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que

po

que l'édition et la révision des œuvres du Stagirite, au temps d'Apellicon et d'Andronicus, furent faites d'une manière fort insuffisante, et les copies qui circulaient alors étaient entachées de fautes grossières. En étudiant le contexte de la Politique, et en comparant les divers passages indiqués dans cette discussion, il est de toute évidence que l'arrangement actuel est contraire à la logique et aux idées de l'auteur. Cet arrangement doit remonter probablement au temps d'Andronicu's de Rhodes; il existe déjà sans doute dans le catalogue de Diogène de Laërte, au début du ir siècle avant J. C. (πολιτικῆς ἀκροάσεως βιβλία ή); et à la fin du v siècle, David, philosophe arménien, cite sitivement, au début de son commentaire sur les Catégories, le Ile livre de la Politique (voir le manuscrit de la Bibliothèque Royale, no 1939, fo 128, recto). Pourquoi n'admettrait-on pas qu'ici la main d'Andronicus de Rhodes, ou de quelque arrangeur, a été aussi malheureuse que pour tant d'autres ouvrages? Pourquoi attribuer légèrement un défaut de méthode au philosophe le plus systématique et le plus régulièrement logique de tous les philosophes, surtout quand il s'en défend lui-même, et quand il proteste dans tout le cours de son œuvre contre la disposition illogique qu'on prétend lui imposer? Bien plus, d'autres traités d'Aristote portent des

traces non moins certaines de bouleversements analogues. Duval a dû changer l'ordre des livres de la Métaphysique, Heinsius celui des chapitres de la Poétique; Gaza, avant eux, en 1471, avait déplacé, dans l'Histoire des Animaux, le VII livre qui occupait d'abord le dernier rang; et tous les éditeurs subséquents ont dû admettre cette modification avouée par le bon sens.

Que faire donc maintenant de ces quatre passages de l'ancien VI livre notés plus haut, et qui rappellent formellement l'ancien Ve? Je ne balance point à le dire, il faut les déclarer interpolés. On se convaincra facilement, en lisant le contexte, qu'ils n'y tiennent pas essentiellement, et qu'ils peuvent en être détachés sans rompre en rien le fil de la pensée. Or, il a été prouvé plus haut que c'é tait manquer à toutes les lois de la logique que de placer le Ve livre avant le VI, ainsi qu'il l'est dans l'ordre actuel.

S'il restait quelques doutes sur la réalité de ces interpolations, une dernière considération semble devoir les lever, c'est que l'arrangeur des huit livres, quel qu'il soit, a laissé dans son texte des traces évidentes de sa maladresse et de sa légèreté. Livre VII® (6o), chap. 1, § 5, on lit : Zntovo, μèv yàp οἱ τὰς πολιτείας καθιστάντες ἅπαντα τὰ οἰκεῖα συναγαγεῖν πρὸς τὴν ὑπόθεσιν, ἁμαρτάνουσι δὲ τοῦτο ποιοῦντες, καθά

"

περ ἐν τοῖς περὶ τὰς φθορὰς καὶ τὰς σωτηρίας τῶν πολι τεῖων εἴρηται πρότερον. « Les fondateurs d'États cher« chent à grouper autour de leur principe général « tous les principes secondaires qui en dépendent; « mais ils se trompent dans l'application, ainsi que « je l'ai déjà fait remarquer en traitant de la ruine et « du salut des États. » Non sans doute, Aristote n'a pas parlé dans sa Théorie des révolutions de ces erreurs politiques; il a seulement rappelé au début du VIIIe (5) livre qu'il avait précédemment discuté ce sujet; et où l'a-t-il réellement discuté avec toute l'étendue qu'il comporte? Ce n'est pas dans l'ancien Ve livre, c'est dans le IIIe livre, chap. v, § 8 et suiv. Ainsi, l'interpolateur s'est trompé, et certainement si Aristote avait eu le dessein de rappeler sa discussion, il ne se serait pas arrêté à ce qui n'en est que la réminiscence fort légère, au lieu de l'indiquer elle-même formellement et précisément.

Il conviendrait de placer ici une question qui se lie à toutes les questions antérieures sur l'ordre des huit livres, et qui pourrait à elle seule les résoudre et les embrasser toutes.

La division de la Politique en huit livres appartient-elle à l'auteur lui-même? Est-ce Aristote qui a partagé son ouvrage de cette façon ?

Plusieurs éditeurs ont pensé, et à mon sens ils

ont parfaitement raison, que cette division né venait pas d'Aristote; ils l'ont attribuée à Andronicus de Rhodes, et la chose est infiniment probable, d'après le passage de Plutarque, dans la Vie de Sylla. Quel que soit l'ordre dans lequel on place les V, VI, VIIe et VIIIe livres, on peut voir qu'ils commencent tous quatre par des conjonctions, et qui plus est, par des conclusions de raisonnements: Περὶ μὲν οὖν, πόσαι μὲν οὖν, ὅτι μὲν οὖν. Ajoutez, d'après les considérations précédentes, que la fin du IIIe et le début de l'ancien VIIe sont essentiellement liés l'un à l'autre par cette phrase suspendue du premier au second, et qu'il en est à peu près de même à l'égard de l'ancien VI et du Ve.

Qu'on se représente par la pensée ce que serait en français une pareille division de livres, où le raisonnement commencé à la fin de l'un ne se terminerait qu'au début de l'autre. La chose semble même si bizarre, qu'un traducteur, malgré toute sa fidélité, doit supprimer en français ces conjonctions étranges pour ne pas choquer ses lecteurs, sauf à les en avertir.

Rien du reste dans le contexte ne montre positivement quelle a pu être, dans la pensée même de l'auteur, la division de son ouvrage. Aristote dit bien en plusieurs endroits ἐν πρώτοις λόγοις, ἐν πρώτῃ μεθόδῳ, ἐν μεθόδῳ πρὸ ταύτης, mais rien n'est assez

formel pour qu'on puisse en déduire quelque conclusion légitime. Scaïno s'est efforcé de retrouver, d'après ces indications fugitives, la division d'Aristote, et il prétend que les cinq premiers livres c'est-à-dire les anciens Ier, II, III, VII et VIIIe livres, ne devaient former qu'une seule partie, une seule méthode (μétodos), un seul livre. Cette conjecture est peu probable; et, tout considéré, l'on ne s'arrêtera point à cette question, parce qu'on n'a pas trouvé dans le texte les éléments suffisants pour la résoudre. Les seuls points de fait qu'on puisse ici rappeler, c'est que cette division en huit livres, déjà donnée par Diogène de Laërte et qui est confirmée par David l'Arménien trois siècles plus tard, se retrouve dans tous les manuscrits grecs, et que deux manuscrits latins cités par Jourdain, page 195, donnent les anciens VII et VIIIe livres en un seul, ce qui peut paraître tout à fait rationnel, vu leur intime et nécessaire connexion.

De cette opinion émise ici comme une certitude sur l'ordre des livres de la Politique, on peut tirer cette conséquence fort importante que l'ouvrage d'Aristote, que jusqu'à ce jour on a cru mutilé, est complet; qu'il ne présente pas de lacunes réelles, mais seulement du désordre; et qu'il ne manque rien au système politique du Stagirite. Il suffirait presque pour s'en convaincre de lire les huit livres

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