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18. Nous avons vu plus haut que le Dialoque d'un Chrétien et d'un Juif, imprimé sous le nom de Guillaume de Champeaux, était de Gilbert, abbé de Westminster. [Il est reproduit parmi les ouvrages douteux de Guillaume, au fome CLXIII de la Patrologie, col. 1045-1072.] Mais Guillaume 1, au rapport d'Albéric de Trois-Fontaines, fit un abrégé des Morales de saint Grégoire sur Job; cet abrégé se trouve en effet 2 dans la Bibliothèque de Clairvaux. On cite de lui un autre écrit intitulé: Sentences théologiques, qu'on dit se trouver encore dans les bibliothèques de France. Le seul traité qui soit parvenu jusqu'à nous, est celui de l'Origine de l'âme, que dom Martène a inséré dans le cinquième tome de ses Anecdotes [et qu'on a reproduit parmi les œuvres douteuses de Guillaume, au tome indiqué de la Patrol., c. 1043-1044.] Guillaume y examine une question souvent agilée: Comment Dieu peut avec justice condamner les enfants qui meurent sans baptème? « Cela, dit-il, ne serait point difficile à comprendre, si le corps qui tire son origine d'Adam, contractait la tache du péché originel; mais comme l'âme ne descend pas de la masse corrompue, et qu'elle n'est unie au corps que parce que Dieu en dispose ainsi, il semble qu'elle ne puisse être coupable d'aucun péché, que par le consentement qu'elle donne aux mouvements sensuels de ce corps lorsqu'il est adulte. Cependant, ajoute Guillaume, la foi de l'Eglise est que si, aussitôt après l'union de l'âme avec le corps, l'enfant meurt, l'âme sera damnée à cause du péché d'origine. N'y a-t-il donc pas de la faute du Créateur, en ce qu'il loge cette âme dans un corps qui l'engage nécessairement dans la corruption? » Après avoir exposé ainsi la question, et rapporté les raisons pour et contre, il dit que quelques anciens, entre autres saint Grégoire de Nazianze, ont cru que l'âme comme le corps étaient engendrés par les parents; que d'autres croient que Dieu crée l'âme et l'unit au corps soixante-six jours après sa formation, ou le sixième mois. Guillaume, sans rien fixer sur le temps de l'union de l'âme avec le corps, exprime ainsi son sentiment Dieu ayant ordonné par son décret

1 Alberic., in Chronic., pag. 222.

2 Marten., ubi supra.

3 Oudin, tom. II, pag. 965.

D'autres avaient fait de semblables écrits avant lui; ainsi Anselme de Laon en avait donné un. Des pensées de l'Ecriture et des pères servaient de texte XIV.

et

éternel cette union, ne l'a point changé depuis le péché d'Adam; laissant aller le cours ordinaire de la nature, il n'est point responsable de la corruption que l'âme contracte en s'unissant à un corps corrompu par le péché de l'homme, et il n'a pas dû changer de conseil pour la folie de l'homme. Il croit que la peine des enfants qui meurent sans baptême, est beaucoup plus légère; qu'on doit louer Dieu du remède qu'il nous a procuré pour effacer le péché même dans les enfants, et adorer ses jugements dans la condamnation de ceux qui meurent sans baptême. [On a encore de Guillaume un fragment sur le sacrement de l'autel que l'on a reproduit au tome CLXIII de la Patrologie, col. 1039-1040, d'après dom Mabillon, qui l'avait donné au tome III des Actes des saints de l'ordre de Saint-Benoît 6, une charte reproduite dans la Patrologie, ibid., col. 1039-1042, d'après les Annales du diocèse de Châlons, par le père Rapine. Le fragment sur le sacrement de l'Eucharistie est très-important. On y reconnaît le dogme de la présence réelle de la manière la plus claire et la plus précise, et la pratique de l'Eglise dans l'administration de cet auguste sacrement. Les fidèles recevaient encore l'eucharistie sous deux espèces; mais il faut savoir, dit Guillaume, que celui qui n'en reçoit qu'une, reçoit Jésus-Christ tout entier. Car on ne reçoit pas Jésus-Christ comme si les membres de son corps étaient divisés et qu'on les prit l'un après l'autre ; mais on le reçoit tout entier, soit sous les deux espèces, soit sous une seule séparément. » On la donnait aussi aux enfants aussitôt après le baptême, mais seulement sous l'espèce du vin, parce que leur état les rendait incapables de la recevoir sous l'autre espèce. L'auteur traite d'hérésie le sentiment de ceux qui prétendent qu'il est nécessaire de recevoir l'eucharistie. sous les deux espèces : « Cependant, ajoutet-il, l'Eglise conserve toujours le sacrement sous l'une et l'autre espèce 7. L'usage de la communion sous les deux espèces déjà en désuétude au XIIe siècle, commença à disparaître pour s'éteindre tout à fait dans le siècle suivant. Guillaume avait composé aussi plusieurs traités de philosophie en faveur de

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l'opinion des réalistes, et fut un de ses plus illustres représentants, dit dom Visch. Les réalistes étaient donc déjà connus, et cette secte de philosophes ne dut ni sa naissance,

ni son nom au fameux Scot, comme l'insinuent les auteurs du Dictionnaire de Trévoux.]

Guibert. Sa naissance.

Son

tion.

CHAPITRE XVI.

Guibert, abbé de Nogent [1124].

[Ecrivain latin.]

1. C'est de lui-même que nous apprenons éduca qu'il était né à Beauvais d'une famille noble et riche, et qu'étant en bas âge, il perdit Evrard son père. Sa mère, dont il parle ordinairement avec de grands éloges, prit soin de son éducation. Elle lui fit apprendre 2 successivement les premiers éléments des lettres, la grammaire, et les autres sciences. proportionnées à son âge. Son précepteur était de bonnes mœurs, mais sévère et ignorant. On proposa à Guibert de le faire che valier. Il le refusa. Sa mère fit ce qu'elle put pour lui procurer un bénéfice; elle ne réussit pas. Cependant Guy, évêque de Beauvais, lui conféra 5 tous les ordres, excepté la prêtrise, et accorda à sa mère la permission de se retirer auprès de l'église de Saint-Germer, et d'y bâtir une petite chapelle.

Пembrisse la vie monas. tique.

Ses ét des.

2. Guibert, se voyant sans précepteur et éloigné de sa mère, se livra 6 aux plaisirs. Sa mère, l'ayant appris, alla prier l'abbé de Saint-Germer de le remettre sous la discipline de son précepteur, qui s'était fait moine dans ce monastère. Guibert s'y présenta, et fut si touché de la piété et du maintien modeste des moines, qu'il résolut de s'unir à eux dans le même genre de vie. Sa mère s'y opposa, craignant qu'il n'eût pris ce parti par légèreté mais après une épreuve qui dura depuis la Pentecôte jusqu'à Noël, elle y consentit. Elle ne put toutefois le voir revêtir de l'habit monastique, sans verser beaucoup de larmes.

3. Aux exercices de piété, il joignit l'application à l'étude. Ses progrès causèrent

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de la jalousie à quelques-uns de ses frères. Cela ne fit qu'augmenter son ardeur pour les sciences. Mais il convient qu'il excéda dans l'étude de la poésie. Saint Anselme, alors prieur du Bec, venait le voir souvent, et lui enseignait la méthode d'étudier l'Ecriture sainte, et d'en expliquer les divers sens. Il en fit l'essai par un commentaire sur l'Ouvrage des six jours, ou de la Création, qu'il expliqua en un sens moral. Son abbé l'en reprit, et lui défendit de continuer. Cet abbé, qui se nommait Garnier et qui n'avait pas de goût pour les lettres, s'étant dépouillé de son autorité pour mener une vie privée, Guibert, qui, depuis sa défense, n'avait travaillé que furtivement à son commentaire, le reprit ouvertement pendant la vacance du siége abbatial, et l'acheva en dix livres.

4. Ses amis et ses parents, lui trouvant du talent pour figurer dans le monde, où sa naissance le faisait déjà considérer, le pressaient d'aspirer aux dignités ecclésiastiques. Mais il ne voulut jamais se prêter à leurs désirs; et ce ne fut que malgré lui qu'on le fit abbé de Nogent-sous-Coucy, dans le diocèse de Laon, en 1104, à la place de Godefroi, élu évêque d'Amiens 10. Guibert était encore jeune, et sa mère, craignant que cette dignité ne lui fût une occasion de dérangement, ne l'y vit élevé qu'avec douleur. Les moines de Nogent le reçurent avec honneur. A son entrée dans l'église, on lui donna l'Evangile à baiser, et l'on eut grand soin de remarquer sur quel endroit il jetterait les yeux, afin d'en tirer quelque pronostic pour son gouverne

tirée de la Gallia christiana, et reproduite au tome CLXII de la Patrologie, col. 730-736. Elle y est, col. 735-750, suivie de sept épîtres et diplômes, et du titre primitif de la charte de la commune d'Amboise, donnée par saint Godefroi en 1106. Godefroi mourut en 1118. (L'éditeur.)

31 est f abbé de N gent.

ment. Entré dans le chapitre, il harangua la communauté, prenant pour texte un endroit ... du prophète Isaïe, où il est parlé des pasteurs et de leurs devoirs. Il les remplit luimême très-exactement pendant vingt ans. 5 mort en 5. Trois ans avant sa mort, il ordonna qu'au jour de son anniversaire, tous les prêtres du monastère célébreraient la messe pour lui, comme ils avaient fait jusque-là le jour de sa bénédiction, qui tombait à la fête de sainte Lucie. Il légua à cet effet douze deniers de rente annuelle pour la réfection des frères en ce jour. On ne sait ni celui de sa mort, ni celui de sa sépulture. Mais on croit communément qu'il ne vécut pas au-delà de l'an 1124.

6. Manassés, évêque de Soissons, a loué Guibert 2 pour sa sagesse et l'innocence de ses mœurs. Les écrits que nous avons de lui sont des preuves de son savoir et de sa capacité. Le premier dans l'édition de dom Luc d'Achéry, à Paris, chez Billaine, en 1651, [et reproduit avec corrections au tome CLVI de la Patrologie,] est un traité de la Prédication, où il enseigne la méthode de prêcher avec succès. « Celui qui se charge d'annoncer la parole de Dieu, doit chercher uniquement à lui plaire; pratiquer les vérités qu'il propose aux autres; avoir la conscience pure; animer son discours; n'être pas trop abondant en paroles; être court, pour ne pas charger la mémoire de l'auditeur; prêcher à la portée de ceux qui l'écoutent; ne pas approfondir les mystères, mais s'étendre sur la morale. Dans l'explication de l'Ecriture, il est plus utile pour les fidèles qu'il s'applique au sens moral ou tropologique, plutôt qu'à l'historique, à l'allégorique, à l'anagogique. Pour tirer les pécheurs de leurs désordres, il emploiera la crainte des peines dont le péché est souvent puni en ce monde, et plus encore en l'autre vie. Le prédicateur qui se cherche lui-même dans la beauté et l'éloquence du discours, qui prêche par ostentation ou par avarice, offense son auditeur. Mais il lui sera utile, s'il ne pense qu'à l'instruire par un discours vrai el sans affectation.>> Guibert remarque en passant, que l'effet des sacrements ne dépend pas de la probité du ministre; et qu'on reçoit également le baplême, l'eucharistie, la confirmation d'un mauvais, comme d'un bon ministre.

7. Le traité de la Prédication sert de pré

1 Guibertus, in notis ad ejus opera, pag. 626, 627.

face aux Commentaires moraux de Guibert sur la Genèse. Il les dédia à Barthélemy, évêque de Laon, qui succéda dans ce siége à l'évêque Hugues, en 1113. Dans l'épître dédicatoire, Guibert parle de deux savants de la France, qui étaient frères, et qu'il appelle les yeux de l'Eglise de Laon, Anselme et Raoul. Le premier mourut en 1116. Ces commentaires furent donc achevés avant cette année-là. Guibert, faisant attention que saint Augustin avait suffisamment expliqué le sens littéral de la Genèse, s'appliqua à en donner le moral, à l'imitation des commentaires de saint Grégoire sur Job, et divisa les siens en dix livres qui comprennent l'explication de tous les endroits de la Genèse susceptibles de moralités car Guibert ne s'arrête point aux généalogies ni à plusieurs autres parties de ce livre, qui ne présentent rien que d'historique ou de littéral.

8. Il composa dans le même goût ses Commentaires sur Osée, Amos, et les Lamentations de Jérémie. Ils sont dédiés à saint Norbert, dont la demeure n'était éloignée de celle de Guibert que de deux lieues : ce qui leur facilitait un commerce de liaison et d'amitié. Il s'excuse dans le prologue, d'avoir entrepris d'expliquer la prophétie d'Osée, qui, d'après saint Jérôme, est remplie de tant de profondeurs et d'obscurités, que le célèbre Origène, Apollinaire de Laodicée, Piérius, Eusèbe de Césarée, et Didyme l'Aveugle, ont été obligés d'abandonner l'explication de ce prophète, sans l'avoir achevée. Mais il s'agissait de leur part de donner le vrai sens de la lettre. Il y avait moins de difficulté d'expliquer le texte d'Osée en un sens allégorique ou tropologique, parce que nous connaissons beaucoup mieux ce qui se passe dans nous, nos passions, nos mœurs, ce que nous devons faire, que les mystères qui ont rapport à Jésus-Christ et à son Eglise, dans lesquels il est facile d'échouer. C'est sur cette facilité que Guibert justifie son entreprise. Il s'excuse de l'inélégance et du peu d'exactitude du style de ces commentaires sur la faiblesse de ses yeux, qu'une trop grande assiduité, moins à lire qu'à écrire, avait occasionnée; en sorte qu'il était obligé de dicter à un secrétaire. Il fait, dans ce prologue ou épître dédicatoire, l'éloge de saint Norbert, et soumet ses commentaires à sa censure. Ils furent écrits après l'an 1120, et ont

Pag. 625, Oper. Guiberti.

Commen. taires sur

Osée, Amos pag. 182 ei

et Jérémie,

beq.

Commentaire sur le

das, pag. 639,

tom. VI An.

zal Benedic

tin. Mabillon.

pour titre Tropologies sur Osée, sur Amos et sur les Lamentations de Jérémie.

9. Guibert fit aussi des commentaires prophète Ab- sur le prophète Abdias, qu'il dédia à Geoffroi, in appendice, abbé de Saint-Médard de Soissons, et à Alard, abbé de Florène. Nous en avons le prologue dans l'appendice du tome VI des Annales bénédictines. L'ouvrage n'a pas encore été imprimé. Le manuscrit de Pontigny, d'où ce prologue est tiré, contient le commentaire entier sur Abdias, et sur les autres petits Prophètes. Geoffroi fut fait abbé de SaintMédard en 1120 ainsi l'on ne peut mettre plus tôt le commentaire sur Abdias. Guibert rappelle dans le prologue, ses commentaires sur Osée, Amos et Jérémie. A la fin du commentaire sur Amos, dans un manuscrit de la bibliothèque du collège de Navarre, dont s'est servi Pierre d'Ailli, se lit une lettre publiée par le père Hommey, par laquelle 2 Guibert rend juge de son commentaire saint Norbert à qui il l'adresse, ne connaissant personne dans les provinces voisines qui fût plus au fait que lui des dispositions intérieures de l'homme; il le prie de corriger dans cet écrit ce qui lui paraîtra défectueux, et lui en assure d'avance sa reconnaissance.

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veur, et favorables à la nation juive, dont il soutenait hautement les erreurs. Bernard, doyen de l'église de Soissons, croyant qu'il était de l'intérêt de la religion de les réfuter, en pria l'abbé Guibert, qui, après quelques délais, composa le traité qu'on lui demandait. Il attaque le comte de Soissons sans le nommer, et fait sentir tout l'odieux de sa conduite, en ce que d'un côté il faisait au dehors profession de la religion chrétienne, allant à l'église, bonorant les prêtres, participant aux sacrements de l'Eucharistie et de la Pénitence, et faisant des aumônes; et que de l'autre il faisait valoir les objections des juifs contre les chrétiens, et disait publiquement ce que les juifs osaient à peine dire en secret. Les juifs ne pouvaient souffrir que l'on dît que Dieu se fût fait homme dans le sein d'une vierge. Guibert répond Ils ne font aucune difficulté de dire à chaque moment, avec l'Ecriture, que Dieu a des membres

1 Mabillon, lib. LXXIII Annal., num. 104. Hommey, supp. Patrum, pag. 489.

Pag. 279.

corporels, des yeux, des oreilles, des mains, et même des ailes comme un oiseau; Dieu remplit tout par son immensité, et ne se souille point en s'unissant à la nature humaine, qui est bonne, puisqu'elle est faite à l'image de Dieu; en naissant d'une vierge pure, il ne pouvait avoir contracté aucune tache; Dieu s'était souvent revêtu de la forme humaine du temps des patriarches; il avait apparu sous cette forme à Abraham, et il n'y avait pas plus d'indécence à se faire homme dans les derniers temps. Guibert rapporte les passages des prophètes qui Pag. 265 annoncent la naissance du Messie d'une seq. vierge; sa demeure sur la terre, pour rappeler les hommes au devoir; sa passion, sa mort pour la rédemption du genre humain; sa résurrection. Ensuite il réfute l'objection que les juifs faisaient aux chrétiens, d'adorer les images du crucifix, même le bois de la croix, et dit : « Nous adorons dans des signes visibles les choses invisibles, ou bien nous arrêtons notre esprit errant et vagabond à la contemplation des choses spirituelles par les regards que nous jetons sur des peintures qui nous servent comme d'avertissement pour appliquer notre esprit à des choses intérieures. Pourquoi, ajoute-t-il, en s'adressant aux juifs, vous a-t-on proposé le serpent d'airain, à qui depuis vous avez rendu un culte, sinon pour vous apprendre ce que ce serpent signifiait?» Guibert fait voir encore que les juifs n'avaient aucune raison d'accuser les chrétiens d'adorer trois Dieux, puisqu'ils n'en adoraient qu'un seul, mais en trois personnes; ce qui lui donne lieu d'établir la Trinité des personnes en Dieu. » Il rapporte sur la fin de l'ouvrage, qu'un clerc de Laon, disputant un jour contre un juif, et ne pouvant le convaincre par ses raisons, offrit en preuve de la vérité de la religion chrétienne, de porter en sa main un tison allumé de tous côtés; qu'il le porta en effet; mais que le juif, attribuant cet événement à l'art magique, ne se rendit pas.

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E oge de la minte Vierge

seconde, si l'eucharistie est plutôt le signe que le vrai corps de Jésus-Christ. Il dit sur la première, que le morceau n'était que de simple pain que Jésus-Christ avait trempé et donné ensuite à Judas en signe de sa trahison; et qu'auparavant le Sauveur lui avait donné l'eucharistie avec tous les autres apôtres, n'ayant pas voulu en exclure ce traître pour un crime qu'il n'avait pas encore manifesté au dehors. La seconde est dirigée contre Bérenger et contre tous ceux qui soutiennent que l'eucharistie n'est que l'ombre et la figure du corps de Jésus-Christ. Guibert prouve qu'elle est le vrai corps et le vrai sang du Sauveur; en sorte qu'il ne reste, après la consécration, que les espèces du pain et du vin, leur substance étant changée en la chair et au sang de Jésus-Christ. « C'est pour cela, dit Guibert, qu'il se fait tant de signes de croix dans le sacré canon, et toujours par trois, parce que, comme c'est la Trinité qui a formé dans Marie la chair de Jésus-Christ, c'est elle aussi qui opère le mystère sur l'autel. » Il dit encore, que si l'eucharistie n'est qu'une ombre et une figure, nous sommes tombés des ombres de l'ancienne Loi en des ombres encore plus misérables.

12. Le livre qui a pour titre : Les louanges Marie, p. 187. de la Vierge Marie, contient l'éloge de ses

Pag 300.

303.

Traité de

Fag. 311.

vertus. Guibert y fait voir aussi qu'elle est véritablement Mère de Dieu, et dit qu'en la regardant en ce monde comme portant dans son sein le Verbe incarné, on peut soutenir que son état était alors plus excellent qu'il n'est dans le ciel. Ce n'est au reste qu'une opinion de Guibert, qui la propose sans préjudice de celle qui assurerait le contraire. Il dit encore que dès ce monde Marie a joui continuellement de la vision de Dieu. Parmi les miracles faits par l'intercession de la sainte Vierge dans le diocèse de Laon, il en raconte un, où l'on voit l'usage de confesser ses péchés aux prêtres. Ce livre est suivi d'un rhythme ou prose en l'honneur de la sainte Vierge et de saint Jean l'Evangéliste.

13. Guibert était très-jeune quand il écrivit Is Virginité, sur la virginité, à la prière d'un nommé Salumon, à qui il dédia le traité qu'il en fit. Il craignait d'écrire sur un sujet sur lequel il ne pouvait se flatter d'être sans reproche; mais il surmonta sa répugnance, en considé

Inde est quod crebræ crucum trinitates in sacrativo canone fiunt, quia sicut in Maria carnem, sic in

rant, que même coupable, on ne laisse pas d'être obligé, lorsqu'on le peut, de travailler à corriger les autres. D'après Guibert, autant l'état de virginité est sublime, autant est-il difficile de le conserver. Cela paraît impossible aux voluptueux; mais ils ne font pas attention que la virginité a été en honneur chez les païens, que Dieu n'a voulu naître que d'une vierge, que saint Paul a gardé la virginité. Les moyens de la conserver sont l'humilité, la douceur, la componction, la patience; on la perd aisément par de trop grandes familiarités, et par trop d'attention à se parer le visage, et à s'orner d'habits précieux; ceux qui mènent une vie austère et pénitente, ne tombent ordinairement dans quelque faute contre la pureté que par orgueil. Il était encore d'u- Pag. 322. sage de son temps que les parents offrissent leurs enfants jusqu'à l'âge de douze ans, et que le vœu qu'ils faisaient pour eux fût irrévocable. Les ennemis de la virginité objectaient l'ordre que le Créateur a donné aux hommes de se multiplier. Guibert répond, que ce commandement n'était que pour autant de temps qu'il en fallait pour peupler le monde, et qu'à présent il n'oblige plus.

Traité des Reliques des

14. Le traité de Guibert sous le titre de Gages ou Reliques des saints fut composé à saints, p. 327. l'occasion d'une dent de notre Seigneur, que l'on prétendait avoir dans l'abbaye de SaintMédard à Soissons. Il l'écrivit au plus tard en 1121, et le dédia à Odon, abbé de SaintSymphorien à Beauvais. L'ouvrage est divisé en trois livres, dont le premier traite du culte des saints et des précautions que l'on doit prendre pour distinguer les vraies reliques des fausses. Le second livre est employé à montrer que le corps de Jésus-Christ est dans l'eucharistie, et qu'il ne faut point chercher d'autres reliques de lui que la sainte eucharistie, où il nous a laissé non quelques restes de son corps, mais son corps entier. Il renverse dans le troisième les preuves que les moines de Saint-Médard alléguaient pour soutenir qu'ils étaient possesseurs d'une dent de lait de Jésus-Christ.

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