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XXIII.

De quelle manière Dieu veut être glorifié.

Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté. S. Luc. 11. 14.

EN ne cherchant que la gloire de Dieu, notre paix s'y trouvera. Mais la gloire de Dieu ne se trouve point dans toutes les pensées et les actions des hommes. Dieu ne veut être glorifié que par l'anéantissement entier de la nature et par l'abandon à son esprit. Il ne faut point vouloir sa gloire plus qu'il ne la veut lui-même. Prêtons-nous seulement, comme des instrumens morts, à la conduite de sa providence. Réprimons tout empressement, tout mou vẹment naturel, toute inquiétude déguisée sous le nom de zèle. Paix dans la bonne volonté. N'avoir plus ni désir ni crainte, et se laisser dans la main de Dieu, c'est là avoir une bonne volonté, conforme à la sienne. Celui qui est ainsi est immobile comme la montagne de Sion; il ne sauroit être ébranlé, puisqu'il ne veut que Dieu, et que Dieu fait tout.

XXIV.

De la douceur et humilité de cœur(*).

Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur ; et vous trouverez le repos de vos ames. S. Matth. x1. 29.

MON Dieu, je viens m'instruire et m'examiner à vos pieds. Vous êtes ici présent; c'est vous qui m'y attirez par votre grâce. Je n'écoute que vous, je ne crois que vous. Parlez, votre serviteur écoute.

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Seigneur, je vous adore; mon cœur n'aime que vous; il ne soupire qu'après vous. Je m'anéantis avec joie devant vous, ô éternelle Majesté : je viens pour recevoir tout de vous, et pour renoncer sans réserve à moi-même.

Envoyez, ô mon Dieu, votre Esprit saint. Qu'il devienne le mien, et que le mien soit détruit à jamais! Je me livre à cet Esprit d'amour et de vérité. Qu'il m'éclaire aujourd'hui, pour m'apprendre à être doux et humble de cœur!

O Jésus, c'est vous qui me donnez cette leçon de douceur et d'humilité. Tout autre qui voudroit me l'apprendre me révolteroit ; je trouverois partout de l'imperfection et de l'orgueil. Il faut donc que ce soit vous qui m'instruisiez.

O mon bon Maître, vous daignez m'instruire par votre exemple : quelle autorité! Je n'ai qu'à me taire,

(*) On a vu ci-dessus page 43 une partie de cette Méditation, dont Fénélon a fait usage dans les Réflexions pour tous les jours du mois. Nous la donnons ici tout entière. (Edit. de Vers.)

qu'à

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qu'à adorer, qu'à me confondre, qu'à imiter. Le Fils de Dieu descend du ciel sur la terre, prend un corps de boue, expire sur la croix pour me faire rougir de mon orgueil. Celui qui est tout s'anéantit; et moi qui ne suis rien, je veux être, ou du moins je veux qu'on me croie tout ce que je ne suis pas. O mensonge! ô folie !ô impudente vanité ! ô diabolique présomption!

Seigneur, vous ne me dites point: Soyez doux et humble; mais vous dites que vous êtes doux et humble. C'est assez de savoir que vous l'êtes, pour conclure que nous devons l'être sur un tel exemple. Qui osera s'en dispenser après vous? Sera-ce le ver de terre? Sera-ce le pécheur qui a mérité tant de fois pour son ingratitude d'être foudroyé par votre justice?

Mon Dieu, vous êtes ensemble doux et humble, parce que l'humilité est la source de la véritable douceur. L'orgueil est toujours hautain, impatient, prêt à s'aigrir. Celui qui se méprise de bonne foi veut bien être méprisé. Celui qui croit que rien ne lui est dû, ne se croit jamais maltraité. Il n'y a point de véritable douceur par tempérament, ce n'est que mollesse, indolence, ou artifice. Pour être doux à autrui, il faut renoncer à soi.

Vous ajoutez, ô mon Dieu : Doux et humble de cœur. Ce n'est point un abaissement qui ne soit que dans l'esprit par réflexion, c'est un goût du cœur; c'est un abaissement auquel la volonté consent, et qu'elle aime pour glorifier Dieu. C'est un plaisir de voir sa misère, pour s'anéantir devant Dieu, afin de ne devoir sa guérison qu'à lui. C'est une destruction de toute confiance en son esprit et en son courage FÉNÉLON. XVIII.

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naturel. Voir sa misère et en être au désespoir, ce n'est pas être humble; au contraire, c'est avoir un dépit d'orgueil qui ne peut consentir à son abaisse

ment.

Enfin vous me promettez, ô Sauveur, que c'est dans cette humilité que je trouverai le repos de mon ame et la paix. Hélas ! que j'ai été loin la chercher, cette paix. Je la cherchois dans des passions folles et turbulentes ; je la cherchois dans les vaines imaginations de mon orgueil. L'orgueil est incompatible avec la paix. Il veut toujours ce qu'il n'a pas; il veut toujours passer pour ce qu'il n'est point. Il s'élève sans cesse, et sans cesse Dieu lui résiste pour le rabaisser, par l'envie, par la contradiction des autres hommes, ou par ses propres défauts qu'il ne peut s'empêcher de sentir. Malheureux orgueil, qui ne goûtera jamais la paix des enfans de Dieu, qui sont simples et petits à leurs propres yeux!

Mon Dieu, que vous êtes bon de me faire aimer cette paix! Mais ce n'est pas assez de me la faire aimer et désirer, rendez-m'en digne, en écrasant mon orgueil. Abattez mon esprit autant que mon corps. Que mon orgueil ait encore plus d'oppression et d'accablement que ma poitrine; qu'il ne puisse plus respirer. Achevez, Seigneur, de m'arracher à la société profane de ceux qui ne vous connoissent ni ne vous aiment. Etouffez en moi jusqu'aux derniers restes de la mauvaise honte. Rompez tous mes liens, et formezen de nouveaux qui m'attachent à vous seul inséparablement.

Que vous ai-je fait pour mériter tant de grâces? J'ai foulé aux pieds les anciennes, j'ai payé d'ingra

titude toutes vos bontés d'autrefois. Voilà l'unique mérite que j'ai devant vous. Il n'y a que ma misère qui puisse exciter votre miséricorde. Après cela, hésiterai-je encore entre le monde et vous? le monde qui veut me perdre, vous qui voulez me sauver. Repousserai-je la croix que vous me présentez avec tant d'amour, pour me délivrer des maux de mon ame, bien plus terribles que ceux de mon corps?

O Seigneur, je m'abandonne à votre miséricorde. Je mériterois d'être livré à votre éternelle justice. Frappez, Seigneur, frappez; faites de votre vile créature selon votre bon plaisir. Plus de volonté que la vôtre. Je vous louerai dans toutes mes douleurs, je baiserai la main qui me frappe, je me croirai encore épargné. Je suis prêt à tout, à vivre séparé du monde confessant hautement votre Évangile, ou à mourir sur la croix avec vous, ô Jésus, qui êtes mon amour et ma vie.

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