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secteurs en pierre de taille provenant de colonnes maçonnées, des débris d'amphores, du moellon, toutes sortes de matériaux accumulés pêle-mêle, sans autre but que le remplissage. Le déblai opéré, on se trouva en face d'une ouverture rectangulaire en pierres de taille, obstruée d'un dépôt de terre noire et fine. La première pensée fut qu'elle était la bouche de fourneau d'un hypocauste, vu qu'elle ouvrait sous la maison fouillée, et qu'un autre hypocauste existait sous une maison voisine antérieurement explorée. Les premiers dégagements révélèrent un aqueduc, quoique sans eau alors; on commença activement le déblai.

Disons de suite, pour ne pas interrompre l'ordre de la fouille, que cet aqueduc est le travail le plus curieux et le plus important peut-être qui, jusqu'à ce jour, ait été constaté au Beuvray. L'énorme tranchée, de 5 mètres de profondeur pratiquée pour l'établir, sa construction même en font une œuvre à part dans laquelle se rencontre pour la première fois l'emploi sérieux de la voûte à Bibracte. En voyant cette voûte construite en moellon grossier, sans chaux, avec du mortier de terre, on se demande comment elle a résisté deux mille ans. La seule infiltration des eaux pluviales, et l'on sait s'il en tombe sur la montagne, aurait dû suffire à désagréger la maçonnerie et produire l'écroulement, indépendamment du poids des terres. Un artifice. peu dispendieux avait conjuré l'avarie. L'application d'une modeste couche de terre glaise battue et comprimée sur l'extrados de la voûte l'a préservée de l'action de l'eau pendant vingt siècles, on peut voir et juger encore aujourd'hui ce rare spécimen de l'industrie de nos aïeux. L'âge de l'aqueduc ne saurait non plus faire de doute. Sans parler maintenant des objets concluants trouvés à l'intérieur et dont il sera question ailleurs, les maisons gauloises fondées, tant sur la voûte que sur les couvertes plates, sont à elles seules une démonstration de son antériorité. Son entrée a 110 de hauteur sur 60 centimètres de large. Les pieds

droits comprenant chacun quatre assises en pierre de taille se prolongent d'un mètre à l'intérieur; ils portent quatre couvertes plates d'une seule pièce et de même granit du Morvan. La première, longue de 103 et épaisse de 30 centimètres, s'est fendue sans fléchir sous la charge du pignon oriental de l'habitation citée au commencement de cette étude. A la suite de cette espèce de cage en grand appareil commence la voûte EF de moellon, haute de 150 sous clef et 75 centimètres de large. Cette voûte à plein cintre est peu régulière, portant le signe de l'inexpérience et d'un certain embarras. Le canal, par exemple, à la suite de la cage en pierre de taille, décrivant une courbe et subissant un élargissement de 15 centimètres, les constructeurs, afin d'éviter un raccord et un changement de calibre, ont imaginé pour l'asseoir de racheter la différence en plaçant sur la paroi de droite, à la naissance de la voûte, quatre rangs de grosses briques en encorbellement. Le procédé n'a pas réussi, car les supports ont cédé et les clefs se sont effondrées sur un mètre de long. Cette première partie de l'aqueduc, avec une forte pente, était obstruée, sur toute sa hauteur et sur une longueur de 8 mètres, d'une couche inférieure de sable surmontée de terreau noir, comme à l'entrée. La voûte est intacte jusqu'à la lettre EF. Le déblai nécessita un travail souterrain de mineur qui permit de recueillir quelques débris de l'encorbellement affaissé, des poteries de fabrication gauloise certaine, entre autres une moitié d'écuelle plate et une moitié de petite coquelle à trois pieds en terre cuite enduites de mica, divers débris en terre fine, noire et lustrée à raies concentriques, d'autres plus grossières, tous indigènes. Il fut aisé alors d'examiner les détails. de l'intérieur avec une lampe. Le carrelage, dès l'orifice, consiste, sur 210, en grandes et épaisses briques de 42 centimètres sur 30 centimètres, ajustées avec soin, et de même nature que celles de l'encorbellement. Au delà de ce glacis destiné à faciliter l'écoulement dans la courbe du

canal, le pavé est en moellon jusqu'à 8 mètres où ces moellons sont piqués en hérisson, pour rompre, semble-t-il, le choc de l'eau à une seconde courbe moins accentuée mais plus rapide que la première. La maçonnerie des parois en pierres de grosseur courante ne diffère en rien des bonnes maçonneries gauloises de même ordre. Au point où s'est arrêté le déblai de 8 mètres, la voûte, qui jusque-là passe sous la maison, fait place à deux couvertes plates d'un mètre de long et 50 centimètres de large chacune, soit un mètre, sur lesquelles est fondé le mur d'arrière de la maison. Le même procédé se renouvelle dans tous les cas semblables où pèse le poids d'un gros mur qui eût pu compromettre la voûte. C'est à cette charge sans doute exercée sur le haut des parois de l'aqueduc que doit être attribué leur déversement partiel, sans que la voûte reprise au delà des couvertes en ait subi d'avarie appréciable; il a paru prudent néanmoins d'interrompre le déblai sur une longueur de 3 mètres que l'introduction d'une perche dans la masse du terreau meuble a permis de mesurer. Au delà de ces 3 mètres, GH, où l'aqueduc dévie légèrement à l'est, il achève de traverser le talus pierreux cité plus haut, passe sous la clôture qui le couronne pour pénétrer dans un terrain plat désigné sous le nom de Pâture du Couvent. C'est en effet dans cette pièce de terre que s'élevait, à 60 mètres plus loin, le Monasterium Bibractense du P. Fodéré, l'historien des maisons de l'ordre de Saint-François. Il fallait dès lors, pour reprendre la piste, creuser une excavation divisée en étages afin de faciliter le rejet des terres. Le remblai sur 3 à 4 mètres d'épaisseur provenait tout entier de démolitions, moellons, tuileaux à rebords et autres, enduits stuqués, uniquement de couleur blanche, secteurs de colonnes maçonnées, poteries gauloises de toute nature. Doit-on voir dans cet amoncellement le produit d'un défrichement des moines dont un mur de clôture sans fondations le traverse, ou celui de l'écroulement des maisons

dont on retrouve les fondations à un niveau inférieur? Cette seconde explication semble la plus probable, vu que dans la suite des fouilles le même amas de décombres disparait pour faire place à un terrain d'alluvion, noir et riche, atteignant jusqu'à 5 mètres d'épaisseur. L'aqueduc fut retrouvé dans la fosse ISK, et comme il avait eu à supporter en ce lieu deux maisons successives, la voûte au passage des murs était remplacée par quatre énormes couvertes plates en pierre de taille, de 150 de long et 30 centimètres sur les autres faces. L'une put être soulevée non sans peine, au fond de la tranchée. Cette ouverture permit de descendre dans l'aqueduc entièrement vide, sauf une couche de 20 centimètres de sable et de terreau noir. Le radier est à 5m40 sous le gazon. 1

La voûte existe en deçà et au delà des quatre couvertes plates, conservant une hauteur de 173, avec cette particu larité que les clefs au lieu d'être en simple moellon, comme précédemment, sont formées de languettes de pierre de taille débruties, de 40 centimètres à 50 centimètres de long, en granit du Morvan. Une autre particularité, observée uniquement sur ce point, a révélé l'emploi de la chaux dans un jointoiement de 2 à 3 mètres de long et 60 centimètres de hauteur, en deçà des quatre couvertes. On croit, dans ce travail, reconnaitre une réparation d'autant plus probable que le mortier de chaux et sable fait défaut dans le corps de la maçonnerie et n'existe nulle autre part dans l'aqueduc. La circulation à l'intérieur de cette partie du canal était sans obstacle sur 7 mètres; joignant d'un côté l'avarie précitée de 3 mètres, et de l'autre une seconde dans les mêmes

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conditions défectueuses, mais dont l'étendue n'a pu être mesurée. Il eût été peut-être possible de pénétrer un peu plus loin en rampant, mais non sans danger. Les deux parois latérales sont déversées de 30 à 40 centimètres sur l'intérieur sans dislocation appréciable de la voûte, mais le moindre ébranlement eût pu déterminer la chute de celle-ci et compromettre l'ouvrier. Ce n'est pas sans un vif regret qu'il a fallu abandonner cette piste, que l'écoulement des ressources financières et les difficultés d'un déblai continu à pareille profondeur rendaient obligatoire. Avant de pousser plus loin les recherches, notons brièvement les ruines. de maisons élevées sur l'aqueduc même et reconnues dans l'excavation. Au-dessous du mur de clôture de la pièce de terre du couvent cité déjà, on rencontre, à 3m87 de profondeur, sur les couvertes, deux murs d'une habitation, I, hauts de 160, qui furent suivis l'un et l'autre sur 2m30 de longueur et que l'importance du déblai fit abandonner. Au pied de ces murs il en existait deux autres de 65 centimètres de hauteur, paraissant avoir précédé les premiers et leur faisant parfois contrefort, sans aucune trace de chaux. Ils s'en séparent dans la direction de l'ouest, formant avec eux un angle aigu, signe de leur diversité d'origine. Leur antiquité ne saurait pas davantage être mise en doute; on a recueilli à l'angle nord-ouest de l'habitation deux médailles gauloises, l'une des Eduens, l'autre des Turons, à l'aigle éployé, et un moyen bronze celtibérien, tête chevelue de type grec, à droite, cavalier au revers; dans la même direction, deux fibules en bronze très oxydées, l'une avec son épingle et l'autre avec reste de filigrane en cuivre rouge, tordu en spirale, un fragment de col d'amphore marqué RA, diverses poteries, des secteurs de colonnes en pierre de taille. Les surprises dans cette énorme tranchée que la nécessité forçait d'abandonner trop vite devaient se produire jusqu'à la dernière heure. Un éboulis, pendant le remblai, mit en évidence une troisième construction, K,

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