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envoyer quelques écus, apportés, sans tant de peine, par un simple petit esclave:

Quanto commodius nullo mihi ferre labore

Argenti potuit pondera quinque puer! 1

De même à Couches, nous l'avons vu, le prieur faisait présenter, en ce jour, à chacun de ses vassaux, un gâteau doré au safran et une pinte de vin aromatisé, et ce don leur était offert par un cortège de douze hommes, qui n'était pas moins pompeux que celui dont parle Martial. Nous constatons même que, dans quelques contrées, et en particulier dans la Cyrénaïque, au dire de Macrobe, les présents offerts à l'occasion des Saturnales consistaient principalement en gâteaux : « Cyrenensesque etiam..... placentasque mutuo >> ministrant 2. » Il est à croire que l'usage rapporté par Macrobe n'était pas spécial aux habitants de la Cyrénaïque et qu'il s'était aussi répandu dans plusieurs autres provinces. De plus, le banquet, que le prieur de Couches offrait à ses vassaux, rappelle celui que les maîtres donnaient à leurs serviteurs, suivant le témoignage du poète Accius cité par Macrobe:

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Iste ut cum dominis famuli epulentur itidem. 3

Enfin, sous le rapport du désordre, des cris, des hurlements et des excès de toute sorte qui caractérisaient les Saturnales, et qui ont rendu leur nom proverbial, les fêtes de Couches n'avaient rien à envier à celles de Rome, et c'est encore un trait commun entre elles qu'une même cause ait produit les mêmes effets.

Ainsi donc, la concordance du temps entre la fête des Saturnales et celle de Couches; les désordres qui leur étaient communs et qui justifient le nom de folie, donné à l'une

1. Lib. VII, LIII.

2. Macrob. Saturn, lib. I.

3. Id. ibid.

d'elles et mérité par toutes deux; les présents, offerts en grande pompe, dans l'une comme dans l'autre, consistant en gâteaux, à Couches comme dans la Cyrénaïque; le repas servi par le maître à ses esclaves comme par le prieur à ses vassaux : tout concourt à motiver entre elles un rapprochement qui paraîtra certainement justifié.

C'est ainsi qu'après seize siècles de christianisme les vieilles coutumes de l'antiquité s'étaient maintenues en vigueur, non pas d'une façon latente et irrégulière, mais en vertu d'obligations véritables qui ne purent être abrogées que par des actes en forme. Le vieux païen, on le voit, a survécu longtemps dans le cœur de l'homme, et qui pourrait prétendre qu'il ait tout à fait cessé de s'y maintenir? Heureux quand il ne s'éveille ainsi qu'à propos de gâteaux et pour quelques heures seulement!

ANATOLE DE CHARMASSE.

ÉPIGRAPHIE AUTUNOISE

MOYEN AGE ET TEMPS MODERNES

(SUITE) 1

ABBAYE DE SAINT-MARTIN

Les historiens d'Autun ont à l'envi raconté qu'au lieu où devait s'élever l'abbaye de Saint-Martin, existait au quatrième siècle un temple dédié au fabuleux Sarron, « troisième roi des Gaulois ». Ladone 2 et l'auteur des Notes historiques préparées en 1675 pour dom Mabillon 3, étant, je crois, les plus lointains échos de cette prétendue tradition, on trouvera bon que nous ne nous y arrêtions pas; nous nous bornerons à dire qu'il y avait probablement là, en vue des murs d'Augustodunum, aux abords de la voie de Vesontio, un édifice romain assez apparent, que saint Martin aurait transformé en une église dédiée aux saints apôtres Pierre et Paul, si l'on en croit du moins une inscription sur vélin autrefois conservée à l'abbaye et dont on trouvera plus loin le texte. 4

Deux siècles après, l'an 589 ou environ, la reine Brunehaut fonda en ce lieu un monastère qu'elle plaça sous le vocable du grand thaumaturge des Gaules, et orna son sanctuaire de colonnes de marbre, de poutres de sapin et de décorations en mosaïque, « columnis marmoreis ac trabibus

1. Cf. Mémoires de la Société Éduenne, nouv. série, t. VII, p. 193 et suiv. T. VIII, p. 333 et suiv. T. IX, p. 463 et suiv. T. X, p. 361 et suiv.

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2. Augustoduni amplissimæ civitatis et Galliarum quondam facile principis antiquitates. Augustoduni apud Bl. Simonnot, 1640, p. 180.

3. Archives de l'évéché d'Autun. F. de Saint-Martin.

4. Art. IV.

abietinis formosis et musivo opere mirifice decoravit ». Ce texte emprunté à la vie de saint Hugon 1 montre d'abord qu'à cette époque l'église n'était pas voûtée mais plafonnée en caissons, en lacunar, à la manière des basiliques, ensuite que ses murailles étaient décorées par un procédé dont l'antiquité avait laissé à Autun d'admirables spécimens et que l'évêque saint Syagre avait fait revivre. 2

Que représentaient ces mosaïques? Nous l'ignorons, et cependant, jusqu'au milieu du dix-septième siècle, il en subsista quelques débris « aux trois voûtes ou coquilles du fonds de l'église et sur le pavé du chœur. » C'était là, selon toute apparence, avec les gros murs, les seules parties de l'édifice qui eussent échappé à la destruction lors de l'invasion sarrazine de 732.

L'abbaye livrée au pillage et ses habitants dispersés, le pieux asile consacré par la reine d'Austrasie à la méditation et à la prière demeura un siècle et demi dans l'abandon. Ce fut seulement en 870 qu'un seigneur de la cour de Charles le Chauve, le comte Badilon, releva ses bâtiments et les peupla de religieux détachés du monastère de Saint-Savin en Poitou. La nouvelle église consacrée le 7 décembre de cette même année eut une existence plus longue que celles qui l'avaient précédée. En effet, elle était encore debout en 1740, près de neuf siècles après sa restauration.

Bien que rien ne subsiste de cet édifice, bien qu'aucun plan n'en ait été conservé dans le chartrier de Saint-Martin 3, nous pouvons nous faire de l'ensemble une idée relativement exacte. La troisième église de Saint-Martin se composait de

1. De sancto Hugone monacho Æduensi et priore Enziacensi ordinis S. Benedicti in Gallia. Apud Bolland. XX aprilis.

2. Desiderius Autissiodorensis basilicam Sancti Stephani miro decore ampliavit ingenti testudine a parte orientis applicita auroque ac musivo splendidissime decorata, instar ejus quam Syagrius episcopus fecisse cognoscitur. » (Labbe, Bibliotheca manuscriptorum, t. II, p. 423.)

3. Je ne parle pas ici de la tibériade informe du seizième siècle publiée par M. G. Bulliot à la fin du t. Ier de son Essai historique sur l'abbaye de SaintMartin d'Autun, et que nous reproduisons ici.

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