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bleffures fe font ouvertes à la fois! Tu as flotté

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fur la mer agitée, & les vagues cruelles ont démembré ton corps ! Ta mere eft venue, & fes cheveux blancs étoient découverts ta focur eft venue, & nous avons pleuré ensemble. Ton frere eft auffi venu, & il n'a point appaifé les cris de la douleur. Triftes & défolées, nous avons tourné nos regards au loin vers toi; vers toi, dont les amis étoient fept fois heureux! vers toi, la corde (1) de fecours, à laquelle ils fe tenoient attachés Hélas! maintenant on entend crier dans les nuages les oifeaux qui m'étoient deftinés : & ma part des œufs m'est enlevée par la force! C'est à Soa que j'ai laiffé le jeune homme que j'aimois. »

Les poefies Erfes qui nous reftent, ont fans doute été compofées, pour la plûpart, par les Bardes qui étoient entretenus dans les familles des Seigneurs ou des chefs. Il y avoit auffi des rapfodes qui alloient chantant leurs compofitions pour de l'argent.

Dans toutes les montagnes d'Ecoffe on chante des chanfons en choeur, ou l'on joue des airs fur les inftrumens, non-feulement dans les occafions de fètes, mais encore dans prefque tous les cas où une occupation réunit plufieurs perfonnes ainsi l'on chante en foignant les

(1) Shiny thonne. Corde brillante, faite de bandes de peaux en poil.

troupeaux, en foulant les draps, en broyant, les grains avec le moulin à bras, en faifant les foins, en coupant les moiffons.

Ces chants raniment les manoeuvres fatigués, & donnent le courage de foutenir les travaux. Lorsqu'on voyage en automne dans ces montagnes, on entend de tous côtés des bandes de mufique qui font en effet extrêmement agréables. Il y a des preuves fans replique que depuis le douzieme au quinzieme fiecle, les Ecoffais, comme les Irlandais, excelloient à jouer de la harpe, inftrument qui originairement leur venoit des Druïdes. Mais l'inftrument favori, & qu'on peut appeler National, c'eft la cornemufe, que les Norwégiens ont fait connoître aux Ecoffais dans une époque très-ancienne. Dans toutes les grandes occafions, telles que la guerre, les mariages, les proceffions funebres, on emploie la grande cornemufe. Ils en ont une plus petite, qui fert pour la danfe. Il y a de certain airs nommés pibrachs, qui font fur un montagnard d'Ecoffe, le même effet que la trompette guerriere fur les chevaux accoutumés aux combats. Ces im-. preffions rappelent ce qu'on nous raconte de la mufique des anciens. A la bataille de Quebec, en avril 1760, les troupes Anglaifes fe retiroient en défordre. Le Général fe plaignoit à un Officier fupérieur du régiment de Frafer, de la mauvaise conduite de fa troupe. «Mon

fieur, lui dit cet Officier, avec chaleur, « vous avez eu grand tort de ne pas laiffer jouer les cornemufes: rien n'encourage davantage les Ecoffais; & mème à préfent ce ne feroit pas trop tard. » -Faites donc jouer les cornemufes comme le Diable, » repliqua le Général. A l'inftant où les fons de l'air martial frapperent les foldats, ils fe rallierent. Dans la derniere guerre de l'Inde, Sir Eyre Coote, en récompenfe de la bravoure des Ecoffais, à la bataille de Porto-Nuovo, leur fit préfent de deux cornemufes.

ROMAN S.

ALBERT DE

NORDENSHILD OU

LE

MODERNE ALCIBIA DE. Roman traduit de l'allemand, 2 vol. in-12. Robinson 1796. Prix 7 shel.

CE roman eft une forte de curiofité littéraire, parce qu'il fait connoître des mœurs qui appar tiennent au fiecle dernier, & à un canton inté rieur de l'Allemagne. Ces mœurs féodales & militaires forment le plus étrange contrafte avec celles des pays civilifés par les arts & le commerce; & fous ce rapport, l'ouvrage cft piquant.

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Il l'eft encore à d'autres égards; car quoique la fable en foit étrange, bizarre, & chargée d'événemens improbables; il a des fituations & des caracteres qui intéreffent. Un échantil lon du ftyle de l'auteur & du genre de cette production, fuffira pour faire juger qu'elle ne reffemble à aucun des livres qui portent le titre de romans: ce fera peut-être une recommandation auprès de bien des gens.

Albert de Nordenshild, l'un des jeunes hommes les plus beaux de fon fiecle, étoit inculte comme la Nature fauvage; mais, comme elle, il étoit fufceptible de tous les perfectionnemens. Il s'étoit jeté, en arrivant de la chaffe, fur un antique canapé dans l'anti-chambre des valets. Buxar, qui étoit un vieux huffard du régiment du Général de Nordenshild, & qu'on appeloit en dérifion le grand maître de l'écurie, étoit debout auprès d'une fenêtre, occupé à nettoyer fon fabre, premier & dernier objet de fon affection. Buxar avoit une effroyable figure. Il avoit perdu un ceil dans les combats. Une large cicatrice brune traversoit fon front, fon nez & fa bouche, & faifoit paroître fa phyfionomie de travers; enfin une épaiffe mouftache rouffe achevoit de le rendre hideux. Il étoit cependant le favori du Général; & il méritoit cette diftinction; car fon cœur étoit auffi bon, auffi humain que fon vifage étoit difforme. Il venoit de gronder fon jeune maître de ce qu'il

ménageoit fi peu les chevaux à la chaffe ; celu ci n'avoit pas montré beaucoup de déférence pour fes avis, & Buxar pour cacher le dépit que lui donnoit le mépris du jeune homme, frédonnoit un air qui ne reffembloit pas mal au bruit d'une roue mal engraiffée.

» Albert avoit l'air inquiet & chagrin. Il fe tournoit tantôt d'un côté, tantôt de l'autre. Buxar chantoit toujours plus haut; & quand fon œil rencontroit fon jeune maître il fe mordoit les levres d'un air mécontent. Cette bouderie dura quelques momens. Enfin Albert, fe couvrant le vifage de fa main, rompit le filence. & dit au vieux guerrier. Ecoute, Buxar; contemoi quelque chofe de Stralfund. »

> Oui, oui, de Stralfund, reprit le grand maître de l'écurie en fronçant le fourcil, « les hommes d'alors étoient d'un autre trempe que ceux d'à préfent. »

Que le Diable t'emporte! avec tes hommes d'une autre trempe. »

» Vous pensez peut-être, jeune homme, que je ne fais pas la raifon de votre mauvaise humeur; que je ne fais pas que vous êtes faché de ce que Berda & Selina font allés promener fans dire où vous pourriez les trouver. Et moi je fuis für qu'elles ont defcendu l'allée des chevres, comptant d'aller à votre rencontre; car comment auroient elles deviné que le Dia ble, Dieu me pardonne! vous poufferoit dans

tous

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