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faiteurs des peuples, soit en les éclairant par les arts, soit en les guidant à la victoire, en les réunissant ou en leur conquérant des établissements, furent nommés rois par reconnaissance et transmirent le pouvoir à leurs fils. Ces rois avaient le commandement suprême à la guerre, et faisaient tous les sacrifices où le ministère des pontifes n'était pas indispensable. Outre ces deux prérogatives, ils étaient juges souverains de tous les procès, tantôt sans serment, et tantôt en donnant cette garantie. La formule du serment consistait à lever le sceptre en l'air. § 8. Dans les temps reculés, le pouvoir de ces rois comprenait toutes les affaires politiques de l'intérieur et du dehors sans exception; mais plus tard, soit par l'abandon volontaire des rois, soit par l'exigence des peuples, cette royauté fut réduite presque partout à la présidence des sacrifices; et là où elle méritait encore son nom, elle n'avait gardé que le commandement des armées hors du territoire de l'État.

§ 9. Nous avons donc reconnu quatre sortes de royautés l'une, celle des temps héroïques, librement consentie, mais limitée aux fonctions de général, de juge et de pontife; la seconde, celle des barbares, despotique et héréditaire par la loi; la troisième, celle qu'on nomme Æsymnétie, et qui est une tyrannie élective; la quatrième, enfin, celle de Sparte, qui n'est, à proprement parler, qu'un généralat perpétuellement

cus, selon lui, a été une sorte de dictateur, d'æsymnète, comme Aristote le dit ici.

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d'Homère. Lever le sceptre en l'air. Voir plusieurs exemples de ce genre dans l'Iliade,

§ 7. Le commandement suprême chant VII, v. 412: et chant x, à la guerre. C'est la royauté v. 321.

héréditaire dans une race. Ces quatre royautés sont ainsi suffisamment distinctes entre elles. § 10. Il en est une cinquième, où un seul chef dispose de tout, comme ailleurs le corps de la nation, l'État, dispose de la chose publique. Cette royauté a de grands rapports avec le pouvoir domestique; de même que l'autorité du père est une sorte de royauté sur la famille, de même la royauté dont nous parlons ici est une administration de famille s'appliquant à une cité, à une ou plusieurs

nations.

CHAPITRE X.

Suite de la théorie de la royauté; les cinq espèces peuvent être réduites à deux principales. De la royauté absolue; vaut-il mieux remettre le pouvoir à un seul individu qu'à des lois faites par des citoyens éclairés et honnêtes? Arguments pour et contre la royauté absolue; l'aristocratie lui est très-préférable; causes qui ont amené l'établissement et ensuite la ruine des royautés. L'hérédité du pouvoir royal n'est pas admissiDe la force publique mise à la disposition de la royauté.

ble.

§ 1. Nous n'avons réellement à considérer que deux formes de la royauté : la cinquième, dont nous venons de parler, et la royauté de Lacédémone. Les autres se trouvent comprises entre ces deux extrêmes, et sont, ou plus restreintes dans leurs pouvoirs que la monarchie absolue, ou plus étendues que la royauté de Sparte. § 2. Nous nous bornerons donc aux deux points suivants d'abord, est-il utile ou funeste à l'État d'avoir un général perpétuel, qu'il soit d'ailleurs héréditaire ou électif? En second lieu, est-il utile ou funeste à

l'État d'avoir un maître absolu? §3. La question d'un généralat de ce genre est un objet de lois réglementaires bien plutôt que de constitution, puisque toutes les constitutions pourraient également l'admettre. Je ne m'arrêterai donc point à la royauté de Sparte. Quant à l'autre espèce de royauté, elle forme une espèce de constitution à part; je vais m'en occuper spécialement, et parcourir toutes les questions qu'elle peut faire naître.

§ 4. Le premier point, dans cette recherche, est de savoir s'il est préférable de remettre le pouvoir à un individu de mérite, ou de le laisser à de bonnes lois? Les partisans de la royauté, qui la trouvent si bienfaisante, prétendront, sans nul doute, que la loi, ne disposant jamais que d'une manière générale, ne peut prévoir tous les cas accidentels, et que c'est déraisonner que de vouloir soumettre une science, quelle qu'elle soit, à l'empire d'une lettre morte, comme cette loi d'Égypte, qui ne permet aux médecins d'agir qu'après le quatrième jour de la maladie, et qui les rend responsables, s'ils agissent avant ce délai. Donc, évidemment, la lettre et la loi ne peuvent jamais, par les mêmes motifs, constituer un bon gouvernement. Mais

§ 3. Je ne m'arrêterai donc point loi d'Égypte. Hérodote (Euterpe, à la royauté de Sparte. Ainsi Aristote ne voit de royauté réelle que dans la royauté absolue; c'est également l'opinion de Hobbes (Imperium, cap. VII, § 13). Voir plus loin, ch. XI, § 1.

ch. LXXXIV, page 97, édit. Firmin Didot), parle de ces lois égyptiennes sur la médecine. - Ne permet aux médecins d'agir. Le mot du texte que quelques traducteurs ont compris dans le sens de « purger», signifie toujours, dans les Aphorismes d'Hippocrate, « agir » médicalement,«faire une prescrip

§ 4. Le laisser à de bonnes lois. C'est à ce passage que se rapporte la partie des Questions de Buridan qu'on a souvent citée. Cette tion, ordonner quelque remède. »

d'abord, cette forme de dispositions générales est une nécessité pour tous ceux qui gouvernent; et l'emploi en est certainement plus sage dans une nature exempte de toutes les passions que dans celle qui leur est essentiellement soumise. La loi est impassible; toute âme humaine au contraire est nécessairement passionnée. § 5. Mais, dit-on, le monarque sera plus apte que la loi à prononcer dans les cas particuliers. On admet alors évidemment qu'en même temps qu'il est législateur, il existe aussi des lois qui cessent d'être souveraines là où elles se taisent, mais qui le sont partout où elles parlent. Dans tous le cas où la loi ne peut pas du tout prononcer, ou ne peut pas prononcer équitablement, doit-on s'en remettre à l'autorité d'un individu supérieur à tous les autres, ou à celle de la majorité? En fait, la majorité aujourd'hui juge, délibère, élit dans les assemblées publiques; et tous ses décrets se rapportent à des cas particuliers. Chacun de ses membres, pris à part, est inférieur peutêtre, si on le compare à l'individu dont je viens de parler; mais l'État se compose précisément de cette majorité, et le repas où chacun fournit son écot est toujours plus complet que ne le serait le repas isolé d'un des convives. C'est là ce qui rend la foule, dans la plupart des cas, meilleur juge qu'un individu quel qu'il soit. § 6. De plus, une grande quantité est toujours moins corruptible, comme l'est par exemple une masse d'eau; et la majorité est de même bien moins facile à corrompre que la minorité. Quand l'individu

§ 5. Chacun de ses membres. Ceci est une répétition presque textuelle

de ce qui déjà a été dit plus haut, ch. vi, § 4.

est subjugué par la colère ou toute autre passion, il laisse de toute nécessité fausser son jugement; mais il serait prodigieusement difficile que, dans le même cas, la majorité tout entière se mît en fureur ou se trompât. Qu'on prenne d'ailleurs une multitude d'hommes libres, ne s'écartant de la loi que là où nécessairement la loi doit être en défaut, bien que la chose ne soit pas aisée dans une masse nombreuse, je puis supposer toutefois que la majorité s'y compose d'hommes honnêtes comme individus et comme citoyens ; je demande alors si un seul sera plus incorruptible, ou si ce n'est pas cette majorité nombreuse, mais probe? Ou plutôt l'avantage n'est-il pas évidemment à la majorité? Mais, dit-on, la majorité peut s'insurger; un seul ne le peut pas. On oublie alors que nous avons supposé à tous les membres de la majorité autant de vertu qu'à cet individu unique. § 7. Si donc on appelle aristocratie le gouvernement de plusieurs citoyens honnêtes, et royauté le gouvernement d'un seul, l'aristocratie sera certainement pour les États très-préférable à la royauté, que d'ailleurs son pouvoir soit absolu ou ne le soit pas, pourvu qu'elle se compose d'individus aussi vertueux les uns que les autres. Si nos ancêtres se sont soumis à des rois, c'est peut-être qu'il était fort rare alors de trouver des hommes supérieurs, surtout dans des États aussi petits que ceux de ce temps-là; ou bien ils n'ont fait des rois que par pure reconnaissance, gratitude qui témoigne en faveur de nos pères. Mais quand l'État renferma plusieurs citoyens d'un mérite également distingué, on ne put souffrir plus longtemps la royauté; on chercha une forme de gouvernement où l'autorité pût être commune, et l'on établit la républi

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