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N° IX.

LETTRE DE M. EDM. LE BLANT,

DIRECTEUR DE L'ÉCOLE FRANÇAISE DE ROME,
À M. LE SECRÉTAIRE PERPÉTUEL DE L'ACADÉMIE.

Rome, le 7 décembre 1886.

Monsieur le Secrétaire perpétuel,

J'ai éprouvé en arrivant ici, il y a près de trois semaines, une déconvenue en apprenant que, depuis la fin de mai, rien de saillant n'avait été trouvé à Rome. Le principal intérêt est toujours dans le grand monument circulaire de la via Salaria servant de tombe à Lucilius Pætus et à sa sœur Lucilia Polla, monument presque double en dimension de celui de Cæcilia Metella et dont j'ai déjà par deux fois entretenu l'Académie.

Haut de cinq mètres environ, il est couronné par une corniche qui paraît l'avoir terminé. Sa construction, en très grand appareil, était, selon toute apparence, la base d'un tumulus de terre planté d'arbres, comme l'était à Rome le mausolée d'Auguste, que décrit Strabon (V, II, 8), et dont Canina donne une restitution (Edifizi di Roma antica, tav. 283).

La moitié de droite de cette énorme circonférence est maintenant dégagée. La face qui regarde la voie antique a seule conservé ses larges assises jusqu'à la corniche; elles manquent de plus en plus à mesure qu'on avance vers la partie du revers. C'est dans l'antiquité même que la tombe a été ainsi ruinée et dépouillée d'une part de ses beaux matériaux. Au milieu de la face postérieure, on a trouvé l'entrée d'un couloir conduisant à la cella; la voûte et les côtés de ce couloir sont revêtus de stuc.

La cella même contient trois tombes en forme d'arcosolium : la première à gauche était un lit funèbre, à la façon des lits

étrusques, avec matelas et coussin à la tête. Sur ce lit de pierre. a dû être couché le cadavre de Lucilius Pætus. Postérieurement, et afin de pratiquer une nouvelle sépulture, on a crevé le matelas et ouvert dessous une tombe grossièrement maçonnée à l'intérieur.

Au fond, un lit semblable a dû exister. On l'a creusé de même et on y a introduit un sarcophage de pierre lisse, dont le couvercle manque. A droite, la niche où se trouvait un troisième lit funéraire est vide. Dans cette cella étaient deux bustes d'homme et de femme que je n'ai pu obtenir de voir; le buste d'homme a le costume militaire, avec la chlamyde attachée sur l'épaule; la tête est ceinte de lauriers; on a pensé que ce pouvait être l'image de Lucilius Pætus, lequel vivait vers la fin de la République.

Dans le couloir, postérieurement aux premières sépultures, les parois de stuc ont été entaillées et l'on y a ouvert des loculi semblables à ceux des catacombes. A droite, en haut, un carré coupé dans le stuc et offrant encore des attaches de métal avait contenu une inscription, par malheur disparue, et qui nous aurait sans doute donné d'utiles renseignements. Le premier loculus, à gauche dans le couloir, est demeuré seul intact; il est fermé par trois tuiles placées bout à bout et que relie une chaux grossière. Au devant, une saillie de cette chaux forme poche et a gardé l'empreinte d'un vase qu'elle a contenu. Rien ne permet de déterminer l'âge auquel remontent ces sépultures.

A droite de l'entrée du couloir, vers le v siècle, on a construit, en dehors de la tombe, un escalier grossier, aujourd'hui démoli, et aboutissant à cette entrée. Puis, fouillant sous le sol du couloir, on y a creusé alors dans le tuf à droite une galerie souterraine exactement semblable à une catacombe, dans les parois de laquelle s'ouvrent des loculi. L'entrée seulement de cette galerie est déblayée sur une longueur de trois

à

à quatre mètres et on n'y a relevé encore aucun signe chrétien. La disposition matérielle de ces tombeaux ne suffit pas établir qu'ils appartiennent à des fidèles; on sait que les juifs et aussi les païens, comme le montre l'hypogée des Scipions, ont, eux aussi, enterré leurs morts dans des loculi disposés comme ceux des catacombes. Des fouilles que compte faire en ce lieu la Commission d'archéologie sacrée nous renseigneront sans doute sur le caractère de la galerie grossièrement ouverte sous la masse même du beau mausolée de Lucilius Pætus.

Tout autour de ce monument, une nécropole s'était formée. A huit mètres en arrière de sa face postérieure, s'élève un haut mur en réticulé, contre lequel étaient plaqués des cippes funéraires à inscriptions, fixés avec des clous de fer et dont les deux suivants sont demeurés en place :

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Sous le dernier de ces cippes étaient deux squelettes d'enfants avec colliers semblables à celui qu'a déjà fourni un tombeau de Kertsch (Jahn, Berichte der Königlisch Sächsischen Gesellschaft der Wissenschaften, t. VII, p. 41 et planche V). Ils sont formés d'une multitude de menus objets que l'on croyait propres à préserver du mauvais œil. Il en est de toutes matières ivoire, or, ambre, cristal de roche, bronze, onyx. : On y voit notamment un scarabée, un lièvre, un chien, une tortue, une massue, un éléphant, un phallus, une clochette.

La tranchée ouverte perpendiculairement pour dégager à droite le mausolée a coupé par l'extrémité des tombes de basse

époque, couvertes de grandes tuiles butant l'une contre l'autre par le haut et s'écartant par la base.

Les fouilles faites pour des constructions dans le premier kilomètre de la via Salaria ont donné plus de 500 inscriptions funéraires retrouvées en place, et la Commission communale d'archéologie les a recueillies en se réservant de les publier. Nous les lirons dans son Bulletin et dans le grand recueil des Notizie dei Scavi. Si ces marbres sont pour la plupart de type fort vulgaire, il en est pourtant qui présentent un certain intérêt. Il en est ainsi de ces deux plaques de columbarium où se lit le nom de la célèbre factio prasina:

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Faites par des entrepreneurs, les fouilles dont je parle ont entraîné plus d'une destruction regrettable. Rendus pour un moment au jour, un grand nombre des monuments funéraires qui jalonnaient la voie ont disparu. Je citerai entre autres une mosaïque représentant une scène de vendanges : les ouvriers l'ont ruinée avec tant de hâte que l'on n'en a pu apercevoir qu'un angle où se trouvait un homme monté sur une échelle et cueillant des raisins. Une autre mosaïque dont on n'a vu qu'un dernier fragment était, comme celles des fontaines de Pompée, formée de cubes de marbre et de coquillages entremêlés.

Voilà, Monsieur le Secrétaire perpétuel, la peu que j'ai pu savoir des choses trouvées à Rome pendant mon absence. L'Académie peut compter sur mon très vif désir de la tenir exactement informée de ce qui pourra se découvrir cet hiver. Veuillez agréer, etc.

Edm. LE BLANT.

Je joins à cette lettre la photographie d'un très beau buste de marbre qui sera prochainement publié par l'Institut archéologique. Le savant M. Helbig, qui veut bien m'en communiquer cette reproduction, pense qu'il représente Livie déjà âgée et coiffée d'une perruque par-dessus ses cheveux.

APPENDICE N° 1.

RAPPORT

FAIT, AU NOM DE LA COMMISSION DES ANTIQUITÉS DE LA FRANCE, sur les ouvrages envoyés au concours de l'année 1886,

PAR M. GUSTAVE SCHLUMBERGER.

LU DANS LA SÉANCE DU 2 JUILLET 1886.

MESSIEURS,

Trente-cinq concurrents se sont présentés au concours de cette année; sept parmi eux nous ont envoyé plus d'un ouvrage. Bien Bien qu'aucun livre absolument capital ne nous ait été adressé, un certain nombre de travaux présentaient toutefois des mérites si incontestables que l'embarras de votre Commission a été grand lorsqu'il s'est agi de décerner les médailles. Nous nous trouvions en particulier en présence de quatre concurrents, parmi lesquels il était fort difficile de

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