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avait été suspendue par le déplacement de l'ancien VIIe livre.

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On peut opposer à cette opinion sur la fin du VIe livre plusieurs passages qu'il renferme et où le Ve se trouve formellement rappelé : livre VI® ( 7o de cette édition), chap. 1, § 1, 2, 4, 5, 9; chap. II, S $ 1, 9; chap. II, § 1; chap. v, § 1. On verra plus loin ce qu'il convient de penser de tous ces passages.

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Quelle est la conséquence générale qui ressort des discussions antérieures sur la place des anciens VIIe et VIIIe livres et sur celle du VI? La voici :

L'ordre actuel des huit livres de la Politique n'est pas bon; l'ordre qu'il convient de lui substituer est celui-ci : Ier, II, III, VII, VIII, IV, VI, Ve.

Que sera-ce maintenant, si l'on prouve que cet ordre donné par la logique, donné par le contexte, est aussi l'ordre indiqué par Aristote lui-même, l'ordre qu'il annonce formellement, l'ordre qu'il impose à sa propre pensée? Or voici comment Aristote s'exprime, livre VI (4), chap. 1, § 5.

Μετὰ δὲ ταῦτα τίνα τρόπον δεῖ καθιστάναι τὸν βουλόμενον ταύτας τὰς πολιτείας, λέγω δὲ δημοκρατίας τε καθ ̓ ἕκα στον εἶδος καὶ πάλιν ὀλιγαρχίας. Τέλος δὲ, πάντων τούτων ὅταν ποιησώμεθα συντόμως τὴν ἐνδεχομένην μνείαν, πειρατέον ἐπελθεῖν τίνες φθοραὶ καὶ τίνες σωτηρίαι τῶν πολιτειῶν

καὶ κοινῇ καὶ χωρὶς ἑκάστης καὶ διὰ τίνας αἰτίας ταύτας μáλiota yívéolai téQuxe. « Ensuite, j'expliquerai com«ment il faut constituer ces formes de

gouverne«ments, je veux dire la démocratie et l'oligarchie,

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dans toutes leurs nuances. ET ENFIN, après avoir

passé tous ces objets en revue avec la concision convenable, je tâcherai de dire les causes ordinaires de la chute et de la conservation des États, <«< en général et en particulier. » Le passage est décisif, et si on le rapproche de ceux qu'on a déjà cités plus haut du même livre, et qui contiennent les réminiscences de l'auteur sur le sujet de l'ancien VII, il ne peut plus rester, ce semble, le plus léger doute sur la marche générale de l'ouvrage. La théorie des révolutions vient en dernier lieu, Teños dé; c'est, dans la pensée de l'auteur aussi bien qu'en réalité, la fin du système. L'ancien VIe livre, qui traite de l'organisation du pouvoir dans les démocraties et les oligarchies, passe de toute nécessité avant l'ancien Ve, qui traite des révolutions, et l'ouvrage se termine avec celui-là, complet, entier, et satisfaisant à toutes les exigences de la logique.

Dans cette disposition nouvelle, l'ouvrage du Stagirite apparaît avec une clarté, un esprit de méthode, et l'on peut ajouter, avec une vérité incontestables. Aucun doute ne s'élève sur l'ordre des

trois premiers livres. Dans le III, Aristote annonce qu'il reconnaît trois formes fondamentales de gouvernement : la monarchie, l'aristocratie et la république. Il traite de la monarchie sous forme de royauté à la fin du III livre. Dans le VII et le VIII®, qui viennent ensuite, suivant le nouvel ordre, il traite de l'aristocratie, qui, pour lui et comme il a soin de le dire, est la même chose que la constitution modèle, le gouvernement parfait, identité qui se retrouve jusque dans les mots : ἡ ἀριστοκρατία, ἡ aplστη TOMITεía. Dans les IV et VIe livres, il traite de la république et des formes dégénérées des trois gouvernements purs: la tyrannie, l'oligarchie et la démagogie; et comme les gouvernements oligarchiques et démocratiques sont les plus communs de tous, il s'y arrête plus longuement et en donne les principes spéciaux. Enfin vient le Ve livre, et, après avoir considéré tous les gouvernements en eux-mêmes, dans leur nature, dans leurs conditions particulières, Aristote les étudie dans leur durée, et fait voir comment chacun d'eux peut se conserver, comment chacun d'eux court risque de périr.

En gardant au contraire l'ordre actuel des livres, voyez comme cette pensée d'Aristote, ordinairement si conséquente, devient incohérente et incomplète, comme le système de ses idées est

rompu, brisé, bouleversé de fond en comble. A la fin du III livre, après avoir traité le premier des trois grands objets de discussion qu'il se propose, et annoncé le second, il quitte tout à coup ce second objet, qu'il n'a pas encore traité, pour passer au troisième; puis il abandonne ce troisième pour passer à un objet totalement différent; puis il reprend sa troisième thèse et la complète; puis enfin, il revient au second objet de son examen, qu'il avait d'abord si formellement annoncé, et qu'il avait ensuite oublié pendant trois livres entiers. Quel désordre!

Reste toujours, on doit le remarquer, quel que soit d'ailleurs le système qu'on adopte, cette phrase inachevée du III livre, qui ne trouve son complément qu'au début du VII. Tous les éditeurs ont affirmé qu'il existait ici une lacune; et d'après la discussion antérieure, on se croit fondé à affirmer simplement qu'il y a ici une négligence de copiste, chose bizarre et peu compréhensible à la sollicitude philologique des modernes, mais dont l'antiquité nous offre malheureusement trop d'exemples pour que nous puissions encore nous en étonner.

Je n'hésite pas à déclarer, en m'appuyant de toutes les preuves que j'ai citées plus haut, cette marche nouvelle de l'ouvrage d'Aristote la seule raisonnable, la seule vraie. Aristote n'a pu en

adopter une autre, et la légèreté seule des copistes a bouleversé son système; mais elle n'a point tellement obscurci l'arrangement réel de sa pensée qu'on ne puisse encore le retrouver et le suivre.

Or, ces changements que l'on vient d'indiquer doivent paraître d'autant plus vraisemblables qu'on sait, à n'en pouvoir douter, quel a été le destin matériel, sinon de tous, du moins de quelquesuns des écrits d'Aristote, et par quelles vicissitudes ils ont dû passer pour arriver jusqu'à nous. Il n'est plus permis de croire aujourd'hui, comme on l'a vu plus haut, que tous les ouvrages du Stagirite, sans exception, soient restés inconnus au monde durant près de deux siècles après sa mort, dans le fameux caveau des héritiers de Nélée1. D'un autre côté, des recherches antérieures m'ont conduit à avancer que la Politique était un des derniers ouvrages d'Aristote, et qu'il avait dû le composer cinquante-trois ans à soixante. Il est donc possible de penser que la Politique fut un des ouvrages dont l'ignorance ou la cupidité des gens de Scepsis retarda la publicité.

de

Mais on sait d'une manière formelle, par le témoignage contemporain de Cicéron et de Strabon et par le témoignage postérieur de Plutarque,

1

Voir un excellent mémoire de M. Brandis: Reinisches Museum, 1827, 3 cahier, page 237, et les Aristotelia de M. Stahr.

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