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Epist. 43.

le-Grand, [saint] Grégoire VII et Urbain II ont, sous l'habit monastique, présidé à l'Eglise romaine, et ont enseigné. Mais pouvait-il ignorer que depuis le concile d'Aix-la-Chapelle en 817, il y avait eu des écoles publiques dans un grand nombre de monastères de l'ordre de Saint-Benoît, tant pour les laïques que pour les moines; et qu'à Toul, Adson, moine de l'abbaye de Luxeuil, invité par saint Gauzelin, tint dans l'abbaye de Saint-Evre des écoles, où cet évêque envoyait ses clercs?

25. Un jeune homme, nommé Foulques, demanda à Métellus pourquoi Dieu avait créé l'homme qu'il savait devoir tomber, et pourquoi il l'avait fait capable de chute? Métellus répondit : L'ange avait été créé de même, avec pouvoir de persévérer dans son état primitif, ou d'en déchoir; et l'homme ayant été fait pour remplir la place des anges apostats, Dieu lui a laissé, comme à eux, la liberté de persévérer ou de ne pas persévérer . dans l'état d'innocence. Il s'explique dans cette lettre sur la différence de la crainte filiale et de la crainte servile, suivant les principes de saint Augustin, qu'il suit ordinairement dans ses décisions; c'est de lui aussi et de Boëce, qu'il emprunte l'explication qu'il donne du mystère de la Trinité dans sa lettre 45 et 46. à l'abbé Odon, et la solution des difficultés qui regardent les futurs contingents marqués dans l'Ecriture. Il condamne le duel; mais il n'approuve ni ne désapprouve les épreuves de l'eau chaude et du fer chaud, disant qu'elles ne sont autorisées par aucune loi, et qu'elles ont été mises en usage par la nécessité des temps. Il n'est pas d'avis qu'on moleste les Juifs, parce qu'ils sont utiles à la religion, par le témoignage que lui rendent les livres dont ils sont dépositaires; mais il pense différemment de ceux qui enlèvent aux chrétiens leurs biens et les persécutent.

47.

48.

52 et 53.

26. Dans les deux lettres à Constantin, Hugues résout plusieurs questions touchant les usages et les rits de l'Eglise pendant le Carême et les trois semaines précédentes. La plupart de ses solutions ne sont fondées que sur des explications mystiques, mais qui supposent toujours la réalité de ces rits et de ces usages. On y trouve les usages suivants : à l'office de la nuit de l'Epiphanie, on supprimait l'invitatoire; l'Alleluia ne se chantait pas depuis la Septuagésime jusqu'à Pâques ; pendant le Carême on s'abstenait de viande, mais on pouvait manger du poisson, comme moins propre à nourrir la concupiscence;

durant ce saint temps l'on suspendait un voile devant l'autel, et en quelques endroits, un autre à l'entrée du choeur; tous les jeudis de Carême n'avaient point d'offices propres, et le samedi saint point d'office de nuit, celui que l'on y célébrait appartenant à la fête de Pâques; pendant les trois jours précédents, l'on éteignait tous les luminaires.

:

27. Les deux dernières lettres sont à Si- Epist. 54, 55. mon, abbé de Saint-Clément à Metz; dans l'une, Métellus fait l'éloge de ses vertus, de son amour pour les pauvres, de sa libéralité envers les étrangers, de la douceur de son gouvernement; dans l'autre il répond à la question que Simon lui avait proposée, savoir si l'absolution donnée par un prêtre, qui, par compassion pour la fragilité humaine, ou par ignorance, n'impose pas une pénitence proportionnée au crime, est valide. Hugues répond que cette absolution vaut, si le pénitent accomplit, avec toute la ferveur dont il est capable, la pénitence qui lui est imposée. La raison qu'il en donne, c'est que Dieu même opère dans le sacrement: c'est lui qui absout ou qui baptise par le ministère du prêtre, dont le mérite ou démérite ne fait rien à l'effet du sacrement; parce que ce n'est pas par le mérite de sa vie qu'il remet les péchés, c'est par son office ou caractère de prêtre.

Poésies de Hugues Mè

28. Par l'extrait que nous venons de donner des lettres de Hugues Métellus, on voit tellus qu'elles méritent d'être lues, soit à cause des questions importantes qu'il y traite, soit pour l'exacte discussion qu'il en fait. Elles sont d'ailleurs écrites avec esprit, mais on ne trouve ni dans son style, ni dans sa latinité, l'élégance, la douceur, ni la pureté des écrivains du siècle d'Auguste, dont il s'était toutefois rendu la lecture familière dès sa jeunesse. Il emploie souvent des termes barbares, et il se plaît presque partout dans des jeux de mots, et d'une même terminaison. Sa poésie est au-dessous de sa prose. Content des pensées et des sentiments vulgaires, il ne donne à ses vers ni l'air de noblesse, ni le ton de dignité, souvent même il néglige les règles de l'art; ses poésies sont une fable du loup et du berger, où l'auteur n'a gardé ni la décence, ni le respect dû à la religion; divers problèmes selon les lettres de l'alphabet, et quelques épigrammes sur les mystères et sur quelques sujets profanes. On peut les voir à la suite de ses lettres de l'édition de l'abbé Hugo; la Bibliothèque Lorraine, par Dom Calmet, en rapporte aussi quelques-unes.

Orderic Vital. Sa nais.

CHAPITRE XXXI.

Orderic Vital, moine de Saint-Evroul.

[Ecrivain latin du XIIe siècle. ]

1. Il nous sera aisé de rapporter les prinsance en 1075. cipales circonstances de sa vie, puisqu'il a eu soin lui-même de les mettre par écrit. Il naquit en Angleterre le 16 février 1075. Son père, nommé Odeliri, était né à Orléans, de Constance, citoyen de cette ville; mais étant passé en Angleterre avec Roger de Montgomery, il s'établit dans un des faubourgs de Scrobesbury. Il eut trois enfants, dont Vital fut le premier. L'année même de sa naissance il reçut le baptême, la veille de Pâques, à Ettingesham dans l'église de Saint-Catte, confesseur, et fut nommé Orderic, du nom du prêtre qui le baptisa. C'est pourquoi il l'appelait depuis son parrain 2.

Ses études.

Il est admis

gé.

2. A l'âge de cinq ans, Odeliri, son père, dans le eler- le mit entre les mains du prêtre Siwade, pour apprendre les premiers éléments des lettres, c'est-à-dire de la langue latine. Il y apprit aussi les hymnes, les psaumes et les autres choses nécessaires pour remplir ses fonctions dans le clergé de la basilique des Saints-Apotres, où on l'avait admis. Cette basilique n'était dans son origine 3 qu'une chapelle bâtie de bois, dans un faubourg de Scrobesbury; Roger, seigneur du comté de ce nom, l'avait donnée à Odeliri, qui, quoique marié, était prêtre; et celui-ci, avec le secours de son bienfaiteur, l'avait construite de pierres, et convertie en un monastère. La charte de la fondation par le comte Roger est de l'an 1082.

Il embrasse la profession

4

3. Orderic ne servit dans cette église que monastique. jusqu'à l'âge de dix ans 5. Alors son père le fit passer d'Angleterre en Normandie, sous la conduite d'un moine nommé Rainald. Quoiqu'il n'eût point appris la langue du pays, il l'entendait, et en cela il se compare au patriarche Joseph, à qui le langage égyptien devint familier aussitôt qu'il entra en Egypte.

1 Orderic. Vital, lib. V, pag. 579, 580, 581.

2 Orderic. Vital., lib. XIII, pag. 924.

3 Id., lib. V, pag. 580, et lib. XIII, pag. 924. Lib. V, pag. 579.

XIV.

Mainère, abbé de Saint-Evroul, reçut Orderic avec bonté, lui donna l'habit monastique et la tonsure cléricale. Au lieu du nom d'Orderic, il voulut qu'on l'appelât Vital, du nom d'un des compagnons de saint Maurice, martyr, dont on faisait la fête le jour qu'il reçut la tonsure, c'est-à-dire le 21 septembre de l'an 1086. Il se fit aimer et considérer de ses confrères. 4. Il n'avait encore que seize ans, quand Serlon, son abbé, le fit ordonner diacre, par Gislebert, évêque de Lisieux; il servit dans ce grade pendant quinze ans, au bout desquels il fut ordonné prêtre aux Quatre-Temps de décembre de l'an 1107, par Guillaume, archevêque de Rouen, qui ordonna le même jour deux cent quarante-quatre diacres et cent vingt prêtres. Orderic était dans la trente-troisième année de son âge. Il en avait soixante-sept, lorsqu'il écrivait toutes les particularités de sa vie, et avait vécu à SaintEvroul sous six abbés, Mainère, Serlon, Roger, Guarin, Richard et Ranulfe.

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ecclésiastique.

5. Ce fut par ordre de l'abbé Roger 7 qu'il Son Histoire entreprit d'écrire l'histoire de son temps; il la dédia à l'abbé Guarin, son successeur. 11 s'appliqua moins à rapporter les grands événements de l'Etat, que ce qui avait trait aux affaires de l'Eglise; c'est pour cela qu'il intitula son ouvrage Histoire ecclésiastique. 11 concevait bien qu'il la rendrait plus intéressante en y faisant entrer ce qui s'était passé de remarquable dans les Eglises de Rome et d'Orient; mais son vœu de stabilité dans le monastère de Saint-Evroul, et les observances de son état, ne lui permettaient point des recherches si étendues. Il se borna donc à la Normandie, et aux provinces voisines, pour les choses qui se passèrent de son temps: il divisa son histoire en trois tomes, et le tout en treize livres.

5 Lib. XIII, pag. 924.

6 Ibid., pag. 924, 925.

7 Lib. I in præfat., pag. 321.

24

Premier li vre, pag. 323,

6. Dans le premier livre, il fait un précis des edit. an. 1619. principaux événements, depuis l'incarnation. du Sauveur, jusque vers l'an 1140: il rapporte les différents sentiments des anciens sur le nombre des années qui se sont écoulées depuis la création du monde jusqu'à la naissance et à la passion de Jésus-Christ; puis entrant dans le détail de sa vie, il la donne, en accordant les quatre évangélistes dans les endroits où ils paraissent ne pas se rencontrer; ensuite, il parle de tous les empereurs, en commençant par Tibère; des rois de France et d'Angleterre, des ducs de Saxe, de Bourgogne et de Normandie; des six premiers conciles généraux, et de quelques conciles particuliers. Il a recours dans ce livre aux écrits d'Eusèbe de Césarée, de saint Jérôme, du sophiste Hibérius, d'Osorius, de saint Isidore de Séville, et du Vénérable Bède.

Deuxième

7. Il commence son second livre par l'alivre, p. 375. brégé des Actes des apôtres, des livres des Recognitions, qui portent faussement le nom de saint Clément, et de celui d'Arator, sousdiacre de l'Eglise romaine, qui a mis en vers les Actes des apôtres, les combats et les souffrances de saint Paul. Ce qu'il dit de saint André, il l'avait tiré d'un livre dont il ne connaissait pas l'auteur; c'étaient les Actes que nous avons sous le nom des prêtres et des diacres d'Achaïe. Il cite pour l'histoire de saint Jean le faux Méliton, et sur le martyre de saint Jacques, frère du Seigneur, les Commentaires d'Hégésippe. Après avoir donné la vie des autres apôtres, et de quelques-uns de leurs disciples, il donne la suite des papes, depuis saint Pierre jusqu'à Innocent II, qui fut élu en 1130; prenant dans les fausses décrétales ce qui concerne les papes des six premiers siècles.

Troisième livre, p. 457.

8. Le troisième livre a une préface, dans laquelle Orderic avertit que ses maîtres lui ont ordonné de rapporter les événements de la guerre des Normands dans la France, l'Angleterre et la Pouille; les fondations des monastères; la suite des évêques et des abbés dans presque toute la Neustrie, et les choses mémorables du règne de Guillaume II, surnommé le Bâtard et le Conquérant. Il entend par Neustrie, ce que nous appelons la Normandie, et on la nommait ainsi de son temps. Il compte pour le premier duc de Normandie, depuis l'invasion des Danois, Rollon, qui fut baptisé par Francon, archevêque de Rouen, en 912, et renonça avec toute son armée au

culte des idoles; les ducs ses successeurs furent Guillaume Jer, Richard Ier, Richard II, Robert Ier. Orderic raconte dans son troisième livre ce qui se passa sous leur gouvernement. Il donne de grands éloges à Thierry, abbé de Saint-Evroul, sous le duc Guillaume. Cet abbé savait se faire aimer des bons, et craindre Pag. 470. des méchants. Assidu à la prière, il aimait aussi le travail des mains; il réussissait à transcrire des livres; un art si utile ne pouvant être trop mis en pratique, il l'enseigna aux jeunes religieux de son monastère, où l'on vit, par ce moyen, se former une nombreuse bibliothèque. Outre les livres d'église, les missels, les lectionnaires, les antiphonaires, les graduels, il copia lui-même, ou fit copier tous les livres de l'Ecriture sainte, les ouvrages de saint Grégoire, de saint Jérôme, de saint Augustin, de saint Ambroise, de saint Isidore, d'Eusèbe, d'Orose, et de plusieurs autres docteurs de l'Eglise. Cet abbé avait coutume de dire à ses moines qu'il voulait préserver des tentations du démon: << Priez, lisez, psalmodiez, écrivez, ou appliquez-vous à quelqu'autre ouvrage semblable. »

9. Guillaume II succéda à Robert dans le duché de Normandie en 1066; puis il conquit l'Angleterre, dont il se fit couronner roi après la mort d'Harold. L'histoire de ce grand conquérant, et des grands hommes qui fleurirent sous son règne, fait la matière du quatrième livre. On y trouve la réponse édifiante que Guitmond, moine de la Croixde-Saint-Leufroi, au diocèse d'Evreux, fit à ce prince qui le pressait d'accepter un évêché en Angleterre. Sa modestie fut admirée. de toute la cour, et le roi lui permit de retourner à son monastère.

10. Orderic continue dans le cinquième livre l'histoire du règne de Guillaume II. Il y rapporte le testament que Roger de Montgomery, comte de Scrobesbury, fit en faveur du monastère de Saint-Evroul, et le discours qu'Odeliri, son père, fit à ce seigneur pour l'engager à fonder l'abbaye de Saint-Pierre à Scrobesbury Odeliri y donna lui-même la plus grande partie de son bien, y consacra à Dieu Benoît son second fils, et y embrassa la vie monastique. On trouve dans le même livre plusieurs chartes de donations faites à des monastères, surtout à celui de SaintEvroul.

Quatrième livre, p. 555.

Cinquième livre, p. 55:.

Pag 579.

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deric y demande pardon à ses lecteurs de les avoir entretenus si longtemps des bienfaits dont tant de personnes avaient enrichi cette abbaye; et dit qu'en cela il n'a eu d'autre intention, que d'engager les moines ses successeurs à se souvenir de leurs fondateurs Pag. 608. et bienfaiteurs dans leurs prières. Il donne ensuite la Vie de saint Evroul sur les mémoires qu'en avaient laissés ceux qui l'avaient connu, et celle des abbés qui avaient gouverné ce monastère depuis la mort du saint.

Septième livre, p. 633.

Haitième livre, p. 653.

Neuvième

12. Le septième livre présente d'abord une suite des rois de France, depuis Pépin jusqu'à Henri, fils de Robert, et les diverses révolutions arrivées dans le royaume de la part des Vandales, des Normands et des Saxons, les guerres entre les ducs de Bourgogne et les rois. Viennent ensuite les différends de Henri IV, roi d'Allemagne, avec le pape [saint] Grégoire VII; les tentatives de Robert Guiscard, duc de Pouille, sur l'empire d'Orient. Orderic met la mort de ce prince, qu'il regardait comme un des plus grands héros de son siècle, en 1085, et dit que Robert s'y disposa par la confession de ses péchés, et la communion salutaire de l'eucharistie. Il rapporte aussi la mort de la reine Mathilde, et celle du roi Guillaume son époux; l'histoire de la translation des reliques de saint Nicolas de Myre à Bari; et de l'enlèvement d'un bras du saint, enchâssé dans un reliquaire d'or et d'argent, par Etienne, chantre du monastère de Saint-Nicolas à Angers.

13. Robert II succéda à Guillaume, son père, dans le duché de Normandie; et Guillaume-le-Roux, [son frère], dans le royaume d'Angleterre. Henri, troisième fils de Guillaume-le-Conquérant, n'eut que de l'argent en partage. Ils eurent soin d'orner superbement le tombeau de leur père; mais ils n'imitèrent ni sa piété, ni son attachement à l'Eglise. Orderic rapporte leurs principales actions dans le huitième livre.

14. Il décrit dans le neuvième l'histoire de livre, p. 717. la première Croisade, sous le pontifical d'Urbain II et de Pascal II. Elle avait été écrite en quatre livres par Baudric, évêque de Dol, qui la conduisait depuis le départ des Croisés, jusqu'à la première guerre qui suivit la prise de Jérusalem. D'autres, Grecs et Latins, travaillèrent sur le même sujet; mais Orderic, croyant l'histoire de l'évêque de Dol plus sincère, s'y attacha, en abrégeant ce qui lui paraissait trop diffus, et en ajoutant quelques circonstances intéressantes qui lui

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avaient échappé. Il remarque que l'empres- Pag. 720. sement pour la Croisade était si général, qu'il n'y avait pas jusqu'aux femmes et aux enfants qui ne se présentassent; les seigneurs vendaient ou engageaient leurs châteaux et leurs terres, même à vil prix; chacun quittait ce qu'il avait de plus cher, femme, enfants, père et mère; les voleurs mêmes et les scélérats confessaient leurs péchés, espérant les expier par la guerre sainte.

Dixième

15. La ville de Jérusalem fut prise par les Croisés quelques jours avant la mort d'Ur- livre, p. 761. bain II, arrivée le 29 juillet 1099. L'antipape Clément était mort quelque temps auparavant. Henri IV mourut le 7 août 1106, abandonné de tous ses amis et excommunié. Son corps, que l'on avait d'abord inhumé dans une église de Liége, fut déterré et mis en un lieu profane. Henri V, son fils et son successeur, imita la tyrannie de son père; il fit des vexations sur ses peuples et sur le clergé, assiégea Rome, y répandit beaucoup de sang, se saisit du pape, obtint de lui tout ce qu'il voulut, notamment une concession des investitures. Le pape Pascal, se retrouvant en liberté, assembla un concile, où, de l'avis des plus habiles jurisconsultes, l'on cassa tout ce qu'il avait accordé malgré lui à ce prince. Après avoir raconté ce qui se fit en cette occasion, Orderic vient à ce qui se passa dans le même temps en Angleterre, dans la Normandie et au Mans; puis il reprend l'histoire de la Croisade, et retourne ensuite à celle de Normandie et d'Angleterre. Il finit son dixième livre par la prise de Boëmond, prince d'Antioche, et sa délivrance par le moyen de Mélaz, fille du prince d'Alimann.

Onzième

16. Le onzième livre continue l'histoire de la Croisade; mais il est employé particuliè- livre, p. 802. rement à faire connaître l'état de la Normandie et de l'Angleterre sous le règne des deux fils de Guillaume-le-Conquérant, Robert et Henri. Il y est parlé aussi de la venue du pape Pascal en France; de la mort du roi Philippe, et de son fils Louis, son successeur; de saint Anselme, archevêque de Cantorbéry; de Hugues, abbé de Cluny, et de plusieurs évêques de réputation. Orderic remarque que le roi Philippe, se voyant près de sa fin, assembla les seigneurs de sa cour qu'il aimait le plus, et leur dit : « La sépulture des rois est à l'église de] Saint-Denis; mais en considérant le grand nombre de mes péchés, je n'ose me faire enterrer auprès du corps d'un martyr si respectable, de peur qu'en

Pag.

835

Douzième livre, p. 842.

punition de mes fautes, je ne sois livré au démon, et qu'il ne m'arrive ce qu'on dit être arrivé à Charles-Martel. J'aime saint Benoît, j'invoque humblement le pieux père des moines, et je désire être inhumé dans l'église bâtie sous son nom sur la Loire. Il est bon et clément, et reçoit avec bonté tous les pécheurs qui désirent de se corriger, et de se réconcilier avec Dieu en observant sa règle. >> Ce prince fut donc enterré, selon ses désirs, au monastère de Fleury-sur-Loire, entre le chœur et l'autel, la quarante-septième année de son règne, de Jésus-Christ 1108.

17. On trouve dans le douzième livre la suite de l'histoire d'Henri, roi d'Angleterre; ses démêlés avec Louis, roi de France; les actes du concile de Reims en 1119, auquel le pape Calixte II présida; ceux du concile de Mouzon; la lettre de Roger, abbé de SaintEvroul, à Henri, roi d'Angleterre, par laquelle il le prie, à raison de son grand âge et de ses infirmités, de le décharger du gouvernement de ce monastère, et de le donner Pag. 873. à un autre; la permission que ce prince accorda à la communauté de se choisir un abbé; l'ordre du roi à l'évêque de Lisieux, aux comtes et aux barons de Normandie, de reconnaître pour abbé Guérin, qui avait été élu par les moines de Saint-Evroul, et de le laisser jouir paisiblement de tous ses droits; et plusieurs autres événements depuis l'an 1118 jusqu'en 1131, qui fut l'année de la mort du pape Honorius, et de l'élection d'Innocent II.

Treizième

livre.

18. Orderic raconte dans le treizième livre ce qui se passa dans la guerre qu'Hildephonse, roi d'Aragon, eut à soutenir contre les Sarrasins; les suites fâcheuses du schisme occasionné par l'élection de deux papes en même temps, Innocent II et Anaclet II; les calamités dont on fut affligé en divers endroits, l'an 1134 et 1136; la mort de Louis, roi de France, et celle de Henri, roi d'Angleterre. Il fait de ce dernier un grand éloge, et rapporte son épitaphe. Etienne de Boulogne, neveu de Henri, lui succéda dans le royaume d'Angleterre. Son règne fut troublé par la révolte de quelques seigneurs vers l'an 1141.

1 Pagi, ad an. 1141, num. 7; Mabillon., tom. IV Annal., pag. 343, 519, 585.

2 Orderici, in fine lib. XIII, et in limine lib. XI, pag. 802.

3 On peut voir dans la Biographie universelle de Michaud, article Orderic, les travaux et le projet relatifs à une édition plus correcte. Duchesne n'eut pas

Le jour qu'il devait leur livrer bataille, il entendit la messe; le cierge bénit qu'il tenait en main se rompit et tomba trois fois. Ceux qui s'en aperçurent en tirèrent un mauvais augure, que l'événement vérifia. La victoire tourna du côté des rebelles, et le roi fut fait prisonnier.

Jugement de l'Histoire

mort.

19. Telle est en substance l'Histoire ecclésiastique d'Orderic Vital. Quoiqu'il y ait peu d'Orderic. Sa d'ordre et de méthode, et plusieurs fautes de chronologie 1, elle est néanmoins fort intéressante par le grand nombre de faits. qu'elle contient et qu'on ne trouve point ailleurs, du moins, si bien détaillés. Elle est encore recommandable par son air de naïveté et de sincérité. Il paraît que l'auteur revit son ouvrage après l'avoir achevé; car en tinissant le premier livre, il dit qu'alors Lothaire régnait en Allemagne, Louis en France, Etienne en Angleterre, Jean, fils d'Alexis, à Constantinople. Cependant l'empereur Lothaire ne mourut qu'en 1136; et Orderic ne finit son treizième livre qu'en 1142, dans le temps qu'Etienne, roi d'Angleterre, était détenu en prison; et au commencement de ce livre, il fait mention de la mort de l'abbé Guérin, à qui il avait dédié son ouvrage. Il compte dans le même livre deux Pag. 910. autres abbés depuis Guérin, savoir Richard et Ranulfe. Tout cela fait voir, qu'après avoir fini son histoire, il mit à la fin du premier un précis des principaux événements qu'elle renfermait. On ne dit point en quelle année Orderic Vital mourut; mais il nous apprend lui-même qu'il n'avait que soixante-sept ans, lorsqu'il acheva son Histoire.

2

20. François de la Croix avait promis de la mettre au jour; on ne sait quelle raison l'a empêché de tenir sa promesse. André Duchesne y a suppléé, en lui donnant place dans son Recueil des historiens de Normandie, imprimé imprimé à Paris, en 1619, chez Sébastien Cramoisy, in-fol., sur trois manuscrits, dont l'un était de la bibliothèque de Bigot 3. Il y a ajouté, par forme d'appendice, l'Histoire anonyme d'Etienne, successeur de Henri dans le royaume d'Angleterre, écrite par un auteur contemporain; une Chronique aussi anonyme,

communication d'un manuscrit d'Orderic qui était conservé à l'abbaye de Saint-Evroul. Ce manuscrit, de 502 pages d'étendue, maintenant à la bibliothèque d'Alençon, est regardé comme autographe; ce n'est qu'un fragment considérable qui s'étend depuis l'an 688 jusqu'en 1141. (L'éditeur.)

Edition de

cette histoire.

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