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maniere de donner une idée complete du livre, autant que le permettent les bornes d'un extrait. Il faut mettre le lecteur en mesure de juger fi le fond de la fable eft bien trouvé, fi les caracteres font pris dans la Nature, fi les incidens font piquans, s'il y a de l'ordre dans le récit, s'il y a des fituations, des tableaux, fi l'intérêt croit en avançant, enfin s'il y a un effet moral à attendre de la publication de l'ouvrage. Nous aurions défiré donner un plus grand choix de fragmens traduits; & on fera tenté de nous demander compte de quelques fcènes entre les amans dans des fituations vraiment théatrales: mais dans quelques endroits l'exécution eft médiocre, dans d'autres l'intérêt tient à l'enchainement, & l'on ne peut ifoler fans affoiblir.

Le début de l'ouvrage le préfente d'une maniere favorable: le premier chapitre eft charmant, mais celui qui fuit ne donne que de l'impatience. On attend un expofé très-rapide de ce qui a amené l'héroïne en Galles, & non pas l'histoire détaillée de fon pere & de fa mere: une parenthèse de quarante pages eft trop longue. Le défaut d'ordre dans la narration eft encore plus marqué enfuite. Très long-temps aprés nous avoir préfenté Belgrave marié, & arrivant d'Irlande, l'auteur file l'intrigue d'Of car avec la jeune fille que Belgrave époufera. Il faut un effort d'imagination pour retrograder

ainfi, & fe repréfenter que ce qu'on lit s'eft paffé avant ce qu'on a achevé de lire ce dé faut de méthode brouille les idées, & amortit la curiofité. L'Ariofte difoit:..

«Di molte fila effer bifogno parme

A condur la gran tela ch'io lavoro. »

Mais l'art de mener de front toutes les par ties du travail, de ne rien laiffer dépaffer hors de temps, eft indifpenfable à tout conteur qui veut, comme lui,

«‹...... Che la fua istoria, quanto
Or quà, or là più variata sia,
Meno a chi l'udirà nojofa fia. "

On pardonne de grands défauts à un roman dont le héros eft très-intéreffant. Quand le lecteur eft fortement occupé du fort de celui qui joue le premier rôle, les défauts le frappent moins lorfqu'on fent l'on ne juge gue res, & l'émotion rend indulgent. Le roman de Mad. Roche n'a pas cet avantage. D'abord l'intérêt fe partage, & par conféquent s'affoiblit. Enfuite Mortimer fe montre peu digne d'Amanda. Il débute mal; il foupçonne toujours; il n'eft qu'amoureux, & jamais paffionné; il femble fe confoler toutes les fois que, dans l'imbroglio des incidens, il perd. l'espoir d'époufer fa maîtreffe & lorfque les explications lui rendent cette espérance, il ne s'abandonne point, il raisonne. Plus Amanda intéreffe par fon perfonnel, fes malheurs,

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perfécution qu'elle éprouve, plus on regretté que Mortimer refte au-deffous d'elle. Ofcar eft plus intéreffant, mais il n'eft point affez en fcène, on le perd trop de vue; & quant à fon Adèle, on n'a pas le temps de s'y attacher depuis le moment où l'on s'apperçoit qu'elle le mérite, jufqu'à celui où elle époufe Belgrave fans qu'on fache bien pourquoi.

Les incidens font nombreux, mais ils font peu variés. Amanda fe fauve toujours, tantôt de Mortimer, tantôt de Belgrave. Il y a quelques fituations qui font fortes. Ainfi, par exem ple, Amanda réfolue à facrifier toutes fes espérances au repos & à l'honneur de Cherbury, obligée à la diffimulation

Près d'un amant qu'elle aime, & qui brûle à fes pieds,"

eft un peu dans la fituation de Zaïre; mais l'exécution de la fcène eft foible, & l'on peut en dire autant de celle du couvent, dans laquelle Mortimer reconnoît l'innocence d'Amanda après la mort de Fitzalan: ce font de belles occafions manquées.

Le roman n'a pas de prétentions à l'originalité il tient un peu de tous les genres. Mortimer à table avec fes amis, & portant la fanté de fa naîtreffe, fait penfer à Tom-Jones; les Dlles de Kilkorban rappellent les fcènes d'Evelina; il y a des morceaux imités de Sterne'; & il n'y a perfonne qui ne reconnoiffe Mad

Radcliffe dans la fcène nocturne de Dunreath. L'auteur a exagéré la mode des citations. Les lignes en guillemets & les vers détachés fe retrouvent partout. Ils font quelquefois d'un effet agréable, mais plus fouvent ils rallentif fent la narration, & refroidiffent l'intérêt. Le style eft fleuri, fans être très-foigné il y a un luxe d'image qui fatigue, & à côté de cela des négligences & des répétitions qui rebutent.

Voilà les côtés foibles de ce long roman où l'on trouve de jolis tableaux, des traits heureux, des fcènes attachantes, & une excellente morale. Il fera compté parmi ceux dont il faut recommander la lecture.

MÉLANGES.

NOTICE fur Mad. INCH BALD, tirée du General Magazine.

MR. Simpson, riche fermier de Suffolk, avoit une nombreufe famille de beaux enfans, parmi lefquels on diftinguoit notre héroïne comme la plus belle. Celle-ci étoit très-jeune encore lorf que fon pere mourut; fa mere, qui étoit une femme habile & refpectable, continua à tenir la ferme, & éleva fes enfans avec autant de foin que fa pofition & fes circonstances le lui permirent.

La jeune Mifs SIMPSON avoit un défaut datig l'organe de la parole qui fa rendoit prefque inintelligible pour ceux qui n'étoient pas habitués à l'entendre. Ce défaut l'intimidoit; elle aimoit la folitude; & dès fa tendre jeuneffe elle parut difpofée à la mélancolie. La lecture devint pour elle un goût très-vif, & une confolation. Elle fe plaifoit furtout aux tableaux d'une vie toute différente de celle qu'elle menoit dans fa retraite. La difpofition qu'elle avoit montrée pour la vie folitaire tenoit à la difficulté qu'elle éprouvoit à fe faire entendre; mais ce motif de répugnance pour le monde céda à la curiofité que fes lectures exciterent; & dès l'âge de treize ans elle déclara qu'elle aimeroit mieux mourir que de continuer à vivre féqueftrée. Dans fon défir de prendre une idée de la vie de Londres, elle forma divers projets que fa mere n'eut garde d'agréer ; & celle-ci lui ordonna enfin d'oublier une fantaifie qui ne pouvoit que compromettre fon bonheur & la tranquillité de la famille.

Le défir s'accrût par les obftacles; & enfin elle réfolut de tenter la fortune, & de prendre ce qu'on lui refufoit. Elle étoit régulièrement belle. C'étoit une blonde à yeux noirs, un teint écla tant, de belles dents, des cheveux fuperbes, une taille de nymphe; elle avoit feize ans, tout jufte, lorfqu'au cœur de l'hiver (1), elle fe

(1) C'était au mois de Février 1772.

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