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reconnaissance; mais le porteur était chargé Epist. 150. de dire bien des choses à ce prince. Dans celle qu'il écrivit au roi Louis, il le prie de ne point faire la guerre au comte d'Angers et au duc de Normandie, sans en avoir auparavant délibéré avec les grands et les ar153. chevêques de son royaume. Suger écrivit

même à ce comte pour lui représenter, que le différend qu'il avait avec le roi, ne lui était ni honorable, ni avantageux; qu'il lui conseillait, pendant qu'il en était encore temps, d'employer des moyens convenables pour 154. rentrer dans l'amitié du roi. Il pressa l'évêque d'Amiens de chasser de son diocèse un fameux apostat, qui s'y était retiré, et qui pouvait y faire beaucoup de mal.

158.

20. On a vu plus haut que Suger avait été choisi par le pape Eugène III, avec l'évêque de Noyon, pour faire sortir les chanoines de Compiègne, et mettre à leur place des moines. Comme il leur fallait un abbé, Suger pria cet évêque de se transporter sur les lieux le jour même de la fête de saint Corneille, et de bénir l'abbé devant l'autel, si cela se pouvait faire sans beaucoup de bruit. 159. Les chanoines, soutenus par Philippe de France, frère du roi, eurent recours à la violence pour se faire rétablir à Compiègne; mais leurs efforts scandaleux furent inutiles, la puissance royale maintint le nouvel éta161. blissement. Suger écrivit au comte de Ver

mandois de ne point se dessaisir de ce que
ces chanoines avaient mis sous sa garde;
parce que, s'ils étaient privés de leurs offices
et du bénéfice de l'église, ils l'avaient mérité
par leur mauvaise conduite. Ces clercs ayant
pris les devants, le comte ne put se saisir que
de
peu de chose.

21. Eudes, élu et béni abbé de Compiègne, alla à Rome pour raconter au pape Eugène 163. tout ce qui s'était passé. Suger le chargea d'une lettre pour le pape, à qui il dit en peu

Epist. 164, 165.

Autres lettres de Suger,

tom. 1; Anece. pag. 415

dot, Marte

et seq.

de mots ce qui était arrivé au sujet de la réforme de Sainte-Geneviève et de Saint-Corneille. Il chargea Eudes de deux autres lettres l'une pour l'abbé de Cluny, qui était Pierre le Vénérable; l'autre pour saint Bernard, par lesquelles il les prie de le recevoir avec bonté, et de le recommander au pape. 22. Parmi un grand nombre de lettres. adressées à l'abbé Suger, dom Martène en rapporte quelques-unes de cet abbé même. Il y en a une à Henri, évêque de Beauvais, au clergé et au peuple de cette ville, pour les détourner de la révolte qu'ils méditaient contre le roi. Henri était son frère; Suger lui fait voir, qu'outre les dangers auxquels il s'exposait, lui et la ville de Beauvais, il ne convenait pas à un évêque de prendre les armes contre le seigneur commun du royaume, l'ami et le protecteur des Eglises, à qui tous les archevêques, les évêques, les barons sont attachés nécessairement par le serment de fidélité qu'ils lui ont prêté. Il représente à la ville de Beauvais son impuissance dans un cas semblable, et la compare à une fourmi qui entreprendrait de tirer seule un chariot. La lettre suivante est la réponse de Suger à Pag. 124. celle qu'il reçut de saint Bernard, étant à l'extrémité. Elle est rapportée dans les Annales de l'ordre de saint Benoît, et on en a parlé plus haut. Celle qu'il écrivit à Joslène, évêque de Soissons, est une lettre d'amitié. 424, 425. Il a été aussi parlé ci-dessus de sa lettre au roi, pour lui recommander l'abbaye de SaintDenis et les pauvres.

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commence

seigne à Liége.

CHAPITRE XXXIII.

Alger, diacre et scholastique de Liége.

[Ecrivain latin, vers l'an 1132 ou 1135.]

Alger. Ses 1. Natif de Liége 1, Alger y fit ses études ments. Il en- sous les meilleurs maîtres, et cette ville en avait d'excellents: Hézelon et Tézelin. Ses progrès dans les sciences furent si grands, qu'en considération de son mérite seul, on l'admit dans le clergé de l'église de Saint-Barthélemy, où il fut ensuite fait diacre, et chargé du soin de l'école. L'évêque Otbert le fit chanoine de la grande église. Il y demeura jusqu'à la mort de l'évêque Fridéric, en 1121, c'est-à-dire pendant environ vingt ans. Sa réputation s'étendit en Saxe et dans les autres parties de l'Allemagne. Plusieurs évêques le demandèrent, lui offrant des richesses et des honneurs. Content de la médiocrité de ses revenus, il préféra le séjour de la ville de Liége aux honneurs qu'on lui offrait ailleurs.

Il se fait

moine à Cla.

en 1152.

2. Plus touché encore de son salut que des By. S mort biens qu'il possédait, il abandonna tout pour suivre Jésus-Christ, et se retira à Cluny pour y vivre dans la retraite et dans la pratique de la règle de saint Benoît. Pierre-le-Vénérable en était alors abbé. Ecrivant à Adalbéron 2, évêque de Liége, il fait l'éloge d'Alger et de ses écrits. Il le compte pour le troisième des scholastiques de Liége, qui s'étaient réunis à Cluny. On conserve dans l'archive de cette abbaye l'acte de donation que lui fit Alger, lorsqu'il y vint embrasser l'état religieux. On ne sait pas bien l'année de sa mort. Le père Pagi la met en 1152 3, et rien n'empêche que l'on ne s'en tienne à cette époque *.

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à ces deux écrivains les éloges qu'ils méritent. Il y a toutefois dans le traité d'Alger quelques expressions peu correctes. Nous les remarquerons dans l'analyse.

4. Alger rapporte dans le prologue les diverses erreurs répandues sur cet auguste mystère 5. « Les uns, dit-il, croient que le pain et le vin ne sont pas changés, non plus que l'eau du baptême, ou l'huile du chrême; en sorte que le pain et le vin ne sont qu'en figure le corps et le sang de Jésus-Christ. D'autres disent que Jésus-Christ est dans le pain, comme le Verbe dans la chair par l'incarnation; c'est ce qu'on appelle l'erreur de l'impanation. Quelques-uns enseignent que le pain et le vin sont changés au sang et à la chair, non de Jésus-Christ, mais de tout homme qui est par la sainteté de sa vie agréable à Dieu. Il y en a qui pensent que l'indignité du prêtre est un obstacle au changement du pain et du vin en la chair et au sang du Seigneur; d'autres, que le changement se fait par la consécration, mais que le corps de Jésus-Christ ne demeure pas dans ce sacrement pour ceux qui le reçoivent indignement, et qu'il retourne en ce qu'il était avant la consécration, c'est-à-dire en pain et en vin. La dernière erreur est de ceux qui croient que le corps de Jésus-Christ, lorsque nous l'avons mangé, est sujet aux suites ordinaires des autres aliments. >>

5. La méthode qu'Alger se prescrit pour détruire toutes ces erreurs, est de ne s'appuyer point sur les lumières de la raison, mais sur l'autorité de l'Ecriture et des pères. Il avertit ses lecteurs que si le mystère de l'Eucharistie est incompréhensible, il n'est pas pour cela incroyable; parce que le pouvoir de Dieu ne

être mis par Otbert à la tête des affaires ecclésiastiques en l'an 1101, à l'âge de 25 ou 30 ans; il demeura vingt ans dans le clergé, fut pendant vingt ans chargé de l'administration de l'école de Liége, et professa environ douze ans la vie monastique, ce qui nous permet de mettre sa mort vers l'an 1132 ou 1135. Voyez M. Malou, ouvrage cité. (Ľ'éditeur.)

5 Tom. XXI Bibliot. Pat. pag. 251, prolog.

Analyse de ce traité.

Il est divisó en trois livres.

vre.

Promier li

Cap. 1, 11,

III. IV.

doit point se mesurer sur l'étendue de nos connaissances. Son traité est divisé en trois livres. Dans le premier 1, il prouve la vérité du corps de Jésus-Christ dans l'eucharistie; il résout dans le second 2 diverses questions qui ont rapport à ce mystère, et dans le troisième, il examine la question du ministre, quant à la validité de la consécration.

6. « Dieu s'est fait homme, dit-il, afin que, incompréhensible de sa nature, il se fit connaître à nous par la nôtre; qu'étant élevé au-dessus de toutes choses par le mérite de sa passion, et fait notre chef par son incarnation, nous devinssions ses membres. Il a fait plus en instituant l'eucharistie. Par ce sacrement il nous unit à lui et nous incorpore en lui-même. » Alger explique ce que c'est qu'un sacrement, et en combien de ma▾.nières on peut prendre ce terme; puis il distingue dans l'eucharistie le sacrement, et la chose du sacrement. Le sacrement est la forme, la figure, et tout ce qui est visible dans le pain et le vin; mais la substance invisible couverte de ce sacrement, en laquelle la substance du pain et du vin a été changée, est véritablement et proprement dite le corps VI. de Jésus-Christ. L'auteur fait voir contre les impanateurs, que le changement qui arrive dans le sacrement d'eucharistie n'a aucun rapport avec celui qui s'est fait par l'incarnation. « Dans ce mystère, dit-il, c'est un Dieu fait chair, sans être changé en chair, et la chair reste. Dans l'eucharistie, le pain et le vin ne demeurent point, ils sont changés en la chair et au sang de Jésus-Christ. Quand donc l'Ecriture donne à l'eucharistie le nom de pain, ou c'est figurativement, ou parce que le pain lui a servi de matière, ou à cause qu'elle en retient encore les qualités. »>

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7. « Ce n'est pas la forme, mais la substance du pain qui est changée : la forme et les autres qualités du pain restent, afin de donner lieu au mérite de la foi. Il n'en est pas de même de la substance du pain et du vin: si elle demeurait, et si Jésus-Christ était en même VIII. temps dans l'Eucharistie, cette union du vrai pain, qui est la vie éternelle, avec le pain commun, serait aux fidèles une occasion d'erreur, et l'on pourrait croire que l'eucharistie est sujette aux suites honteuses de la digestion. »

1 Tom. XXI, Bibliot. Pat., pag. 252.- 2 Ibid., p. 275. 3 Universalis Ecclesiæ catholica fide, quæ ab initio conversionis suæ ita credidit, et ita salvata est, sufficienter astructum est quod vera Christi caro verusque sanguis in mensa dominica immoletur. Cap. XIII.

8. Quelques-uns demandaient si Jésus- Cap Ix. Christ, dans la dernière cène, avait donné à ses disciples son corps incorruptible et immortel, comme nous le recevons aujourd'hui. On pouvait en douter, car, lorsqu'il communia ses disciples, il était encore mortel, et à la veille de sa passion. Alger répond que le Sauveur leur donna son corps immortel et incorruptible, quoiqu'il dût bientôt mourir ; comme il leur montra son corps glorieux dans sa transfiguration, quoiqu'il fût alors mortel, et le leur fit voir transpercé de ses plaies après sa résurrection, encore qu'il fût pour lors invulnérable : l'un et l'autre de ces événements sont l'effet de la puissance divine. Alger donne pour certain que le corps de Jésus-Christ, tel que nous le recevons maintenant, est absolument et substantiellement le même corps que celui qu'il donna à ses disciples. Sur quoi il cite ces paroles de saint Augustin aux nouveaux baptisés : « Recevez dans le pain celui qui a été attaché à la croix : recevez dans le calice ce qui est sorti du côté de Jésus-Christ. »

9. Ces paroles: Si vous ne mangez la x, xi, xii. chair du Fils de l'homme, ne doivent s'entendre que de Jésus-Christ; quoique son corps soit d'une manière invisible dans l'eucharistie, il y est réellement et substantiellement; la foi de l'Eglise universelle depuis le commencement de son établissement 3, est que c'est la vraie chair du Sauveur et son vrai sang que l'on immole sur l'autel; Jésus-Christ, pour affermir x. notre foi sur cet article, a bien voulu quelquefois y paraître en sa chair naturelle, en supprimant par miracle les apparences du pain et du vin. Par une autre merveille, Jésus-Christ est en même temps dans le sacrement de l'autel sur la terre, et à la droite de son père dans le ciel. « En effet, ce serait en vain que dans le temps qu'on l'immole sur l'autel, nous dirions: Vous qui êtes assis à la droite du père, ayez pitié de nous; si nous faisions un mensonge, en disant que celui que nous adorons dans le sacrement est dans le ciel.» Alger remarque que le prêtre formant XIV. sur l'autel d'ici- bas le corps du Seigneur en la place de Jésus-Christ même, ne s'attribue rien de ce qu'il fait, mais rapporte tout à la

4

↳ Frustra enim immolationis suæ tempore diceremus: Qui sedes ad dexteram Patris, miserere nobis : si quem adoramus in sacramento, mentiremur esse in cælo. Cap. XIV.

Cap. xv.

XVI.

puissance et à la grâce divine, lorsqu'il prie Dieu le Père dans le canon de la messe, en lui disant Commandez que ces offrandes ne vous soient pas présentées seulement par les mains et la vertu de votre Fils, qui est l'Ange du grand conseil, sur cet autel visible d'ici-bas, mais qu'elles soient portées jusqu'à votre autel sublime du ciel, qui n'est autre que ce Fils même. « Ce qui fait voir, dit notre auteur, que le Fils de Dieu, selon l'ordre de son père, est tout ensemble dans le ciel, et l'offrant, et l'hostie, et l'autel sur lequel on l'offre. Aussi, nous appuyant avec une parfaite confiance en la fidélité des promesses et de la grâce de Dieu, nous croyons que les corps terrestres du pain et du vin sont changés en JésusChrist; et qu'il est tout ensemble, et intercédant pour nous dans le ciel où il est assis à la droite du Père, et consacré et rendu présent dans le sacrement de l'autel. >>

10. « Encore donc que Jésus-Christ se soit séparé de nous en sa forme humaine, lorsqu'il est monté au ciel, il ne laisse pas de demeurer avec nous d'une manière non moins véritable et substantielle dans le sacrement de son corps et de son sang, afin d'être présent, même corporellement, et là-haut, et ici-bas, comme ne faisant qu'une seule personne avec sa divinité qui est partout. C'est ainsi que, lorsque le corps du Sauveur est reçu dans 2 la bouche des fidèles, il est partagé à chacun d'eux, et ne laisse pas de demeurer tout entier et indivisible en chacun d'eux, étant mangé et n'étant point consumé, en sorte que l'on croit par la foi, qu'ainsi qu'il est indivisible lorsqu'on le divise, de même il est incorruptible lorsqu'on le mange. C'est une merveille qui cause de l'étonnement à la raison, et de l'admiration à la foi même; mais quand elle considère la puissance de la divinité qui y est jointe, et qui est présente partout en ce corps spirituel, ou plutôt devenu divin par la toute - puissance qui lui a été conférée, alors ce miracle ne lui paraissant plus impossible, elle le révère sans en douter. »

11. « Au reste, quoique ce soit le même Christ, et la même substance de son corps qui a été offert sur la croix, et qui l'est sur

1 Quia omnino fidei et gratiæ ejus innitimur, quod terrena corpora in Christum converti, ipsumque in cœlestibus ad dexteram Patris sedentem, pro nobis interpellare et in sacramento altaris consecrari et esse credimus. Ibid.

• Dum ipsum corpus suum in ora fidelium datum et

l'autel, ce n'est pas néanmoins de la même manière sur la croix, Jésus-Christ a été véritablement mis à mort pour nous sur l'autel, ce n'est qu'en figure et en mémoire de sa passion. C'est une immolation qui se fait sans douleur de la part de Jésus-Christ; immolation que nous appelons mystique, ou sans effusion de sang. Nous péchons tous les jours; c'est pour cela que nous offrons tous les jours le sacrifice mystique. » Alger prouve que c'est le même sacrifice, parce que si celui que nous offrons tous les jours était différent, il serait superflu, celui qui fut offert sur la croix ayant été suffisant pour nous communiquer la vie éternelle. Il rapporte la profession de foi par laquelle Bérenger, condamnant son erreur, reconnaît que le pain et le vin sont, après la consécration, le vrai corps. et le vrai sang de Jésus-Christ. Il confirme cette doctrine par l'autorité de saint Augustin, et allègue un passage du même père, où il est dit, « que les mœurs bonnes ou mauvaises du ministre, n'influent point dans la consécration, comme la différence des mœurs n'empêche pas dans ceux qui communient, qu'ils ne reçoivent réellement le corps et le sang du Seigneur. >>

12. Alger prescrit les moyens de le recevoir dignement, d'une manière non-seulement spirituelle, mais aussi corporelle; et il montre qu'il est plus dangereux aux impudiques qu'aux autres pécheurs de s'en approcher, parce que c'est l'agneau de Dieu et le fils de la Vierge; et qu'il n'arrive presque jamais que l'impudicité soit suivie d'une véritable pénitence.

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Deuxième

Cap. 1.

13. Dès le commencement de la seconde partie, Alger combat ceux qu'on appelait livre, p. 275. stercoranistes, parce qu'ils croyaient que l'eucharistie allait au retrait, comme les aliments communs 3. Deux anonymes du IX® siècle, traitant cette question, dirent nettement qu'ils ne pouvaient s'imaginer qu'un si grand mystère fût exposé à des suites si honteuses, ni que le corps de Jésus-Christ fût sujet à pourrir ou à être consumé par le feu, n'y ayant aucune apparence qu'il lui puisse arriver ces sortes d'accidents. Alger épouse ce sentiment, et l'explique avec plus d'étendue,

singulis dividitur, et unum totum universis individuum et integrum habetur, sumptum, non consumptum : ut sicut individuum, cum dividitur; sic incorruptum, cum sumptum fuerit, credatur. Cap. 15.

3 Voyez tom. XII, pag. 552.

Sentiment

d'Alger sur

eucharis tiques, commun à beau

en soutenant qu'aucune partie de l'eucharis-
tie ne souffre ni corruption, ni altération;
qu'encore que les espèces du pain et du vin
semblent en souffrir, comme lorsqu'elles sont
avalées par des bêtes, ou consumées par le
feu, cela ne se fait pas réellement, mais seu-
lement en apparence, pour punir ou corriger
la négligence des ministres, ou pour châtier
l'incrédulité des méchants. Il convient toute-
fois que l'espèce du pain et du vin ne pou-
vant être éternelle, il est nécessaire qu'elle
ait une fin; mais il veut que cette défectibi-
lité ne soit accompagnée d'aucune tache de
corruption, et qu'elle n'en ait point la laideur.
Pour sauver à ces espèces les suites fâcheuses
que quelques-uns leur attribuaient, il a re-
cours au ministère des anges, et cite sur cela
un trait de l'histoire du martyr Tharsylius.
Les païens l'ayant pris dans le moment qu'il
portait le corps de Jésus-Christ, ils lui de-
mandèrent ce qu'il portait; il refusa de le
dire, de
peur de livrer les choses saintes aux
chiens. Comme, après l'avoir fait mourir, ils
cherchèrent exactement ce qu'il avait sur lui,
ils ne trouvèrent que les linges dont le corps
de Jésus-Christ avait été enveloppé, ce corps
sacré ayant été enlevé dans le ciel par le mi-
nistère des anges.

14. Tout ce discours d'Alger n'a pour but les espèces que de sauver le respect dû au sacrement de l'autel, et de montrer combien il avait d'éloicoup d'antres. gnement pour l'erreurdes stercoranistes, qu'il ne connaissait que par ce qu'il en avait lu dans les écrits du cardinal Humbert; mais cette erreur n'était point avouée des Grecs, ce n'était qu'une conséquence que ce cardinal tirait des reproches que les Grecs faisaient aux Latins de rompre le jeûne en Carême, lorsqu'ils disaient la messe à neuf heures. Il paraît au contraire que le stercoranisme était condamné par les Grecs, comme par les Latins. Nous citerons là-dessus ce que dit saint Jean Damascène, le théologien le plus accrédité dans l'Eglise grecque : « Voilà, dit-il 1, ce pur et non sanglant sacrifice que le prophète a prédit devoir être offert à Dieu depuis le lever du soleil jusqu'au couchant, c'est-àdire le corps et le sang de Jésus-Christ, qui devient la force et le soutien de notre âme et de notre corps, qui ne se consume point, qui ne se corrompt point, et ne va pas au retrait,

1 Hoc est purum illud et incruentum sacrificium quod ab ortu solis usque ad occasum sibi oblatum iri per Prophetam Dominus ait, corpus nimirum et sanguis Christi ad animi et corporis nostri firmamentum

à Dieu ne plaise! » Alger n'en dit pas davantage; et Guitmond d'Anvers en avait dit autant avant lui. On ne peut donc l'accuser de nouveauté, quoique dans les siècles suivants les théologiens n'aient pas fait difficulté de dire que les espèces sacramentelles sont sujettes à la corruption.

15. On demandait pourquoi Dieu, qui est invisible, et qui a déclaré qu'il voulait être adoré en esprit et en vérité, a ordonné à son Eglise un sacrifice visible. Alger répond que Dieu en a agi ainsi, afin de nous exciter plus vivement au souvenir de ses grâces; il dit que l'homme étant composé de corps et d'âme, il était juste qu'il offrit à Dieu des sacrifices corporels et spirituels. Cette réponse est tirée de saint Augustin dans son dixième livre de la Cité de Dieu.

16. L'on demandait encore pourquoi le sacrifice de l'Eglise n'est pas composé du seul sacrement, ou du corps et du sang de JésusChrist sans le sacrement, ou pourquoi il est composé de l'un et de l'autre. Alger répond: « Si l'eucharistie était un simple sacrement, elle ne différerait pas des sacrifices de l'ancienne loi, qui n'étaient que des figures; Jésus-Christ a donné à son Eglise la vérité, c'est-à-dire son corps et son sang, afin que ce que l'ombre ancienne n'avait pu faire, il le fit lui-même, opérant tous les jours sur l'autel l'ouvrage de la rédemption qu'il avait opéré une seule fois sur la croix; mais JésusChrist n'a pas voulu nous donner son corps et son sang sans sacrement, parce que, s'il nous les donnait sans voile et à découvert, personne n'oserait en approcher, soit qu'il se présentât à nous en la forme qu'il avait avant sa mort, soit comme il est depuis sa résurrection. Il convenait d'ailleurs, que son corps et son sang dans l'eucharistie fussent couverts du voile du sacrement, autant pour exercer la foi des chrétiens, que pour ôter aux païens l'occasion de reprocher aux chrétiens de manger de la chair humaine, et de boire du sang. >>

17. Pourquoi, dira-t-on encore, Dieu demande-t-il de nous tant de foi dans le sacrement de l'eucharistie? « C'est, répondit Alger, qu'Adam s'étant perdu pour avoir trop ajouté foi aux paroles du démon, qui lui conseillait de manger du fruit défendu, il faut que nous

cedens, quod non consumitur, nec corrumpitur, nec in secessum progreditur : absit, absit! Damascen., lib. IV de Fide orthodoxa, cap. XIV.

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