Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

aux droits de juridiction accordés à l'abbaye dans les possessions qu'elle avait à Méry et dans les environs, au val de Crenne et sur la rive occidentale du lac.

La seconde de ces restrictions au droit absolu de juridiction avait entraîné de funestes conséquences. Des étrangers, à la faveur de l'espèce d'impunité dont ils jouissaient sur les terres de l'abbaye, où les officiers du comte pouvaient seuls les rechercher, s'étaient rendus coupables d'homicides, de vols, d'agressions violentes et de dévastations dans les vignobles du monastère. Deux personnes, dont un frère convers d'Hautecombe, avaient été tuées et les meurtriers étaient restés impunis.

Pour mettre fin à cet état de choses, Sébastien d'Orlyé et ses religieux adressent à la duchesse Yolande une requête où ils lui demandent l'abolition des deux réserves apposées aux chartes de juridiction de l'abbaye.

1

La régente fit examiner cette demande par son conseil et, d'après son avis, elle y répondit par lettres patentes que l'on trouvera aux Documents et dont voici le résumé: Yolande, fille aînée et sœur des rois très chrétiens de France, duchesse, tutrice de son auguste fils Philibert, duc de Savoie, de Chablais, prince et vicaire perpétuel du saint empire romain, etc.; considérant que le culte de la justice doit être plutôt étendu que restreint, accordons, mais pendant sa vie seulement, à notre très cher conseiller, Sébastien d'Orlyé, et à son couvent, le mère et le mixte empire, la juridiction omnimode et le droit d'infliger le dernier supplice sur et contre tous les délinquants étrangers habitant le territoire de sa juridiction, en n'exceptant que les hommes appartenant au duc de Savoie, c'est-à-dire

1 Voir Documents, no 34.

dans le village de Méry et ses dépendances, dans le val de Crenne, dans l'enceinte du monastère et dans les terres voisines s'étendant depuis la pierre Poentaz, du côté du midi, jusqu'à Feissellans, du côté du nord, et depuis le lac jusqu'au sommet de la côte, soit montagne d'Hautecombe.

La duchesse leur octroie, en outre, le droit d'élever des fourches patibulaires dans ces mêmes lieux.

L'exécution de ces lettres patentes est confiée au conseil qui accompagne le souverain et qui réside à Chambéry, aux président et magistrats de la Chambre des Comptes, aux baillis et autres officiers ducaux, qui devront les faire observer sous peine de 100 livres d'amende. Elles sont données à Verceil, le 3 avril 4473, en présence de Jean de Compeys, évêque de Turin; d'Urbain Bonivard, évêque de Verceil; d'Humbert Cheurery, chancelier de Savoie ; de Claude de Seyssel, maréchal de Savoie; d'Anthelme, seigneur de Miolans; de Pierre, bâtard d'Aix, grand-maître d'hôtel, etc.

Quelques jours après avoir obtenu cette faveur, Sébastien d'Orlyé n'était plus sur le siége d'Hautecombe. Le 28 du même mois, nous y trouvons Étienne de Caluse, recevant de Janus, comte de Genevois, une déclaration par laquelle lui et son couvent, et principalement les vénérables pères Georges Doche et Pierre Rosset, sont habilités à posséder les biens par eux acquis, à condition de payer les servis imposés et, en outre, le plaict de 4 florins à chaque changement de seigneur et d'abbé1.

1 Biblioth. Costa. Protocole Mignonio, f 157. (Communication de M. l'abbé Tremey.)

CHAPITRE IV

La famille de Savoie jusqu'à Emmanuel-Philibert. - Elle s'éloigne Dernières inhumations de souverains avant la

d'Hautecombe. restauration de l'abbaye.

La période comtale de la Maison de Savoie a été considérée comme la plus glorieuse de cette dynastie. Et ce fut moins peut-être en considération de l'étendue de ses possessions, qu'à raison de ses brillantes alliances de famille, des difficultés qu'elle dut surmonter pour résister à tant d'intrigues et de luttes, à une époque où le droit public n'existait pas, et à raison des résultats qu'elle atteignit par l'extension progressive de son influence et de ses provinces, au milieu de tant d'autres souverainetés croulant peu à peu autour d'elle.

Malheureusement pour nous, l'abbaye d'Hautecombe suivit les mêmes vicissitudes et la partie la plus importante de son histoire finit avec le dernier comte de Savoie. Après avoir vu ses abbés régents du comté, conseillers intimes du souverain, prenant part aux principaux actes du gouvernement, nous les verrons désormais remplacés dans leurs augustes prérogatives par d'autres prélats et barons. La cour des ducs se prépare à prendre le chemin de l'Italie, et leur éloignement de l'ancienne nécropole la leur fera oublier, de même que les moines qui en sont les gardiens.

1

Le dernier souverain dont nous avons relaté la sépulture était le Comte-Rouge. Son fils Amédée VIII, premier duc, ne fut point transporté à Hautecombe, malgré son désir', et fut inhumé sur les bords du Léman.

Louis Ier, surpris par la mort à Lyon, le 29 janvier 1465, fut transporté à Genève, dans la chapelle de SainteMarie de Bethleem. Cette chapelle avait été fondée dans l'église de Saint-François par la femme du défunt, la belle et impérieuse Anne de Lusignan, fille du roi de Chypre, qui exerça une si funeste influence sur son mari et toute sa cour. Elle l'avait précédée dans cette dernière demeure en novembre 1462 2.

Amédée IX, le Bienheureux, fils et successeur de Louis Ier, naquit à Thonon, le 1er février 1435. Destiné dès le berceau à Yolande de France, sœur de Louis XI, il l'épousa à l'âge de 17 ans (1452)3. Trois ans après être monté sur le trône, il partagea avec elle le pouvoir que ses infirmités ne lui permettaient pas de porter seul. Les intrigues, les guerres civiles et le besoin d'un air plus doux le poussèrent à descendre en Italie; il mourut l'année suivante (30 mars 1472) à Verceil, àgé de 37 ans, entouré de l'auréole de la sainteté, que lui mérita son amour de la justice et des pauvres. L'église de Saint-Eusèbe, cathédrale de Verceil, reçut ses dépouilles. Elles furent déposées dans un tombeau fort simple, sous les

1 Voir, plus haut, p. 267.

"Elle mourut à Genève le 11 novembre 1462.

Le cœur et les entrailles du duc Louis, suivant un usage assez fréquent à cette époque, où l'art d'embaumer les corps n'était pas fort avancé, furent séparés du reste du corps et déposés devant le grandautel de l'église des Célestins de Lyon, fondée par Amédée VIII, en 1407. (GUICHENON, Savoie, p. 451.)

'BOISSAT, op. cit.

« ZurückWeiter »