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des théories pour en venir à tout partager. Les origines inavouables de la propriété, la Bible les indique clairement c'est le vol, c'est l'accaparement détourné, comme celui que commet un roi ou un homme puissant sur un simple particulier; c'est l'usure entre membres d'une même cité. Les origines justes, c'est la donation, c'est le testament, c'est l'échange; c'est l'acquisition par libre contrat; c'est la prescription 2, c'est la saisie à la suite d'un prêt sur gage (pourvu que l'objet livré n'ait pas été déclaré insaisissable par la loi de Moïse); c'est, enfin et par-dessus tout, le travail et l'économie.

3

La pauvreté 3 vient de la paresse, dit Salomon, qui donne aussi l'orgueil et les habitudes dépensières comme une cause permanente de ruine. Non seulement le paresseux ne sait rien tirer de son champ et ne conserve même pas le nécessaire, mais il est encore « dévoré de désirs stériles». Autant, d'autre part, la richesse injuste et avare est maudite par l'Écriture, autant la richesse équitable et généreuse y est louée. « La richesse est bonne à celui dont le cœur est pur, et la pauvreté est mauvaise au méchant qui murmure 5. »

Donc celui qui possède un bien légitimement

1. La pratique du testament est générale dans la Bible. 2. Deutér., xv, 2.

3. Prov., XII.

4. Ibid., XIII.

5. Ibid.

doit en faire bon usage; mais il doit faire en sorte, de le conserver. S'il le tient de ses pères, il doit défendre son héritage, c'est là une partie du respect dû aux ancêtres, c'est là le moyen de maintenir pour les générations futures les traditions du foyer. Si c'est lui-même qui a acquis sa fortune, qu'il s'en serve et qu'il la garde encore pour garder sa propre liberté. Qu'il donne ou qu'il prête au pauvre; mais qu'il ne prête pas « à un homme plus puissant que lui »; qu'il ne réponde pas « au delà de ses forces ».

Qu'il ne se dépouille même pas pour les siens. <«< Ne donne pas pouvoir sur toi durant ta vie à ton fils, à ta femme, à ton frère ou à ton ami; ne donne pas à un autre tes biens, de peur que tu ne te repentes et que tu ne lui en demandes avec prière.

<<< Tant que tu vis et que tu respires, ne t'assujettis à personne ; car il vaut mieux que tes enfants te prient que d'attendre rien des mains de tes enfants.

<< Conserve-toi l'autorité dans toutes tes œuvres 2. >>

Résumons l'esprit de tous ces textes. Le respect de l'autorité divine est bien à la base du droit israélite, mais les lois édictées par cette autorité garantissent à chacun ce qui lui est dû :

1. Ecclés., VIII. 2. Ibid., XXXIII.

ils laissent aussi à chacun le droit de le conserver, de l'agrandir et de le défendre.

Pour la défense de ces droits, l'Écriture pose quelques règles immuables, éternelles, auxquelles Dieu lui-même est assujetti ou plutôt fidèle. Ni le peuple tout entier, ni son juge, ni son roi, ne sont maîtres de tout subordonner à l'intérêt public. Qu'il s'agisse même de faire cesser une calamité nationale, on ne doit s'y appliquer qu'en respectant le droit de l'individu.

La propriété porte sur un fond que l'homme n'a pas créé; c'est pourquoi Dieu et l'interprète de sa justice ont conservé le droit de limiter cette propriété par des servitudes, par la dîme (forme primitive de l'impôt), par l'obligation de l'aumône, par l'organisation de services mutuels, par la recherche des moyens propres à sauvegarder la solidarité durable des membres d'une même famille et d'une même nation. Mais la part de l'individu restait à faire : elle a été faite et réglée, d'après ce principe qu'aucun autre n'a pu jusqu'à présent remplacer, le principe du respect dû au travail et au droit qu'a tout travailleur de disposer librement de ce qu'il a luimême produit et conservé.

L'Ancien Testament ne renferme point d'autre socialisme que celui-là.

II

Le Nouveau Testament a-t-il ajouté, a-t-il retranché quelque chose à ces maximes?

L'Évangile donne des règles de vie morale, et les règles qu'il a édictées ne sont liées, comme disait très bien M. Schérer, à aucune condition de temps ou de nationalité, nous pouvons ajouter : à aucune condition de législation civile ou de régime social.

Il distingue cependant dans la loi de Moïse deux parties : l'une repose sur l'équité naturelle ; et celle-là, il la consacre brièvement, mais formellement. L'autre est plus proprement « de la loi », c'est-à-dire de la législation positive; et cette dernière, il l'accepte, mais comme il accepterait la législation romaine ou toute autre, pourvu qu'elle ne rendît pas impossible l'accomplissement des devoirs nouveaux qu'il est venú recommander au monde.

Il est des points très importants où ces deux lois se rencontrent dans une concordance absolue.

Dans sa première Épître aux Corinthiens, saint Paul reprend en quelques lignes cette formule qu'on a lue tant de fois dans l'Ancien Testament : <«< Qui plante une vigne et ne mange pas de son fruit? Qui paît un troupeau et ne mange pas du lait de ce troupeau? N'est-ce que selon l'homme

que je dis ces choses? La loi elle-même ne le dit-elle pas? >>

« Nous aussi, nous le disons, pourrait observer ici un socialiste; nous prétendons même assurer mieux que les autres cette règle sacrée selon l'homme et selon la loi, que chacun doit participer équitablement aux fruits du travail humain ou national. Nous prétendons que la propriété individuelle, telle qu'elle est organisée aujourd'hui, n'assure point cette participation. » Soit! Il n'en est pas moins vrai que l'Évangile reconnaît le droit de propriété individuelle sur le sol et avec toutes ses conséquences naturelles : le droit de louer sa propriété moyennant redevance, et le droit de la transmettre à son fils. On n'a qu'à relire à ce sujet la parabole du père de famille et des vignerons.

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Il semble d'abord que le texte sacré ait voulu marquer soigneusement tout ce que le propriétaire avait fait de lui-même pour transformer en un bien productif la portion du sol qu'il détenait :

<«< Un homme planta une vigne; il l'entoura d'une haie, y creusa un pressoir, y bâtit une tour; il la loua ensuite à des vignerons et partit pour un voyage1. » On sait la suite et le dénouement. « Les vignerons se dirent l'un à l'autre : Celui-ci est l'héritier; venez, « tuons-le, et nôtre

1. S. Marc, XII, 1-9; cf. Matth., xx1, 33-41.

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