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Le mouvement qui inspirait à un certain nombre de jeunes filles la pensée de prendre l'habit au monastère de Champchanoux ne se ralentit pas pendant le gouvernement de Marie de la Croix. Nous rencontrons à cette époque le nom de Jeanne-Magdeleine de Fuligny- Damas, fille de feu JeanNicolas de Fuligny-Damas, seigneur de Sandolcourt, et de Christine-Charlotte Pot de Rochechouart, qui fit profession le 29 juin 1713 1; Antoinette Carillon, fille de feu Toussaint Carillon, bourgeois de Toulon, et de Pierrette Laizon, admise le 11 juillet suivant; Jeanne-Jacqueline Baudouin d'Orville, fille de feu Jacques Baudouin d'Orville, écuyer, gouverneur pour le roi des ville et château d'Auphalisse et comté de Chigny, et de Eugène Chauveau, sa mère, qui prit le voile le même jour; Jeanne-Marie-Magdeleine Guillemin, fille de Jacques Guillemin, bourgeois de Toulon, et de Antoinette Vérizet, le 31 janvier 1714. Assurément, on ne peut croire que la vie religieuse ait alors perdu tous ses attraits.

Marie de la Croix ne s'appliqua pas avec moins d'intelligence et de zèle au rétablissement du temporel de sa communauté. Le domaine de Pierre-Cervau avait été aliéné par acte du 2 juin 1676, à Claude Humblot de Villiers, écuyer, au prix de 7,310 livres. Elle poursuivit l'annulation de cette vente en 1719 et l'obtint par un arrêt du parlement de Dijon, du 22 août 1722.

Les infirmités, plus encore que les années, obligèrent Marie de la Croix, âgée seulement de soixante-cinq ans, à se démettre de sa charge. Elle résigna le 6 février 1730, << ayant perdu l'œil et ne voiant que très peu de l'autre et ne pouvant plus vacquer à ses fonctions de prieure. »

LOUISE THIERRIAT, dite de Sainte-Flavie, religieuse du monastère de Lancharre au diocèse de Chalon, fut nommée

1. Depuis, Jeanne de Fuligny-Damas fut nommée prieure de « Legneux en Forez, proche de Lion, par monsieur son frère supérieur et nominateur dudit prioré de Legneux, abbé de Savigny. » — Leigneux, canton de Boën (Loire).

par François-Antoine Blitersvich de Moncley, évêque d'Autun, le 14 février 1730, pour succéder à Marie de la Croix. Elle prit personnellement possession, le 23 avril 1730, en présence de sa devancière, des douze autres religieuses qui formaient alors la communauté, de Jean Renaudet, subdélégué de l'intendant, et de Melchior Laizon, bailli de Toulon.

On commençait alors à ressentir les premiers mouvements de l'esprit qui préludait à la suppression des monastères par l'interdiction de recevoir des novices: former obstacle à leur recrutement, c'était un moyen lent mais assuré d'arriver à une extinction certaine et complète. Les conseillers de la couronne favorisaient très vivement cette tendance et les supérieurs ecclésiastiques eux-mêmes la secondaient assez volontiers, dans le dessein de faire réunir le revenu des bénéfices supprimés aux hôpitaux, séminaires et autres établissements qui leur semblaient plus utiles. Le prieuré de Champchanoux ne tarda guère à en éprouver l'effet et son nom fut bientôt inscrit, avec tant d'autres, sur les pages de ce nécrologe: l'interdiction de recevoir désormais des novices fut notifiée à la prieure par une lettre de cachet du 20 mai 1737. Louise Thierriat, qui survécut longtemps à cet évènement, mourut dans l'exercice de sa charge en 1755.

MARIE-JAQUELINE DUPRÉ DE GUIPY 1, religieuse à l'abbaye de Saint-Andoche d'Autun, fut nommée prieure par provision du 24 décembre 1755. Elle prit possession le 9 mars 1756 et fut installée, le même jour, par son frère, ClaudePhilibert Dupré de Guipy, abbé commendataire de la Boissière, prieur de Lairoux et grand chantre de la cathédrale d'Autun « Le sieur Desmolins, prêtre desservant lesdites dames, ayant célébré solennellement, en notre présence, la sainte messe, nous avons, à l'issue d'icelle, fait la bénédiction de la croix pectorale en or de ladite dame prieure; nous

1. Guipy, canton de Brinon (Nièvre).

nous sommes ensuite, étant accompagné des notaire et témoins cy après nommés, rendu à la porte conventuelle dudit prieuré, où nous avons trouvé ladite dame Dupré tenant en main ses provisions, et ayant à ses côtés mes dames Marguerite Chaussin, dite de Sainte-Scholastique, et Louise de Grandchamp, dite de Sainte-Cécile, religieuses audit prieuré; nous l'avons conduite en ladite église, où s'étant mise à genoux près le maître autel, sur un prie-Dieu à ce destiné, Mre Simon Rougemont, avocat, conseiller du roy, notaire royal et apostolique du diocèse d'Autun, résidant en la ville de Charolles, mandé exprès audit Toulon, a fait lecture, à haute et intelligible voix, de ses provisions; après quoy, nous avons présenté à ladite dame la croix pectorale, par nous bénite, qu'elle a mise à son col; nous avons reçu d'elle la profession de foy et serment en tel cas requis et accoutumé. Nous nous sommes ensuite rendus avec elle, étant accompagné comme dessus, à la même porte conventuelle où la communauté dudit prieuré étant venue processionnellement luy a présenté les clefs dudit monastère et l'a conduite, ainsi que nous, en chantant le psaume Lætatus sum, au chœur desdites dames, où elle a pris place dans la stalle de la prieure, et nous dans un fauteuil qui nous avoit été préparé. Elle a ensuite entonné le Te Deum qui a été chanté solemnellement, à la fin duquel nous avons dit l'oroison Pro gratiarum actione et autres convenables. Nous nous sommes ensuite transporté avec ladite dame, précédé de la communauté, à l'endroit où sont les cordes des cloches qu'elle a sonnées, et étant de retour au chœur dans le même ordre, nous y avons fait une exhortation. » Cette prise de possession s'accomplit en présence de François Beau, bachelier en théologie, curé prévôt de Toulon, Claude Bouillet, curé de Rosière, Félix Delaporte, avocat en parlement, juge bailli de Toulon, Louis Bouillet, conseiller du roi, maire perpétuel de Toulon, et des sœurs Marguerite Chaussin, Louise de Grandchamp, Hélène de Vallerot, Éléo

nore de Vallerot, Antoinette Carillon, Benoite Desgarennes, Jeanne-Marie de la Fouge et Marie Philibert, toutes admises à faire profession avant la lettre de cachet de 1737.

Marie-Jaqueline Dupré de Guipy mourut au monastère le 22 juin 1759.

ADÉLAÏDE DE BOUILLÉ, religieuse professe en l'abbaye de Saint-Menoux au diocèse de Bourges, lui succéda en vertu des lettres de provision qui lui furent accordées le 28 juin 1759 par Nicolas de Bouillé, évêque d'Autun.

Malgré la défense, faite en 1737, de recevoir des novices, huit religieuses de choeur, la plupart fort âgées, demeuraient encore, en 1762, les gardiennes de ce foyer condamné : Marguerite Chaussin, native d'Uxeau 1, âgée de soixante-dixhuit ans; Louise de Grandchamp, de Saint-Berain-sousSanvignes 2, âgée de quatre-vingts ans; Éléonore de Vallerot de Beaudésir, sacristaine, native de Beaudésir, près Vendenesse-sur-Arroux 3, âgée de soixante-quinze ans; Hélène de Vallerot, sœur de la précédente, âgée de soixante-quatorze ans; Antoinette Carillon, de Toulon, âgée de soixante-quatorze ans; Benoîte Desgarennes, de Paray-le-Monial1, âgée de soixante-un ans; Marie Philibert, de Cluny, âgée de cinquantequatre ans; Jeanne-Marie de la Fouge, dépositaire, native de Toulon, âgée seulement de quarante-quatre ans. La maison comptait en outre une converse, Jeanne-Jaqueline Baudoin, de Saulieu, âgée de soixante-treize ans; une pensionnaire, Anne Jacob, de Cluny, âgée de vingt-quatre ans, et qui payait une pension de 180 livres par an; deux servantes, un jardinier et un valet.

La longévité de ces pauvres religieuses ne permettant pas d'arriver à une entrée en jouissance des revenus du monastère aussi prompte que celle qui avait été espérée, il y eut

1. Canton de Gueugnon (S.-et-L.).

2. Canton de Montcenis (S.-et-L.).

3. En 1442, la seigneurie de Beaudésir appartenait à Guillaume Dufresne. 4. Benoite Desgarennes avait fait profession au monastère le 29 janvier 1732.

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lieu de recourir à des moyens plus expéditifs. Le syndic du clergé du diocèse présenta donc une requête à l'évêque pour solliciter l'extinction du prieuré de Champchanoux, se fondant sur ce que l'interdiction de recevoir des novices destinait cet établissement à une fin prochaine, sur l'impossibilité de trouver quelque personne capable pour y ouvrir un noviciat et y rétablir la conventualité et sur l'intérêt qu'il y aurait à réunir les revenus qui en dépendent au séminaire d'Autun pour servir de supplément aux fonds déjà unis à ce séminaire, à l'effet de procurer des pensions de retraite en faveur des prêtres âgés ou infirmes. Tels étaient les motifs qui étaient invoqués à l'appui du projet. L'affaire s'instruisit dans les formes canoniques. Le promoteur ayant donné des conclusions favorables, l'évêque rendit une ordonnance conforme à la requête, et un arrêt du conseil d'État, en date du 23 janvier 1762, l'autorisa à procéder à la suppression du prieuré, et en attendant, à nommer un économe séquestre pour en gérer les biens. Le 27 mai suivant, M. Develle, vicaire général, se présenta au monastère pour engager les religieuses à donner un consentement qu'elles refusèrent unanimement par un acte capitulaire du 31 mai, déclarant «< que leur monastère n'est pas dans le cas de suppression puisqu'il est pourvu de sujets pour remplir avec décence l'office divin, et de fortune pour leur fournir suffisamment les choses nécessaires à la vie et aux charges qui affectent leur communauté. >>

Adélaïde de Bouillé, nommée depuis peu abbesse de Notre-Dame de Meaux et qui se plaisait sans doute assez peu à demeurer à la tête d'une maison assiégée, résigna le 3 juin 1762. Cette retraite de la prieure ne découragea pas les religieuses dans leur résistance. Le 25 juillet, elles renouvelèrent leur acte d'opposition à l'arrêt du conseil d'État et le 31 du même mois elles refusèrent l'entrée du monastère à Edme Delaplace, économe séquestre, nommé en exécution de cet arrêt.

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