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leurs ateliers et de donner du travail à domicile

(on craignait sans doute que, chez lui, l'ouvrier ardent ne travaillât plus que les autres!); 2° de faire exécuter, en vue de la production complète des objets d'une industrie, des travaux partiels relevant d'une autre industrie et d'une corporation autorisée. On demandait encore que les fabricants de chaussures en gros ne pussent travailler que pour l'exportation, qu'il fût interdit de fabriquer des chaussures à domicile, que les magasins de confections ne pussent plus accepter de commandes sur mesure; que nulle école professionnelle ne fût admise à remplacer l'apprentissage, que nul particulier ne pût fonder d'école commerciale, à côté des écoles dirigées par l'État, les provinces et les communes. Voilà donc à quoi tant de personnes bien intentionnés veulent employer l'Église et l'État réunis : à empêcher les gens de s'instruire comme ils veulent, à chasser les travailleurs de leur foyer pour les contraindre à ne plus opérer que dans l'usine « modèle », à faire enfin hausser le prix de toutes choses. Il ne faut pas s'étonner si les récentes prières adressées au gouvernement prussien pour introduire dans l'Allemagne du Nord le régime corporatif de l'Allemagne du Sud aient trouvé si peu d'écho 1.

1. Voir l'article de M. Maurice Block, dans l'Économiste français du 9 janvier 1891.

Π

VI

Il y aurait lieu de s'étendre davantage sur ces diverses propagandes, si l'école française correspondante ne nous fournissait plus d'une occasion de revenir aux plus importants de ces problèmes.

Cette école, dont nous ne pouvons nous dispenser de parler, est bien connue. On l'appelle très souvent l'école de M. de Mun, et certes, c'est là un beau nom. Rappelons brièvement (en nous arrêtant le moins possible aux personnes) qu'il y a là tout à la fois une œuvre et une école. C'est l'œuvre qui a commencé, l'œuvre des cercles ouvriers, fondée, comme chacun sait, après la guerre, par quelques officiers d'élite attristés d'avoir eu à combattre en 1871 les égarements de la population parisienne. A cette œuvre des cercles s'adjoignit la propagande active de M. Harmel. Puis ces militaires et ces industriels voulurent s'éclairer sur plus d'une question délicate; ils s'agrégèrent des théologiens, des publicistes; ils devinrent théologiens et publicistes eux-mêmes et instituèrent l'intéressante revue appelée l'Association catholique. Aujourd'hui l'Euvre et la Revue se séparent sans aucune hostilité, mais pour retrouver, chacune de leur côté (nous diton), plus de liberté.

De l'œuvre, nous dirons peu de chose, non qu'elle ne mérite qu'on en parle, qu'on en parle longuement, avec sympathie; mais, dès qu'il s'agit d'œuvres privées, d'associations fondées librement par un appel aux bonnes volontés, il n'y a pas ombre de socialisme. Dans une lettre à M. Hervé-Bazin ', M. Harmel, le pieux et vaillant industriel du Val-des-Bois, invite tous les gens de cœur à restaurer, là où ils le peuvent, l'amour de Dieu, l'amour de la famille, l'amour du métier. «< Hâtons-nous, dit-il, de profiter de la loi de 1884 pour former immédiatement et partout des groupements professionnels. Là où nous unirons, par des relations affectueuses et suivies, des patrons du même métier, un ou deux patrons avec quelques ouvriers, nous aurons posé une pierre d'attente pour reconstruire l'édifice social. N'attendons pas le nombre, si nous ne pouvons pas l'atteindre tout d'abord. Commençons la pratique nous enseignera plus que toutes les études. »

Quand M. Harmel et ses amis parlent ainsi, on ne peut qu'applaudir à leurs efforts et souhaiter qu'ils réussissent. L'école enseignante et militante qui s'est groupée pendant quinze ans autour de l'œuvre veut être discutée de beaucoup plus près. Elle a une histoire assez remplie et dont les diverses périodes ne se ressemblent

1. Association catholique de mars 1889.

pas toutes entre elles. D'abord elle a fait appel, avec succès, à des hommes que rapprochaient moins leurs théories économiques que leur esprit religieux, leurs tendances politiques et leur désir également sincère d'une réforme générale dans nos mœurs. Bientôt s'accentuèrent les divergences. La Revue socialiste les remarquait dans son curieux article de 1885. « M. de Mun et les directeurs de l'Euvre des cercles catholiques d'ouvriers, écrivait-elle, cèdent trop, cela est visible, à l'influence romaine et aux purs rétrogrades, comme Claudio Jannet, Urbain Guérin, Hervé-Bazin, le Jésuite Pascal et consorts, et pas assez aux écrivains de valeur, comme Læsewitz, de Ségur-Lamoignon, La Tour du Pin-Chambly, Geoffroy de Grandmaison et quelques autres qui, bien que gênés dans leurs entournures, font de l'Association catholique un recueil si intéressant. >> <«< Si intéressant! » le mot pourrait être dit par tout le monde, mais on devine le sens qu'il a dans une revue telle que celle de Benoît Malon.

Le second groupe que la Revue socialiste signale ainsi paraissait bien près, en 1886, d'avoir entraîné dans ses idées toute la rédaction de l'Association catholique, et la plupart

1. Écrit en 1885. Je crains fort que, depuis, M. Benedikt n'ait été amené, à part lui, à décerner au P. de Pascal (missionnaire apostolique et non Jésuite) des éloges plus compromettants et plus justement compromettants.

des hommes du premier groupe s'étaient retirés. Parmi ceux qui restèrent, plusieurs allèrent si loin, qu'ils firent, à leur tour, reculer la majorité des plus fidèles, mais cette majorité n'en garda pas moins des allures qui la rendirent de plus en plus suspecte à des hommes tels que le P. Forbes, dans le clergé régulier, et surtout Mgr Freppel, dans l'épiscopat 1. L'Encyclique sur la condition des ouvriers et les dernières manifestations de la pensée de Léon XIII l'ont amenée à « s'expliquer ». Ce mot, en matière de polémique, a généralement un sens assez clair il désigne presque toujours un effort plus ou moins heureux pour rétracter certaines propositions et en maintenir d'autres qu'on adoucit, en vue d'un accord moins facile que nécessaire. Mais toute cette histoire vaut la peine d'être reprise et suivie plus en détail.

Pour être plus sûrs d'être pleinement équitables envers des hommes de grand cœur et de grand talent, voyons d'abord, et de concert avec eux, comment ils entendent se distinguer des socialistes proprement dits; il semble qu'on ne puisse mieux faire que de leur laisser la parole. « On n'hésite pas, lisons-nous dans le livre du Régime du travail, à nous assimiler aux socia

1. Il est juste d'ajouter Mgr Turinaz, évêque de Nancy (dont le mandement de 1891 mérite d'être lu), le P. Ludovic de Besse, M. le professeur Rambaud, de l'Université catholique de Lyon, et beaucoup d'autres.

2. P. 177; art. de M. de Roquefeuil. Les mots souli

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