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les reliques de la sainte furent transportées de Syracuse à Corfou, et de cette ville à Metz dans l'abbaye de Saint-Vincent; il ajoute qu'en 1042 on prit un bras de la sainte pour le porter au monastère de Lintbourg, bâti depuis peu par l'empereur Conrad.

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12. Ce fut encore pendant son séjour à Metz qu'il composa la Vie de saint Sigebert II, roi d'Austrasie, fondateur de l'abbaye de SaintMartin, située hors des murs de Metz, sur les rives de la Moselle. Ce prince était fils de Dagobert I, mort à Epinay en 638. Il mourut lui-même en 656. Sigebert ne put en faire l'histoire qu'à l'aide des historiens du temps, dont il était trop éloigné pour en avoir appris quelque chose par lui-même. On croit qu'il travailla à cette Vie à l'occasion de la première translation des reliques de ce pieux prince, qui se fit en 1063. Cette Vie se trouve dans le tome ler de la Collection 3 d'André Duchesne; dans le supplément de Surius, par Mosander, au 1er février; dans Bollandus, au même jour. Ce dernier l'a donnée plus entière que les deux autres, et c'est sur son édition que l'auteur de la dernière Collection des Historiens français en a transcrit la première partie. [Le tome LXXXVII de la Patrologie latine, col. 303 et suiv., reproduit la Vie donnée par Bollandus, avec une notice extraite pareillement du même éditeur.] Georges Aulbéry, secrétaire de Charles III, duc de Lorraine, traduisit en français la Vie de saint Sigebert, donnée par Mosander, et la fit imprimer à Nancy, in-8°, en 1616, avec une description de cette ville et de la Lorraine, et la généalogie de la maison de Lenoncourt, chez Garnich.

13. De retour au monastère de Gemblou, Sigebert y fit un poème 5 en vers héroïques rimés sur le martyre de la légion Thébéenne, nommément de saint Maurice, patron de cette abbaye. Ce poème était divisé en trois livres; Valère André, qui l'avait vu, n'a rapporté que le premier vers 6. Il écrivit ensuite la Vie de saint Guibert, fondateur du monastère. Elle est en prose. Surius et Bollandus l'ont publiée au 23 mai, et dom Mabillon dans le tome Vil des Actes de l'ordre de SaintBenoit, avec les corrections 7 de Lambécius, et des notes de sa façon. Sigebert en fit dans

1 Sigebert., in Chronic., ad an. 656. Bolland., ad diem 1 februarii. Duchesne, tom. I, pag. 591.

• Tom. II Histor. Franc., pag. 597.

Sigebert., de Scriptor. Eccles., cap. CLXXI.

la suite un abrégé, pour servir de leçons à l'office du saint le jour de sa fête. Il composa aussi des antiennes et des répons, qu'il nota en musique, en sorte qu'on pouvait lui attribuer l'office entier de saint Guibert. On a, dans Lambécius et dans dom Mabillon, l'Histoire de l'élévation du corps de ce saint; mais elle est d'un autre moine de Gemblou, qui ne l'écrivit qu'après la mort de Sigebert. Elle est aussi dans Bollandus, mais en forme de discours.

14. Dom Luc d'Achéry, dans sa préface sur le tome VI du Spicilege, où se trouve la Chronique ou le livre des Gestes des abbés de Gemblou, dit que dans le manuscrit sur lequel il l'a fait imprimer elle porte le nom de Sigebert; il convient encore que cet écrivain, dans le catalogue de ses ouvrages, se déclare auteur de cette Chronique. Néanmoins, il ne peut se résoudre à la lui attribuer, et croit qu'elle est d'un de ses disciples qui ne nous a pas voulu faire connaître son nom. Ce qui l'a déterminé à prendre ce sentiment, c'est l'uniformité de style qui règne dans cette Chronique, depuis le commencement jusqu'à la fin, et encore parce que cet anonyme, en parlant des ouvrages de Sigebert, ne nomme point le livre des Gestes des abbés de son monastère. Mais ces deux raisons ne sont pas assez fortes pour ôter à Sigebert un écrit qu'il se donne lui-même en termes formels, et qui porte son nom dans les manuscrits. Il n'est point singulier qu'un écolier d'esprit et de talent imite le style de son maître, surtout quand il ne fait que continuer un ouvrage qu'il a sous ses yeux. S'il n'attribue pas à son maître la Chronique dont il donnait la continuation, ce n'est pas une preuve qu'il ne l'en crût pas auteur. Il ne dit rien non plus de sa Chronique universelle ni de la Vie de l'évêque Thierry, ni de plusieurs autres qu'on ne conteste pas à Sigebert 9, renvoyant le lecteur au catalogue que cet écrivain en avait donné lui-même dans son livre des Hommes illustres. Il faut donc distinguer deux chronologistes de Gemblou Sigebert, qui a donné la liste et l'histoire des abbés de cette maison, depuis l'abbé Erluin jusqu'à l'abbé Tietmar; et l'Anonyme, écolier de Sigebert, qui, voulant faire honneur à la mémoire de son maître, a

• Bibliot. Belgica.

7 Lambecii Bibliot., lib. II, cap. vIII, pag. 899.

• Lambec., ibid., et Mabill., tom. VII Actor., pag. 297 et 309.

• Chronic. Gemblac, pag. 536.

Les Gestes des abbés de Gemblou.

Légende de Saint-Malo,

Légende de

dard.

coupé en deux l'article de Tietmar 1, pour avoir lieu de parler de Sigebert et des autres personnes de mérite qui vécurent sous cel abbé. La Chronique de Gemblou s'étend depuis l'an 948 jusqu'en 1136; elle est intéressante, non-seulement pour la connaissance des hommes de lettres qui sont sortis de ce monastère, mais aussi pour l'histoire du pays de Liége.

15. Sigebert retoucha 2 et mit en meilleur style la Légende de Saint-Malo, et la dédia à l'abbé Tietmar, qui l'avait engagé à ce travail. Elle est imprimée, avec l'épître dédicatoire, dans Surius, au 15 novembre; mais on n'a aucune connaissance des répons et des antiennes qu'il avait composés et notés en musique pour l'office du saint.

16. Il mit aussi en un style plus poli la Vie int Thé de saint Théodard, évêque de Maëstricht. C'est celle que Surius a donnée au 10 septembre; car il est hors d'apparence que l'abrégé qu'on en trouve dans le recueil des Actes des évêques de Liége soit de Sigebert, puisqu'il ne remplit pas même une page.

Vie de saint Lambert,

Réfutation lettre

d'une

VII.

17. Il fit de la Vie de saint Lambert ce qu'il avait fait de celle de saint Théodard son prédécesseur, c'est-à-dire qu'il en changea le style dur et barbare en un autre plus poli et plus coulant. Henri, archidiacre et doyen de la cathédrale de Liége, voulant quelque chose de plus, l'engagea à orner cette Vie d'un commentaire. Sigebert chercha à cet effet dans les anciens écrivains des comparaisons et des pensées qui eussent du rapport à la vie du saint. Cela fit un ouvrage fleuri qui plut au doyen, mais qui ne fut pas goûté du public. On s'en tint à la première Vie de Sigebert, comme plus simple et plus claire. Ni l'une ni l'autre n'ont été rendues publiques.

18. On a vu, dans l'article de [saint] Gréde Grégoire goire VII, qu'Hérimann, évêque de Metz, l'ayant informé que plusieurs doutaient qu'il fut au pouvoir du Saint-Siége apostolique d'excommunier Henri IV, roi de Germanie, et de délier ses sujets du serment de fidélité, ce pape écrivit là-dessus une grande lettre à cet évêque, où il appuie, par divers exemples et par des passages de l'Ecriture et des pères, ce qu'il avait fait à l'égard de ce prince et de ses sujets. Le clergé de Liége, qui pour la

1 Pag. 535.

2 Sigebert., de Scriptor. Eccles., cap. CLXXI.

3 Leodiens. Histor., tom. 1, pag. 99, et Marten., tom. IV Ampliss. Collect., pag. 845.

Sigebert., de Script., cap. CLXXI.

plus grande partie était attaché au roi de Germanie, engagea Sigebert à réfuter les principes établis dans celte lettre. Il le fit par des arguments tirés des pères; ce sont ses paroles, et c'est surtout ce que nous savons de cette réfutation qui est restée dans l'obscurité. On a quelque lieu d'être surpris qu'elle n'ait pas trouvé place dans le Code épistolaire d'Udalric de Bamberg 7, où il y a plusieurs lettres de [saint] Grégoire VII, nommément celle à Hérimann; de Henri IV, roi de Germanie, el des évêques ou qui étaient du parti de ce prince, ou qui tenaient celui du SaintSiége.

19. On n'a pas non plus encore mis au jour l'Apologie des Prêtres mariés, que Sigebert avait composée à la prière du doyen de l'Eglise de Liége, et qu'il lui avait dédiée. Il y a apparence qu'il ne s'appliquait, dans cet écrit, qu'à montrer que l'on avait eu tort de défendre aux fidèles d'entendre la messe des prêtres engagés dans le mariage, et à ceuxci de la célébrer et de faire leurs fonctions dans les offices divins. Il fait à peu près la même chose dans sa Chronique, où il accuse le concile de Rome de l'an 1074 d'avoir innové, et même, selon quelques-uns, d'avoir agi contre les décrets, en défendant aux simoniaques et aux prêtres mariés la célébration de la messe, et aux laïques d'y assister. Il fondait ses reproches sur ce que c'est JésusChrist qui opère dans le baptême et dans les autres sacrements; qu'ainsi ces sacrements avaient toujours leurs effets, soit que les ministres fussent bons ou mauvais. Il entre dans le détail des fâcheuses suites que les décrets du concile occasionnèrent; suites, dit-il, qu'on doit plutôt rejeter sur l'ignorance. des laïques de ce temps-là, qui ne savaient distinguer dans les ministres de l'Eglise ce qu'ils peuvent faire validement ou licitement. Au lieu de faire baptiser leurs enfants par des prêtres mariés, ils les baptisaient euxmêmes, se servant de l'ordure qui se trouve dans les oreilles au lieu de chrême; ils donnaient le viatique et faisaient les obsèques des défunts; il leur arrivait souvent de fouler aux pieds le corps du Seigneur consacré par ces prêtres; de répandre volontairement le sang précieux, et de faire beaucoup d'autres

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choses contre les règles et les usages de l'E- munication, veuille encore les faire périr par
glise.
le glaive.

20. Le pape Pascal II ayant écrit, l'an 1202, Pà Robert, comte de Flandre, qui s'était déjà déclaré contre les schismatiques du diocèse de Cambrai, de faire aussi la guerre au clergé de Liége excommunié, Henri, doyen de la cathédrale, engagea Sigebert à réfuter cette lettre. Sigebert ne mit point son nom à la tête de la réfutation. On l'a intitulée, dans la collection générale des Conciles Lettre des Liégeois contre le pape Pascal II, et ce sont en effet les clercs du diocèse de Liége qui parlent dans cette lettre 2. Sigebert n'a fait que prêter sa plume. Ils s'adressent à tous. les hommes de bonne volonté, et dès le titre de leur apologie ils se déclarent catholiques et attachés inviolablement à la vérité de la foi et à l'unité de l'Eglise. Quoique très-irrités du procédé du pape Pascal, ils ne laissent pas de le reconnaitre pour pape légitime et le père de toutes les Eglises, comme ils reconnaissent aussi l'Eglise romaine pour leur mère. Ils rapportent la lettre de Pascal II toute entière; puis, la prenant en détail, ils disent qu'on ne connait dans l'Evangile que deux glaives: l'un, que Jésus-Christ a tiré plutôt contre les affections charnelles que contre les assauts du siècle; l'autre, par lequel, en mortifiant les vices de la chair, on achète la couronne du martyre; d'après eux, l'Eglise ne connaît point ce troisième glaive donné à Robert par l'Apostolique. Ils déplorent les malheurs de l'Eglise de Cambrai; conviennent que les canons permettent aux clercs de prendre les armes contre les Barbares et les ennemis de Dieu, quand c'est pour la défense de l'Eglise, mais ils soutiennent qu'on ne trouve rien dans ces canons qui autorise à déclarer la guerre à une Eglise particulière. Ils opposent à la conduite du pape Pascal celle de Saint Martin de Tours, qui réprouva l'édit de mort rendu par l'empereur Maxime contre les priscillianistes, et qui se défendit de communiquer avec l'évêque Ithace, privé de la communion par ses confrères pour avoir sollicité cet édit. Ils ne disconviennent pas qu'il ne soit juste que les catholiques privent des bénéfices ceux qui se sont séparés de l'Eglise catholique; mais ils se plaignent que l'Eglise romaine, qu'ils appellent leur mère, outre la note infamante d'excom

1 Tom. X Concil., pag. 630; Goldast., Apolog., pag. 158, et Marten., tom. I Ampliss. Collect. p. 588. Les éditeurs de la Patrologie avertissent au tome

21. «Que fait à notre cause, disent-ils, Pag. 634. celle des Cambraisiens? Nous plaignons leur sort, mais nous n'avons rien à craindre de ce qu'ils souffrent. Qu'avons-nous fait contre les canons qui soit digne d'excommunication et de mort? Unis du même esprit dans lequel nous avons été baptisés, c'est à tort que l'on nous a déférés à l'Eglise romaine, comme divisés entre nous. Dieu nous commande de rendre à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu; Pierre et Paul ont mis en pratique cette maxime. Serons-nous excommuniés parce que nous honorons le roi? On dira peut-être que nous sommes simoniaques. Au contraire, nous les évitons autant qu'il est en nous; et lorsque nous ne pouvons les éviter, nous les supportons patiemment, selon les lieux et les temps. Mais quand et par qui avons-nous été excommuniés, et pour quelles raisons? Ce n'est ni par notre évêque ni par notre archevêque, ni même par le pape. Il ne l'aurait pas fait sans nous entendre. Si c'est parce que nous sommes attachés à notre évêque, qui l'est lui-même à l'empereur, alors nous dirons que c'est ici un artifice du démon, qui a trouvé le moyen de diviser l'empire et le sacerdoce. Quoi donc, notre évêque n'a-t-il pas prêté serment de fidélité à l'empereur? Le parjure n'est-il pas un grand péché? Ne punit-on pas de mort celui qui manque de fidélité à César? » Ils rejettent comme une nouveauté la doctrine de ceux qui prétendaient qu'on pouvait dispenser les sujets du serment de fidélité.

22. «< Mais pourquoi nous appelle-t-on faux 636.
clercs, nous qui, vivant selon les règles ca-
noniques, méritons le nom de clercs, c'est-à-
dire d'avoir part à l'héritage de Dieu ? Celui-
là n'y a point de part, qui veut nous en ex-
clure. » Ils lancent encore quelques autres
traits contre le pape Pascal, et, supposant
toujours que le sujet de l'excommunication
contre les Liégeois était l'attachement de leur
évêque pour le roi Henri, ils font voir, par
les témoignages de saint Ambroise et de saint
Augustin, que de tout temps les plus saints
évêques ont rendu à César ce qui était à Cé-
sar, en même temps qu'ils rendaient à Dieu
ce qui lui est dû. Ils prétendent qu'en pre-
nant bien le sens de l'Ecriture sainte, ou

CLX de leur collection, qu'ils ne la reproduisent pas
à cause des violentes attaques qu'elle contient contre
le Saint-Siége. (L'éditeur.)

Pag. 637.

l'on ne doit point excommunier les rois ni les empereurs, ou l'on ne doit le faire qu'avec peine; que leur nom même les déclare exempts de cette censure; ou qu'en tout cas il n'est pas encore décidé s'ils sont sujets à l'excommunication. « Ce n'est pas, ajoutent-ils, qu'ils ne puissent être repris de leurs fautes par des personnes discrètes et craignant Dieu; mais il paraît que Jésus-Christ s'est réservé le jugement de ceux qu'il a commis à sa place. pour gouverner le monde, lui qui est le Roi des rois. >>

23. Ils vont plus loin, et prétendent que les rois et les empereurs ont corrigé plusieurs fois les fautes que les papes avaient faites par ambition; qu'ils en ont même contraint de quitter le Saint-Siége. Ils ajoutent:

« Il ne faut pas trop nous alarmer de ce qu'on 638. nous traite d'excommuniés; nous sommes

persuadés que Rome nous exceptera de l'excommunication.» Ils se fondent sur une fausse supposition, savoir que Grégoire VII, après avoir excommunié le roi Henri et ses fauteurs, s'en repentit, et leur donna l'absolution; ce fait est démenti par les historiens du temps, comme on l'a remarqué plus haut. 639. Le clergé de Liége continue : « Si l'empereur

640.

Henri est hérétique, ainsi que le dit le pape Pascal, nous en sommes affligés pour lui et pour nous; mais quand il serait tel, nous ne laisserions pas de souffrir qu'il nous commande, persuadés que nous aurions mérité par nos péchés d'avoir un tel prince. En ce cas-là même nous ne devrions pas chercher à nous en délivrer par la force des armes; mais il serait de notre devoir d'adresser à Dieu nos prières pour lui, puisque saint Paul veut que l'on prie même pour les princes qui ne sont pas chrétiens, afin que nous menions une vie tranquille.

24. » Mais au lieu de prier pour le roi, quoique pécheur, afin que nous menions une vie tranquille, le pape Pascal excite la guerre contre lui et empêche la tranquillité. D'où vient cette autorité au pape, de tirer, outre le glaive spirituel, un glaive meurtrier contre ceux qui lui sont soumis? C'est une maxime qu'aucun pontife romain n'a autorisée par ses décrets. Au contraire, saint Grégoire, premier du nom, qui s'était trouvé en état de détruire les Lombards, n'en voulut rien faire, disant qu'il craignait de participer à la mort d'aucun homme, quel qu'il fût. Les

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papes ses successeurs ont suivi son exemple. Grégoire VII est le premier qui se soit armé du glaive militaire contre l'empereur et qui en ait donné l'exemple aux autres papes. » Pascal II, en ordonnant au comte Robert de faire la guerre à l'empereur, lui promettait, ainsi qu'à ses soldats, la rémission de leurs péchés. Sur cela, le défenseur de l'Eglise de Liége dit : « En vain je lirai toute la Bible et tous Pag :. les anciens qui l'ont commentée, je n'y trouverai point d'exemple d'un semblable commandement. Hildebrand est le seul qui, mettant la dernière main aux saints canons, a enjoint à la comtesse Mathilde, pour la rémission de ses péchés, de déclarer la guerre à l'empereur Henri. Qu'en cela lui ou d'autres aient agi avec équité, nous n'en avons aucune preuve; nous savons seulement qu'on ne peut lier ni délier sans examen. C'est la règle que l'on avait tenue jusque-là dans l'Eglise romaine, et celle que cette sainte mère nous a prescrite. D'où vient donc cette nouvelle maxime d'accorder aux pécheurs, sans confession et sans pénitence, l'impunité de leurs péchés passés et la liberté d'en commettre à l'avenir? Quelle fenêtre n'ouvre-ton pas par là à la malice des hommes? >>

25. On voit, par l'analyse de cette lettre, qu'encore qu'elle soit trop vive et peu respectueuse, elle ne contient rien qui puisse faire regarder comme schismatiques ni celui qui l'a écrite, ni ceux au nom desquels il l'écrivit. Il n'y est pas dit un seul mot en faveur de l'anti-pape Guibert; au contraire, Pascal II y est reconnu pour pape légitime. On lui donne les titres d'apostolique, d'évêque des évêques, d'ange de l'Eglise, d'oint du Seigneur, de christ du Seigneur 2; l'Eglise de Liége se dit fille de l'Eglise romaine 3; elle l'appelle sa mère; elle déclare qu'elle veut en tout éviter le schisme, la simonie, l'excommunication; et que si, à l'imitation de son évêque, elle demeure attachée 5 à l'empereur Henri, c'est uniquement parce que, selon les divines écritures, elle doit l'obéissance à son souverain. Toute la plainte du clergé se réduit à ce que le pape Pascal employait les censures et la force des armes pour les obliger à manquer de fidélité envers le roi Henri IV. On ne paraît donc pas bien fondé à taxer de schisme l'auteur de la lettre, ni ceux au nom desquels elle a été écrite. Gerbais, docteur de Sorbonne, l'a

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C42.

Remarques sur cette lettre.

traduite en français, et fait imprimer en cette langue à Paris, chez Frédéric Léonard, en 1697, avec le texte latin. Elle se trouve dans le tome X des Conciles, dans l'Apologétique de Goldast, dans les Centuriateurs de Magdebourg1 et dans le tome I de la Grande Collection de dom Martène 2, mais elle y est imparfaite 3. 26. Il y avait une différence entre l'Eglise. de Trèves et celle de Liége, sur l'observation du jeûne des Quatre-Temps. La première, se conformant aux règles établies par Bernon, abbé de Richenow, dont nous avons parlé plus haut, observait ce jeûne le premier samedi de mars, lorsque le mercredi et le vendredi, qu'on devait aussi jeûner, se rencontraient dans le même mois. Celle de Liége, qui suivait un autre usage, et trouvait de la difficulté dans la pratique de l'Eglise de Trèves, lui écrivit pour en avoir la solution. La réponse ne fut point satisfaisante, parce que cette pratique n'était fondée que sur des raisons allégoriques difficiles à comprendre. L'Eglise de Liége les réfuta et demanda de nouvelles explications. L'Eglise de Trèves. répondit en peu de mots, et celle de Liége fit encore une réplique. C'étaient trois lettres de la part de cette dernière Eglise, et Sigebert fut prié par Henri, doyen de la cathédrale, de les écrire; sa première lettre est perdue; nous avons les deux autres dans le tome I des Anecdotes de dom Martène. On y trouve aussi les deux de l'Eglise de Trèves.

27. La raison que l'on avait dans cette église de célébrer le jeûne des QuatreTemps en mars et non en février, était qu'en ce mois l'année commençait, et que Dieu y avait créé le monde; elle ajoutait plusieurs

1 Centur. 12, cap. VII, pag. 1110, 1128. * Pag. 587.

* Les observations de notre auteur sur la lettre insolente de l'Eglise de Liége me paraissent bien bénignes. Voici ce qu'en dit Rohrbacher avec plus de vérité : « Le clergé de Liège répondit à cette lettre par une déclamation très-longue et tellement schismatique, qu'il nie que llenri ait été excommunie par les papes, qu'il révoque en doute qu'il puisse l'être, qu'il rejette la cause du schisme non sur Henri qui avait fait six antipapes, mais sur le pape saint Grégoire VII, qu'il ne nomme qu'Hildebrand, de même qu'il ne nomme Urbain II qu'Odon ou Odoard, et qu'il appelle le pape Pascal, non l'ange du Seigneur, mais l'ange exterminateur. Ce pape, qu'ils ne nomment le plus souvent que le seigneur Paschase, les avait appelés faux clercs; ils lui répondent que celui-là nème en est un, qui leur donne ce nom. Quant au fond de l'affaire, leur attachement à Henri, excommanié et déposé, ils se perdent dans des généralités banales, sans jamais rappeler l'état particulier de la

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autres raisons, mais allégoriques, pour finir le jeûne des Quatre-Temps en mars, le second en juin, le troisième en septembre, le quatrième en décembre. L'Eglise de Liége, dans sa réponse 8, conteste le principe, et dit que, suivant l'Ecriture, la première partie du mois de mars est plutôt la fin que le commencement de l'année; elle le prouve aussi par l'autorité de saint Jérôme et par plusieurs faits d'histoire qui regardent les temps de l'ordination, et par où l'on peut voir que les papes Gélase, Symmaque et Félix ont fait des ordinations au mois de février, ce qui prouvait clairement que l'on avait en ces années-là observé le jeune des Quatre-Temps en ce mois. Elle allègue 10 encore l'autorité d'Anatolius, qui prétend que l'on ne doit pas commencer les saisons de l'année par les premiers jours du mois. La seconde lettre de l'Eglise de Trèves, et la troisième de celle de Liége ou de Sigebert, ne roulent que sur le défaut qui paraissait dans la règle établie par l'abbé Bernon pour la fixation du jeûne des Quatre-Temps du premier mois; au reste, la contestation de ces deux Eglises n'en altéra pas l'union, elles conservèrent chacune leur usage.

28. Sigebert, voulant exercer son esprit par un ouvrage varié, prit pour matière 11 le livre de l'Ecclésiaste, qu'il mit en vers héroïques, avec une explication littérale, allégorique et mythologique; cet ouvrage n'a pas encore été mis sous presse, mais il existe 12, 12, ainsi que son Comput Ecclésiastique 13; il est précédé d'un dialogue où les interlocuteurs relèvent les erreurs de Denis-le-Petit sur les années du Sauveur, notamment sur celle de sa Passion;

question, les lois fondamentales qui régissaient alors les nations chrétiennes, notamment la nation allemande, savoir : Pour régner sur la nation, il faut que ce prince soit catholique et soumis à l'Eglise; s'il reste excommunié plus d'un an, il perd par là même tout droit de régner. Henri, en plus d'une circonstance, s'était expressément soumis à cette loi. En un mot, cette protestation du clergé de Liége ressemble parfaitement aux protestations modernes des jansénistes d'Utrecht, qui, lorsque le pape les excommunie, soutiennent au pape qu'il ne les excommunie pas. » Rohrbacher, Histoire universelle de l'Eglise catholique, tom. XIV, pag. 665 de la 3e édition. (L'éditeur.)

Sigebert., de Script. Eccles., cap. CLXXI. 5 Tom. I Anecdot., pag. 293 et 306. 6 Ibid., pag. 292 et 305. 7 Ibid., pag. 293. 8 lbid., pag. 295. 9 Pag. 299. 10 Pag. 300. 11 Sigebert, de Script. Eccles., cap. CLXXI. 12 Bibliot. Belg., verbo Sigebertus. 13 Ibid.

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