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vette. Le rapport de l'homme à la femme reste toujours tel que je viens de le dire. L'autorité du père sur ses enfants est au contraire toute royale. L'affection et l'âge donnent le pouvoir aux parents aussi bien qu'aux rois; et quand Homère appelle Jupiter

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Père immortel des hommes et des dieux,

il a bien raison d'ajouter qu'il est aussi leur roi; car un roi doit à la fois être supérieur à ses sujets par ses facultés naturelles, et cependant être de la même race qu'eux; et telle est précisément la relation du plus vieux au plus jeune, et du père à l'enfant.

§ 3. Il n'est pas besoin de dire qu'on doit mettre bien plus de soin à l'administration des hommes qu'à celle des choses inanimées, à la perfection des premiers qu'à la perfection des secondes, qui constituent la richesse; bien plus de soin à la direction des êtres libres qu'à celle des esclaves. La première question, quant à l'esclave, c'est de savoir si l'on peut attendre de lui, au delà de sa vertu d'instrument et de serviteur, quelque vertu, comme la sagesse, le courage, l'équité, etc. ; ou bien, s'il ne peut avoir d'autre mérite que ses services tout corporels. Des deux côtés, il y a sujet de

rait sembler une interpolation. Amasis. La pensée reste ici obscure à cause de la concision de l'expression. Hérodote raconte (Euterpe, ch. CLXXII) le trait auquel Aristote fait peut-être allusion. D'une cuvette d'or qui servait à laver les pieds de ses convives, Amasis fit faire la statue d'un dieu, qui reçut bientôt les adorations et les hommages des Égyp

tiens. Amasis alors appela près de lui les principaux d'entre eux ; et, leur racontant l'histoire de la cuvette, il ajouta que lui aussi, avant de devenir roi, n'était qu'un obscur citoyen, mais qu'une fois élevé sur le trône, il méritait le respect et les hommages de ses sujets.

§ 2. Homère, Iliade, chant I, vers 544 et passim.

doute. Si l'on suppose ces vertus aux esclaves, où sera leur différence avec les hommes libres?. Si on les leur refuse, la chose n'est pas moins absurde; car ils sont hommes, et ont leur part de raison. § 4. La question est à peu près la même pour la femme et l'enfant. Quelles sont leurs vertus spéciales? La femme peut-elle être sage, courageuse et juste comme un homme? L'enfant peut-il être sage et dompter ses passions, ou ne le peut-il pas? Et d'une manière générale, l'être fait par la nature pour commander et l'être destiné à obéir doivent-ils posséder les mêmes vertus ou des vertus différentes? Si tous deux ont un mérite absolument égal, d'où vient que l'un doit commander, et l'autre obéir à jamais? Il n'y a point ici de différence possible du plus au moins autorité et obéissance different spécifiquement, et entre le plus et le moins il n'existe aucune différence de ce genre. § 5. Exiger des vertus de l'un, n'en point exiger de l'autre serait encore plus étrange. Si l'être qui commande n'a ni sagesse ni équité, comment pourra-t-il bien commander? Si l'être qui obéit est privé de ces vertus, comment pourra-t-il bien obéir? Intempérant, paresseux, il manquera à tous ses devoirs. Il y a donc nécessité évidente que tous deux aient des vertus, mais des vertus aussi diverses que le sont les espèces des êtres destinés par la nature à la soumission. C'est ce que nous avons déjà dit de l'âme. En elle, la nature a fait deux parties distinctes: l'une pour commander, l'autre pour obéir; et leurs qualités sont bien diverses, l'une étant douée de raison, l'autre en étant privée. § 6. Cette

§ 5. Nous avons déjà dit. Voir plus haut, ch. 1. § 10.

relation s'étend évidemment au reste des êtres; et dans le plus grand nombre, la nature a établi le commandement et l'obéissance. Ainsi, l'homme libre commande à l'esclave tout autrement que l'époux à la femme, et le père à l'enfant ; et pourtant les éléments essentiels de l'âme existent dans tous ces êtres; mais ils y sont à des degrés bien divers. L'esclave est absolument privé de volonté; la femme en a une, mais en sous-ordre; l'enfant n'en a qu'une incomplète. § 7. Il en est nécessairement de même des vertus morales. On doit les supposer dans tous ces êtres, mais à des degrés différents, et seulement dans la proportion indispensable à la destination de chacun d'eux. L'être qui commande doit avoir la vertu morale dans toute sa perfection; sa tâche est absolument celle de l'architecte qui ordonne ; et l'architecte ici, c'est la raison. Quant aux autres, ils ne doivent avoir de vertus que suivant les fonctions qu'ils ont à remplir.

§ 8. Reconnaissons donc que tous les individus dont nous venons de parler ont leur part de vertu morale, mais que la sagesse de l'homme n'est pas celle de la femme, que son courage, son équité, ne sont pas les mêmes, comme le pensait Socrate, et que la force de l'un est toute de commandement; celle de l'autre, toute de soumission. Et j'en dis autant de toutes leurs autres vertus; car ceci est encore bien plus vrai, quand on se donne la peine d'examiner les choses en détail. C'est se faire illusion à soi-même que de dire, en se bornant à des généralités, que « la vertu est une bonne

8. Socrate. Platon expose cette et dans le Ménon, trad, de M. Coudoctrine, Républ., liv. V, p. 236; sin. Le dénombrement. Voir la

disposition de l'âme », et la pratique de la sagesse; ou de répéter telle autre explication tout aussi vague. A de pareilles définitions, je préfère de beaucoup la méthode de ceux qui, comme Gorgias, se sont occupés de faire le dénombrement de toutes les vertus. Ainsi, en résumé, ce que dit le poëte d'une des qualités féminines:

Un modeste silence est l'honneur de la femme,

est également juste de toutes les autres; cette réserve ne siérait pas à un homme.

§ 9. L'enfant étant un être incomplet, il s'ensuit évidemment que la vertu ne lui appartient pas véritablement, mais qu'elle doit être rapportée à l'être accompli qui le dirige. Le rapport est le même du maître à l'esclave. Nous avons établi que l'utilité de l'esclave s'applique aux besoins de l'existence; la vertu ne lui sera donc nécessaire que dans une proportion fort étroite; il n'en aura que ce qu'il en faut pour ne point négliger ses travaux par intempérance ou paresse. § 10. Mais, ceci étant admis, pourra-t-on dire: Les ouvriers aussi devront donc avoir de la vertu, puisque souvent l'intempérance les détourne de leurs travaux? Mais n'y a-t-il point ici une énorme différence? L'esclave partage notre vie; l'ouvrier au contraire vit loin de nous et ne doit avoir de vertu qu'autant précisément qu'il a d'esclavage; car le labeur de l'ouvrier est en quelque sorte un esclavage limité. La nature fait l'esclave; elle ne fait pas le cordonnier ou

Morale à Eudème, livre. II, chapitre III, page 1220, édition de Berlin, p. 254 de ma traduction.

Un modstee silence. Ce vers

est tiré de l'Ajax de Sophocle, v. 291.

§ 9. Nous avons établi. Voir plus haut, ch. 1, §§ 4 et suiv.

tel autre ouvrier. § 11. Il faut donc avouer que le maître doit être pour l'esclave l'origine de la vertu qui lui est spéciale, bien qu'il n'ait pas, en tant que maître, à lui communiquer l'apprentissage de ses travaux. Aussi est-ce bien à tort que quelques personnes refusent toute raison aux esclaves et ne veulent jamais leur donner que des ordres; il faut au contraire les reprendre avec plus d'indulgence encore que les enfants. Du reste, je m'arrête ici sur ce sujet.

Quant à ce qui concerne l'époux et la femme, le père et les enfants, et la vertu particulière de chacun d'eux, les relations qui les unissent, leur conduite bonne ou blâmable, et tous les actes qu'ils doivent rechercher comme louables ou fuir comme répréhensibles, ce sont là des objets dont il faut nécessairement s'occuper dans

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§ 11. Leur donner que des ordres. Aristote veut blâmer Platon qui a soutenu cette opinion, Lois, liv. VI, p. 381, trad. de M. Cousin. Dans les études politiques. Schneider prétend qu'Aristote a traité le sujet dont il parle ici dans une portion de la Politique qui n'est pas parvenue jusqu'à nous, et qui continuait les IVe (7e) et Ve (8) livres. Schneider semble avoir lu dans le texte un singulier au lieu d'un pluriel, comprenant alors qu'il s'agit du gouvernement modéle, de la république parfaite, dont il est question en effet au IVe (7e) livre. Tous les manuscrits donnent le pluriel et non pas le singulier; et dès lors, Aristote a voulu dire simplement que, dans les ouvrages de politique, il faut traiter des rapports du père aux

enfants, de l'époux à la femme; mais il ne promet pas qu'il en traitera spécialement lui-même. D'ailleurs ce qu'il vient de dire précédemment sur la nature de la femme et celle de l'enfant, ce qu'il dira plus tard de l'éducation, peut paraître une discussion suffisante de la question: et je ne pense pas que nous avons à regretter aucune partie de l'ouvrage d'Aristote sur les devoirs des femmes, comme Schneider l'a cru, et comme l'ont supposé avant lui plusieurs commentateurs. Il faut ajouter que ce sujet a été traité assez longuement par Aristote dans l'Économique, liv. I, le seul que la critique reconnaisse pour authentique; et peut-être est-ce à cette discussion que l'auteur entend se référer.

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