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CHAPITRE VII.

La république est une combinaison de l'oligarchie et de la démocratie; moyens divers de faire cette combinaison; caractère d'une vraie république; exemple tiré du gouvernement lacédémonien; la république doit se maintenir par l'amour seul des citoyens.

§ 1. Comme conséquence de ces premières considérations, nous examinerons maintenant comment la république proprement dite se forme à côté de l'oligarchie et de la démocratie, et comment elle doit être constituée. Cette recherche aura de plus l'avantage de montrer nettement les limites de l'oligarchie et de la démocratie; car c'est en empruntant quelques principes à l'une et à l'autre de ces deux constitutions si opposées, que nous formerons la république, comme on reforme un objet de reconnaissance, en en réunissant les parties séparées.

§ 2. Il y a ici trois modes possibles de combinaison et de mélange. D'abord, on peut réunir la législation de l'oligarchie et de la démocratie sur une matière quelconque, par exemple sur le pouvoir judiciaire. Ainsi, dans l'oligarchie, on met le riche à l'amende s'il

§ 1. Un objet de reconnaissance. Mot à mot: << Symbole ». Le contexte explique assez ce que ce mot veut dire. C'est un objet composé de deux parties qui peuvent être aisément séparées, pour être ensuite réunies. C'était souvent une

pièce de monnaie ou de métal, un morceau de bois, etc. Deux personnes qui s'aimaient tendrement se partageaient le « symbole»,comme gage de fidélité et de souvenir. Cet usage touchant et fort antique subsiste encore parmi nous.

ne se rend pas au tribunal, et l'on ne paye pas le pauvre pour y siéger; dans les démocraties au contraire, indemnité aux pauvres, sans amende pour les riches. C'est un terme commun et moyen de ces institutions diverses que la réunion de toutes deux : amende aux riches, indemnité aux pauvres; et l'institution nouvelle est républicaine, car elle n'est que le mélange des deux autres. Voilà pour le premier mode de combinaison. § 3. Le second consiste à prendre une moyenne entre les dispositions arrêtées par l'oligarchie et par la démocratie. Ici, par exemple, le droit d'entrée à l'assemblée politique s'acquiert sans aucune condition de cens, ou du moins par un cens modique, là par un cens extrêmement élevé; le moyen terme est de n'adopter aucun des taux fixés de part et d'autre; il faut prendre la moyenne entre les deux.

Troisièmement, on peut à la fois faire des emprunts, et à la loi oligarchique et à la loi démocratique. Ainsi, la voie du sort pour la désignation des magistrats est une institution démocratique. Le principe de l'élection, au contraire, est oligarchique; de même que ne point exiger de cens pour les magistratures appartient à la démocratie, et qu'en exiger un appartient à l'oligarchie. L'aristocratie et la république puiseront leur système, qui acceptera ces deux dispositions, dans l'une et dans l'autre; à l'oligarchie, elles prendront l'élection; à la démocratie, l'affranchissement du cens. Voilà comment on peut combiner l'oligarchie et la démocratie.

§ 4. Mais pour que le résultat sorti de ces combinaisons soit un mélange parfait d'oligarchie et de démocratie, il faut qu'on puisse nommer indifféremment

l'État qui en est le produit, oligarchique ou démocratique; car ce n'est là évidemment que ce qu'on entend par un mélange parfait. Or, c'est toujours le moyen terme qui présente cette qualité, parce qu'on y retrouve les deux extrêmes. § 5. On peut citer comme exemple la constitution lacédémonienne. D'un côté, bien des gens affirment que c'est une démocratie, parce qu'en effet on y découvre plusieurs éléments démocratiques; par exemple, l'éducation commune des enfants, qui est exactement la même pour les enfants des riches et pour les enfants des pauvres, les enfants des riches étant élevés précisément comme ceux des pauvres pourraient l'être; l'égalité, qui continue même dans l'âge suivant et quand ils sont hommes, sans aucune distinction du riche au pauvre; puis l'égalité parfaite des repas communs à tous; l'identité de vêtement qui laisse le riche absolument vêtu comme pourrait l'être le premier pauvre quelconque; enfin l'intervention du peuple dans les deux grandes magistratures, dont il choisit l'une, le sénat, et possède l'autre, l'éphorie. D'autre part, on soutient que la constitution de Sparte est une oligarchie, parce que, de fait, elle renferme bien des éléments oligarchiques. Ainsi, toutes les fonctions y sont électives; pas une n'est conférée par le sort; quelques magistrats en petit nombre y prononcent souverainement l'exil ou la mort, sans compter encore d'autres institutions non moins oligarchiques.

§ 6. Une république où se combinent parfaitement

§ 5. La constitution lacédémo- le mélange des pouvoirs à Sparte, nienne. Voir plus haut, ch. v, § 5, il faut surtout voir le morceau et liv. II, ch. vi; voir aussi l'excel- décisif des Lois de Platon, livre lent traité de Cragius, p. 250. Sur IV, p. 225, trad. de M. Cousin.

l'oligarchie et la démocratie doit donc paraître à la fois l'une et l'autre, sans être précisément aucune des deux. Elle doit pouvoir se maintenir par ses propres principes, et non par des secours qui lui seraient étrangers; et quand je dis qu'elle doit subsister par ellemême, ce n'est pas en repoussant de son sein la plus grande partie de ceux qui veulent participer au pouvoir, avantage qu'un mauvais gouvernement peut se donner aussi bien qu'un bon; mais je comprends que c'est en se conciliant l'accord unanime des membres de la cité, dont aucun ne voudrait changer le gouvernement.

§ 7. Je ne pousserai pas plus loin ces remarques sur les moyens de constituer la république, et toutes les autres formes politiques nommées aristocraties.

CHAPITRE VIII.

Quelques considérations sur la tyrannie; ses rapports avec la royauté et la monarchie absolue; c'est toujours un gouvernement de violence.

§ 1. Il nous resterait à parler de la tyrannie, non qu'elle doive par elle-même nous arrêter longtemps; mais seulement pour compléter nos recherches en l'y

§ 1. Il nous resterait. Aristote dit ici qu'il ne lui reste plus qu'à parler de la tyrannie. Il n'aurait cependant pas traité de l'aristocratie, qui est la seconde forme de gouvernement dans sa classifi

cation, si l'on admet l'ordre actuel des livres. Il faut donc qu'il en ait antérieurement traité; et en effet, c'est le sujet de l'ancien VIIa livre, qui doit être placé, comme on l'a fait dans cette édition, avec l'an

comprenant, puisque nous l'avons admise parmi les formes possibles de gouvernement. Nous avons traité précédemment de la royauté, en nous attachant surtout à la royauté proprement dite, c'est-à-dire à la royauté absolue; et nous en avons montré les avantages et les dangers, la nature, l'origine et les applications diverses. § 2. Dans le cours de ces considérations sur la royauté, nous avons indiqué deux formes de tyrannie, parce que ces deux formes se rapprochent assez de la royauté, et que, comme elle, c'est la loi qui les a fondées. Nous avons dit que quelques nations barbares se choisissent des chefs absolus, et que dans les temps les plus reculés, les Grecs se donnèrent des monarques de ce genre, nommés æsymnètes. Ces pouvoirs avaient d'ailleurs entre eux quelques différences: ils étaient royaux, en ce que la loi et la volonté des sujets leur donnaient naissance, mais tyranniques, en ce que l'exercice en était despotique et tout à fait arbitraire. § 3. Reste une troisième espèce de tyrannie qui semble mériter plus particulièrement ce nom, et qui correspond à la royauté absolue. Cette tyrannie n'est pas autre que la monarchie absolue qui, loin de toute responsabilité et dans l'intérêt seul du maître, gouverne des sujets qui valent autant et mieux que lui, sans consulter en rien leurs intérêts spéciaux. Aussi est-ce un gouvernement de violence; car il n'est pas un cœur libre qui supporte patiemment une sem

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