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26.

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Quand un discours' naturel peint une passion, ou un effet, on trouve dans soi-même la vérité de ce qu'on entend, laquelle on ne savait pas qu'elle y fút?, en sorte qu'on est porté à aimer: celui qui nous le fait sentir; car il ne nous a pas fait montre de son bien“, mais du nôtre; et ainsi ce bienfait nous le rend aimable : outre que cette communauté d'intelligence que nous avons avec lui incline nécessairement le cæur à l'aimer.

27.

Il faut de l'agréable et du réel; mais il faut que cet agréable soit lui-même pris du vrai.

28.

Quand on voit le style naturel’, on est tout étonné et ravi; car on s'attendait de voir un auteur, et on trouve un homme 8. Au lieu que ceux qui ont le goût bon, et qui en voyant un livre croient trouver un homme, sont tout surpris de trouver un auteur : Plus poetice' quam humane loculus es. Ceux-là honorent bien la nature, qui lui apprennent qu'elle peut parler de tout, et même de théologie''.

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XXXI.

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« Quand un discours. » 420, P, R.,

a Qu'elle y fut. » Il faudrait, pour que la phrase füt correcte, laquelle on ne sarait pas qui y fuil. Mais on répétait alors volontiers il ou elle.

« Qu'on est porté à aimer. » Pascal dit ailleurs (xxv, ?): « Ce n'est pas dans » Montaigne, mais dans moi, que je trouve tout ce que j'y vois. » C'est donc à Montaigne aussi sans doute qu'il pensait ici.

* « De son bien. » Ce qui blesserait notre vanité et exciterait notre jalousie. 5 « Il faut de l'agréable. » 402. En titre, Éloquence. P. R., XXXI.

« Soit lui-même pris du vrai. » Cela est si juste qu'on ne voit pas même d'abord comment Pascal peut distinguer l'agréable du réel. Pensail-il aux figures, aux images, qui expriment la vérité, mais par une espèce de fiction ?

u Quand on voit le style naturel, » 427. P. R., XXXI. - C'est-à-dire, quand on voit que le style est naturel,

« Et on trouve un homme. » Méré, Discours de la Concersalion, p. 76 : « Je ► disais a quelqu'un fort savant qu'il parlait en auteur. Eh quoi! me répondit cet » homme, ne le suis-je pas ? Vous ne l'éles que trop, repris-je en riant, et vous » fei iez beaucoup mieux de parler en galant homme. » C'est plutôt encore Montaigne que Méré qui a dù inspirer à Pascal celle pensée : et à qui s'applique-t-elle mieux ?

« Plus poetice. » Cette phrase est de Pétrone, au chapitre 90, où elle n'a pas le même sens que dans Pascal. Pascal emprunte sans doute à quelqu'un cette citation. 16 « Et même de théologie, » Est-ce la un retour sur les Provinciales?

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29.

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La dernière chose qu'on trouve en faisant un ouvrage? est de savoir celle qu'il faut mettre la première.

30.

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Il ne faut point détournerl'esprit ailleurs, sinon pour le délasser, mais dans le temps où cela est à propos ; le délasser quand il faut, et non autrement; car qui délasse hors de propos , il lasse; et qui lasse hors de propos délasse :, car on quitte tout là; tant la malice de la concupiscence se plaît à faire tout le contraire de ce qu'on veut obtenir de nous sans nous donner du plaisir, qui est la monnaie pour laquelle nous donnons tout ce qu'on veut.

31. Quelle vanité que la peinture, qui attire l'admiration par la ressemblance des choses dont on n'admire pas les originaux"!

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Un même sens' change selon les paroles qui l'expriment. Les sens reçoivent des paroles leur dignité, au lieu de la leur donner. Il en faut chercher des exemples :...

33.

Ceux qui sont accoutumés o à juger par le sentiment ne comprennent rien aux choses de raisonnement; car ils veulent d'abord pénétrer d'une vue, et ne sont point accoutumés à chercher les

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« La dernière chose qu'on trouve. » 225. Manque dans P. R.
« Il ne faut point détourner. » 1 29. En titre, Langage. P. R., XXXI.

« Et qui lasse hors de propos délasse, » Pascal s'explique tout de suite : car on quitte toul là , et ainsi l'esprit, qu'on croyait tenir bien tendu, échappe tout à fait, et se délasse à son aise. C'est comme dans l'épigramme de Rousseau : Faisons-les courts en ne les lisant point.

« Qui est la monnaie. » Voltaire voudrait que Pascal eût dit, la denrée.
« Quelle vanité. » 24. Manque dans P. R.

« Les originaux. » Cependant s'il n'y avait aucune espèce de beauté dans l'ori. ginal, il ne pourrait pas y en avoir dans la peinture./

« Un même sens, » 225. Manque dans P. R. — Il n'est pas vrai que la pensée reçoive sa dignité des paroles, car c'est la pensée qui fait les paroles à son image. La parole toute seule n'est rien.

8 all en faut chercher des exemples. » Pascal n'a pas achevé, il n'aurait pu trouver des exemples à l'appui d'une remarque qui n'est pas vraie.

• « Ceux qui sont accoutumés. » 229. Manque dans P. R. Sur la différence des choses de raisonnement et des choses de sentiment, voir le paragraphe 2.

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principes. Et les autres, au contraire, qui sont accoutumés à raisonner par principes, ne comprennent rien aux choses de sentiment, y cherchant des principes, et ne pouvant voir d'une vue.

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34. La vraie éloquence se moque de l'éloquence, la vraie morale se moque de la morale; c'est-à-dire que la morale du jugement se moque de la morale de l'esprit, qui est sans règles 2. Car le jugement est celui à qui: appartient le sentiment, comme les sciences appartiennent à l'esprit. La finesse est la part du jugement, la géométrie est celle de l'esprit.

Se moquer de la philosophie", c'est vraiment philosopher.

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Toutes les fausses beautés ó que nous blâmons en Cicéron ont des

5 admirateurs, et en grand nombre.

« La vraie éloquence. » 169. En titre, Géométrie, Finesse. Manque dans P. R. Le titre, Géométrie, Finesse, indique qu'il faut rapprocher ce fragment du paragraphe 2. Sur la vraie éloquence opposée à ce qu'on appelle l'éloquence, cf. le paragraphe suivant.

« Qui est sans règles. » Cependant la morale de l'esprit étant, d'après ce qui suit, la morale du raisonnement, la morale géométrique, comment peut-elle étre sans règles ? C'est qu'il n'y a pas de principes absolus sur lesquels on puisse établir une géométrie en morale.

« Car le jugement est celui à qui. » C'est-à-dire est ce à quoi. Celui est au mas culin parce que le jugement est au masculin; c'est une attraction à la manière des langues anciennes.

« Se moquer de la philosophie. » C'est comme s'il avait dit, en continuant le même tour : La vraie philosophie se moque de la philosophie.

Mont., A pol., p. 146 : a Un ancien à qui on reprochoit qu'il faisoit profession de la philosophie, » de laquelle pourtant en son jugement il ne tenoit pas grand compte, respondit que » cela c'estoit vragement philosopher.

« Toutes les fausses beautés. » 439. Manque dans P. R. En blåmant dans Cicéron les fausses beautés, on doit croire que Pascal ne méconnaissait pas les véritables. Montaigne, son maitre, qui parle d'ailleurs assez durement de Cicéron, ajoute pourtant (I1, 10, p. 451): « Quant à son eloquence, elle est du tout hors » de comparaison : je crois que jamais homme ne l'egualera. » Il mèle à cet éloge quelques critiques sans y appuyer beaucoup; et nulle part, je crois, il ne lui reproche des beautés fausses. Mais il est remarquable que trois de nos plus grands esprits, Pascal, La Fontaine, Fénelon, se soient montrés sévères à l'égard de cette éloquence tant admirée. C'est justement, je crois, parce qu'elle était trop indiscrètement admirée de leur temps, et que le nom de Cicéron était comprornis par les déclamateurs cicéroniens. Rollin encore, qui a tant de sens, avait peine à consentir qu'on préférât à Cicéron Démosthene (voir son Traité des Études); qu'on juge ou devait aller l'enthousiasme des esprits vulgaires, puisé dès l'enfance dans les écoles, et fortifié par la pratique d'un art oratoire tel que celui que Racine a parodié dans les Plaideurs. — Méré ne parait pas goûter beaucoup Cicéron; et en effet, Cicéron est trop constamment oraleur pour plaire à ces délicats qui voulaient qu'on ne fut qu'honnéte homme. Cfvi, 45.

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36. Il y a beaucoup de gens qui entendent le sermon de la même manière qu'ils entendent vépres.

37. Les rivières sont des chemins ? qui marchent, et qui portent où l'on veut aller:

38.

Deux visages semblables “, dont aucun ne fait rire en particulier, font rire ensemble par leur ressemblance.

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39. ... Ils ont quelques principes ; mais ils en abusent. Or, l'abus des vérités doit être autant puni que l'introduction du mensonge.

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ARTICLE VIII.

1.

... Les principales forces des pyrrhoniens, je laisse les moindres, sont que nous n'avons aucune certitude de la vérité de ces principes’, hors la foi et la révélation, sinon en ce que nous les septons naturellement en nous : or, ce sentiment naturel n'est pas une preuve convaincante de leur vérité, puisque n'y ayant point de certitude, hors la foi, si l'homme est créé par un Dieu bon, par un démon méchant', ou à l'aventure, il est en doute si ces principes nous sunt

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« Il y a beaucoup de gens. » 275. Manque dans P. R. P. R. n'aurait pas voulu dire ce que semble dire Pascal, qu'on entend vepres machinalement, comme quelque chose d'étranger, à quoi on n'a point de part.

2 « Les rivières sont des chemins, » 439. Manque dans P, R.
3 « Où l'on veut aller. » Pourvu qu'on veuille aller où elles portent,

« Deux visages semblables. » 83. Manque dans P. R.

« Ils ont quelques principes. » 344. En titre : Probabililé. Supprimé dans P. R., comme se rattachant aux querelles du jansenisme. On lit dans les éditions : Les astrologues, les alchimistes ont quelques principes, etc. On voit que Pascal ne pensait pas (11 tout aux alchimistes et aux astrologies, mais à la morale des jésuites et à leur doctrine de la probabilité. Voir les Provinciales.

6 « Les principales forces. » 257. P. R., XXI. P. R. a mis en tête de ce morceau un alinéa qui en forme comme l'exorde.

7 « De ces principes. » P. R. : Des principes. C'est ce qu'il appelle plus loin les principes naturels. Cf. III, 15, pour voir ce que c'est que ces principes.

! « Par un démon méchant. » C'est l'objection que se fait Descartes.

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donnés ou véritables, ou faux, ou incertains, selon notre origine. De plus, que 2 personne n'a d'assurance, hors de la foi 3, s'il veille ou s'il dort, vu que durant le sommeil on croit veiller aussi fermement " que nous faisons; on croit voir les espaces, les figures, les mouvements; on sent couler le temps, on le mesure, et enfin on agit de même qu'éveillé; de sorte que, la moitié de la vie se passant en sommeil, par notre propre aveu, où, quoi qu'il nous en paraisse, nous n'avons aucune idée du vrai, tous nos sentiments étant alors des illusions, qui sait si cette autre moitié de la vie où nous pensons veiller n'est pas un autre sommeil un peu différent du premier, dont nous nous éveillons quand nous pensons dormir 5?

« Ou faux ou incertains. » Faux, si nous sommes faits par un démon méchant; incertains, si nous procédons du hasard. Mais comment concevoir un Dieu bon ou un démon méchant, si on ne conçoit d'abord le bien, le mal comme quelque chose de réel et de certain? La notion de la vérité n'est donc pas subordonnée à celle de Dieu, mais au contraire.

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« De plus, que. » Ce que fait suite aux premiers mots de l'article: Les principiles forces des pyrrhoniens sont que...

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Hors de la foi. Et qu'est-ce que la foi, comment pourrait-on avoir la foi, quand on ne sait pas si on dort ou si on veille? Fides ex auditu, dit saint Paul; comment donc pourra-t-on croire, si on n'est pas sûr de ce qu'on entend? Cependant il faut avouer que Pascal ne fait ici que suivre les principes mêmes de Descartes, qui s'exprime ainsi dans le Discours de la Méthode (quatrième partie): « Entin s'il y a » des hommes qui ne soient pas assez persuadés de l'existence de Dieu et de leur » àme par les raisons que j'ai apportées, je veux bien qu'ils sachent que toutes les >> autres choses dont ils se pensent peut-être plus assurés, comme d'avoir un corps, » et qu'il y a des astres, et une terre, et choses semblables, sont moins certaines : car encore qu'on ait une assurance morale de ces choses qui est telle, qu'il semble qu'à moins que d'être extravagant on n'en peut douter; toutefois aussi, à moins que > d'être déraisonnable, lorsqu'il est question d'une certitude métaphysique, on ne » peut nier que ce ne soit assez de sujet pour n'en être pas entièrement assuré, que d'avoir pris garde qu'on peut en même façon s'imaginer, étant endormi, qu'on a un » autre corps, et qu'on voit d'autres astres, et une autre terre, sans qu'il en soit rien. Car d'où sait-on que les pensées qui viennent en songe sont plutôt fausses » que les autres, vu que souvent elles ne sont pas moins vives et expresses? Et que » les meilleurs esprits y étudient tant qu'il leur plaira, je ne crois pas qu'ils puissent » donner aucune raison suffisante pour óter ce doute s'ils ne présupposent l'existence » de Dieu, » etc. Cette supposition d'un Dieu, Descartes prétend la démontrer géométriquement, en partant de la connaissance certaine que l'homme a de sa propre pensée. Il ne sait s'il a un corps, ni s'il y a des corps, mais il se tient sûr d'avoir une âme. Pour Pascal, il n'admet point de certitude philosophique, et il ne veut tenir l'existence de Dieu, ni celle du monde, ni la sienne même, que de la foi. Ce système répugne à la nature; mais n'est-il pas plus conséquent que celui de Descartes, qui veut absolument douter là où tous les hommes affirment, et qui affirme là où quelquefois ils ont douté?

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4 << Aussi fermement. » Non, car en rêvant on ne met pas en question si on rêve, on ne discute pas la solidité des imaginations qui se présentent, on n'a pas d'opinion arrêtée la-dessus; on sent plutôt qu'on ne cro.t, on seat vivement, mis on ne croit pas fermement.

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Quand nous pensons dormir. » Ici Pascal avait ajouté cet alinéa qu'il a barré :

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