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choisir, mieux vaudroit encore se décider pour les premiers.

Pour découvrir l'original d'un tableau au milieu d'une foule de copies, il faut chercher celui dont les parties simples décèlent, dans leur unité, le génie du maître. C'est ce que nous trouvons dans la Genèse, original pur de toutes ces ambitieuses peintures reproduites dans les traditions des peuples. Quoi de plus naturel et cependant de plus magnifique! quoi de plus facile à concevoir et de plus d'accord avec la raison de l'homme, que le Créateur descendant dans la nuit antique, pour faire la lumière au son d'une parole! Le soleil, à sa voix, rayonne dans les cieux, au centre d'une immense voûte d'azur; de ses invisibles réseaux, il enveloppe les sept planètes, et les retient autour de lui comme sa proie : les mers et les forêts commencent leurs balancemens sur le globe, et leurs premières voix s'élèvent, pour annoncer à l'univers ce mariage de qui Dieu sera le prêtre, la terre le lit nuptial, et le genre humain la postérité (1).

(1) Les Mémoires de la Société de Calcuta, confirment absolument les vérités de la Genèse. Ils nous montrent la mythologie partagée en trois branches, dont l'une s'étendoit aux Indes, l'autre en Grèce, et la troisième chez les Sauvages de l'Amérique septentrionale, et cette mythologie

CHAPITRE I I.

Chute de l'Homme, le serpent, un mot hébreu MAIS qui ne seroit frappé d'admiration à cette autre vérité marquée dans les Ecritures? L'homme mourant pour s'être empoisonné avec le fruit de vie. Vérité touchante ! vérité sublime! l'homme perdu pour avoir goûté au fruit de science, pour avoir su trop connoître et le bien et le mal, pour avoir cessé d'être semblable à l'enfant de l'évangile ! Qu'on suppose toute autre défense de Dieu, relative à un penchant quelconque de l'ame; que devient la sagesse et la profondeur de l'ordre du TrèsHaut? Ce n'est plus qu'un caprice indigne de la Divinité, et aucune moralité ne résulte de la désobéissance d'Adam. Mais voyez comment toute l'histoire du monde découle de la loi imposée à notre premier père: Dieu a mis la science à sa portée; il ne pouvoit la lui refuser puisque l'homme étoit né libre; mais il lui prédit que s'il veut trop savoir, la connoissance

venant se rattacher à une plus ancienne tradition qui est celle même de Moyse. Les voyageurs modernes aux Indes trouvent par-tout des traces des faits rapportés, dans l'écriture, et après en avoir long-temps contesté l'authenticité, on est obligé de la reconnoître.

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des choses sera sa mort et celle de sa postérité. L'existence politique et morale des peuples de tous temps et de tous pays, l'histoire secrète du cœur humain sont renfermées dans la tradition de cet arbre admirable et funeste.

Or, voici une suite très-merveilleuse à cette défense de la sagesse. L'homme tombe, et c'est le démon de l'orgueil qui cause sa chûte. Mais l'orgueil emprunte la voix de l'amour pour le séduire, et c'est pour une femme qu'Adam cherche à s'égaler à Dieu : profond développement des deux premières passions du cœur, la vanité et l'amour. Le grand Bossuet dans ses Élévations à Dieu, où l'on retrouve souvent l'auteur des oraisons funèbres, dit, en parlant du mystère du serpent: «Que les anges conver>> soient avec l'homme, en telle forme que Dieu >> permettoit, et sous la figure des animaux. » Eve donc ne fut point surprise d'entendre » parler le serpent, comme elle ne le fut pas » de voir Dieu même paroître sous une forme >> sensible.» Bossuet ajoute : « Pourquoi Dieu » détermina l'ange superbe à paroître sous cette » forme plutôt que sous une autre ? Quoiqu'il >> ne soit pas nécessaire de le savoir, l'Ecriture » nous l'insinue, en disant que le serpent étoit » le plus fin de tous les animaux, c'est-à-dire » celui qui représentoit mieux le démon dans » sa malice, dans ses embûches, et ensuite » dans son supplice. »

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Notre siècle rejette avec hauteur tout ce qui tient de la merveille: sciences, arts, morale , religion, tout demeure désenchanté. Le serpent a souvent été l'objet de nos observations, et si, nous osons le dire, nous avons cru reconnoître en lui cet esprit pernicieux et cette subtilité dont il est parlé dans l'Ecriture, tout est mystérieux, caché, étonnant dans cet incompréhensible reptile. Ses mouvemens diffèrent de ceux de tous les autres animaux; on ne sauroit dire où gît le principe de son déplacement, car il n'a ni nageoires, ni pieds, ni ailes; et cependant il fuit comme une ombre, il s'évanouit magiquement, il reparoît, disparoît encore, semblable à une petite fumée d'azur, ou aux éclairs d'un glaive dans les ténèbres. Tantôt il se forme en cercle, et darde une langue de feu; tantôt, debout sur l'extrémité de sa queue, il marche dans une attitude perpendiculaire, comme par enchantement. Il se jette en orbe, monte et s'abaisse en spirale, roule ses anneaux comme une onde, circule sur les branches des arbres, glisse sous l'herbe des prairies, ou sur la surface des eaux. Le labyrinthe avoit moins de sinuosités, que les méandres tracés par ce reptile. Ses couleurs sont aussi peu déterminées que sa marche ; elles: changent à tous les aspects de la lumière, et comme ses mouvemens, elles ont le faux bril

lant et les variétés trompeuses de la séduction. Plus étonnant encore dans le reste de ses mœurs, il sait, ainsi qu'un homme souillé de meurtre, jeter à l'écart sa robe tachée de sang, dans la crainte d'être reconnu. Par une étrange faculté, il peut faire rentrer dans son sein les petits monstres que l'amour en a fait sortir. Il sommeille des mois entiers, fréquente les tombeaux, habite des lieux inconnus, compose des poisons, qui glacent, brûlent ou tachent le corps de sa victime des couleurs dont il est lui-même marqué. Là, il lève deux têtes menaçantes; ici, il fait entendre une sonnette; il siffle comme un aigle de montagne, il mugit comme un taureau. Objet d'horreur cu d'adoration, les hommes ont pour lui une haine implacable, ou tombent devant son génie. Le mensonge l'appelle, la prudence le réclame, l'envie le porte dans son cœur, et l'éloquence a son caducée ; aux enfers il arme les fouets des furies, au ciel l'éternité en fait son symbole: il possède encore l'art de séduire l'innocence. Ses regards enchantent les oiseaux dans les airs, et sous la fougère de la crèche, la brebis lui abandonne son lait. Mais il se laisse lui-même charmer par de doux sons, et pour le dompter, le berger n'a besoin que de sa flûte.

Au mois de juillet 1791, nous voyagions dans le Haut-Canada, avec quelques familles

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