Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

Saint An-

selme retour-

terre. Concile

raient quittes pendant trois ans de toute im-
position. Anselme, de son côté, accorda au
roi tout ce qui était porté dans la lettre du
pape Pascal, savoir, qu'il donnerait l'abso-
lution à ceux qui avaient reçu les investitures,
et ordonnerait ceux qui les avaient reçues ou
fait hommage au roi; et que si dans la suite
quelques-uns recevaient les prélatures sans
investiture, quoiqu'ils eussent fait hommage
au roi, il ne laisserait pas de les ordonner.

17. Toutes ces conventions acceptées de
non Angle part et d'autre, l'archevêque s'embarqua pour
de Londres. l'Angleterre, où il fut reçu avec des démons-
trations de joie incroyables. La reine Mathilde
alla au-devant de lui 3, et prit soin, sur la
route, de lui préparer des logements. L'an-
née suivante, 1107, il se tint 4, au mois d'août,
une assemblée d'évêques et de seigneurs à
Londres, dans le palais du roi, où l'on con-
firma tout ce qui avait été arrêté l'année pré-
cédente dans l'abbaye du Bec. Elle dura trois
jours, pendant lesquels on agita diverses
questions, entre autres celle des investitures.
Quelques-uns étaient d'avis que le roi conti-
nuât à les donner, comme avaient fait son
père et son frère. L'avis contraire l'emporta,
et l'on convint que l'on se conformerait au rè-
glement du pape Pascal, qui accordait au roi
les hommages et lui défendait seulement les
investitures. En conséquence, le roi ordonna
qu'à l'avenir personne, dans son royaume,
ne recevrait l'investiture d'un évêché ou d'une
abbaye par la crosse et par l'anneau de la
main du roi ou de quelque autre laïc que ce
fût; et Anselme déclara qu'on ne refuserait
la consécration à aucun prélat pour avoir
fait hommage au roi. Alors on donna des
pasteurs aux Eglises vacantes, mais sans leur
donner l'investiture; et ceux qui avaient été
élus évêques furent ordonnés à Cantorbéry
par saint Anselme. Celui-ci écrivit au pape ce
qui s'était passé, comment le roi d'Angleterre
avait renoncé aux investitures, et les précau-
tions qu'il prenait pour ne remplir les siéges
vacants que de dignes sujets.

Sa difficulté

18. Pendant la tenue du concile de Londres,

avec l'arche Anselme demanda à Gérard, archevêque
d'York, la soumission qu'il lui devait depuis
sa translation d'Erfort à cet archevêché. Le
roi, qui était présent, dit qu'il ne paraissait
point que Gérard dût faire une autre sou-
mission que celle qu'il avait faite à son ordi-

nation. Anselme n'insista pas; mais il fit pro-

mettre à Gérard qu'il lui rendrait, comme

archevêque, la même obéissance qu'il lui

avait promise comme évêque. Gérard étant

mort en 1108, Thomas fut élu pour lui suc-

céder. Il assista, avec Anselme, au concile de

Londres, le 24 mai de cette année, quoiqu'il

ne fût pas encore sacré. Turgot, moine de

Durham, fut choisi, vers le même temps,

pour évêque de Saint-André en Ecosse, et ne

pouvant être sacré par Thomas son archevê-

que, parce qu'il n'était pas sacré lui-même,

l'évêque de Durham proposa de sacrer Tur-

got en présence de Thomas et des évêques

d'Ecosse. Anselme s'y opposa *, soutenant

que cette ordination lui était dévolue tant

que l'archevêque ne serait point sacré. Il

pressa Thomas de se faire sacrer au plus tôt,

et sachant qu'il avait envoyé à Rome deman-

der le pallium par avance, il écrivit au pape

pour le prier de ne pas le lui accorder qu'il

ne fût sacré, afin qu'il n'eût point de prétexte

de lui refuser l'obéissance qu'il lui devait

comme à son primat. Thomas, différant tou-

jours son sacre sous divers prétextes, mais

en effet parce qu'il prévoyait que la mort

d'Anselme n'était pas éloignée, vu son grand

âge et ses infirmités, l'archevêque lui dé-

clara 5 par écrit qu'il l'interdisait de toutes

fonctions sacerdotales, et lui défendait de s'in-

gérer au ministère pastoral jusqu'à ce qu'il

lui eût promis obéissance, comme avaient

fait Gérard et ses prédécesseurs. Il defendit,

par la même lettre, à tous les évêques de la

Grande-Bretagne de lui imposer les mains

ou de le reconnaître pour évêque, s'il se fai-

sait ordonner par des étrangers. C'est pour-

quoi il envoya des copies de cette lettre à

tous les évêques d'Angleterre, à qui il en re-

commanda l'exécution en vertu de la sainte

obéissance.

19. Il était attaqué depuis six mois d'un
dégoût de toute nourriture, et la diminution
de ses forces ne lui permettant plus d'offrir
le sacrifice de la messe, il s'y faisait porter.
Etant près de sa fin, on le mit sur le cilice et
la cendre, où il expira au point du jour du
mercredi saint, 21 avril 1109, dans la seizième
année de son pontificat, et la soixante-seizième
de son âge. Baudouin, qui avait eu soin de
ses affaires temporelles, fit embaumer son
corps, que l'on enterra ensuite dans l'église

Mort

saint Ans

me en 1
(ou dluge

1. Il n'est point d'édition des ouvrages de
saint Anselme, où l'on ne trouve celui qui
ést intitulé Monologue, et il y est même à la
tête de tous les autres, non que ce soit le
premier de ses écrits selon l'ordre des temps,
mais à cause de l'importance de la matière.
Il est cité par Eadmer 3 sous le nom de saint
Anselme; Sigebert de Gemblours et Hono-
rius d'Autun le lui attribuent, et on le trouve
intitulé de son nom dans tous les manuscrits.
Saint Anselme le composa 5 étant prieur du
Bec, conséquemment avant l'an 1078, qu'il
en fut choisi abbé. Mais avant de le rendre
public, il l'envoya à Lanfranc, dès lors ar-
chevêque de Cantorbéry, le priant de le cor-
riger, ou même de le supprimer, au cas qu'il
ne le trouvât pas digne d'être mis au jour.
Eadmer semble dire 7 que saint Anselme
avait déjà écrit ses quatre dialogues; d'où il
suivrait que le Monologue n'est que la cin-

[merged small][ocr errors][merged small]

quième de ses productions: mais le texte

d'Eadmer n'est pas concluant. Il dit seule-

ment, après avoir parlé de ses quatre dialo-

gues, qu'Anselme fit encore un livre qu'il

appela Monologue. Il est même très-probable

qu'il fut achevé avant que ce saint docteur

travaillât à ses Dialogues, puisqu'il est cité

dans le premier jusqu'à deux fois 8.

2. Il l'écrivit à la prière de ses moines,

nommément de Maurice, qui souhaitaient

avoir de suite et par écrit ce qu'il leur avait

dit en divers entretiens sur la nature et l'exis-

tence de Dieu, afin d'en faire la matière de

leur méditation. C'est pourquoi il l'intitula

d'abord Modèle de méditation sur les mystères

de la Foi. Depuis, par ordre de Hugues, ar-

chevêque de Lyon, il mit son nom à cet ou-

vrage, et en changea le titre en celui de Mo-

nologue, ou de Soliloque, parce qu'il y parle

seul. L'ouvrage est divisé en soixante dix-

neuf chapitres, dans lesquels saint Anselme

prouve par des arguments tirés des lumières

de la raison, et sans recourir aux témoignages

de l'Ecriture sainte, tout ce que la foi nous

enseigne de l'existence et de la nature de

Dieu. Il commence par les preuves de l'exis-

tence de Dieu; ensuite il vient à la connais--

sance de sa nature et des trois personnes di-

vines, autant que la raison, aidée de la foi,

peut nous la faire connaître. Il suit ce que

saint Augustin avait dit sur cette matière dans

ses livres de la Trinité. Mais il ne feint [craint]

pas de dire, avec les Grecs, qu'il y a en Dieu

trois substances, et une seule essence ou na-

ture, [en] prenant le terme de substance pour

celui de personne, comme il s'en explique lui-

même dans la préface du Monologue. D'où

vient qu'il prie ceux qui copieront l'ouvrage,

de transcrire aussi et de mettre à la tête cette

préface, afin qu'ils y voient quel a été son

but dans ce traité, et son attention à ne rien

dire qui ne fût conforme à la doctrine des

pères orthodoxes.

3. Ses raisonnements sont non-seulement
très-métaphysiques, mais encore tellement ou Prosloge.
enchaînés les uns dans les autres, qu'il n'est
point facile d'en prendre bien la suite, ni
d'en sentir toute la force. Cela lui fit naître
la pensée de prouver par un seul raisonne-
ment suivi ce qu'il avait prouvé dans le Mo-

Vita Anselm., pag. 6.

Anselm., lib. I, Epist. 63, et lib. IV, Epist. 102.
7 Anselm. vit., pag. 6.

8 Dialog. de Veritate, cap. I et x.

nologue par plusieurs. Occupé presque con-

tinuellement de cette pensée, tantôt il croyait

avoir trouvé l'argument qu'il cherchait, tan-

tôt il échappait à son esprit. Désespérant de

réussir, il fit tous ses efforts pour se défaire

de cette pensée; mais il ne put en venir à

bout, et trouvant enfin ce qu'il cherchait, il

l'écrivit aussitôt sur des tablettes cirées 1

dont on faisait encore usage alors, et les

donna à garder à un des frères du monas-

tère, qui les égara. Saint Anselme fut donc

contraint d'en faire un autre exemplaire sur

des tablettes de même matière, et ensuite sur

du parchemin. Il donna pour titre à ce petit

écrit: La foi qui cherche l'intelligence de ce

qu'elle croit. Depuis, aux instances de ceux

qui en avaient tiré des copies, et surtout de

Hugues, archevêque de Lyon, il l'intitula

Prosloge, parce que l'auteur s'y entretient

ou avec lui-même, ou avec Dieu, sur l'exis-

tence de cet Etre suprême, et sur tous ses

attributs; montrant qu'il est tout ce que la

foi nous en apprend, éternel, immuable,

tout-puissant, immense, incompréhensible,

juste, pieux, miséricordieux, vrai, la vérité,

la bonté, la justice, et que tout cela n'est

dans Dieu qu'une même chose. Sigebert et

Honorius d'Autun mettent le Prosloge au

nombre des écrits de saint Anselme; et ce

saint le cite lui-même dans le chapitre qua-

trième du livre de la Foi de la Trinité et de

l'Incarnation; et dans sa lettre 3 à Hugues le

Reclus, à qui il conseille la lecture de ce qui

y est dit de la joie parfaite de la félicité éter-

nelle. Comme il est certain que saint An-

selme est auteur de cet opuscule, il suit de

là que le Manuel qui en est tiré pour la plus

grande partie, n'est pas de saint Augustin,

quoiqu'il ait été quelquefois imprimé sous

son nom. Le Prologue est distribué en vingt-

cinq chapitres.

[blocks in formation]
[ocr errors]

5. Selon les anciennes éditions gothiques

du livre de la Trinité, il avait été écrit contre

les Juifs opinion que les éditeurs paraissent

avoir prise de Trithème 6, qui dit en effet

que saint Anselme composa un livre de la

Trinité contre les Juifs, différent toutefois de

celui-ci. Dans les éditions postérieures l'ins-

cription porte qu'il fut fait contre Roscelin :

et cette inscription se trouve dans plusieurs

manuscrits 7.

6. Roscelin ou Ruzelin était natif de l'Ar-

morique ou de la petite Bretagne. Etant venu
à Compiègne au diocèse de Soissons, il en
fut fait chanoine, et chargé des leçons publi-
ques. Amateur de la nouveauté, il donna
dans le sentiment des nominaux, avancé par
un docteur français nommé Jean, et l'épousa
tellement qu'il passa dans la suite pour un
des chefs de cette secte. Comme il savait plus
de dialectique que de théologie, il aimait à
raisonner des mystères de la religion sui-
vant les lumières de la raison; ce qui le fit
lomber dans l'erreur au sujet des trois per-
sonnes de la Trinité; disant qu'elles étaient
trois choses séparées, comme trois anges,
quoiqu'elles n'eussent qu'une volonté et
qu'une puissance. Il ajoutait qu'on pourrait
dire véritablement qu'elles sont trois dieux,
s'il était d'usage de s'exprimer ainsi. Rosce-
lin s'appuyait de l'autorité de Lanfranc et de
saint Anselme, soutenant qu'ils avaient l'un
et l'autre pensé comme lui sur cette matière.
Le saint archevêque, se voyant calomnié avec
son prédécesseur, écrivit en 1089 à Foul-
ques, évêque de Beauvais, qui devait assis-

Saint An-

selme y com-
bat toscelin.

[ocr errors]

ter au concile indiqué à Reims contre Ros-
celin, pour le prier de déclarer en plein
concile, s'il en était besoin, que ni Lafranc
ni lui n'avaient jamais rien enseigné de sem-
blable, et qu'il disait anathème à quiconque
enseignerait l'erreur qu'on attribuait à Ros-
celin. Il ajoutait qu'on ne devait lui deman-
der aucune raison de son erreur, ni lui en
rendre aucune de la vérité opposée, et qu'il
fallait agir contre lui par autorité, s'il était
chrétien. « Car ce serait, dit-il, une extrême
simplicité de mettre en question notre foi si
solidement établie, à l'occasion de chaque
particulier qui ne l'entend pas. Il faut la dé-
fendre par raison contre les infidèles, mais
non pas contre ceux qui portent le nom de
chrétiens. » Le concile indiqué à Reims se tint
à Soissons, quatre ans après, c'est-à-dire en
1092, ou au commencement de l'année sui-
vante. Roscelin, cité au concile, comparut, fut
convaincu de son erreur, feignit de l'abjurer 2,
et continua à l'enseigner dans des disputes
secrètes, assurant qu'il ne l'avait abjurée
que dans la crainte d'être assommé par le
peuple. Yves de Chartres lui fit des reproches
de sa dissimulation 3, et l'exhorta, mais inuti-
lement, à se rétracter sincèrement, et à faire
cesser le scandale qu'il avait causé dans l'E-
glise.

7. Alors les moines de l'abbaye du Bec
in pressèrent saint Anselme, devenu archevê-
que de Cantorbéry, d'achever la réfutation
de Roscelin, qu'il avait commencée, étant
leur abbé, dans sa lettre à l'évêque de Beau-
vais. L'archevêque fit ce que ses moines de-
mandaient de lui, dans un livre intitulé de
la Foi de la Trinité et de l'Incarnation, qu'il
dédia au pape Urbain II, en le priant de
l'examiner. Eadmer parle de ce traité en
deux endroits, et le met au commencement
de l'épiscopat de saint Anselme, c'est-à-dire
en 1093 ou 1094. Il ajoute que ce pape le
reçut gracieusement, et qu'il en fit le fond
de ses raisonnements contre les erreurs des
Grecs au concile de Bari. Saint Anselme cite
au quatrième chapitre son Monologue et son
Prosloge, ce qui montre que le traité de la
Trinité leur est postérieur, suivant l'ordre
des temps; mais il fut fait avant le livre de la
Procession du Saint-Esprit, où il est cité au
dix-septième chapitre. Saint Anselme re-
prend ces hommes téméraires, qui s'imagi-

Anselm., lib. II, Epist. 41.

2 Anselm., de Trinit., cap. 1; Yvo, Epist. 7.
* Yvo, Epist. 7.

nent que rien n'est possible que ce qu'ils
conçoivent par les lumières de la raison; et
fait voir qu'en suivant ce principe, il n'est
pas surprenant qu'ils tombent en tant d'er-
reurs. Il pose un principe contraire, qui est
que l'on ne parvient à la connaissance des
choses divines que par les lumières de la foi,
et en suivant ce que l'Eglise nous enseigne.
Venant à la proposition de Roscelin, portant
que les trois personnes divines sont trois
choses séparées, comme trois anges ou trois
âmes, parce qu'autrement il faudrait dire que Pag 43.
le Père et le Saint-Esprit se sont incarnés
avec le Fils, il dit ou que Roscelin admet
trois dieux, ou qu'il ne sait ce qu'il dit; que
s'il admet trois dieux, il n'est pas chrétien;
que s'il ne sait ce qu'il dit, on ne doit pas
l'écouter. Il convient que l'on peut dire en
un sens que les trois personnes sont trois
choses, pourvu que par ce terme l'on entende
relation et non pas substance, puisqu'en effet
la paternité, la filiation, la procession sont
trois choses différentes. Mais ce n'était pas
là le sens de Roscelin; il voulait qu'elles fus-
sent trois substances différentes comme le
sont trois anges et trois âmes, ne trouvant
point d'autre moyen pour sauver au Père la
nécessité de s'incarner avec le Fils. Saint
Anselme fait voir que la distinction que les
relations constituent entre les personnes suf-
fit pour dire que le Fils s'est seul incarné
personnellement, quoique l'incarnation soit
l'ouvrage des trois personnes. Il donne plu- .
sieurs raisons pour prouver qu'il était plus con-
venable que le Fils s'incarnât que le Saint-Es-
prit; entre autres, que dans le cas où le Saint-
Esprit se serait fait chair, il aurait été fils de
l'homme, et qu'alors il y aurait eu deux fils
dans la Trinité: ce qui aurait produit quel-
que confusion dans nos idées, lorsque nous
parlons de Dieu le Fils. La même difficulté
serait arrivée, si le Père se fût incarné. Il
montre qu'il n'y a en Jésus-Christ qu'une
personne et deux natures; et pour donner
une idée de l'origine des personnes en Dieu,
il propose l'exemple d'une fontaine, d'où
naît d'abord un ruisseau, puis un lac ou un
fleuve tel que le Nil. Ce n'est qu'une même
eau dans la fontaine, dans le ruisseau, dans
le lac ou le fleuve, et toutefois la fontaine
n'est pas le ruisseau, ni le ruisseau le lac. La
fontaine, le ruisseau et le lac sont distingués

Eadmer., lib. II, de vita Anselm., pag. 14, et
lib. II Novor., pag. 53.

l'un de l'autre; la fontaine ne naît pas du

ruisseau, ni du lac; le ruisseau naît de la

fontaine, mais non pas du lac; et le lac naît

de la fontaine et du ruisseau. Le ruisseau

est tout entier de la fontaine; et le lac tout

entier de la fontaine et du ruisseau. La na-

ture divine est une et la même dans le Père,

le Fils et le Saint-Esprit, mais chacune de

ces personnes a ses propriétés qui la distin-

guent des autres; le Père ne tire son origine

de personne; le Fils est engendré du Père; et

le Saint-Esprit procède du Père et du Fils.

8. Roscelin, s'opiniâtrant dans son erreur,

France et fut banni du royaume. Il se retira en An-

gleterre, où il excita de nouveaux troubles,

surtout à Oxford, enseignant 2 que les en-

fants des prêtres ne pouvaient être promus

aux ordres sacrés. Thomas ou Thibaud d'E-

tampes, qui enseignait alors en cette ville,

le réfuta par un traité dogmatique 3 qu'il lui

adressa en forme de lettre. Roscelin se ré-

pandit ensuite en calomnies contre saint

Anselme. Elles ne furent point écoutées,

mais le roi Guillaume le Roux, à la persua-

sion des amis de l'archevêque, chassa de ses

Etats le calomniateur. Il eut en une autre

occasion des démêlés avec un théologien

nommé Pierre, que quelques-uns ont cru être

Pierre Abélard. Mais la lettre de ce théolo-

gien contre Roscelin fut écrite avant qu'A-

bélard eût étudié en théologie. Elle est adres-

sée à un archevêque de Paris, dont le nom

commençait par la lettre G, et qui gouver-

nait cette Eglise depuis la condamnation de

Roscelin au concile de Soissons et du vivant

de ce novateur ce qui désigne l'évêque

Guillaume, mort vers l'an 1101. Ce théolo-

gien prie le prélat de lui accorder une con-

férence avec Roscelin, où ils puissent l'un et

l'autre publiquement et en sa présence s'ex-

pliquer sur la matière qui faisait le sujet de

leur dispute. On ne sait quelle fut l'issue

de cette affaire. Roscelin ne se rendit pas

moins odieux par ses calomnies que par ses

erreurs, et l'irrégularité de sa conduite. I

fut sans doute dépouillé de son canonicat de

Compiègne, puisqu'il demanda à Yves de

Chartres une place dans son Eglise. Elle lui

fut refusée sous d'honnêtes prétextes. Nous

ne connaissons la lettre qu'il écrivit à ce pré-

lat que par la réponse qu'il en reçut.

[blocks in formation]

1. Le concile indiqué à Bari par le pape

Urbain II, s'y tint au mois d'octobre de l'an Saint-Eprit.

1098. Les Grecs proposèrent la question de

la procession du Saint-Esprit, et apportèrent

divers passages de l'Evangile pour montrer

qu'il ne procède que du Père. Le pape en

produisit de son côté pour prouver qu'il pro-

cède du Fils comme du Père, ce qu'il appuya

de plusieurs raisons tirées du livre de la Tri-

nité et de l'Incarnation, qu'Anselme lui avait

adressé. Les Grecs insistant par de nouvelles

preuves, le pape ordonna à Anselme de s'ap-

procher de lui, et de répondre aux objections

des Grecs. Il était prêt à le faire; mais on fut

obligé de renvoyer la chose au lendemain.

L'archevêque parla avec tant de force et de

solidité, que tous convinrent qu'il avait ren-

versé absolument les objections des adver-

saires, et mis en évidence que le Saint-Es-

prit procède du Père et du Fils; en sorte que

le concile, après avoir donné au prélat les

louanges qu'il méritait, prononça anathème

contre ceux qui nieraient cette vérité. Ead-

mer, qui était assis aux pieds de son arche-

vêque pendant la dispute, dit que depuis il

traita la même matière par écrit avec encore

plus de soin et d'exactitude, et qu'il envoya

des copies de ce traité à ses amis qui lui en

avaient demandé. Hildebert, évêque du

Mans, fut un de ceux qui le pressèrent de

composer cet ouvrage, dont on met l'époque

vers l'an 1100. Il est intitulé: Lettre, dans

les éditions gothiques et dans celles de Colo-

gne. Dans les autres il porte le titre de Livre,

et il est divisé en vingt-neuf chapitres, sans

compter le prologue et l'épilogue. Tous les

manuscrits le donnent à saint Anselme, de

même que Sigebert. Mais dans celui du col-

lége de Saint-Benoît à Cambridge, il porte le

nom de saint Augustin: ce qui vient sans

doute de ce que le copiste, ne lisant dans son

exemplaire que la première lettre du nom

d'Anselme, a cru qu'elle marquait saint Au-

gustin.

2. On trouve d'abord dans ce livre les ar-

49.

« ZurückWeiter »