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ait contribué à la négation de faits incontestables: mais elle n'en est pas la cause unique.

On s'étonnera sans doute de cette contradiction injustifiée opposée par le R. P. Scheil, et cet étonnement s'accroîtra encore en pensant à la facilité extraordinaire avec laquelle le savant dominicain accueille et cherche à propager ce qu'à tort il regarde comme une découverte. Dans un document copié au Musée de Constantinople il veut reconnaître le nom de Kedorlaomer, roi d'Elam, cité dans la Genèse comme contemporain d'Abraham. I lit Kudurnukhgamar et, sans être arrêté par cette forme étrange, il proclamait urbi et orbi ce grand résultat. Un examen consciencieux de la tablette en question a démontré qu'il y a simplement le nom d'un personnage nommé Inukhsamar, et ainsi s'est effondrée cette grande découverte du R. P. Scheil qui n'a pas jugé utile de rectifier son

erreur.

Grâce à l'assistance de ses amis et maîtres, le savant dominicain avait été choisi pour accompagner M. de Morgan dans sa mission en Perse: il s'était déjà signalé par la direction des fouilles turques en Mésopotamie, et par les services que la publication des documents avait rendus aux interprètes de ces textes.

Et c'est justement grâce à l'activité spéciale du R. P. Scheil que nous pouvons récapituler ce que nous avons exposé, dans notre premier travail, sur la personnalité de Sogdien, fils d'une Babylonienne, né probablement en Sogdiane, pendant une des expéditions d'Artaxerxès dans les provinces orientales de son vaste empire. Ctésias a mentionné le nom perse presque exact de Sekigdianos, différant fort peu de la forme originale Sukudanyia.

Le même auteur grec a conservé très exactement le nom de cette Babylonienne, Alogouné, qui retrace l'original perse Alugauna, ayant la couleur de pêche; une autre femme illégitime d'Artaxerxès Ier est appelée Cosmartidéné, nom

babylonien dans lequel il faut reconnaître l'assyrien Savasmarti-iddin (le Soleil a donné une fille).

Je ne sais qui a cru reconnaître dans le nom de Sekudianus un nom phénicien Syduq-yaton, nom d'un roi de Sidon qui s'appelait selon sa fantaisie « roi des rois » et qui n'a rien à faire ici.

Comme nous l'avons dit, le nom cité par Diodore de Sicile et d'autres n'est que la traduction grecque du nom perse. Le roi phénicien vivait du temps des Achéménides ou des Séleucides. Cette identification superficielle part de cette idée enfantine qui veut tout savoir ou croit que nous sommes omniscients. Quand on trouve deux noms différents, n'ayant aucune relation entre eux, on suppose qu'ils ont été portés par le même personnage. Nous pouvons rappeler comme analogues du nom phénicien ceux de Sakun-yaton dont les Grecs ont fait Sanchoniathon (« le dieu Sakun a donné »), et Pumyaton (<< le dieu Pum a donné ») déformé en Pygmalion.

C'est à Babylone que résidaient les rois perses durant l'hiver pendant l'époque où le palais de Suse gisait en ruines, détruit par un incendie sous le règne d'Artaxerxès Ier. Le palais fut rebâti par Artaxerxès Mnemon, au début du Ive siècle avant l'ère chrétienne.

En attendant, le roi usurpateur se fit construire un palais à Babylone même ou dans le territoire appartenant à la grande cité chaldéenne. Nous lisons dans les fragments copiés par le faussaire à Babylone « dans la terre de Babylone », formule que nous retrouvons dans les documents juridiques, plus complète et plus rationnelle à Babylone : « dans tel quartier, dans la terre de Babylone »; souvent la situation est précisée par la phrase: «à Babylone, devant la porte de Zamama, d'Istar, de Bel», et par d'autres indications topographiques.

Cette omission d'un membre de phrase nécessaire démontre la non-authenticité du texte gravé sur marbre. Peu importe que l'authenticité soit « absolue ou relative »,

expression obscure et sans signification précise. Une authenticité est toujours absolue, et en cela elle est comparable à la virginité. De pareilles absurdités ne sont pas une preuve ni ne peuvent fournir une échappatoire.

Sans crainte de nous répéter, nous pouvons affirmer que Sogdien est bien Sogdien et que le comparer à un autre nom serait aussi recommandable que d'identifier Solon et Salomon, Napoléon et Nabouli, Clovis et Cléobis.

Aucune identification de Sogdien n'a été proposée par le R. P. Scheil, et il serait inique de lui reprocher ce silence prudent. Il se tient dans les généralités. Pour lui, le roi Sogdien est un « roi achéménide », et le lecteur serait bien indiscret s'il ne se contentait pas de cette très juste indication. Nous avons déjà remarqué que selon l'indécise fixation, le roi Hammurabi vivait « vers » 2000 avant l'ère chrétienne; le savant dominicain n'a pas le temps de faire des calculs, et on doit se contenter de la lettre mystérieuse X quand il aurait été si facile de parler de la soixantaine.

Nous reconnaissons volontiers que le P. Scheil a contribué à l'extension de nos connaissances par ses fouilles et par la publication des textes inédits, et qu'il a ainsi contribué aux découverts de ses prédécesseurs et maîtres. Nous nous garderons bien de ne pas reconnaître ses mérites et nous n'imiterons pas notre disciple dans la discrétion. qu'il a observée à l'égard de ses devanciers. Nous n'oublions pas que le droit qu'on veut enlever aux autres, on le leur donne contre soi-même. Quand on veut diminuer la valeur de quelqu'un, on amoindrit la sienne propre dans la proportion même dont on se sert contre autrui. C'est l'application morale de la loi d'Archimède que le poids de l'objet diminue autant que pèse le volume d'eau déplacé par l'immersion.

Le Gérant, A. PICARD.

MACON, PROTAT FRÈRES, IMPRIMEURS

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