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COMPTES RENDUS DES SÉANCES

DE

L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS

ET BELLES-LETTRES

PENDANT L'ANNÉE 1904

PRÉSIDENCE DE M. L. HAVET

SÉANCE DU 6 MAI

M. le Ministre de l'instruction publique et des beaux-arts informe le Président de l'Institut que les élections pour le renouvellement du Conseil supérieur de l'instruction publique ont été fixées au jeudi 26 mai, et il le prie de vouloir bien inviter l'Institut à procéder à cette date, en assemblée générale, à l'élection de cinq membres, qui seront choisis dans chacune des. cinq classes.

L'Académie procédera, dans la prochaine séance, à la désignation de son représentant.

M. SENART annonce à l'Académie la mort tragique de M. Odend'hal, survenue au cours de l'exploration archéologique du Laos:

« Un coup bien imprévu et bien terrible vient de frapper l'École française d'Extrême-Orient et le petit groupe des chercheurs dévoués à l'exploration de l'Indo-Chine. L'Académie tout

1904.

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entière voudra s'associer à ce deuil et à l'hommage si largement dû à l'homme distingué, entreprenant, laborieux, qui vient de tomber victime de son dévouement à la science.

<< M. Odend'hal avait été en janvier dernier, sous les auspices de l'École d'Hanoï, chargé par le gouvernement de l'Indo-Chine de procéder à l'inventaire archéologique et littéraire et à l'exploration ethnographique du Laos. Il s'était mis en route au commencement de février. Une dépêche dont il est malheureusement difficile de mettre en doute l'exactitude, nous a appris ces jours. derniers qu'il a été massacré avec plusieurs de ses compagnons indigènes. Les détails manquent mais une lettre particulière, datée du 22 mars et arrivée depuis la nouvelle de sa mort, nous le montre parvenu à Cheo Reo (Palei Chu), dans le Bas-Laos, et se débattant déjà contre le mauvais vouloir des populations. très sauvages, très dangereuses de ces régions.

<< Parti de Phanrang, son plan était de remonter vers le Nord, le long de la chaîne annamite du Darlac à Attopeu, pour de là gagner Sarravane, puis le Mékhong et redescendre le fleuve. Une seconde campagne devait le mener au Haut-Laos, de Hué à Luang-Prabang, par Quang-tri, Savannakhet, etc. Il s'agissait de faire pour ces régions, en partie inexplorées, en tout cas si peu connues et si inhospitalières, le travail fait pour le Cambodge par le commandant de Lajonquière : le relevé précis des monuments, et d'y ajouter l'étude des populations, des dialectes, de fixer notamment bien des points qui intéressent l'histoire de l'ancien Campâ.

<< Personne n'était mieux préparé pour mener à bien cette tâche difficile. Né à Brest, le 24 novembre 1867, d'une famille d'origine irlandaise, arrivé en Indo-Chine vers 1890, comme sous-lieutenant, presque à sa sortie de Saint-Cyr, M. Odend'hal avait, dans la colonie, été détaché successivement en plusieurs emplois où il avait, grâce à une curiosité d'esprit et une énergie remarquables, acquis du pays une connaissance étendue. Inspecteur de la garde civile, il avait, dès 1894, par un rapport relatif à la recherche d'une voie de pénétration du littoral vers la rivière d'Attopeu », témoigné de sa vive intelligence et de ses rares aptitudes. Ce n'est pas le moment d'entrer dans des détails qui cependant lui feraient grand honneur: je me contente

de rappeler qu'arrivé au grade de capitaine, il avait quitté l'armée pour entrer dans les cadres de l'administration coloniale et avait en dernier lieu été nommé résident à Phanrang, d'où il est parti pour ce voyage d'où il ne devait pas revenir.

<< De plus en plus nettement sa vocation scientifique s'était manifestée. Les pensionnaires de l'École, MM. Cabaton et Parmentier, n'ont pas oublié le concours précieux qu'il avait donné à leurs missions. Dans ce rapprochement avec l'École, il avait de mieux en mieux apprécié la nécessité des études méthodiques et savantes qu'il s'était efforcé d'entreprendre dans des conditions très méritoires. L'an dernier, nous l'avons vu à Paris employer un congé bien gagné à se refaire élève à l'École des Hautes-Études, à poursuivre avec un entrain et un succès vraiment frappants l'étude du sanscrit; il y avait fait les plus sérieux progrès. Connaissant bien le pays, parlant plusieurs de ses langues, il était armé supérieurement pour l'œuvre qui aurait grandement honoré son nom. Il était soutenu à la fois par le zèle de la recherche et par une autre qualité qui n'est pas moins précieuse : une sympathie très sincère, très active pour les indigènes, qui semblait le destiner moins que personne à tomber victime de leur barbarie.

<< Sa dernière lettre témoigne que les débuts de sa mission nouvelle avaient été fructueux. Il avait relevé des ruines des inscriptions nouvelles, conquis des restes de sculpture intéressants, et certaines indications nous le montrent près à aborder utilement des problèmes archéologiques d'un caractère général.

<< Tant de belles espérances sont détruites par une catastrophe lamentable, à laquelle sa connaissance intime du pays semblait lui donner plus qu'à d'autres les meilleures chances d'échapper. C'est avec une émotion profonde que nous saluons la mémoire de ce vaillant, à l'esprit si actif, au caractère si estimable. Odend'hal était, dans la pensée de tous ceux qui le connaissaient, destiné à prendre une des premières places dans la phalange des explorateurs dont notre pays s'honore en Indo-Chine. Sa perte laisse un vide qui ne sera pas facile à combler. Espérons que son noble dévouement restera comme un exemple fécond. A coup sûr, sa mémoire demeurera honorée et chère à tous ceux qui l'ont vu à l'œuvre. Puisse cette pensée être une consolation pour la famille que désole sa fin si cruelle et si prématurée! »>

Le PRÉSIDENT exprime les regrets de l'Académie. Mention en sera faite au procès-verbal.

M. HAMY, au nom de la Commission du prix Loubat, annonce que la Commission a partagé ce prix, de la valeur de trois mille francs, entre M. le baron Marc du Villiers du Terrage, pour son livre intitulé: Les dernières années de la Louisiane française, et M. Georges Musset, pour la partie américaine de son édition d'Alphonse le Saintongeois.

Le R. P. Séjourné, appelé à lire un rapport du R. P. Lagrange, commence par adresser à l'Académie les remerciements du savant pour le titre de correspondant que l'Académie lui a déféré, puis il donne lecture du rapport annoncé par M. de Vogüé1.

M. DIEULAFOY achève la lecture des premiers chapitres d'une étude sur la sculpture espagnole et notamment sur la statuaire polychrome. Cette étude très complète et très nouvelle qu'il poursuit depuis bien des années commence au XIIe siècle et se continue jusqu'à la fin du xvi. Elle arrive bien à propos aujourd'hui que les artistes s'avancent à tâtons dans une voie que les Grecs avaient ouverte, mais que l'on croyait fermée depuis la Renaissance.

Il n'en est pas ainsi, et M. Dieulafoy qui a fouillé toutes les églises, toutes les sacristies, tous les couvents de l'Espagne en a rapporté une ample et admirable moisson de documents la plupart inédits.

Il semble que c'est à Léon, dans la vieille cathédrale et au Musée municipal, que l'on trouve les monuments polychromes les plus anciens. Au début du xe siècle, la sculpture procède des écoles méridionales de la France et des écoles clunisiennes. D'ailleurs, l'influence artistique de la France reste prépondérante jusqu'au milieu du xve siècle environ. M. Dieulafoy le montre en mettant en parallèle les sculptures exécutées durant cette période en deçà comme au delà des Pyrénées et en décrivant le premier quelques figures venues de France et retrouvées dans

1. Voir ci-après.

les sanctuaires espagnols. De ce nombre est une vierge d'ivoire exquise portée de Paris à Pampelune en 1349 et le merveilleux chef émaillé de Saint-Valère envoyé d'Avignon à la Seo de Saragosse en 1397. Puis en s'appuyant sur les monuments déjà décrits, il fait l'histoire du retable, cette œuvre de prédilection des artistes espagnols, tandis que les contrats et les comptes conservés dans les archives des églises, ainsi que les règlements édictés par les souverains et le plaidoyer célèbre de Pacheco dans un procès célèbre contre Montañes, lui fournissent des renseignements précis et très intéressants sur les arts mis à contribution par la statuaire polychrome.

Vers 1450, l'influence de la Bourgogne, des Flandres et même de l'Allemagne se substitue à celle de la France : elle atteint son apogée à l'époque où la fille des rois catholiques, Jeanne la Folle, épouse Philippe le Beau. Mais si elle est décisive, elle dure peu. L'Espagne victorieuse des Maures, riche, puissante, entre en contact permanent avec Florence, Gênes, Rome et se range au style caractérisé par la Renaissance italienne tout en restant fidèle à la statuaire polychrome. De grands sculpteurs comme Berruguete, Philippe de Vigarny dans le nord et Pedro Millan dans le sud vont la conduire dès le début du xvre siècle à un état voisin de la perfection qui ne sera pourtant atteinte que par les contemporains et les émules des Velasquez, des Ribera et des Murillo.

COMMUNICATION

RAPPORT SUR UNE EXPLORATION ARCHÉOLOGIQUE AU NÉGEB, PAR LE R. P. LAGRANGE,

CORRESPONDANT DE L'ACADÉMIE.

Le R. P. Séjourné, supérieur de l'École Biblique de Saint-Étienne à Jérusalem, a communiqué de la part du P. Lagrange, correspondant de l'Académie, le rapport sui

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