Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

elle devait pousser de si profondes racines. Comme s'il prenait possession de la Bretagne au nom de Notre-Seigneur, saint Clair ne s'était pas renfermé dans les murailles de la vieille cité des Namnètes: il avait étendu jusqu'au centre même de la province son apostolat, et c'est à Reguigny, entre Josselin et Ploërmel, qu'il eut son tombeau, monument durable de la première mission évangélique chez nos ancêtres . Au moment de la lutte suprême du paganisme contre le Sauveur du monde, l'Armorique inscrivit parmi les grands martyrs de la persécution de Dioclétien, les deux Enfants-Nantais, saint Donatien et saint Rogatien . Puis vint le mouvement des invasions barbares qui, à la fin du ve siècle et au commencement du vie, couvrit le sol de la province des émigrés de la Grande-Bretagne. Ces émigrés avaient à leur tête des évêques et des moines qui s'unirent aux évêques et aux moines de la race gallo-romaine; et, tous ensemble, fécondèrent par leurs travaux les germes de la foi chrétienne déposés par les prédicateurs de la première heure. Saint Melaine de Rennes (530) 3; saint Félix de

Sur l'Apostolat de saint Clair, voyez la dissertation placée à la fin du volume, parmi les Notes et Pièces justificalives, N° 1.

2 LES BOLLANDISTES: Acla sanctorum (ad diem 24 maii).

La date placée après chaque nom est celle de la mort du saint. Nous avons suivi pour les saints bretons la chronologie donnée par M. l'abbé TRESVAUX, dans son édition des Vies des saints de Bretagne de DOM LOBINEAU,

Nantes (583); saint Patern de Vannes (448); saint Corentin de Quimper (460); saint Samson de Dol (565); saint Tugdual de Tréguier (564); saint Brieuc (502), saint Paul de Léon (570), saint Malo (627), qui ont laissé leurs noms aux villes dont ils furent les pasteurs; tous ces grands évêques, dont on peut dire avec vérité qu'ils firent la Bretagne, répandent le plus vif éclat sur le VIe siècle, celui de nos origines nationales.

La Bretagne, au milieu des luttes du moyen âge, grandit avec son double caractère de foi catholique et de courage militaire. Sans doute bien des erreurs, bien des crimes, se mêlèrent aux agitations incessantes de ces siècles turbulents; mais de beaux noms se lisent de siècle en siècle, inscrits dans notre histoire. Ce sont ceux de nos rois, ducs ou guerriers, à côté des noms de nos évêques et de nos moines: le saint roi Judicaël (658) 1, qui laissa une mémoire bénie et une postérité, dont un vieux chroniqueur a dit que « longtemps après sa mort resplendissait toute la nation des Bretons ; » Nominoë, qui rendit la Bretagne grande et respectée, au milieu des sanglantes divisions qui suivirent la mort de Charlemagne (851); Alain-le-Grand (889), Alain Barbe-Torte (952), et Alain Fergent (1119), les trois champions de

Cette date, comme les suivantes, est celle de la mort du personnage auquel elle se rapporte. Nous suivons la chronologie de DOM LOBINEAU, 2 Ingomar, cité par LE BAUD, apud DOM LOBINEAU, liv. 1, N° XCVII.

l'indépendance bretonne contre les Normands. Puis viennent, à partir du XIIIe siècle, les ducs de la maison de Dreux, sous lesquels la Bretagne prend une telle importance qu'elle se place au premier rang parmi les grands fiefs du royaume. Enfin, à une époque encore plus rapprochée, les trois connétables: Bertrand du Guesclin (1380), Olivier de Clisson (1407), et Arthur de Richemont (1458), présentent une suite non interrompue d'illustrations guerrières et politiques.

En même temps et parallèlement, pour ainsi parler, saint Guignolé (504), premier abbé de Landevenec; saint Gildas (570), premier abbé de Rhuys; saint Martin de Vertou (601); saint Hermeland, l'abbé d'Aindre (720); saint Hervé, le solitaire, fils du troubadour breton (568); saint Gohard, le martyr de Nantes, à l'époque de l'invasion normande (843); le Bienheureux Robert d'Arbrissel, fondateur de la célèbre abbaye de Fontevrault (1117); saint Guillaume, le grand évêque de Saint-Brieuc (1234); saint Yves, le prêtre, avocat des pauvres (1303), forment, avec bien d'autres, les anneaux de cette chaîne de saints. qui relie tous les siècles de notre histoire. La Bienheureuse Françoise était destinée par la Providence à ajouter un nouvel éclat à ce passé riche

Pierre de Dreux, arrière-petit-fils de Louis-le-Gros, roi de France, devint duc de Bretagne, en 1214, par son mariage avec Alix, fille ainée de Guy de Thouars et de Constance, duchesse de Bretagne.

de souvenirs, en faisant asseoir la sainteté sur le trône ducal, avant que la Bretagne cessât d'exister comme province indépendante. En lisant leur histoire, les Bretons trouvent une céleste patronne dans l'une de leurs dernières souveraines, et l'auréole qui brille sur le front de Françoise d'Amboise donne une sorte de consécration religieuse à nos gloires nationales et leur assure ce caractère de perpétuité qui est le propre des choses du ciel '.

Nous venons de nommer quelques-uns des saints qui forment comme la généalogie spirituelle de notre Bienheureuse Duchesse. Les vies des saints présentent tout un côté de l'histoire de l'humanité trop souvent mis en oubli. Les historiens racontent avec détail les faits qui se succèdent dans l'État ou même dans l'Église; mais il y a, dans chaque siècle, des hommes, des femmes qui travaillent, d'une manière héroïque, à la gloire de Dieu, au bien du prochain et à leur propre sanctification. Quelquefois Dieu les place sur le trône et dans les rangs les plus distingués de l'ordre social. D'autres fois, on les rencontre dans ces classes moyennes et populaires qui forment la grande masse de l'humanité; et là, ils occuperont les postes les plus variés,

Voyez les Acta sanctorum; les Vies des saints, d'Alban BUTLER, traduites par Godescard; les Vies des saints de Bretagne, par Doм LOBINEAU; les Histoires de Bretagne par Doм LOBINEAU et DOM MORICE; l'Annuaire historique et archéologique de Bretagne, par A. DE LA BORDERIE, 1861 et 1862.

depuis la cellule du solitaire jusqu'à la tente du soldat; ils seront assis au foyer domestique, pères dévoués, mères pleines de tendresse, ou bien, dans une communauté religieuse, ils renonceront aux joies de la famille pour se consacrer à la prière et au soulagement de tous ceux qui souffrent du corps ou de l'âme. Vous trouverez même des saints sous Phabit du mendiant et jusque dans les rangs les plus infimes. Quand vous les regardez de près, quand vous considérez, non les formes extérieures de la vie qui leur sont communes avec tous les hommes, mais les qualités intérieures de l'âme qui font les amis de Dieu, vous êtes émerveillé des richesses que renferme ce monde, invisible aux yeux distraits des gens qui ne vivent que des pensées de la vie présente. C'est une révélation de l'éternité, ou, si vous le voulez, de la vérité qui demeure, mise en regard du temps, c'est-à-dire, de ces apparences rapides qui fuient comme une ombre. C'est une manifestation de ce que Dieu a mis de plus pur et de plus beau dans le cœur humain, qui se dégage du milieu des passions et des préoccupations de la terre.

Françoise d'Amboise appartient à cette race bénie. Nous avons essayé de rappeler les conditions extérieures du siècle où elle a vécu. Pour achever de nous faire une idée du xv' siècle, nous ne devons pas oublier la partie intime de son histoire. Nous nommerons les saints qui furent les contemporains

« ZurückWeiter »