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Constantin

Manasses.

Nicéphore Bryenne.

4. Constantin Manassès, contemporain de Michel Glycas', composa sous le règne de Manuel Comnène une Chronique abrégée qui commence à la création du monde, et finit à l'an 1081, auquel Nicéphore Botoniate fut détrôné par Alexis Comnène, le 3 avril, n'ayant régné que trois ans. Voyant les Comnènes maîtres de Constantinople, il en sortit et se retira dans un monastère, où il mourut quelque temps après. La Chronique de Manassès est en vers, et adressée à Irène, sœur de l'empereur Manuel Comnène, et femme d'Andronic Sébastocrator 2. Leunclavius traduisit cette Chronique en latin sur un manuscrit d'Italie, et la fit imprimer en cette langue avec des notes, à Bâle en 1573, in-8°. Meursius joignit le texte grec à cette version, après l'avoir corrigée sur un manuscrit de la bibliothèque Palatine et enrichie de nouvelles notes. Son édition parut à Leyde en l'an 1616, in-4°. Nous en avons une autre parmi les écrivains de l'Histoire byzantine, à Paris en 1655, par les soins de Charles Annibal Fabrotti. Pour compléter cette édition, l'éditeur a mis à la fin de cette Chronique les notes de Leunclavius et de Meursius, avec les variantes de Léon Allatius, et un Glossaire pour l'intelligence des termes peu usités. [La Chronique de Manassès se trouve aussi dans l'édition de la Byzantine, à Venise en 1729, dans celle de Bonn, avec Joël et Acropolite, par Bekker, 1 volume, et dans la nouvelle série de la Patrologie grecque. On a encore de cet auteur, 1o un poème politique sur Justin le Grand, empereur, avec une version latine en vers, par François Morelle, Paris 1610, in-8°; 2o quelques fragments publiés avec notes et traduction, par Boissonade, 1819, in-12. Le tout est reproduit dans la Patrologie grecque.]

5. Nicéphore Bryenne, mari d'Anne Comnène, fille d'Alexis Comnène et de l'impératrice Irène, se fit admirer de son temps par la beauté de son corps et de son esprit, par sa prudence consommée, par son savoir et par son éloquence. Irène, sa belle-mère, lui fraya autant qu'il fut en elle le chemin à l'empire, à l'exclusion de Jean, son fils aîné. Alexis, son beau-père, le fit d'abord césar et ensuite panhypersebaste; mais les tentatives pour faire monter Bryenne sur le trône furent inutiles. Jean Comnène y fut placé le 15 août 1118, comme ayant été associé à

1 Const. Manas., Chronic., pag. 113, edit. Venet.; Paris., 136.

l'empire dès l'an 1090 ou 1091. Nicéphore Bryenne écrivit en quatre livres l'Histoire des Empereurs, en commençant au règne d'Isaac Comnène, et finissant à celui d'Alexis Comnène, c'est-à-dire depuis l'an 1057 jusqu'en 1081. Le père Poussines les a traduits en grec et en latin, et fait imprimer en ces deux langues, à Paris en 1661, in-folio, à la suite de Procope. [On les trouve aussi dans la Byzantine, à Venise, 1729, avec les notes de du Fresne, à Bonn avec Cinnam, par Meineke, 1 volume, dans la nouvelle série de la Patrologie grecque.] Anne Comnène parle souvent de cette Histoire dans celle qu'elle a faite du règne de son père Alexis Comnène.

Isaac, catholique de la

ménie.

6. Il est parlé dans l'histoire de la légation de Théorien vers Norsesis, catholique des Granda ArArméniens 3, d'un Isaac, évêque, qui s'était expliqué sur les deux natures en Jésus-Christ. On croit que c'est le même dont nous avons deux Invectives contre les Arméniens, sous le nom d'Isaac, catholique ou métropolitain de la grande Arménie. On y cite quelques paroles de Norsesis dans ses conférences avec Théorien ainsi les Invectives d'Isaac furent écrites postérieurement à ces conférences. Isaac était Arménien, avait été élevé parmi ceux de cette nation, et imbu de toutes leurs opinions; mais ayant embrassé la foi catholique, il en prit la défense dans deux écrits intitulés Invectives contre les Arméniens, dont les erreurs étaient les mêmes que celles d'Eutychès, de Dioscore, de Timothée Elure, de Pierre le Foulon, de Julien d'Haly carnasse et des apthartodocites, qui niaient que JésusChrist eût pris dans le sein de la Vierge un corps de même nature que le nôtre, et anéantissaient conséquemment le dogme de l'Incarnation. Le père Combefis a traduit de grec en latin et fait imprimer ces deux traités sur un manuscrit de la bibliothèque du roi, dans le second tome de son Supplément, à Paris en 1648, in-folio. Ils ont été réimprimés en latin dans le vingtième tome de la Bibliothèque des Pères, à Lyon en 1677, [et dans la Bibliothèque des anciens Pères de Galland, tome XIV, p. 411-447. Le tome X des Script. vet. nov. collect., par Maï, part. п, p. 300, contient quinze canons sous le nom d'Isaac III ou d'Isaac le dernier du nom. A la suite vient une collection de canons par Jean le Stylite, avec les réponses d'Isaac, patriarche d'Ar

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Invectives d'Isaac contre

niens.

Analyse de la première.

ménie, et de plusieurs des évêques ses collègues.]

que

7. Dans la première Invective, Isaac comles Armé bat d'abord l'erreur des aphtartodocites 1; en niant Jésus-Christ eût un corps consubstantiel au nôtre, ils ne laissaient pas de lui en donner un, mais impassible, immortel, incréé, invisible de sa nature. Ils ajoutaient que par l'incarnation ce corps avait été changé en la nature divine, qui l'avait absorbé, comme une goutte de miel jetée dans la mer se mêle tellement avec l'eau qu'elle disparaît entièrement. Sur ce principe ils disaient que le corps de Jésus-Christ n'avait conservé, ni sa nature, ni ses propriétés, et que par une conséquence nécessaire, il n'y avait pas en lui deux natures, mais une seule, savoir la nature divine. Ils ne donnaient donc pas au saint sacrifice de la chair du Seigneur le nom de corps de Jésus-Christ, mais le nom de sa divinité, quoiqu'ils ne pussent ignorer que Jésus-Christ même l'avait appelé son corps.

8. Isaac dit qu'on avait prouvé mille fois aux Arméniens, par l'autorité des livres 2, soit de l'Ecriture, soit des pères, écrits en langue arménienne, qu'il y a en Jésus-Christ deux natures et deux opérations; et il démontre encore cette vérité par des passages tirés des Psaumes, des Evangiles et des saints docteurs de l'Eglise. Il prouve qu'encore que la divinité n'ait jamais été séparée de JésusChrist, néanmoins son corps a été attaché à la croix, enfermé dans le tombeau, tandis que son âme qui en fut séparée à la mort était descendue aux enfers, selon l'expression de l'Ecriture; que ce même corps était en un lieu éloigné de la demeure de Marie et de Marthe, lorsque Lazare leur frère mourut; que ce même corps après sa résurrection était sur la terre et non dans le ciel, lorsque Jésus-Christ apparut à Marie; qu'il avait des os et de la chair lorsqu'il le donna à toucher aux apôtres, pour les tirer du doute où ils étaient qu'il fût ressuscité; que s'il était vrai qu'en lui la nature humaine avait été changée en la divinité, on ne pourrait dire qu'il était homme parfait 3, comme l'enseignent l'Evangile, les pères du concile de Nicée dans leur symbole, saint Athanase et saint Cyrille d'Alexandrie.

3

9. Les Arméniens ne célébraient en aucun

1 Tom. II Actuar. Combef., pag. 318.

temps de l'année la fête de l'Annonciation *, sous prétexte que la sainte Vierge n'avait pas conçu au mois de mars; ils se contentaient de faire en un même jour et sans cérémonie mémoire de ce mystère, de la nativité et du baptême de Jésus-Christ. Ils avaient supprimé dans leurs exemplaires un endroit de l'Evangile de saint Luc; à la consécration ils ne mêlaient point d'eau avec le vin, et se servaient du pain azyme dans le sacrifice; ils offraient à l'autel des bœufs, des agneaux et des brebis; ils ne respectaient pas assez le signe de la croix, et joignant trois croix ensemble, ils donnaient à cet assemblage le nom de trinité. Dans le chant du Trisagion, ils ajoutaient, comme Pierre le Foulon : « Dieu saint, Dieu puissant, Dieu immortel, qui êtes crucifié pour nous. » Ils ne voulaient pas recevoir l'ordination des mains de l'archevêque de Césarée, et observaient un jeune très - rigoureux la semaine qui précède le commencement du Carême, dans laquelle les Grecs se contentaient de s'abstenir de viande et de vivre de laitage.

10. Isaac attaque les Arméniens sur tous ces articles. Il fait voir par le témoignage de tous les anciens pères de l'Eglise, nommément par celui d'Eusèbe de Césarée, de saint Athanase, de saint Chrysostôme, que le sentiment commun était que la sainte Vierge avait conçu le 25 mars; qu'en ne célébrant pas avec solennité la naissance de Jésus-Christ, ils s'éloignaient de l'usage de toute l'Eglise; qu'en n'admettant qu'une seule nature en Jésus-Christ, savoir la divine, c'était dire que l'incarnation ne s'était faite qu'en apparence; que c'était à dessein d'appuyer cette erreur, qu'ils avaient retranché de l'Evangile de saint Luc ce qui y est dit de la sueur de sang de Jésus-Christ dans son agonie; que l'usage de l'Eglise de mêler de l'eau avec le vin dans le calice venait d'une tradition apostolique, fondée sur ce que l'eau était sortie avec le sang du côté de JésusChrist lors de sa passion; que les liturgies de saint Jacques et de saint Marc, de même que celle de saint Basile, le concile de Carthage composé de deux cent dix-sept évêques, sous les empereurs Arcade et Honorius, rendent témoignage à la doctrine de l'Eglise sur ce point, comme à sa foi sur l'union des deux natures en Jésus-Christ; qu'en se servant du

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Lac, IX,

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pain azyme dans le sacrifice, ils n'avaient d'autre avantage que d'imiter les Juifs; et qu'en accordant que Jésus-Christ en a usé, on ne pourrait s'en prévaloir, parce qu'étant au moment d'être livré aux Juifs, il a pris pour l'accomplissement du mystère de l'eucharistie le pain qui lui est tombé sous la main, pour ne pas scandaliser les Juifs qui en ce jour-là ne mangeaient que du pain azyme, suivant que la loi de Moïse le prescrivait. Isaac prétend que comme il nous est défendu de jeûner avec les Juifs et de célébrer la Pâque avec eux, nous ne devons pas non plus comme eux nous servir du pain azyme dans le sacrement. D'après notre auteur, Jésus-Christ prévint le jour de la Pâque des Juifs, et la fit le 13 de la lune qui était le jeudi; ainsi il mangea du pain fermenté, le pain azyme ne devant avoir lieu que le 14 de la lune. Tel est aussi le sentiment de plusieurs Grecs.

11. Encore que Jésus-Christ se serait servi du pain azyme 2, dit Isaac, on ne serait pas obligé de l'imiter en ce point, l'Eglise observant diverses choses dans la célébration des mystères, qui ne sont pas conformes à ce que Jésus-Christ a fait : par exemple, il n'a été baptisé qu'à trente ans, faut-il attendre cet âge pour recevoir le baptême? En le recevant, Jésus-Christ n'a pas été oint d'huile sanctifiée, il a été baptisé dans un fleuve, il n'a observé aucune de nos cérémonies; après son baptême, il n'a pas reçu son corps comme nous le recevons; il a jeûné quarante jours depuis son baptême, et l'on a observé un jeûne de quarante jours dans l'Eglise jusque cent vingt ans après Jésus-Christ: mais maintenant, dit Isaac, nous jeûnons cinquante jours avant Pâques. Il ajoute que le Sauveur donna son corps à ses disciples après qu'ils eurent soupé; qu'il le consacra dans une maison particulière, et qu'il a fait plusieurs autres choses que nous ne pratiquons pas, et que nous en pratiquons beaucoup qu'il n'a pas ordonnées 3, mais qui toutefois nous sont venues de la tradition apostolique, et ont été prescrites par les anciens pères, comme de jeûner le mercredi et le vendredi, de prier le visage tourné à l'orient, de fabriquer et de révérer les images.

12. Ensuite il vient aux sacrifices des Arméniens, qui en immolant des boeufs, des

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brebis et autres animaux, montraient qu'ils étaient plutôt juifs que chrétiens. Il invective vivement contre eux pour leur peu de respect envers la croix, dont le signe nous sanctifie et chasse les démons 5, et leur reproche de donner le nom de la sainte Trinité à trois bois joints ensemble en forme de croix, et de dire que la sainte Trinité a été attachée à la croix. Comme ils enseignaient d'ailleurs, selon Isaac, que le Saint-Esprit n'était pas consubstantiel au Père et au Fils, il rejette leur baptême comme nul, et parle avec mépris de deux synodes qu'ils avaient assemblés ", leur portant le défi de montrer qu'ils soient en communion avec aucun évêque des siéges apostoliques. Il les renvoie à leurs anciens livres ecclésiastiques, pour y apprendre la vraie doctrine des deux natures et des deux volontés en Jésus-Christ dont ils s'étaient éloignés 7. Il rejette la cause de leurs égarements dans la foi, sur ce qu'ils avaient cessé depuis la mort de Grégoire, évêque des Arméniens, de recevoir comme lui l'ordination de l'archevêque de Césarée en Cappadoce, leur métropolitain, et qui en cette qualité aurait veillé sur la pureté de leur doctrine.

13. Quant à leur jeûne singulier 9 et rigoureux à l'excès, dont ils attribuaient l'institution à un nommé Sergius, il soutient qu'il est illégitime, n'étant autorisé ni des apôtres ni des conciles, et dit qu'en vain ils le célébraient, eux qui ne jeûnaient ni la veille de saint Jean, ni celles des apôtres et des martyrs, et qui n'en solennisaient pas même les fêtes. Quelques-uns d'eux avançaient qu'il avait été institué à l'exemple de celui que le grand Constantin avait pratiqué à Rome pour se préparer à recevoir le baptême du pape Sylvestre. Isaac les réfute, en disant que ce prince n'avait pas été baptisé à Rome, mais à Nicomédie, et qu'il était mort aussitôt. Il établit en passant l'infaillibilité de l'Eglise dans la foi, anathématise les erreurs des Arméniens, et fait voir qu'elles avaient déjà été condamnées dans plusieurs conciles.

14. Isaac convient dans l'exorde de sa seconde invective 10, qu'après avoir été très-attaché aux erreurs des Arméniens, et ennemi déclaré des catholiques, Dieu par sa miséricorde l'avait appelé à la connaissance de la vérité. Il dit ensuite que les évêques et les prêtres irrités de son changement résolurent

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Deuxième invective u'l

saac.

XVII, 21.

de le faire mourir; qu'enfin ils lui interdirent les fonctions des ordres sacrés, c'est-à-dire du diaconat, puisqu'il n'était pas alors honoré du sacerdoce. Tous ces mauvais traitements ne firent qu'exciter son zèle. Il fit connaître au public leurs erreurs, et les réfuta en les dévoilant. En voici le détail 1° Les Arméniens ne reconnaissaient en Jésus-Christ qu'une nature', une volonté, une opération; doctrine condamnée dans Sergius, Pyrrhus et Paul, par le sixième concile tenu à Constantinople, et contraire aux pères orthodoxes. 2o Ils errent en ajoutant au Trisagion Qui êtes crucifié pour nous; addition qui fait Dieu passible, et qui conséquemment doit être frappée d'anathème. 3° On doit rejeter aussi la différence qu'ils mettent entre les personnes divines, dont deux, selon eux, figurées par les deux grands bois de leur croix, sont égales, savoir le Père et le Fils, et la troisième, plus petite, qui représente le SaintEsprit. 4o Ils ne sont unis de communion à aucun des quatre siéges patriarchaux, et ne reçoivent point comme ils devraient l'ordination de l'archevêque de Césarée, leur métropolitain. 5° Ils ne mettent point de sel dans leur pain, en quoi ils agissent contre la doctrine de l'Evangile et de saint Chrysostôme, qui défend d'offrir aucune victime sans sel. 12° Ils ne solennisent point la fête des lumières, ni celle du baptême de Jésus-Christ le 6 janvier. 15° Ils composent leurs saintes huiles de graines de sésame, et non d'olives. 16° Ils n'en oignent point les nouveaux baptisés, contre la doctrine des pères, nommément de saint Denis l'Aréopagite. 17° Ils ne permettent qu'au célébrant de réciter l'Oraison dominicale, en quoi ils transgressent le commandement de Jésus-Christ; mais peut-être que leur défense ne regardait que les jours de fêtes et d'assemblées, où ils permettaient au célébrant seul de réciter cette prière à haute voix, tandis que le peuple la récitait ou tout bas ou mentalement.

15. Isaac leur reproche, 18° de ne pas souffler sur les baptisés 2, rit usité dès l'AnIII Reg, cien Testament pour rendre la vie aux morts; 19o de ne point révérer les images; 20° de ne point entrer dans l'église en carême, et de ne pas adorer la croix; 21o de manger du fromage les samedis et dimanches de carême; 22o de ne pas célébrer avec décence la fête de la dormition de la sainte Vierge

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ou de son assomption, ni celle de l'exaltation de la précieuse croix, et de les transférer à leur fantaisie; 25° de ne pas changer d'ornements sacrés suivant les différentes circonstances, et de vaquer aux choses saintes la tête couverte; 26° de ne pas communier le jeudi-saint, quoique tous les chrétiens communient en ce jour. Nous passons sous silence quelques autres erreurs des Arméniens, parce qu'il en a été parlé dans l'analyse de la première invective.

Nicétas, de Constantino

16. Un prince d'Arménie ayant répandu une lettre dans laquelle il prenait la défense ple. de l'erreur d'Eutychès, condamnée par le concile de Chalcédoine en 451, Nicétas de Constantinople [surnommé le Philosophe] répondit à cette lettre. Il y parle comme s'il eût été patriarche de Constantinople, quoiqu'en effet il ne fût que moine. Le concile avait dit dans sa profession de foi que l'on doit confesser un seul et même Jésus-Christ, Fils unique, Seigneur en deux natures, sans confusion, sans changement, sans division, sans séparation, sans que l'union ôte la différence des deux natures, qui au contraire y conservent chacune leurs propriétés, quoique unies en une seule personne et une seule hypostase. Il défendit à qui que ce fût d'enseigner ou de penser autrement, sous peine. d'anathème, et condamna l'erreur opposée, qui était celle de Dioscore et d'Eutychès; elle consistait à soutenir que Jésus-Christ étant de deux natures avant l'union, ces deux natures après l'union n'en faisaient qu'une, étant par cette union mêlées et confondues. [Allatius a le premier fait paraître cette Apologie dans sa Grèce orthodoxe en grec et en latin, mais en l'attribuant à David Nicétas. Elle a été réimprimée au tome XIV des Anciens Pères, de Galland, p. 347-381.]

Analyse de

17. Nicétas prouve l'existence et la distinction des deux natures en Jésus-Christ 3 son apologie. après leur union en une seule personne, par plusieurs passages de l'Ecriture, qui disent nettement que Jésus-Christ est Dieu et homme; qu'avant comme depuis l'union, il est Matth., xvi. éternel et de même nature que le Père et le Saint-Esprit, et que depuis l'union il a été tenté comme nous en toutes choses, sans être néanmoins sujet au péché. Il prouve la même vérité par l'autorité des conciles, en particulier celui d'Ephèse, qui, pour rendre sensible l'union des deux natures en une seule per

8 Græc. orthod., tom. I, pag. 663.

Hebr., X1, 15.

sonne dans Jésus-Christ1, propose l'exemple de l'homme, qui est composé de deux natures, l'une corporelle, l'autre incorporelle, mais unies en une seule personne.

18. Ensuite il fait voir 2 que le prince d'Arménie calomniait le concile de Chalcédoine en l'accusant d'avoir donné dans l'hérésie des sabelliens et des nestoriens; que ce concile a suivi en tout la foi de l'Eglise, qui confesse trois personnes en Dieu, consubstantielles et d'une même nature, et dans JésusChrist deux natures distinctes, la divine et l'humaine unies en une seule personne, sans confusion; en sorte qu'il n'y a qu'un Fils, quoique de deux natures, et un seul Christ, fils de Dieu et de la sainte Vierge. Il fait à cette occasion un précis de la définition de foi publiée dans le concile de Chalcédoine, en l'opposant aux erreurs de Sabellius, de Nestorius et d'Eutychès, et de la lettre de saint Léon à Flavien 3, montrant que le concile n'a rien enseigné qui ne soit conforme à la doctrine contenue dans cette lettre.

19. Il vient après cela à l'objection du prince d'Arménie, qui soutenait que le concile de Chalcédoine était d'une doctrine contraire à celle de saint Cyrille d'Alexandrie, qui dit, non deux natures, mais une nature incarnée. Nicétas répond que ce père ne s'est exprimé ainsi que par rapport à Nestorius, qui des deux natures en Jésus-Christ concluait qu'il y avait aussi deux personnes; et que quand saint Cyrille a dit : une nature incarnée, c'est-à-dire une nature du Verbe incarnée, il n'a pas prétendu qu'après l'union des deux natures, la divinité et l'humanité ne fissent plus qu'une nature; au contraire, que même après l'union elles subsistaient entières et distinctes, quoiqu'unies en une personne. En effet, lorsqu'il dit : une nature du Verbe, il marque que la nature du Fils est la même que celle du Père et du Saint-Esprit; et lorsqu'il ajoute : incarnée, il désigne notre nature composée de corps et d'âme raisonnable 5, à laquelle celle du Verbe a été unie hypostatiquement par l'incarnation. Il confirme sa réponse par plusieurs passages de la seconde lettre de saint Cyrille à Successus, où ce père enseigne clairement deux natures, la divine et l'humaine, après leur union en la personne du Fils. Il la confirme encore par un passage de

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saint Ambroise allégué par saint Cyrille dans la même lettre, où l'évêque de Milan déclare sans aucune équivoque la distinction des deux natures depuis l'union.

20. Le prince d'Arménie inférait de l'exemple de l'union des deux natures en l'homme, que le concile de Chalcédoine en avait admis trois en Jésus-Christ, ou que, comme les deux natures en l'homme n'en font qu'une après l'union, il suivait nécessairement qu'après l'union de la nature divine et de l'humaine en Jésus-Christ, il n'y avait plus en lui qu'une nature, ce qui était l'erreur d'Eutychès. Nicétas répond que dans le cours ordinaire des choses, le composé ne prend pas le nom ni les notions des choses dont il est composé; qu'ainsi l'homme composé d'âme raisonnable et de corps, n'est pas appelé âme ni corps, mais homme, parce que l'âme et le corps constituent l'essence et la nature de l'homme; mais qu'à l'égard de Jésus-Christ ce n'est pas la même chose. Il prend le nom et les propriétés des deux natures dont il est composé, et on dit bien : Jésus-Christ est Dieu; Jésus-Christ est homme, parce qu'après l'union la divinité et l'humanité, quoiqu'unies en lui personnellement, sont distinguées l'nne de l'autre. Si après l'union il n'y avait plus qu'une nature, on pourrait la nommer indifféremment humaine, ou divine seulement, ou humaine et divine tout ensemble, ou dire qu'elle n'est ni divine ni humaine langage que la foi ne connaît pas, et qui est contraire aux expres sions de l'Ecriture, qui en parlant de JésusChrist 7 l'appelle Fils de Dieu et Fils de l'homme.

Autres éerits de Nicétas. Jugement sur cet au

21. Il paraît, par plusieurs endroits de cette Apologie, que Nicétas avait déjà écrit sur la même matière, et que c'est ce pre- tour. mier écrit que le prince d'Arménie attaquait dans sa lettre. Il paraît encore que ce prince combattait plutôt les termes et les expressions de Nicétas, que le fond de sa doctrine, car il ne voulait entrer pour rien dans les erreurs d'Eutychès ni de Nestorius. Nicétas. est pressant et solide dans ses raisonnements contre les Arméniens. [Outre cet écrit, on en a un autre sur la procession du SaintEsprit, contre les Latins. Il en est parlé dans la Notice des manuscrits conservés à Moscou, par Matthæi.]

Pag. 713 et seq. 7 Pag. 723, 724, 729.

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