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dans le palais Madame, à Turin, puis il fut porté dans une chapelle du même édifice, le 30 avril.

Le 2 mai, le cortége funèbre se mit en marche suivant le cérémonial usité pour les obsèques royales; les évêques d'Alexandrie, de Pignerol, de Saluces, d'Ivrée, de Fossan, les hauts fonctionnaires, une foule nombreuse et recueillie, accompagnèrent l'auguste dépouille jusqu'à l'extrémité de la ville, du côté des Alpes. Là, placée sur un char de parade, elle arriva le soir à Saint-Ambroise, le deuxième jour à Suze, le troisième à Lanslebourg, le quatrième à Modane, le cinquième à Saint-Jean de Maurienne, le sixième à Aiguebelle, le septième à Montmélian et le huitième à Chambéry.

A chaque station du voyage, le corps restait déposé dans l'église principale de la localité; des personnes en prière veillaient autour de lui pendant la nuit et, le matin, le convoi se remettait en marche après qu'un sacrifice d'expiation eût été offert à Dieu.

Le mardi, 9 mai, sur les dix heures et demie du matin, Monseigneur Martinet, archevêque de Chambéry, avec ses suffragants d'Annecy, de Tarentaise, de Maurienne, le chapitre métropolitain et un clergé nombreux attendaient le cortége funèbre au faubourg Montmélian, de même qu'une foule de dignitaires, d'employés, de corporations, mêlés à des flots de population. Le corps fut porté à la cathédrale et, le lendemain, suivi d'une foule toujours croissante, il quittait Chambéry à onze heures du matin. A une heure, il rejoignait le port de Puer, d'où, sept années auparavant, le défunt avait arrêté définitivement sa résolution de relever de ses ruines cet antique monastère qui allait recueillir tout ce qui restait de lui sur cette terre.

Le grand canot royal reçut le cercueil et une partie du cortége, dont le reste prit place sur d'autres embarcations.

Ainsi était renouée la chaîne des souvenirs ! Une nouvelle flottille aux noires couleurs, comme du temps d'Humbert III, du Comte-Vert et de Philippe II, portait la dépouille d'un souverain jusqu'au-delà de ce lac tant de fois sillonné par les ombres de la mort, pour la déposer dans le religieux et solitaire asile d'Hautecombe.

La traversée fut accomplie à trois heures et demie. Le comte de Collobiano fit prévenir l'abbé Comino, supérieur du monastère, de lui remettre le pli cacheté que le roi avait déposé dans les archives du monastère, le 6 septembre 1826, entre les mains de l'abbé de la Consolata, Siffredi. Ce pli, ouvert en présence du marquis d'Oncieu, gouverneur du duché, et de plusieurs autres personnes, contenait, écrite de la main du roi, l'inscription qui est tracée sur sa tombe.

Le lendemain, une messe pontificale, à laquelle assistaient l'archevêque de Chambéry, les évêques de Maurienne, d'Annecy, de Tarentaise et de Belley et tout le cortége, fut célébrée dans la basilique abbatiale; le vicaire général Vibert, aujourd'hui évêque de Maurienne, prononça une éloquente oraison funèbre. Le cercueil fut ensuite déposé dans le caveau qui lui était destiné.

CHAPITRE IV

Marie-Christine termine la restauration d'Hautecombe. mortels sont déposés dans le tombeau de son époux. visiteurs de cette nécropole.

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Marie-Christine restait chargée d'achever l'œuvre de piété filiale et religieuse qui avait rempli les dernières années du second fondateur d'Hautecombe, de l'heureux sentiment du devoir accompli. Elle s'affectionna de plus en plus à cette demeure où reposait la dépouille mortelle de son époux, et y résida une partie de l'été des années 1832 et 1833.

Les travaux à effectuer étaient encore nombreux et ne furent point interrompus. La façade méridionale du monastère fut prolongée vers l'est, la chapelle de Saint-André, la tour du Phare, qui lui est annexée, furent terminées dans le cours de 4833. Mgr Martinet, archevêque de Chambéry, fit la bénédiction de cet antique oratoire relevé de ses ruines, le 19 juillet de cette année, en présence de la reine douairière.

La partie sculpturale prit fin en 4837 par le rétablissement de l'ancien portail de l'église. La façade occidentale consistait alors en un grand mur percé de fenêtres ogivales. Elle fut revêtue des nombreuses décorations que l'on remarque aujourd'hui, et l'entrée fut reportée de ce côté,

comme elle l'avait été jusqu'à la prélature de Claude d'Estavayé. La chapelle de Belley fut divisée en deux parties; on érigea, en face du tombeau de Charles-Félix, l'autel de Notre-Dame des Anges, et la porte ouvrant au nord, qui donnait accès à la basilique depuis le xvre siècle, fut murée. Vers la même époque, le chœur fut orné des stalles des religieux, sculptées par Squirra.

La statue de Charles-Félix et la Pietà que l'on remarque au-dessus de l'autel de Saint-Liguori terminèrent dignement l'œuvre des Cacciatori.

L'une et l'autre furent exécutées à Milan par Benoit Cacciatori. La descente de croix, que l'on considère comme le chef-d'œuvre des sculptures d'Hautecombe, n'a point été commandée pour cette abbaye. Elle est la reproduction en marbre d'un groupe en terre composé à l'occasion du concours des sculpteurs de Milan, ouvert sur l'invitation du consul sarde, pour l'adjudication des ouvrages d'art à opérer dans l'église d'Hautecombe. En souvenir de cette circonstance, Cacciatori, dont le modèle l'avait fait préférer, reproduisit son groupe en marbre de Carrare et en fit hommage à Charles-Félix.

L'aile orientale du monastère, qui domine le lac, fut construite en 1844 et 1842. On commenca, cette dernière année, la décoration en plâtre de l'intérieur de l'église et l'élégant stuccage de la chapelle de Belley, qui furent confiés aux frères Borrioni. En 1843, ces nouveaux travaux, de même que le dallage de l'église en schiste de Grenoble, étaient achevés.

Grégoire XVI avait contribué lui-même à rendre l'église d'Hautecombe plus vénérable que jamais et à en faire un sanctuaire où les fidèles viendraient invoquer des enfants de la Savoie élevés au rang des bienheureux. Par bref du

4 septembre 1838, il décerna les honneurs du culte public à Humbert III et à Boniface, archevêque de Cantorbéry. L'année suivante, on érigea deux autels à leur mémoire.

La restauration d'Hautecombe était accomplie. Comme on a pu le remarquer, c'est une œuvre italienne par le prince qui en a conçu la pensée, par les artistes qui l'ont exécutée et par le style et les décorations adoptés. L'église est un édifice de style gothique fleuri, non point comme les cathédrales françaises et allemandes nous en montrent des spécimens, mais d'un style gothique italien, où la profusion des ornements, la vivacité des teintes blanches des nombreux stuccages et les revêtements intérieurs ne correspondent point au sentiment sombre et recueilli qu'inspire une nécropole. Toutefois, œuvre d'art et réunion d'un ensemble de souvenirs patriotiques, cette basilique est un monument national dont la Savoie sera à jamais reconnaissante à Charles-Félix et à Marie-Christine et qui reste la plus intéressante nécropole de leur famille1. La reine douairière passa près de deux mois dans cette résidence d'été pendant l'année 1843. Voulant rappeler par un acte solennel l'achèvement de l'œuvre de son époux bien-aimé, elle réunit à Hautecombe, le 24 juillet, jour de sa fête patronale, toute sa cour, plusieurs prélats, les principaux personnages du duché de Savoie, et leur distribua une médaille commémorative de cette restauration". Elle avait ainsi fidèlement rempli les intentions de

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1 Quelques fragments de l'ancienne église se voient aujourd'hui dans le cloître. Voir, infrà, Notes additionnelles, no 11

Elle représente, d'un côté, la façade occidentale de l'église, avec l'exergue Hic jacet Carolus Felix, rex optimus; et, de l'autre, son portrait avec cet exergue M. Christina Borbonia aug. templum Altecumbæ perficit MDCCCXLI. Musée départemental.)

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