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tement conservées, je crois devoir en soumettre une traduction française à nos confrères, en la faisant suivre de quelques observations.

« Dioclès, fils de Philinos, a proposé ce qui suit :

<«< Attendu que les Barbares ayant fait une expédition contre les Grecs et contre le temple de Delphes, on nous annonce que les agresseurs du temple ont été châtiés par le dieu et par les hommes venus au secours du temple lors de l'incursion des Barbares; que le temple a été sauvé et décoré des dépouilles des ennemis; que, des autres agresseurs, la plupart ont succombé dans les combats engagés contre les Grecs; afin qu'il soit apparent que le peuple de Cos partage la joie causée aux Grecs par la victoire et qu'il rend grâce au dieu [Apollon] de son apparition dans les périls que courait le temple et pour le salut des Grecs; à la bonne fortune! Plaise au peuple que l'archithéore et les théores élus, sitôt leur arrivée à Delphes, sacrifient à Apollon Pythien un boeuf aux cornes dorées en reconnaissance du salut des Grecs; qu'ils lui adressent des prières pour la félicité du peuple des Coens et la concorde de leur gouvernement démocratique, et que ceux des Grecs qui sont venus au secours du temple jouissent d'un bonheur perpétuel; que les prostatai offrent également un sacrifice à Apollon Pythien, à Zeus Sôter et à Niké; qu'ils sacrifient à chacun de ces dieux une victime adulte; que le jour où ils offriront ce sacrifice soit un jour férié; que ce jour-là les citoyens et les métèques et les autres personnes résidant à Cos portent des couronnes; que le héraut sacré proclame « que le peuple sanctifie ce jour en raison du salut et de la victoire des Grecs; que tous ceux qui auront porté des couronnes soient heureux et prospères»; que le sacrifice ait lieu au mois de Panamos; que les trésoriers donnent quatre cents drachmes pour le sacrifice à Delphes et cent soixante pour le sacrifice à Cos; que les prostatai veillent à ce que l'argent soit envoyé aux théores et que les sacrifices aient

bien lieu à Cos; que les polètes mettent en adjudication la gravure du décret sur une stèle de marbre et qu'on l'expose dans le temple d'Asklepios.

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La retraite des Gaulois, après l'attaque du sanctuaire de Delphes, se place vers la fin de l'an 279 av. J.-C. Les Coens apprirent les succès des Grecs au printemps de 278. Les jeux pythiens furent célébrés à Delphes, après la retraite des Gaulois, au mois Boucatios de 278, c'est-à-dire en août, ce qui répond à peu près au mois de Panamos, fixé par les Coens comme date des sacrifices à offrir. Ainsi le décret a dû être rendu entre les mois d'avril et de juillet 278.

Un des détails les plus intéressants de ce texte est la mention de l'épiphanie d'Apollon, nozveíz, apparu lui-même pour protéger son sanctuaire et en repousser les agresseurs. Voilà un fait miraculeux qui se trouve attesté par un document officiel moins d'un an après, à la différence de tant d'autres que rapportent des historiens postérieurs et qui, par ce motif, sont suspects à la critique moderne. Ne faut-il pas conclure de là que le plus sûr critérium de la vérité des faits est la vraisemblance, et non la date ou la qualité des textes qui nous en font part?

L'histoire de la campagne des Gaulois contre Delphes nous est connue par les récits de Justin et de Pausanias, où le merveilleux joue un grand rôle, et par un extrait du livre XXII de Diodore, où il n'est pas question d'une intervention divine. Suivant ces trois textes, les Gaulois ne pillèrent pas le temple de Delphes, mais furent mis en déroute au moment de commettre ce sacrilège. Quelques mots de Polybe peuvent être interprétés dans le même sens; enfin, un fragment de décret attique, relatif à l'institution des Zweipiz de Delphes, ne mentionne également que l'échec subi par les Barbares. D'autre part, dans Tite Live, Manlius rappelle à ses soldats que les Gaulois ont pillé Delphes; Strabon semble admettre que le pillage a eu lieu; Appien et Diodore lui-même, dans un autre passage, en font mention,

1904.

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bien qu'incidemment, comme d'un fait acquis à l'histoire; un médaillon en terre cuite de fabrique italienne, actuellement au Musée de Saint-Germain et publié en 1873 par François Lenormant, représente un guerrier gaulois pénétrant dans le temple de Delphes, posant le pied sur la tête de la Pythie et sur le point de renverser le trépied sacré1.

Il y a trente-neuf ans, dans son mémoire bien connu sur les ruines et l'histoire de Delphes, M. Foucart concluait, de ces contradictions entre les textes, que la tradition recueillie par Trogue Pompée (c'est-à-dire conservée par Justin), par Pausanias et par Diodore était apocryphe: « Sans rien affirmer à ce sujet, écrivait notre confrère, il me paraît prouvé que les Gaulois ne furent pas vaincus et encore moins détruits devant Delphes, et que le sanctuaire fut racheté du pillage par les habitants. » Quant à l'intervention des dieux et des héros, M. Foucart semblait disposé à y voir une légende de formation assez tardive. Suivant lui, le récit de Justin et de Pausanias « n'est qu'un tissu d'invraisemblances et de contradictions ». « Que penser, ajoutait-il, de ces phénomènes merveilleux conjurés et réunis à point pour la destruction des Gaulois, exactement comme pour celle des Perses? Comment admettre qu'ils aient été saisis de terreur à la prétendue apparition de dieux de la Grèce auxquels ils ne croyaient pas?? »

Les fouilles de l'Ecole française à Delphes nous ont ellesmêmes rendu le texte de deux hymnes à Apollon, datant des environs de l'an 100 avant l'ère chrétienne, dont l'un mentionne clairement l'intervention du dieu pour protéger le sanctuaire et la déroute des Gaulois au milieu d'une tourmente de neige : « Tu veillais, ô roi, près du saint ombilic de la terre, quand le guerrier barbare, profanant le siège de ton oracle par le pillage, périt dans une tourmente

1. Cf. Revue archéologique, 1889, I, p. 198. 2. Archives des Missions, 1865, p. 208.

de neige1. » Ce texte poétique ne dit pas si les Barbares ont effectivement pillé, ou s'ils en avaient seulement l'intention. M. Henri Weil, éditeur et traducteur de l'hymne, admet qu'« il y avait peut-être eu un commencement de pillage », et ajoute : « Tout poète qu'il est, l'auteur de cet hymne ne sait encore rien de la fantasmagorie du bon Pausanias. » M. Weil admettait donc, comme M. Foucart, que la tradition suivie par Pausanias ne s'était formée que tardivement.

L'inscription de Cos ne prouve assurément pas que le dieu de Delphes, seul ou avec ses sœurs Artémis et Athéna, ait apparu aux Gaulois pour les terrifier; elle ne prouve pas non plus que les Grecs leur aient infligé une sanglante défaite; mais elle établit sans conteste que les Grecs ont cru cela moins d'un an après les événements et que, dans le rapport auquel fait allusion le préambule, il n'était question ni du pillage du temple par les Barbares, ni de l'achat de leur retraite à prix d'argent.

S'il y avait eu commencement de pillage, on peut se demander pourquoi les prêtres de Delphes n'en auraient pas fait l'aveu; n'étaient-ils pas en droit d'attendre de la piété des cités grecques de riches offrandes pour compenser les pertes subies? Or, non seulement ils ne sollicitent rien, mais ils annoncent que le temple a été sauvé et qu'il est décoré des dépouilles des ennemis.

Peut-être la tradition du pillage de Delphes, à laquelle plusieurs textes antiques font d'irrécusables allusions, doitelle s'expliquer par la mise à sac de petits sanctuaires voisins du grand temple, ou comme un écho prolongé des bruits sinistres qui coururent à travers tout le monde hellénique pendant les premiers mois de l'an 278.

Quant à la légende de l'apparition des dieux et des héros, elle a pu d'autant plus aisément prendre naissance que

1. Bulletin de correspondance hellénique, 1894, p. 359.

l'attaque de Delphes par les Gaulois eut lieu pendant une violente tempête d'hiver. Les prêtres étaient dans leur rôle en invoquant d'abord, puis en certifiant une intervention divine, et la Grèce tout entière dut y ajouter foi d'autant plus aisément qu'elle l'avait sollicitée avec plus de ferveur. Cette fois encore, suivant un mot célèbre, « l'attente produisit son objet ».

NOTE

INSCRIPTION GRECQUE TROUVÉE A COS.

DE M. HERZOG, PROFESSEUR A TUBINGUE,
LUE PAR M. S. REINACH

DANS LA SÉANCE DU 18 MARS 1904.

Aesculapi fanum Coum, a Rayeto cogitatione depictum, a Patone divinatione praesensum, post hos viros de Meropis insula unice meritos iuvante Bona Fortuna a me detectum praeter templorum reliquias, curae aegrorum vestigia, signorum fragmenta, thesaurum titulorum ad illustrandam et Coam et universam historiam utilissimorum in lucem edidit. Inter hos nescio an principem locum teneat decretum Coorum congratulantium victoriam divina ope reportatam de Gallis sacrum Delphicum aggressis. Quod cum Gallis eisdem sacri Delphici sospitatoribus merito dono offerendum ducam, ad Academiae viros doctos graecorum studiorum auctores mihi liceat mittere.

Est tabula marmoris albi, supra olim cymatio simplici ornata, infra ad immittendum in basim accommodata, alta 1,62, longa supra 0,48, infra 0,54, crassa supra 0,075, infra 0,125. Decretum locum occupat 1,00 m. Litterae altae 0,014 m. Cum effoderetur (die 25 m. Sept. a. 1903), non iam in situ erat, sed in solo aedium inferiore aetate orien

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