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Sermon sur la Passion.

Des sept

le consomme pas, et il ne vieillit pas par le nombre des années. Ce n'est que dans la maison seule de l'Eglise que l'on mange l'Agneau; personne n'y a part que le vrai Israélite.

9. On ne doit réitérer ni le baptême ni l'ordination, parce qu'il n'est pas permis d'annuler ce que le St-Esprit a sanctifié; comme la divinité est la même dans le Saint-Esprit et dans Jésus-Christ, il s'ensuit que ce qu'ils ont statué est d'une égale autorité. Ce que les apôtres mêmes ont enseigné par l'inspiration du Saint-Esprit, ne doit pas être moins stable que ce que Jésus-Christ a enseigné et ordonné de faire en mémoire de lui. Arnaud insiste beaucoup sur l'utilité du lavement des pieds, dont Jésus-Christ nous a donné l'exemple, et il nous le représente comme un acte d'humilité capable d'effacer nos fautes journalières. Il parle, dans le sermon sur la Cène, de tout ce qui se faisait en ce jour, auquel il rapporte l'institution de l'eucharistie. On y faisait le saint chrême 2 et l'on bénissait les autres huiles pour le baptême, la confirmation et l'ordination; on réconciliait les pécheurs à l'Eglise et l'on rendait la communion aux excommuniés. Les juges ouvraient les prisons et donnaient la liberté aux criminels condamnés.

10. Le discours sur la Passion est une paraphrase du cantique d'Habacuc. Dans celui qui est sur la Résurrection 3, il dit, d'après quelques anciens, qu'on croyait qu'Adam avait été enterré au lieu même où la croix de Jésus-Christ fut plantée, et que son sang ayant coulé sur la tête de ce premier homme, il en fut sanctifié. Le traité des Euvres cardinales de Jésus-Christ fut imprimé à Paris en 1500, par les soins de Cyprien Beneti, de l'ordre des frères Prêcheurs, chez André Bocard; en 1512 dans l'édition des œuvres de saint Cyprien, faite en la même ville, et en 1574 chez Nivelle; il se trouve encore dans l'édition d'Oxfort en 1682, et dans celle de Paris en 1726, au Louvre; on en cite encore d'autres.

11. Le livre des sept Paroles de Jésus-Christ paroles de Jé sur la croix porte, dans un manuscrit de Cîteaux 4, le nom d'Arnaud, abbé de Bonneval

sus-Christ sur

la croix.

holocaustum. Nulla panem hunc multitudo consumit, nulla antiquitate veterascit: una est domus Ecclesiæ in qua Agnus editur : nullus ei communicat quem Israelitici nominis generositas non commendat. Ibid.

1 Nec minus ratum est quod dictante Spiritu Sancto Apostoli tradiderunt, quam quod ipse (Christus) tra

en France. L'édition qu'en a faite Jean Gagney, conseiller et premier aumônier de François Ier, porte : «< Arnaud, abbé de Bonneval, dans le diocèse de Chartres. >> François Titelman fit imprimer cet opuscule à Anvers en 1532, avec un commentaire auquel il ajouta un discours d'Arnaud sur les Louanges de la sainte Vierge. On a le livre des sept Paroles de Jésus-Christ sur la croix dans plusieurs éditions de saint Cyprien, dans la Bibliothèque des Pères, à Paris en 1575, et dans le tome XXII de la Bibliothèque des Pères, à Lyon en 1677, [d'où il a passé au tome CLXXXIX de la Patrologie, col. 1677-1726.]

Titelman relève la douceur du style, la gravité et la solidité des pensées, et l'onction qui se fait sentir dans tout l'ouvrage. Il commence par l'explication de ces paroles : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'avez-vous abandonné? et finit à celles-ci: Mon Père, je remets mon âme entre vos mains. Arnaud fait voir que toutes ces façons de parler regardaient l'humanité de Jésus-Christ et non sa divinité; c'est en distinguant les deux natures qu'il concilie ce qui paraît d'abord contraire à la foi de l'Eglise sur l'incarnation du Verbe. Comme homme, il se plaint de ce qu'il est abandonné; comme Dieu, il accorde le paradis au larron.

Sermon sur les Louanges

12. Le discours des Louanges de Marie, publié à Anvers en 1532, par Titelman, se lit dans la de Marie. Bibliothèque des Pères de Lyon, [et dans le tome CLXXXIX de la Patrologie, col. 1725, 1734.] Arnaud croit que saint Joseph survécut au crucifiement de Jésus-Christ. L'Ecriture n'en dit rien, et parce qu'elle ne nous apprend pas de quelle manière la sainte Vierge est montée au ciel, si c'est en âme seule, ou avec son corps, il ne veut rien décider là-dessus; il croit seulement que son séjour sur la terre, depuis la mort de son fils, ne fut pas long.

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Autres

bé Arnaud.

manuscrits à Auxerre, en 1609, in-8°, et le dédia au cardinal du Perron. La préface d'Arnaud manque dans cette édition : elle se trouve dans l'édition de saint Cyprien à Oxfort, en 1682, à la fin des œuvres de ce père. L'abbé de Bonneval y prouve que les livres de Moïse sont les plus anciens que l'on ait. La Bibliothèque des Pères ayant été imprimée à Lyon avant l'édition des œuvres de saint Cyprien à Oxfort, en 1682, il n'est pas surprenant que le traité d'Arnaud, sur l'Ouvrage des six Jours, y soit sans préface. [Le traité de l'Ouvrage des six Jours est reproduit au tome CLXXXIX de la Patrologie, col. 15131570, d'après la Bibliothèque des Pères de Lyon.] L'auteur cite les commentaires de saint Ambroise et de saint Basile sur cette matière; mais il traite mal Origène et son livre des Principes, l'accusant d'avoir introduit dans l'Eglise les dogmes de Platon, l'erreur touchant le salut des démons, et la préexistence des âmes. Selon Arnaud, quoique Moïse ne dise rien de la création des anges, on ne peut douter qu'il n'en ait eu connaissance, puisqu'il parle en plus d'un endroit de ces esprits célestes. Arnaud croit qu'il les a compris dans la création du ciel. Dans ce que l'auteur dit sur l'Ouvrage des six Jours, il s'attache plus au sens moral et allégorique qu'au littéral.

14. On attribue à l'abbé Arnaud 1 un traité beria del du Corps et du Sang du Seigneur; mais c'est apparemment le discours sur la Cêne, l'un des douze dont est composé l'ouvrage intitulé: Des OEuvres cardinales de Jésus-Christ, où il parle fort au long de l'Eucharistie. Dom Mabillon étant à Câteaux transcrivit deux ouvrages d'Arnaud, l'un sous le titre Des Dons du Saint-Esprit; l'autre, un commentaire sur le psaume CXXXII, divisé en cinq homélies. Ces deux opuscules ont depuis été publiés par Casimir Oudin, à Leyde, chez Pierre Van-der-Meerche, en 1692, sur un manuscrit de l'abbaye de Long-Pont, ordre de Citeaux. [La Bibliothèque de Galland, tome XIV, a reproduit ces deux ouvrages. C'est de là qu'ils ont passé au tome CLXXXIX de la Patrologie, col. 1569-1608.] Les Méditations ne se trouvent que dans l'édition des œuvres

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de saint Cyprien, par Fell, à Oxfort, en 1682, [et dans le tome CLXXXIX de la Patrologie, col. 1733-1760.] On a à Clairvaux un commentaire d'Arnaud de Bonneval sur le prophète Isaïe.

15. Trithème met des lettres 3 dans le catalogue des ouvrages de l'abbé de Bonneval, et il n'est pas douteux qu'il n'en ait écrit un grand nombre; aucune n'est venue jusqu'à nous. Arnould, évêque de Lisieux, fait mention de celle que cet abbé, à son retour de Rome, lui envoya par un exprès à Tours. L'évêque de Lisieux le congratule sur le succès de son voyage et sur les honneurs qu'il avait reçus de la part de l'Eglise romaine, ajoutant qu'il se faisait un plaisir de recevoir sa visite à Lisieux dans le commencement du mois de mars. Il lui en écrivit une autre 5 pour lui témoigner combien il était sensible à ses infirmités et aux persécutions de ses ennemis. Arnould de Lisieux loue dans cette lettre les talents de l'abbé de Bonneval, soit pour la composition, soit pour l'élocution. Ses entretiens n'étaient pas moins agréables qu'instructifs s'il répandait des lumières dans l'esprit de ses auditeurs, il charmait leurs oreilles par la douceur et l'agrément de ses expressions. La troisième est une réponse à la lettre qu'Arnauld avait écrite à cet évêque, en se mettant en voyage pour un endroit qu'il ne nomme pas. « J'ai fait, lui ditil, ce que j'ai pu pour rendre votre voyage heureux; j'ai offert l'holocauste moëlleux (de l'Eucharistie): on ne peut rien offrir de plus précieux ni de plus efficace, ni de plus utile à celui qui l'offre, ou pour qui il l'offre, pourvu que, par leur indignité, ils ne mettent point d'obstacles à la dignité de ce sacrifice.>> Arnould de Lisieux dit ensuite que JésusChrist est tellement dans l'Eucharistie, que chacun de ceux qui le reçoivent le mangent tout entier; que celui qui l'offre en retire le même avantage que celui pour qui il l'offre ; que, quel que soit le nombre de ceux sur qui le prêtre étend sa charité 7, le sacrifice est tout entier pour tous, et pour chacun en particulier, la participation de plusieurs n'en divisant pas l'intégrité, comme elle n'en diminue pas la solidité ou le prix.

7 Quoscumque enim sacerdos effusæ caritatis latitudine complectatur, totum simul omnium, totum uniuscujusque est singillatim, nec integritatem dividit communicatio plurium, nec soliditatem minuit participatio diversorum. Arnold. Lexoviens., Epist. 38 ad Arnald. Abbat. Bona-Vallis.

Lettres d'Arnaud.

Le bienbeu. reux Ælrède,

val, mort en

1166.

CHAPITRE LI.

Le bienheureux Ælrède, abbé de Riedval [1166]; Amédée de Constance [vers 1160].

[Ecrivains latins.]

1. Elevé dès son enfance avec le prince Henri, abbé de Ried fils de David, roi d'Ecosse, Ælrède quitta la cour pour embrasser l'état monastique dans l'abbaye de Riedval, ordre de Citeaux, dans le diocèse d'York. D'une conduite édifiante, il fut chargé quelques années après sa profession du soin des novices; ensuite il fut élu abbé de ce monastère, qu'il gouverna jusqu'à l'an 1166, qui fut celui de sa mort, le 12 janvier. Sa vie et ses miracles se lisent en ce jour dans Bollandus, qui lui donne le titre de bienheureux.

Ses écrits. Ecrits historiques.

2. [Le tome CXCV de la Patrologie, col. 209-796, contient les œuvres d'Ælrède, divisées en deux parties, dont la première contient les œuvres ascétiques, et la deuxième les œuvres historiques. Parmi les œuvres ascétiques sont 1° vingt-cinq sermons; 2° trentedeux discours sur le prophète Isaïe; 3o le Miroir de la Charité, en trois livres suivis d'un abrégé; 4o De l'Amitié spirituelle, en trois livres; 5° De Jésus à l'âge de douze ans, au tome CLXXXIV de la Patrologie, parmi les œuvres de saint Bernard; 6o la règle des recluses, au tome XXXII de la Patrologie, col. 1451. Les ouvrages historiques sont 1° la Guerre de Standard entre les Ecossais et les Anglais; 2o la Généalogie des rois anglais; 3o la Vie du roi saint Edouard, en deux livres; 4° la Vie d'une religieuse de Wathun. Ces écrits sont reproduits d'après Roger Twisden.] On trouve du bienheureux Elrède, dans le recueil des Historiens anglais, fait par Roger Twisden, et imprimé à Londres en l'an 1652, in-folio, l'Histoire de la guerre de Standard en 1138; la Généalogie des rois d'Angleterre; la Vie et les miracles de saint Edouard, roi et confesseur; celle d'une religieuse de Wathun; la Vie de sainte Marguerite, reine d'Ecosse. Il y a aussi de lui un

1 Voir sur Ælrède, sa Vie, par un anonyme, avec préface des Bollandistes, au tome CXCV de la Patrologie. Elle est suivie, ibid., d'une notice par Fabricius

fragment de son ouvrage iutitulé : Des affaires d'Angleterre, adressé à Henri II, duc des Normands, et depuis roi, contenant le discours que le roi Eadgar fit aux évêques et aux supérieurs des monastères. Il se trouve dans le chapitre II du x° siècle de l'Histoire d'Angleterre, par Nicolas Haerpsfild, et dans le tome XXIII de la Bibliothèque des Pères à Lyon, en 1677.

Autres écrits

3. Les bibliothécaires anglais font mention de quelques ouvrages historiques d'El- historiques. rède, qui n'ont pas encore été rendus publics, savoir un livre des Miracles de l'Eglise d'Hagustalde; la Vie de saint Ninien, évêque; la Vie de saint Edouard, en vers élégiaques, dédiée à Laurent, abbé de Westminster; celle de David, roi d'Ecosse, en deux livres adressés à Henri II, roi d'Angleterre. Le second de ces livres donne un précis de la vie des rois d'Angleterre, depuis Edelwulfe, père du grand Alfred, jusqu'à Henri II, et une chronique depuis Adam jusqu'à Henri 1.

4. On a fait un recueil particulier des sermons et des autres œuvres spirituelles d'Elrède. L'auteur de ce recueil est le père Richard Gibbon, jésuite, qui le fit imprimer à Douai en 1631; elles ont passé de là dans le tome V de la Bibliothèque de Citeaux, et dans celle des Pères à Lyon, en 1677. Ces sermons, au nombre de trente et un 2, expliquent ce qui est dit dans les chapitres XIII, XIV, XV et XVI d'Isaïe, touchant les malheurs de Babylone, des Philistins et des Moabites. Le premier discours intitulé: De l'Avent ou Avénement du Seigneur, se trouve dans le tome II des ouvrages de caint Bernard 3, de l'édition de Paris, en 1719. Ælrède avait d'abord commencé à expliquer en peu de mots à ses frères la prophétie d'Isaïe; voyant qu'ils y trouvaient du plaisir et de l'avantage, il con

et d'une autre par Tissier. (L'éditeur.) — 2 Il y en a trente-deux. (L'éditeur.)

3 Pag. 568.

Sermons sur le prophète Isale.

Sermons du Temps et sur les Saints.

Le Miroir de la charité.

tinua jusqu'au dernier des malheurs de Moab. Alors, rédigeant par écrit ses homélies, il les envoya à Gilbert, évêque de Londres, pour les examiner et lui en dire son sentiment. Il s'y applique moins à développer le sens littéral du prophète, qu'à en tirer des allégories et des moralités pour l'instruction de ses religieux. Il ne laisse pas de temps en temps de faire remarquer que ce qui avait été prédit par Isaïe de l'Eglise chrétienne sous des termes mystérieux, s'est accompli depuis de point en point. Il dit dans le dixième discours que les deux grandes lumières dont il est parlé dans la Genèse, le soleil et la lune, sont la figure des deux luminaires qui brillent dans le firmament de l'Eglise, le sacerdoce et la royauté, le roi et l'évêque, le prince et le clerc, et qu'ils produisent un effet admirable quand ils se tiennent chacun dans les bornes de leur puissance, l'un en présidant aux choses spirituelles, l'autre aux temporelles et séculières. Il rappelle aux évêques l'exemple de saint Augustin, de saint Grégoire, de saint Ambroise, de saint Hilaire; aux rois et aux princes, celui du grand Constantin et de Théodose Ier.

5. Il y a encore d'Ælrède vingt-cinq sermons sur les évangiles et les fêtes de l'année on les trouve dans l'édition de Douai, en 1631, et dans le tome V de la Bibliothèque de Citeaux, à Bonne-Fontaine, en 1662; mais on ne les a pas rapportés dans la Bibliothèque des Pères de Lyon.

6. L'éditeur y a donné place à l'ouvrage d'Elrède qui a pour titre : Miroir de la Charité. Il est divisé en trois livres, dans les quels l'auteur traite à fond de la charité et des autres vertus chrétiennes. Dans un abrégé qui précède l'ouvrage, il montre que nous ne pouvons nous dispenser d'aimer Dieu, parce qu'en l'aimant nous évitons d'être condamnés de lui, nous méritons d'en être récompensés, et nous lui rendons amour pour amour, Dieu nous ayant aimés le premier; qu'en possédant cette vertu on rend toutes ses actions agréables à Dieu; que, comme un couteau divin 3, elle retranche de l'âme toutes les passions vicieuses; qu'elle procure à l'homme un repos qu'il ne peut trouver ni dans la santé du corps, ni dans les plaisirs des sens, ni dans les richesses;

1 Tom. XXIII Bibliot. Pat., pag. 76.

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$ Cap. II. Cap. v.

Cap. XIV. 6 Lib. I, cap. 1.

que par elle on acquiert l'innocence des mœurs, qui consiste dans l'amour réglé de soi-même et du prochain, que ce double amour est pour ainsi dire une portion de l'amour divin 5.

7. Dans le premier livre, qui est composé de trente-quatre chapitres, Ælrède enseigne que l'homme fait à l'image de Dieu était capable de la béatitude, et que par son libre arbitre, aidé toutefois de la grâce, il pouvait, en aimant Dieu sans cesse, trouver toujours son plaisir dans le souvenir et la connaissance de Dieu 7; mais qu'ayant cessé d'ai mer Dieu pour s'attacher à la créature, il est tombé dans la misère. Il traite ensuite de la réparation de l'homme par Jésus-Christ; de la grâce du Rédempteur, de son efficacité, qui est telle, qu'elle laisse au libre arbitre son activité, en sorte que c'est l'homme qui fait le bien, prévenu et aidé de la grâce, et qu'il le fait librement 9. Il fait cette distinction entre la grâce donnée à l'homme innocent, et la grâce accordée à l'homme depuis son péché 10, que celle-ci est plus forte que la première à cause de nos infirmités, inconnues à l'homme dans l'état d'innocence, et en ce qu'alors la grâce du Créateur donnait à l'homme le pouvoir de persévérer dans le bien, s'il eût voulu; au lieu que la grâce du Rédempteur nous donne même la persévérance. Il dit ensuite que de tous les animaux 11 l'homme est le seul qui ait la prérogative de s'élever des plaisirs des sens au désir du souverain bien, dont la possession seule peut le rendre véritablement heureux.

8. Le second livre est divisé en vingt-six chapitres 12: Ælrède s'y étend sur les effets différents que la charité et la cupidité produisent dans le cœur de l'homme; l'une en calme les passions, l'autre les irrite; mais il avertit qu'il ne faut pas prendre pour charité, pour amour de Dieu 13, certaines affections momentanées que l'on se sent pour lui: le vrai amour de Dieu consistant dans un attachement sincère et continuel à sa volonté, qui est Dieu même. Cet amour n'est pas parfait d'abord; il a ses degrés de perfection par lesquels nous nous élevons vers le ciel 14, comme la cupidité a les siens pour nous abaisser vers la terre.

9. Dans le troisième livre, divisé en quarante-un chapitres, l'auteur donne la dé

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finition de l'amour 1, de la charité, de la cupidité, ce qu'il n'avait pas encore fait. Sous le nom d'amour, il dit qu'on peut entendre, ou la faculté naturelle de l'âme d'aimer ou ne pas aimer un objet, ou l'acte même de cette faculté, qui se porte vers un objet bon ou mauvais. La bonté de l'objet détermine la bonté de l'amour; mais si l'objet est mauvais, l'amour est mauvais. Selon Ælrède, la charité et l'amour sont une même chose, avec cette différence que la charité a toujours un bon objet, Dieu ou le prochain, et que l'amour peut en avoir de mauvais : c'est à nous de choisir ce dont nous voulons jouir, et après le choix 2, de fixer notre amour selon que la raison nous le dicte. Or elle nous enseigne que nous devons aimer Dieu comme l'Etre suprême de qui nous devons tout craindre et tout espérer, et parce qu'il nous a aimés le premier; nous devons aussi nous aimer nous-mêmes, et notre prochain comme nous-mêmes: Dieu l'ordonne ainsi.

10. Mais il doit y avoir de l'ordre dans ces amours: si nous aspirons au comble de la perfection, il faut nous attacher à Dieu par amour, nous le proposer pour la fin de toutes nos actions, lui rapporter notre abstinence, nos veilles, nos lectures, nos travaux. L'ordre de l'amour de nous-mêmes est de procurer à notre corps ses besoins 4, et à notre âme tout ce qui est nécessaire au salut. Comme nous devons aussi aimer le prochain, non plus que nous-mêmes, mais comme nous-mêmes, nous sommes conséquemment obligés de contribuer, autant qu'il est en nous, au salut de son âme et aux besoins de son corps. Il y a même un ordre à garder dans les attentions que nous devons au prochain, savoir de préférer ceux qui nous sont les plus proches, ou par le sang, ou par l'amitié, ou par les bienfaits que nous en avons reçus, et ceux qui sont dans un degré supérieur, en conservant toutefois la volonté de se rendre utile à tous.

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Traité de l'Amitié spiri

12. Le traité de l'Amitié spirituelle est aussi partagé en trois livres 7; on l'a réimprimé, thelle. comme le précédent, dans la Bibliothèque des Pères à Lyon. Il est en forme de dialogue, dont les interlocuteurs sont Elrède, Yves, Gratien et Gauthier. Dès son enfance Ælrède ne trouvait rien de plus agréable que d'aimer et d'être aimé : cette passion le suivait dans les écoles; mais il n'en connaissait point les dangers, et ne sachant pas même les lois de l'amitié, il changeait souvent d'objet. La lecture des livres de Cicéron intitulés: De l'Amitié, lui donna des sentiments, et lui fit connaître en quoi l'amitié consiste. Ayant quitté le monde quelque temps après pour se consacrer à Dieu dans un monastère, il s'appliqua à la lecture des divines Ecritures; il y trouva du goût, et comparant ce qui est dit de l'amitié dans les livres saints avec ce qu'il en avait lu dans les écrits de Cicéron, il était surpris de ne plus se sentir pour ces derniers le même attrait. Il n'en trouvait plus que dans ce qui se ressentait de la douceur du nom de Jésus, et assaisonné du sel des saintes Ecritures: cela lui fit naître le dessein de tirer de ces divins livres et des écrits des pères de l'Eglise de quoi former un traité où il prescrirait les règles d'une amitié chaste et sainte.

13. Il distingue trois sortes d'amitié 3, la charnelle, la mondaine, la spirituelle. La première tire son origine d'un consentement aux mêmes vices; la seconde de l'espérance du gain, et du désir des biens temporels; la troisième, qui est la seule véritable, n'a pour but ni les voluptés, ni les richesses, c'est une union qui se forme entre des personnes de probité et de bonnes mœurs.

14. Cette amitié est un degré à l'amour de Dieu, aussi ne se trouve-t-elle qu'entre les bons; elle ne peut être entre les méchants, et l'on doit détester le sentiment de ceux qui croient qu'il est permis de manquer à son devoir pour faire plaisir à un ami. En effet, l'amour de Dieu étant le fondement de l'amitié chrétienne 10, il est nécessaire que Dieu en soit aussi la fin, et que les amis lui rapportent tout ce que l'amour leur suggère.

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