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LIBRAIRIE ACADÈMIQUE

DIDIER ET CIE, LIBRAIRES-ÉDITEURS

33, QUAI DES AUGUSTINS

1870

Tous droits réservés.

269.155-8. Fid-

119.420-B

FID.C

LES

MORALISTES FRANÇAIS

DU SEIZIÈME SIÈCLE

PREMIÈRE PARTIE

LES IDÉES MORALES AU SEIZIÈME SIÈCLE AVANT MONTAIGNE

INTRODUCTION

L'étude des théories morales qui ont eu cours dans le passé nous offre un double intérêt. La science du bien et du mal est si importante pour l'humanité, surtout dans un temps où la règle religieuse manque à un grand nombre, que nous ne saurions examiner avec trop de soin les opinions adoptées par des générations entières ou enseignées par les esprits les plus distingués qui leur aient appartenu, pour en dégager ce qu'elles contiennent de vérité, et y trouver des principes ou des raisons d'en avoir. D'un autre côté, l'histoire ne se

rait pas complète, si l'on ne cherchait quelles ont été, dans les temps qui ne sont plus, les croyances de ceux qui ne faisaient qu'agir, ou les systèmes de ceux dont la profession était de penser: on juge un siècle à sa morale, comme une race à la bonté de son sang.

Le moyen âge venait de finir : « Il n'avait eu, en morale, nulle originalité, dit M. Janet: Aristote uni à saint Augustin, voilà la scholastique. Discuter la morale de saint Thomas, c'est discuter la morale d'Aristote. La seule chose qui appartienne à saint Thomas, c'est l'entreprise de cette alliance entre le péripatétisme et le mysticisme. » L'alliance avait produit un double résultat : en premier lieu, la morale était devenue exclusivement chrétienne, car l'Église avait absorbé Aristote dans la théologie; combien de fois ne s'est-on pas plaint ou moqué, jusqu'au dix-septième siècle, de ce que les adversaires du philosophe païen étaient accusés d'hérésie! En second lieu, la morale était imposée par l'autorité; il ne paraissait ni utile ni sage de soumettre au libre examen de la raison individuelle l'enseignement de l'Église, dont le péripatétisme faisait en quelque sorte partie.

Le seizième siècle ne produisit ni une grande école, ni même un grand philosophe, qui créât un système de morale 2. Il ne faut pas faire dire aux auteurs ce qu'ils n'ont pas pensé, abuser de quelques lignes de leur écriture pour former sous leur nom une

Histoire de la philosophie morale et politique, t. Ier, p. 420. 2 Cf. M. Janet, ibid., t. II, p. 3.

doctrine dont ils ont à peine fourni des éléments restés épars. Les théologiens ne se sont occupés que de théologie; les philosophes ont laissé de côté la science pratique des devoirs pour imaginer ou ressusciter des doctrines métaphysiques; il n'y a eu d'autre philosophie que la philosophie naturelle, qui cherchait à deviner l'origine des choses, la cause du monde, la nature de Dieu, et dont on a pu comparer les hypothèses à celles de Démocrite et de Parménide. Ramus1, à qui répugnait la stérilité d'un pareil travail, a voulu rendre à la science qu'il enseignait son utilité perdue, mais son principal dessein a été d'y introduire une logique nouvelle. Pendant les deux premiers tiers du siècle, nous n'avons pas eu un moraliste. Si l'on veut connaître les théories qui ont continué à dominer, ou les idées qui ont commencé à se former, on est réduit à les chercher dans les auteurs les plus éloignés peutêtre de la philosophie. Un écrivain étranger a touché ou étudié la morale comme toutes les parties des connaissances humaines où s'était portée l'activité des anciens et où se portait la curiosité des modernes, c'est Erasme; mais il en a traité sans prétention systématique, en fin observateur et en prudent conseiller plutôt qu'en maître. A la fin du siècle seulement, les moralistes apparaissent, à leur tête Montaigne. On ne trouve pas chez eux, excepté peut-être chez le dernier par ordre de date comme par ordre de mérite, Charron, une véritable

M. Waddington, de Petri Rami vita, scriptis, philosophia, 1848, p. 102.

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