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mense activité qui lui a été donnée pour le bien.

AMPOULE (SAINTE).

Objections. Voudriez-vous nous faire croire aussi à la sainte ampoule? — Qui ne comprend aujourd'hui que cette croyance avait pour but de rattacher davantage, par des liens sacrés, le peuple français au sceptre de ses rois ?

Réponse.- Hincinar, archevêque de Reims, raconte, en effet, comme chacun sait dans la Vie de saint Remi, que, quand cet illustre évêque voulut baptiser Clovis, une blanche colombe apporta du ciel une petite fiole contenant de l'huile qui parfuma toute l'église. Ce serait ce qu'on appela la sainte ampoule. Elle aurait servi au baptême du premier roi chrétien, et aurait été gardée dans l'abbaye de Saint-Remi pour le sacre des rois.

Voudriez-vous nous faire croire aussi à la sainte ampoule, avez-vous demandé?

Qui vous oblige d'y croire? Où voyez-vous que l'Eglise vous en fasse un précepte? Làdessus, comme sur tout ce qui est incertain, les opinions sont parfaitement libres. Quel qu'un veut-il y croire absolument? Libre à lui; c'est un fait qui a son enseignement et son utilité, comme nous allons le dire bientôt, et qu'ont reconnu des historiens qui ne sont point à dédaigner. Refusez-vous d'y croire, au contraire? Libre à vous encore; car, d'une part, ce n'est point un fait essentiel; et, d'une autre part, s'il y a pour lui de graves autorités, il y en a contre également. On remarque, avec raison, que Grégoire de Tours, voisin des temps de la conversion de Clovis, n'en parle point. Or, ajoute-t-on, ce grand narrateur de prodiges n'eût pas manqué de raconter celui-ci, s'il avait eu lieu. La sainte ampoule n'aurait donc été alors qu'une huile ordinaire, qui peut-être avait servi au baptême de Clovis, et qu'on réservait pour le sacre des rois.

Qui ne comprend aujourd'hui, ajoutezVous, que celle croyance avait pour but de rattacher davantage, par des liens sacrés, le peuple français au sceptre de ses rois ?

Et quand cela eût été, quel mal y avait-il? N'était-ce pas un bien, au contraire, et même un très-grand bien, dont nous aurions grand besoin aujourd'hui? I importe souverainement, en effet, non-seulement au gouvernant, mais aux gouvernés, que ceux-ci obéissent par idée religieuse, et, conséquemment, en conscience. Quand il n'en est plus ainsi,

celui qui gouverne est obligé de se faire obéir par crainte. L'unique base de la société alors, c'est l'épée; et, dès que cette épée vient à se briser, la société s'écroule, et tombe aussitôt dans l'abîme. De là tous les malheurs des temps modernes. Qui ne se rappelle ce qui eut lieu, en 1830, quand Louis-Philippe jura fidélité à la charte constitutionnelle? «Comme c'est beau » s'écriait alors le député Guizot. «Quel sacre vaut celuilà!» Oui, peut-être, aux yeux de ceriais enthousiastes. Malheureusement, quelques années s'étaient à peine écoulées, que le nouveau roi, sacré par nos députés, eul, avec toute sa dynastie, une fin plus pitoyable encore que n'avait été son élévation. Il est donc préférable de faire intervenir le ciel plus fréqueminent même que cela n'est à la rigueur nécessaire plutôt que de s'en passer complétement dans les transactions humaines. Car rien ne peut être établi solidement sans une base divine, surtout quand il s'agit d'une grande institution. Pour en revenir au fait dont nous nous occupons dans cet article, ajoutons ici que, s'il avait son enseignement par rapport au peuple, en lui montrant l'iinage de la Divinité dans le chef de l'Etat, il avait aussi son enseignement par rapport au chef de l'Etat, en lui rappelant de se montrer toujours le digne représentant de la Divinité, par la pratique de toutes les vertus chrétiennes, mais principalement de la douceur. Car cette blanche colombe, symbole de la douceur, apportant du ciel, pour lui faire les onctions saintes, une fiole d'huile, symbole aussi de la douceur, tout cela ne lui disait-il pas que cette belle et céleste vertu de la douceur ne devait jamais s'éloigner de ses yeux, qu'elle devait toujours briller dans sa personne sacrée, et passer, autant que possible, dans tous les actes de son gouvernement. Salutaire enseignement, qui ne peut guère venir que de la religion, laquelle a pour mission d'instruire les rois aussi bien que les peuples!Et nunc reges intelligite; erudimini qui judicatis terram. (Psal. 11, 10.)- De là ces remarquables paroles du ministre de la religion au soldat conquérant, pour lui rappeler l'obligation qu'il contractait de changer complétement de mœurs, en entrant dans le sein de l'Eglise: Courbe la tête, doux Sicambre!......"

ANACHORÈTES, HERMITES, MOINES, SOLITAIRES.

Objections. Tout cela est contraire à la nature de l'homme, qui est né pour la société. Que deviendrait le monde, si chacun se retirait ainsi dans la solitude? Il y a chez eux souvent des exagérations de mortification que vous êtes les premiers à condamner chez les mahométáns et les idolatres.

Réponse. Il y a eu, au commencement du christianisme surtout, un certain nombre de Chrétiens, qui, saisis d'un dégoût profond pour ce monde corrompu et corrupteur, se sont retirés dans la solitude, où ils se livraient à la pratique des plus belles vertus du christianisme. On leur donna différents noms

selon les temps, les lieux, le genre de vie qu'ils avaient adopté dans la solitude; mais, au fond, ils étaient tous des solitaires, se livrant aux mêmes exercices: le recueillement, la prière, la méditation, le travail manuel, le détachement des choses de ce monde, la patience, la mortification des sens, la charité dans les relations qu'ils avaient encore avec leurs semblables, en un mot, aux exercices les plus héroïques de la vie chrétienne.

Ce genre de vie est aujourd'hui bien rare, pour ne pas dire complètement abandonné; parce que, d'une part, la société devenue chrétienne excite moins les antipathies du véritable disciple de l'Evangile, et parce que, d'une autre part, la religion a concilié admirablement, dans ses communautés, la vie en société et la vie solitaire. De là ces deux mots, en apparence opposés, pour exprimer la même idée : communauté, c'est-àdire réunion de ceux qui vivent en commun, monastère, c'est-à-dire habitation de ceux qui vivent seuls.

Ces deux termes ne sont opposés qu'en apparence, avons-nous dit avec raison, parce que la vie de communauté est au fond une véritable vie solitaire, soit que l'on considère ceux qui s'y trouvent comme jouissant tous de la plus profonde solitude, soit qu'on les considère comme n'ayant tous qu'un corps et qu'une âme, et ne formant tous, en quelque sorte, qu'un seul en plusieurs, et même en un très-grand nombre quelquefois. C'est dans la solitude, par la réunion des moines sous une même règle, que se sont formés d'abord ces monastères qui, de là, se sont transportés au sein de nos plus grandes populations, autres solitudes d'hommes, suivant l'idée d'un de nos écrivains les plus remarquables.

Tout cela est contraire à la nature de l'homme, qui est né pour la société, avezVous dit.

Et moi, je dis, de mon côté, qu'il n'y a rien là qui ne soit conforme à la nature bien comprise de l'homme; puisque tout y est conforme à la religion, et que la religion n'est que le perfectionnement de la nature humaine.

L'homme est né pour la société, dites-vous. C'est vrai; mais qu'en faut-il conclure? qu'il doit se mettre en relation avec tout le monde? c'est impossible. Avec un trèsgrand nombre de personnes? ce n'est pas possible, non plus, du moins pour la plupart. Il n'y a que dans certaines positions que nos relations avec autrui doivent être étendues. Ailleurs, plus elles s'étendent et plus elles deviennent inutiles, si ce n'est même nuisibles. Que conclure donc? que nous devons conserver avec nos semblables toutes les relations obligatoires, ou du moins très-utiles. Quant aux autres, libre à nous de les rompre, surtout lorsque nous ne le faisons que pour nous livrer exclusivement à la pratiqué des vertus qui nous concernent plus particulièrement nous-mêmes. Or, ceux dont nous parlons ont-ils rompu de semblables relations? Les a-t-on vus abandonner

DICTIONN. DES OBJECT. POPUL.

un père, une mère, une épouse, des enfants qui réclamaient leurs soins, et auxquels ils devaient assistance? Non, jamais. Car s'ils l'avaient fait ils ressaient d'être, je ne dirai pas de parfaits solitaires, mais même de bons Chrétiens. Qu'ont-ils donc fait? Je vous l'ai dit, las d'un monde où ils ne trouvaient que dégoût, et où d'ailleurs rien ne les retenait, ils ont rompu complétement avec lui, et se sont retirés dans une solitude profonde, où, se formant de plus en plus à ceite perfection si expressément recommandée par l'Evangile, ils ont édifié encore les autres solitaires, et même les personnes du monde avec qui ils se sont trouvés quelquefois en relation, et ils ont laissé, après leur mort, les uns des règles de conduite, les autres des exemples de vertu qui ont eu la plus heureuse influence, dans la suite, sur la société chrétienne. Y a-t-il là quelque chose de contraire à la nature de l'homine? n'en est-ce pas, au contraire, le perfectionnement? Rappelez-vous sainte Marie d'Egypte. Après s'être livrée à la débauche pendant plusieurs années, elle s'enfonce dans une solitude immense, où elle se livre à des mortifications telles que nous avons de la peine à les croire aujourd'hui. La première partie de sa vie vous paraft-elle plus conforme à la nature humaine, plus utile à la société ? Admirables effets de la Providence, qui ne se réalisent, du reste, que sous l'influence de no're religion : cette jeune fille, perdue de débauche, se précipite dans l'oubli, de toute la puissance de sa volonté, et elle trouve immédiatement, même pour ce monde, la plus éclatante et la plus salutaire immortalité!

Que deviendrait le monde, avez-vous dit encore, si chacun se retirait ainsi dans là solitude?

Ne savez-vous pas que c'est là une supposition absurde, impossible, par conséquent; et que d'une telle supposition on ne peut rien conclure?

Que deviendrait donc le monde, si tons embrassaient la même carrière, disons-nous dans un autre article où cette objection sc trouve plus longuement réfutée, si, par exemple, tous se faisaient militaires, avocats, médecins, boulangers, bouchers, sabotiers, etc., etc. La nature répond à cela qu'elle a fait des aptitudes diverses, et formé des goûts différents. D'où il suit qu'il faut laisser chacun aller où sa vocation l'appelle, pourvu qu'il ne viole aucune des lois auxquelles il est obligé de se soumettre.

Impossible en soi, la supposition que vous venez de faire l'est bien davantage encoré dans l'état présent de la société. Ne craignez rien, tout le monde ne se précipitera pas dans la solitude. La tendance opposée n'est-elle pas trop dominante au contraire? Est-ce que chacun ne tient pas, comme par le fond de ses entrailles, aux biens du monde, aux plaisirs du monde, aux honneurs du monde? De là l'ambition, de là des rivalités ardentes, de là une agitation continuelle qui, dans un câs donné, peut faire courir les plus grands dangers, je ne

dirai pas à quelques individus seulement, mais à la société entière. Si quelques-uns éprouvent le désir de quitter ce monde pour s'occuper exclusivement de Dieu dans la solitude, laissez-les donc y aller. Bonne pour le ciel, leur retraite ne peut être qu'une décharge pour la terre, indépendamment des bénédictions célestes qu'elle ne manquera pas d'y attirer.

Il y a souvent chez eux, avez-vous ajouté, des exagérations de mortification que vous êtes les premiers à condamner chez les mahométans et les idolâtres.

Ce n'est plus du tout la même chose. Nous condamnons, chez les mahométans et les idolâtres, certaines exagérations de mortification pour trois raisons principales parce que ces mortifications sont mauvaises en soi; qu s'agira, par exemple, de mutilations et . même de suicide; parce que ces mortifications ont un mauvais but, et cela est clair, puisqu'elles sont faites pour honorer de fausses divinités; parce qu'elles n'ont aucun bon résultat, et cela est évident encore, puisque, au lieu de devenir meilleurs, ceux qui s'y livrent ne sont ensuite que plus emportés et plus violents. Or, rien de semblable n'a eu lieu chez nos solitaires, qui n'ont pu se livrer qu'aux mortifications autorisées par T'Eglise, qui ont offert toutes leurs mortifications au Dieu vivant et véritable, en expiation de leurs péchés et de ceux de tous les hommes, et qui ont acquis par là une patience, une douceur, une soumission telles qu'ils ont été appelés, avec raison, les anges de la solitude. Donc, de ce que nous sommes les premiers à blâmer les pratiques superstitieuses de quelques fanatiques musulmans ou idolâtres, il n'en faut pas conclure qu'il soit permis de blâmer de même les grandes mortifications de quelques-uns de nos solitaires.

« Il y avait,» dit Fleury, « des Chrétiens qui, sans y être obligés, pratiquaient volontairement tous les exercices de la pénitence, pour imiter les prophètes et saint Jean-Baptiste, et pour s'exercer à la piété, comme dit saint Paul, en châtiant leur corps et le réduisant en servitude (11 Tim. iv, 7; I Cor. Ix, 26). On les appelait ascètes, c'est-à-dire, exercitants. Ils s'enfermaient d'ordinaire dans des maisons, où ils vivaient en grande retraite, gardant la continence, et ajoutant à la frugalité chrétienne des abstinences et des jeûnes extraordinaires. Ils pratiquaient la xérophagie ou nourriture sèche, et les jeunes renforcés de deux ou trois jours de suite,

ou plus songs encore. Ils s'exerçaient à porter le cilice, à marcher nu-pieds, à dormir sur la terre, à veiller une grande partie de la nuit, lire assidûment l'Ecriture sainte, et prier le plus continuellement qu'il était possible. Plusieurs de ces ascètes ont été de grands évêques et des docteurs fameux. Origène a mené la même vie, et l'a marquée comme un état distingué entre les Chrétiens.» (Mœurs des Chrétiens.)

C'est grave et sévère sans doute, mais qu'y a-t-il là de blamable? qu'y trouver qui ne soit louable, admirable même, quand on pense que c'est fait pour Dieu, et afin d'arriver à une vertu plus éminente? Actuellement, lisons les renseignements suivants, que je trouve dans la feuille officielle de France, et sur l'authenticité desquels personne ne peut élever, du reste, le moindre doute, tant ils sont de notoriété publique.

«Les Indous sont servilement attachés à leur religion. Ils en pratiquent les rites superstitieux, quelque absurdes qu'ils soient. C'est ainsi que, dans leurs fêtes religieuses, des hommes qui veulent passer pour trèspieux se meurtrissent le corps et s'imposent toutes sortes de supplices, dans l'espérance d'être très-agréables à leurs divinités. Les fakirs font de la vie un tourment perpétuel, en se soumettant par dévotion aux habitudes les plus insupportables. Les femmes mêmes montrent du courage et de l'intrépidité quand il s'agit de coutumes religieuses. C'est au son d'une musique bruyante et parée de ses plus beaux habits que la veuve indienne va se précipiter dans les flammes du bacher. Ses enfants l'accompagnent, et dans leurs yeux brille une sainte joie, en pensant à la félicité céleste et à la gloire éternelle que leur mère va conquérir. Un Européen dit à l'aîné des fils: « Ne supplierez-vous pas votre mère de se conserver pour ses jeunes enfants qu'elle va rendre orphelins? Moi, commettre une telle infamie! ah! plutôt, si ma mère hésitait un moment, je l'encouragerais, je la forcerais même à accomplir un sacrifice que demandent la religion et l'honneur. »

Il n'est pas possible d'aller plus loin dans le mal, au nom et sous les dehors de la religion. Il n'y a donc aucune comparaison à établir entre ces exagérations évidemment coupables et les pénitences toujours légitimes de nos solitaires; et, de ce que nous blâmons les unes, il n'en faut pas conclure du tout, avons-nous dit avec raison, qu'il soit permis de blâmer les autres.

ANATHÈME.

Objection. Dire anathème à ses frères, c'est méconnaître la religion de Jésus-Christ, qui était la bonté même.

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(ce qui est la même chose que de lui dire anathème) celui qui refuse obstinément d'écouter l'Église, c'est-à-dire celui que nous en déclarons retranché, en prononçant le mot sacramentel d'anathème: Que si votre frère a péché contre vous, nous dit-il, en nous traçant le devoir de la correction fraternelle, allez le trouver, et le reprenez en particulier entre vous et lui seul. S'il vous écoute, vous

aurez gagné votre frère. Mais, s'il ne vous écoute point, prenez encore avec vous une ou deux personnes, afin que tout soit confirmé par l'autorité de deux ou trois témoins. Que silne les écoute pas, dites-le à l'Eglise; et, s'il n'écoute pas l'Eglise même, qu'il soit à votre égard comme un païen et un publicain. « Si autem Ecclesiam non audierit, sit tibi sicut ethnicus et publicanus. » (Matth. xvIII, 15-17.)

Non, ce n'est point méconnaître la religion de Jésus-Christ; car l'Apôtre qui l'a si bien connue et pratiquée, celui qui, après avoir été instruit par Dieu lui-mêine des vérités de la foi, fut chargé de les faire connaître aux gentils; celui qui parle, en termes si magnifiques, de toutes les vertus chrétiennes, mais principalement de la charité, Paul enfin se sert positivement de cette énergique expression: Si quelqu'un n'aime pas Noire-Seigneur Jésus-Christ, nous dit-il, qu'il soit anathème. « Si quis non amat Dominum nostrum Jesum Christum, sit anathema. » (1 Cor. IVI, 22.)

Non, ce n'est point méconnaître la religion de Jésus-Christ, puisque c'est la sentence même que, sur l'invitation de NotreSeigneur, et d'après l'exemple de saint Paul, l'Eglise n'a cessé de prononcer contre ceux qui persistent jusqu'à la fin dans leur révolte, malgré les avertissements qui leur ont été donnés.

Non, ce n'est point méconnaître la religion de Jésus-Christ, puisque c'est le cri naturel de la raison comme de la foi contre ceux qui outragent le Seigneur, scandalisent leurs frères, et arriveraient infailliblement à l'abtme, en y entraînant beaucoup d'autres avec eux, si une main ferme autant que bienveillante ne les arrêtait sur la voie où ils se sont malheureusement engagés. Estce que le soldat indiscipliné n'est pas retranché du corps qu'il déshonore et démoralise? Est-ce qu'aucune société pourrait subsister sans la condamnation et le retranchement des membres qui sont pour elle une cause d'affaiblissement et peut-être même de ruine? Il en est ainsi pour la religion de Jésus-Christ. On peut dire même que plus cette religion est pure et sainte, plus elle doit être défendue avec soin contre toutes les alteintes de l'erreur.

Et qu'on ne dise pas que la charité chrétienne doit empêcher d'en venir à ces extrémités. Car cette charité est précisément un des motifs les plus pressants qui y déterminent. Charité pour les Chrétiens restés fidèles, charité pour celui-là même qui s'est révolté et à qui on dit anathème.

L'hérétique n'est jamais seul, si ce n'est au moment même où il commence à se séparer de la société des fidèles. C'est une branche qui, en se brisant, tombe à terre et en entraîne d'autres avec elle dans sa chute. On doit remarquer même que toute hérésie, toute erreur en fait de religion est d'autant

plus contagieuse, qu'elle flatte nos passions, et particulièrement la plus violente de toutes, celle de l'indépendance. De là la nécessité de l'arrêter, et de le faire promptement, non-seulement dans l'intérêt de la vérité elle-même, qui peut fort bien se passer des hommes, mais aussi et plus encore dans l'intérêt des hommes, qui ne peuvent se passer de la vérité. De là la nécessité de la signaler aux yeux de tous, de l'élever en haut, moralement du moins (ce qui est exprimé avec tant d'énergie par le mot anathème), et de la présenter ainsi comme une chose abominable, dangereuse, qu'il faut éviter absolument, de peur de périr. Quelquesuns s'y laisseront prendre encore après cela, sans doute, mais ce sera bien leur faute, et ils ne devront imputer leur perte qu'à euxmêmes.

Vous allez me demander, peut-être, pourquoi condamner ainsi, avec tant de publicité, l'hérétique lui-même, et ne pas se contenter de condamner son erreur, qui seule est abominable aux yeux de Dieu et dangereuse pour les hommes.

Pourquoi? Mais parce que, à cause de son obstination dans l'erreur, il se l'est en quelque sorte incorporée, de manière qu'il ne fait plus qu'un, pour ainsi dire, avec elle; d'où il suit qu'on ne peut plus condamner l'hérésie sans condamner l'hérétique luimême.

Pourquoi? Mais parce que c'est lui qui la publie, la propage, et en fait en partie le danger. Il est alors dans une position à peu près semblable à celle de l'homme dont les vêtements sont tout en feu, et qui ne peut plus se tourner d'aucun côté sans communiquer l'incendie à tous les objets avec lesquels il entre en contact. On est bien obligé de jeter l'eau sur lui pour éteindre le feu et l'empêcher de se communiquer.

Pourquoi? Mais parce que, sans cela, il se ferait peut-être illusion jusqu'à la fin; il ne comprendrait pas, du moins, toute l'étendue de sa faute. Quand, au lieu de ces dangereux ménagements, il se sent arrêté, condamné solennellement par ceux à qui Jésus- Christa dit: Comme mon Père m'a envoyé, et moi aussi je vous envoie (Joan. xx, 21); Qui vous écoute, m'écoute (Luc. x, 16); quand il se voit abandonné des fidèles et recherché des méchants seulement, la lumière ne tarde pas à se faire dans son âme, et il est naturellement porté à tourner ses regards vers Dieu, et par suite à se rapprocher de l'Eglise, qui ne l'a même condamné qu'avec charité et qui, en le frappant d'une main, est prête à le presser de l'autre contre son cœur, à lui donner les preuves les plus convaincantes de toute sa tendresse, comme fait le père de famille à l'égard du prodigue repentant, et à lui rendre même, s'il revient à ses sentiments d'autrefois, ses anciennes prérogatives.

ANGE, ARCHANGE, ETC.

Objections.- Contes de fées que tout cela! - C'était bon autrefois; mais aujourd'hui !... Parlez-en aux enfants, tout au plus. Quant aux grandes personnes, ne leur en parlez point, de grâce, car vous les feriez sourire de pitié.

-

Réponse. C'est vous qui faites sourire de pitié, si même vous ne faites gémir de douleur, en attaquant l'un des dogmes les plus touchants, les plus salutaires, les plus répandus de notre sainte religion. Et encore que dites-vous? Ecoutons plutôt.

Contes de fées que tout cela vous écriezvous à propos de la croyance aux anges et de tout ce qui tient à cette croyance.

Non, ce ne sont pas des contes de fées. Ce sont, au contraire, des choses très-sérieuses, et même tellement sérieuses qu'il n'y en a guère de plus sérieuses dans la religion, qui est pourtant l'ensemble des vérités les plus sérieuses dont l'homme puisse s'occuper.

Non, ce ne sont pas des contes de fées, car il n'est question des contes de fées que dans les livres de contes, tandis qu'il est question des anges dans les livres les plus graves et les plus accrédités qui se trouvent entre les mains des hommes, les livres de religion et de science. Que dis-je! Mais il en est question, et même à chaque page, dans le livre le plus saint, le plus respecté, celui qui s'élève au-dessus de tous les autres livres, comme Dieu domine toutes les créatures, parce qu'il est son ouvrage, la Bible! Lisez ce livre, en effet, et vous y verrez que l'un, des noms qui s'y trouvent le plus fréquemment répétés, après le saint nom du Seigneur, est celui de l'ange, dont il nous montre partout et toujours l'intervention dans les choses de ce monde.

Non, ce ne sont point des contes de fées, rar les contes de fées ne s'adressent qu'aux enfants, tandis que tout ce qui concerne les anges s'adresse aussi bien aux grandes personnes qu'aux enfants, comme nous le montrerons dans le courant de cet article.

Non, ce ne sont point des contes de fées, car ces sortes de contes n'ont pour but que d'égayer l'homme un instant au milieu des choses graves et tristes de la terre, tandis que tout ce qui concerne la croyance aux anges a pour but sa sanctification et son bonheur éternel.

Non, encore une fois, ce ne sont point des contes de fées, car les contes de fées ne reposent sur aucune base solide. Bien au contraire, produits d'une imagination qui cherche à s'amuser et à amuser les autres, ils ne peuvent soutenir un seul instant l'examen de la raison. Il n'en est point ainsi de la doctrine des anges. Appuyée sur la base la plus sainte et la plus inébranlable, la religion, cette doctrine a pour elle encore le consentement unanime des peuples, et, en un sens aussi, le consentement de la raison.

Nul ne doute que la croyance aux anges ne soit un dés dogmes de notre religion. J'ajouterai même que c'est un des dogmes les plus connus et les plus pratiqués, si je puis m'exprimer de la sorte; c'est-à-dire que, bien loin d'être connu des savants seulement et de rester dans le domaine des idées, il est connu de tous les Chrétiens sans exception, quels que soient leur âge et leur condition, ayant une influence plus ou moins marquée sur la conduite de chacun.

Dire que la doctrine des anges est plus ou moins reconnue, même en pratique, de tons les Chrétiens sans exception, c'est dire qu'elle a pour elle, à peu près, le consentement de tous les peuples modernes. Car, que sont aujourd'hui les peuples en dehors du christianisme? Quant aux peuples anciens, tout le monde sait que les Juifs croyaient aux anges, comme y croient les Chrétiens, ainsi que nous le voyons par la Bible, et tout le monde sait également que cette croyance se trouvait, en germe du moins, jusque chez les peuples idolâtres. Et, en effet, qu'étaientce que ces génies dont ils reconnaissaient l'existence, ces esprits de beaucoup supérieurs à l'homme, mais infiniment au-dessous de l'Etre suprême? N'étaient-ce pas des anges véritablement? Aussi, les plus éclairés parmi eux en ont-ils parlé absolument dans les mêmes termes que les Chrétiens parlent des anges. Ils nous conduisent, » dit le divin Platon, et nous défendent quelquefois en écartant eux-mêmes les accidents et les objets nuisibles, et d'autres fois en nous inspirant la pensée de les éviter.» (De legibus, lib. x.) J'ai donc eu raison de dire que la croyance aux anges avait pour elle le consentement unanime des peuples. Il me reste à montrer qu'elle a également pour elle, en un sens, le consentement de notre raison.

Je ne veux pas dire par là que la raison puisse, en dehors de la foi, prouver seule leur existence; j'entends seulement que, quand cette existence lui est annoncée, elle en reconnaît l'extrême convenance et l'adopte aussitôt avec empressement. C'est qu'il y a de l'homme à Dieu, de l'atome de l'intelligence à l'intelligence suprême une distance infinie qu'elle ne peut franchir; et quand la religion, venant à son aide, lui montre cette échelle d'intelligences figurée dans le rêve de Jacob, qui s'élève de la terre jusqu'aux cieux (Gen. xxvi, 12), elle doit s'écrier tout naturellement : « C'est cela, et je comprends pourquoi il en est ainsil »>

Gardez-vous donc bien, je vous le répète, de comparer l'enseignement de la religion sur les anges aux contes de fées, car cette doctrine est aussi satisfaisante aux yeux de la raison que solidement établie aux yeux de la foi.

C'était bon autrefois, ajoutez-vous, mais aujourd'hui !...

Oui, vous avez raison, c'était bon autrefois, alors que tous ou presque tous se sou

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