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Pourquoi non? puisque ce sont les princes de l'Eglise catholique, ils se trouvent par cela même, spirituellement du moins, princes des Etats catholiques, où ils exercent leur ministère. Et en effet, si, d'une part, ils défendent, dans ces Etats, les intérêts de la religion et du Saint-Siége, d'une autre part aussi, ils plaident les intérêts de ces mêmes Etats auprès de Dieu et du chef visible de son Eglise. Ce sont comme des liens sacrés qui rattachent toutes les parties du monde catholique à Rome, ce foyer inextinguible des plus pures lumières, à

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Rome, qui a reçu les promesses d'une éternelle durée, et les font participer davantage encore à sa foi indéfectible, à son indestructible existence.

Ajoutons à cela qu'il n'y a guère de cardinaux dans les Etats catholiques, qu'autant que ceux-ci les désirent. D'où nous concluons encore ces Etats ne doivent point s'étonner d'être obligés de faire pour eux des sacrifices qui sont toujours peu de chose, comparativement surtout aux avantages qu'ils en retirent.

CASUEL.

Objection. A quoi bon le casuel? N'y aurait-il pas, en tout cas, un autre moyen de faire subsister le clergé et de fournir aux besoins du culte ? C'est contraire à la recommandation faite par JésusChrist à ses apôtres, de donner gratuitement ce qu'ils avaient reçu gratuitement. C'est vendre les choses saintes. C'est aussi humiliant pour le prêtre que vexatoire pour les fidèles. D'autant plus qu'il s'agit souvent de sommes considérables. — Il n'y a rien de cela chez les protestants, parmi nous du moins.

Réponse. - Vu la mauvaise disposition des populations dans presque toutes les parties de la France, rien n'est plus embarrassant pour le clergé, en ce moment, que la perception du casuel, rien ne lui fait dire aussi fréquemment des choses désobligeantes de la part de certaines personnes.

A quoi bon le casuel ? nous demandet-on quelquefois.

C'est facile à voir, pourtant. Avant tout, c'est pour faire vivre ou pour aider à faire vivre le prêtre. Tout homme doit vivre de son état. C'est un principe généralement admis et pratiqué, c'est un principe que nul ne conteste ou ne saurait contester sérieusement. Or le prêtre est attaché à l'autel : il doit donc vivre de l'autel. De là la réponse de saint Paul à ceux qui déjà, sans doute, faisaient les mêmes observations, réponse également basée sur la raison et sur la religion: Nous est-il donc défendu, dit-il, de manger et de boire? « Nunquid non habemus potestatem manducandi, et bibendi ? » Qui fait jamais la guerre à ses dépens? Qui plante une vigne et ne mange pas de son fruit? Qui fait paitre un troupeau et ne mange pas du lait des brebis? Ce que je vous dis n'est pas de l'homme seulement. La loi n'en dit-elle pas autant? Car il est écrit dans la loi de Moise: Vous ne tiendrez point_la_bouche liée au bœuf qui foule les grains. Est-ce que Dieu a des bœufs une telle sollicitude? N'est-ce pas plutôt de nous qu'il dit cela? Oui, celu a été écrit à cause de nous. Car celui qui laboure doit labourer avec espoir d'en recevoir du fruit, et celui qui bat le grain également. Si donc nous avons semé parmi vous des biens spirituels, est-ce une grande chose que nous recueillions quelque

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fruit de vos biens temporels ?... Ne savezvous pas que les ministres du temple mangent de ce qui est offert dans le temple, et que ceux qui servent à l'autel ont part aux oblations de l'autel? Ainsi, le Seigneur a voulu que ceux qui annoncent l'Evangile vivent de l'Evangile: « Ita et Dominus ordinavit iis qui Evangelium annuntiant, de Evangelio vivere (1 Cor. ix, 4, 7-14). »

Il me semble que, pour ce qui concerne les besoins du prêtre, il n'y a rien à ajouler aux paroles si positives et si claires de l'apôtre saint Paul. Mais ce n'est pas l'unique considération que nous ayons à présenter ici.

Le prêtr n'est pas le seul qui serve à l'autel. Il y a le sacristain, les chantres, d'autres encore, et quelquefois un grand nombre d'autres, qui sont employés sous Jui. Toute peine mérite salaire, comme on dit communément, tout temps employé demande sa rétribution. Il faut donc pour ces serviteurs secondaires de l'autel une rétribution en rapport avec le temps qu'ils passent et les fonctions qu'ils remplissent. De là une autre raison du casuel.

Mais ce n'est pas tout encore que la subsistance des personnes, il faut aussi l'entretien des choses. Il faut l'entretien de l'église et de son mobilier. De là, des dépenses sans nombre, si on ne savait se restreindre. Vous entendez dire tous les jours, et peut-être vous-même le répétezVous quelquefois, en parlant de la plus simple maison, que c'est comme un gouffre où l'argent s'engloutit sans qu'il en reste de traces. Comment voudriez-vous donc fournir à tous les besoins de la maison du Seigneur? De là une nouvelle raison du casuel.

N'y aurait-il pas, en tout cas, nous demande-t-on encore, un autre moyen de faire subsister le clergé, et de fournir aux besoins du culte?

Sans doute, il y en aurait d'autres si on voulait les employer; et même il faut bien qu'on ait recours à quelqu'un de ces moyens dans l'état actuel des choses, puisque le casuel ne pourrait faire subsister le clergé, ni fournir aux besoins si nombreux du culte. Que signifie en effet un casuel de 300 f., 200 f., 100 f., et moins encore, dans beaucoup de campagnes? En ville, c'est bien plus élevé; mais aussi le clergé est plus nombreux, et

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CAS

DES OBJECTIONS POPULAIRES

les besoins du culte sont plus grands. Cet autre moyen destiné, concurremment avec le casuel, à faire subsister le clergé et à fournir aux besoins du culte, ce sont des traitements fixes accordés aux différents membres du clergé, en raison de leurs fonctions, et des secours éventuels accordés aussi par le gouvernement et par les communes; traitements et secours, il faut le dire aussi, qui font jeter les hauts cris à bien des personnes; en sorte que les uns disant : « A quoi bon le casuel?» et les autres: « A quoi bon des traitements il suivrait de là, s'il et des secours? >> ne se trouvait pas de personnes plus raisonnables, que, ballotté de l'un à l'autre, le clergé devrait vivre de l'air du temps, c'està-dire mourir de faim, ce que quelques-uns verraient sans trop de déplaisir.

Quant à nous qui ne sommes point de ces gens déraisonnables, voyons donc quels moyens, autres que le casuel, il y aurait de faire subsister le clergé, et de fournir aux besoins du culte.

Il y aurait une dotation en biens-fonds ou en rentes sur l'Etat. Ce serait beaucoup plus commode et plus honorable pour le clergé. Le désirez-vous? Non. Est-ce praticable? Hélas! non encore.

Que vous ne le veuilliez pas, je n'en suis pas surpris, ni n'en veux tenir compte; car je vous crois mal disposé. Mais le grand inconvénient, c'est que la chose est impraticable. Pour faire la dotation en biens-fonds, où prendre des terres? Et puis, quand on en aurait, qui voudrait les donner? On trouverait probablement plus avantageux de les pren dre, comme on a fait dans la révolution. Pour la dotation en rentes sur l'Etat, ce serait bien justice après tout, car ce ne serait qu'une faible restitution de ce qui a été pris au clergé, comme nous venons de le dire; mais enfin est-ce praticable? Non, vu l'état des finances; non, vu la disposition des esprits. Personne n'y pense, personne ne le demande, pas même les membres du clergé, qui comprennent l'embarras du gouvernement, et ne voudraient pas se faire accuser, même à tort, d'avidité.

Il y aurait encore à augmenter les traitements faits aux différents membres du clergé, et les secours accordés aux églises, de manière à combler le déficit qu'aurait causé la suppression du casuel. Le clergé ne s'y opposerait pas probablement. Mais le désirezVous réellement ? Non. Est-ce praticable? Fort peu. Serait-ce préférable à l'état actuel des choses? Je n'oserais l'affirmer.

Vous ne le désirez pas, n'est-il pas vrai ? Car ce serait pour l'Etat une assez lourde charge que vous ne voudriez pas lui voir prendre. Ce n'est guère praticable; car, voyez quel embarras le gouvernement semble éprouver pour augmenter un peu la rétribution réellement insuffisante des curés de campagne. Que serait-ce donc, s'il fallait tout augnienter dans une proportion beaucoup plus considérable? Cette rétribution du gouvernement, d'ailleurs, telle qu'elle est donnée en ce moment, et il n'y a guère

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à espérer, vu la disposition des esprits,
qu'elle le soit autrement, vaut-elle mieux
que la rétribution des fidèles, autrement le
casuel? Qui ne se rappelle ces criailleries
contre le clergé qui avaient lieu autrefois, à
la tribune législative et dans la presse, d'où
elles se répandaient ensuite dans toutes les
parties de la France, à l'occasion de son
budget insultant, comme disait alors l'abbé
de Lamennais. C'est un peu moins mal au-
jourd'hui. Mais n'y a-t-il pas là encore des
désagréments? Le prêtre n'est-il pas obligé
d'aller, tous les trois mois, tendre la main
à des caissiers incroyants et quelquefois mal-
honnêtes? Est-ce mieux que de la tendre
aux fidèles, ou à ceux qui du moins font
profession de l'être? Le gouvernement est
mieux disposé aujourd'hui. Le sera-t-il de-
main? Ne sera-t-il pas renversé? Et alors que
devient votre budget? Ne sera-t-il pas sup-
primé, ou du moins considérablement ré-
duit, tandis que le casuel fail par les fidèles
subsiste tant que ceux-ci n'ont pas perdu
complétement leurs sentiments religieux,
ce qui n'arrive jamais d'un jour à l'autre,
comme un changement de gouvernement?

Détestable sous bien de rapports, le casuel
a donc aussi son bon côté, comme on vient
de le voir. De plus, c'est une occasion pour
le prêtre d'avoir des relations spirituelles
plus intimes et plus fréquentes avec ses pa-
roissiens, de connaître leur position, leurs
besoins, et de les assister sans qu'on s'en
doute. Et pour les fidèles aussi, quels avan-
tages, s'ils veulent le reconnaire et en profi-
ter? Ils entendront parler de la religion, de ses
grâces, des devoirs qu'elle impose, des ré-
compenses qu'elle promet. Qu'ils sachent le
comprendre, d'ailleurs, ce casuel qu'ils vien-
nent remettre entre les mains du prêtre,
ce n'est point une paie, ce ne sont pas même
des honoraires dans le sens terrestre de l'ex-
pression, c'est une œuvre pie qu'ils ajoutent
à la prière; sans être une aumône, puisque
la dette est rigoureuse, c'est une pieuse of-
frande qui, servant non-seulement à faire
vivre le prêtre, mais à entretenir l'église, et
probablement aussi à soutenir les pauvres,
intercédera auprès de la divine miséricorde
en faveur de ceux qui ne sont plus, s'il s'a-
git d'un Office pour les morts ou en faveur
de ceux qui sont encore exposés à tous les
dangers de ce monde, s'il s'agit d'un Office
pour les vivants.

D'où je conclus que ce qu'il y a de mieux à faire peut-être en ce moment, sous le rapport de la rétribution du clergé, c'est de conserver l'état des choses, tout en pressant le gouvernement d'améliorer autant que possible la position des ecclésiastiques les moins rétribués, afin de les mettre à même de moins tenir encore à leur casuel, et d'accroître leurs bonnes œuvres.

Vous allez, me dire peut-être Le prêtre ne peut-il pas vivre de ses revenus particuliers, ou du travail de ses mains, comme faisait saint Paul.

De ses revenus particuliers ! Mais s'il n'en a point, et c'est là à peu près la condition

de tous les ecclésiastiques aujourd'hui. Quant à ceux qui en ont, pourquoi n'accepteraientils pas la rétribution à laquelle ils ont droit, ne fût-ce que pour leurs bonnes œuvres ? N'est-il pas bienlégitime, n'est-il pas louable même de recevoir de ceux qui ont trop, ou qui ont du moins plus que le suffisant, pour porter à ceux qui se trouvent dans l'indigence? Quant à travailler de ses mains pour vivre, ce n'est pas même proposable aujourd'hui. Est-ce que vous ne seriez pas le premier à en rire, vous qui semblez en parler sérieusement. Autre temps, autres mœurs, comme on dit. Et puis la société, en état de régularité et de paix, ne doit pas marcher comme en temps de persécution et de lutte. Ajoutez à cela que le prêtre doit à la prière et à l'étude le temps qu'il n'emploie point à l'exercice du saint ministère. Vous n'êtes pas sans lui avoir reproché quelquefois, bien injustement à mon avis, de ne pas être à la hauteur du siècle, sous le rapport de la science. Que serait-ce donc, si vous le voyiez occupé chaque jour à vivre du travail de ses mains? Vous nous représentez saint Paul, Mais c'est tout différent. Il était en temps de persécution et de lutte, il était surnaturelleinent éclairé, et il était de plus dépositaire de la toute-puissance divine. Les autres sont bien loin de se trouver dans la même position.

On verrait de nouveaux saints Pauls, me répondrez-vous.

Oui, par les dispositions: mais ce n'est pas la suppression du casuel et le travail des mains qui les susciteraient. N'y en a-t-il pas aujourd'hui ? On ne peut espérer de voir désormais dans les ministres de la religion les grâces extraordinaires qui furent accordées aux apôtres pour la mission extraordinaire aussi qu'ils avaient à remplir, je veux dire le miraculeux établissement du christianisme sur les ruines de l'idolatrie.

J'ai entendu dire quelquefois que le casuel était la destruction de la foi. C'est une erreur. Voyez l'Irlande, par exemple. Littéralement pressuré par le clergé anglican, ce pauvre peuple n'est-il pas encore obligé de se pressurer lui-même pour faire vivre son propre clergé. Pouvez-vous voir une foi plus vive en aucun autre peuple? Non.

C'est qu'il est bien disposé, remarquez

vous.

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vention aurait-il moins d'inconvénients que le mode actuel? Nous croyons que, s'il en avait moins sous certains rapports, il en aurait davantage sous d'autres rapports. Quoi qu'il en soit, nous ne pensons pas que le clergé le repoussât, s'il était en vigueur; mais, puisqu'il ne l'est point, personne ne songera à l'établir, car toute innovation en pareille matière offre toujours de grandes difficultés. Vous nous parlez des protestants de France; mais cela a ainsi commencé chez eux; et puis, il ne serait guère possible aux ministres de recevoir autrement une rétribution de leurs adhérents, car ils n'ont, pour ainsi dire, par leurs fonctions, presque aucuns rapports individuels avec eux.

C'est contraire, dites-vous, en parlant du casuel, à la recommandation faite par Jésus Christ à ses apôtres de donner gratuitement ce qu'ils avaient reçu gratuitement.

Vous vous trompez dans l'interprétation que vous donnez aux paroles de NotreSeigneur Jésus-Christ. Il recommande bien, il est vrai, à ses envoyés, de donner gratuitement ce qu'ils ont reçu gratuitement, comme Vous venez de le rappeler Gratis accipitis, gratis date. (Matth. x, 8.) Mais que leur défend-il par là? De faire commerce des choses saintes. de les vendre, d'en recevoir une rétribution quelconque comme d'une chose matérielle, estimable à prix d'argent. Nulle doute ici; car ce serait de la simonie, ce sacrilége au premier chef, si réprouvé et si sévèrement puni dans l'Eglise. Leur défend-il de recevoir la rétribution fixée par l'autorité compétente pour fournir à leur subsistance et subvenir aux besoins du culte? Au contraire; car il dit en propres termes, en parlant même de l'exercice du saint ministère: L'ouvrier est digne de sa nourriture. « Dignus enim est operarius cibo suo. (Ibid., 10.) » Il a un tel désir que les ministres de son Evangile soient convenablement assistés des fidèles, qu'il regarde comme faite à lui-même et à celui qui l'a envoyé la réception qui leur aura été faite : « Qui recipit vos, me recipit; et qui me recipit, recipit eum qui me misit (Ibid., 40); et qu'il déclare qu'un verre d'eau froide donné au moindre des siens, parce qu'il est son disciple, ne sera point sans récompense: Et quicunque potum dederit uni ex minimis istis calicem aquæ frigidæ tantum in nomine discipuli : amen dico vobis, non perdet mercedem suam. (Ibid., 42.) Ce que nous avons dit précédemment, mais surtout les paroles si positives et si claires de l'Apôtre des nations, éclairé des lumières de l'Esprit - Saint, et qui, naturellement d'ailleurs, ne pouvait ignorer les recommandations faites par leur maître à ces envoyés, au nombre desquels il venait d'être admis, tout cela ne permet pas de donner un autre sens aux paroles de Jésus-Christ.

C'est vendre les choses saintes, avez-vous dit encore.

Non, évidemment; car ces choses sont d'un prix infini, et le prêtre ne reçoit et ne demande qu'une légère rétribution.

Non, ce n'est point vendre les choses saintes; car l'Eglise elle-même, qui condamne si positivement et punit si sévèrement la simonie, c'est-à-dire la vente des choses saintes, a partout et toujours, comme elle le fait encore aujourd'hui, approuvé le casuel du clergé.

Mais, nous objecterez-vous, le prêtre ne le donne-t-il pas lui-même à entendre quand il dit « On me doit telle Messe, tel Office, » etc.

:

Qu'est-ce à dire en ce cas? On me doit la rétribution fixée par l'autorité compétente pour telle Messe, tel Office, etc. Entendezvous la chose autrement, d'une réclamation faite comme pour la vente d'une certaine quantité de pain ou de tout autre marchandise? Vous seriez tout à fait dans l'erreur.

Dites-moi, l'exercice de la justice humaine est aussi une chose sainte, en un sens. Tous ceux qui sont employés dans ce grand ministère vendent done, selon vous, les choses saintes quand ils disent: « On me doit tel acte, telle vacation? » Non, me répondrezvous. Eh bien! ni le prêtre non plus. Mais, ajoutez-vous, le ministère du prêtre est encore plus saint que celui dont vous parlez. Soit, et pourtant ce sera toujours le même principe; c'est-à-dire que, si les ministres de la loi peuvent, sans vendre leurs actes, recevoir et demander même la rétribution fixée par l'autorité compétente, les ministres de la religion le peuvent également.

C'est aussi humiliant pour le prêtre que vexatoire pour les fidèles, ajoutez-vous.

Oui sans doute, c'est une humiliation, comme le corps et tout ce qui s'y rapporte est humiliant pour l'âme et ce qui la concerne. Tant que l'âme sera unie au corps, c'est-à-dire tant que nous resterons sur la terre, il faudra bien nous résigner à subir de telles humiliations.

Oui, c'est humiliant; mais cette humiliation a aussi son côté utile. N'est-elle pas indispensable d'ailleurs ? car le prêtre doit vivre avant tout. Pour vivre, il est obligé de recevoir, et, pour recevoir, il est obligé de tendre la main. Connaissez-vous une autre manière d'arranger les choses? Indiquez-la, faites-la prévaloir, et le clergé vous en sera reconnaissant.

C'est également vexatoire pour les fidèles, avez-vous ajouté.

Oai sans doute, car il est toujours désagréable de donner.

Le casuel du clergé est particulièrement vexatoire, me direz-vous.

Comment cela? J'aurais cru le contraire; car le prêtre sera toujours pour les fidèles un bon père qui ne les traitera jamais avec la même rigueur que les autres.

Donner dans les larmes la plupart du temps, remarquez-vous, et souvent encore lorsque tant d'autres charges pèsent sur nous. N'est-ce pas ce qui a lieu également dans l'administration civile sans que vous y trouviez à redire? Qui vous presse, d'ailleurs? Qui vous demande plus que vous ne pouvez donner? Attendez donc que vos larmes soient

séchées, que le fardeau qui pèse en ce moment sur vous soit diminué... Ou, si vous l'aimez mieux, allez trouver le prêtre; ouvrez-lui votre cœur, faites-lui part de vos peines et de votre embarras, et vous le trou verez disposé, je n'en doute point, à vous consoler, à vous faire toutes les concessions que vous lui demanderez raisonnablement, et à vous donner même, si cela est nécessaire, une partie de ce qu'il aura reçu des

autres.

Vous voyez donc bien que le casuel du clergé n'est pas aussi vexatoire pour les fidèles que vous le prétendiez.

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D'autant plus, remarquez-vous, qu'il s'agit souvent de sommes considérables.

Bien considérables, en effet. Il s'agit de 5 fr., 10 fr., 20 fr., 50 fr. au plus, que vous aurez à donner peut-être une ou deux fois dans votre vie, si vous habitez la campagne. Et encore le pauvre ne donne-t-il rien. Il reçoit, au contraire. Dans les villes, c'est davantage. Aussi, les ressources, d'une part, sont-elles plus considérables, et les besoins, d'une autre part, beaucoup plus pressants. Quand on est pauvre, ce qui arrive plus communément qu'à la campagne, c'est toujours la même chose, c'est-à-dire qu'on ne donne rien ou à peu près, et qu'on reçoit même au contraire.

Et qu'on n'aille pas s'imaginer que tout ce qu'on donne au prêtre soit pour lui. Il y a une part pour la fabrique, une autre pour le sacristain, pour les chantres, etc. Quant à sa part, si elle est la plus considérable, il ne faut pas s'en étonner, car elle n'est pas seulement pour ses bescins propres mais pour ses pauvres et pour ses bonnes

œuvres.

Il n'y a rien de cela chez les protestants, parmi nous du moins, avez-vous ajouté en

core.

Vous faites bien de dire parmi nous; car chacun sait comment les choses se passent dans les Iles-Britanniques et ailleurs. Les ministres épuisent là à peu près toutes les ressources disponibles sous ce rapport; et quelles ressources, grand Dieu ! Et alors même, comme en Irlande, ils n'ont quelfois rien à faire qu'à élever leur nombreuse famille.

Quant aux protestants de France, ils sont en petite minorité; ils sont étrangers, ou venus de l'étranger la plupart du temps. Malgré cela, croyez-vous leurs ministres dans une position inférieure à celle des membres de notre clergé catholique ? Vous seriez dans une grande erreur. Ils reçoivent, en général, du gouvernement un traitement supérieur à celui de la plupart des ministres de notre religion, quoique, pour mettre de côté toute autre considération, on n'ait point la même dette à acquitter envers eux. De plus, pour tenir lieu du casuel, qu'ils ne sauraient trop sur quoi établir, puisque, d'une part, leurs Offices sont peu nombreux, et que, d'une autre part, ils ne peuvent les donner que comme arbitraires, ils ont cette cotisation dont nous avons parlé précédem

ment, qui vaut bien pour eux le casuel, si même elle ne lui est préférable, sous les rapporis temporels du moins.

Vous me direz peut-être que le ministre protestant a sa famille, et souvent une famille bien nombreuse, à élever.

Le prêtre catholique a-t-il donc moins de charges? Il a ses vieux parents, dont il doit d'autant plus soigner la vieillesse, que pour l'élever peut-être aux honneurs du sacerdoce, ils se sont épuisés de fatigues, et se sont même imposé de dures privations; il a d'autres membres de sa famille à qui il ne peut refuser une assistance quelconque, sans s'exposer à être taxé de dureté de cœur, et sans compromettre, par cela même, son ministère; il a surtout cette grande, cette CÉLIBAT, CÉLIBAT

Objections. Le célibat est contre nature. Il est condamné par différents passages des Livres saints, par celui-ci entre autres : Croissez et multipliez. Il est opposé au bien-re des Etats, dont il empêche la population de s'accroître. Si tous gardaient le célibat, la fin du monde arriverait infailliblement. Le prêtre aurait une raison toute particulière de se marier; ce serait pour donner aux autres, tant par luimême que par les siens, l'exemple de toutes les vertus qu'il enseigne. Saint Paul veut que l'évêque ait une femme et des enfants soumis en toute chasteté.

-

Réponse. Il était de mode autrefois de déclamer contre le célibat, et surtout contre e célibat ecclésiastique; et ce qu'il y avait de plus singulier en cela, c'était de voir de vieux célibataires, tout gangrenés d'immoralité, attaquer à chaque instant un célibat fécond en toutes sortes de bonnes œuvres. Le soulèvement est un peu apaisé aujourd'hui, mais il n'a pas complétement cessé. Le célibat est contre nature, nous dit-on, • Si le célibat est contre nature, c'est un grand crime; si c'est un grand crime, il doit être puni en tout temps et en tout lieu. Pourquoi ne voit-on rien de semblable?

Si le célibat est contre nature, ce doit être une honte de le garder; si c'est une honte de le garder, ceux qui n'en sortent point, pour quelque motif que ce soit, doivent être tous, sans aucune exception, méprisés, montrés au doigt partout... Pourquoi encore ne voiton rien de semblable?

Vous prétendez que le célibat est contre nature! Mais pourquoi vos amis, vos maîtres, comme Voltaire et Rousseau, l'ontils gardé? pourquoi vous-même peut-être le gardez-vous de la même manière? Et quand je dis de la même manière, je n'entends pas d'une manière fort honorable; car quel célibat chez un grand nombre! C'est bien celui-là qui est contre nature, pour me servir de vos expressions, ou du moins contre la bonne nature. Aussi, n'est-ce pas celui que nous défendons ici.

Si le célibat était positivement contre na

indigente, cette précieuse famiile en JésusChrist, qui lui est attachée, non par les liens de la chair, mais par les liens plus sacrés de l'esprit, les pauvres, ceux de sa paroisse principalement, dont il doit s'occuper comme de ses enfants de prédilection, et sur les quels il doit reporter une partie de ce qu'il reçoit dans l'exercice du saint ministère. C'est sans doute une des raisons pour lesquelles, nous l'avons montré plus haut, Jésus-Christ parle du bien fait aux ministres de sa religion (Matth. x, 40, 42) comme de ces œuvres de charité qui, exercées extérieurement envers les hommes, le sout réellement envers Dieu, et nous donnent droil aux récompenses éternelles (Matth. xxv, 40, 46).

ECCLÉSIASTIQUE.

ture, comme vous avez l'air de le dire, il suivrait de là qu'il ne serait jamais permis d'y rester; d'où la nécessité de se marier dès que l'âge le permettrait; d'où la nécessité encore de se marier, non-seulement une fois, mais deux fois, trois fois et plus encore, si, marié autant de fois que nous venons de le dire, on retombait toujours dans le veuvage. Car, en quoi l'homme devenu veuf, de de bonne heure surtout et sans enfants, diffère-t-il, à vos yeux, du célibataire ? Vous n'admettez pas ces absurdes conséquences. Vous ne pouvez pas admettre, non plus, que le célibat soit contre nature.

Il est condamné, dit-on encore, par différents passages des Livres saints, entre autres par celui-ci : Croissez et multipliez (Gen 1, 28).

Si le célibat était condamné par les Livres saints, ces mêmes Livres n'en feraient pas l'éloge en plusieurs endroits, comme on le voit par ce passage bien remarquable de saint Paul: Je voudrais que vous fussiez tous comme moi; mais chacun reçoit de Dieu le don qui lui convient. Je dis donc à ceux qui sont dans le célibat ou dans le veuvage, qu'il leur est bon d'y demeurer comme moi; s'ils ne peuvent garder la continence, qu'ils se ma rient; cela vaut mieux que de brûler d'un feu impur: « Dico autem non nuptis et viduis, bonum est illis si sic permaneant, sicut et ego.» (1 Cor. vii, 8 seq.)

Si le célibat était condamné par les Livres saints, ces mêmes Livres, par une conséquence nécessaire, regarderaient comme coupables tous les célibataires. Or, je vois que, bien loin d'en être ainsi, plusieurs de ceux dont il est fait le plus grand éloge, tant dans l'Ancien que dans le Nouveau Testa ment, ont gardé le célibat. Je citerai Elie, Elisée, Daniel, pour l'Ancien Testament, et pour le Nouveau, Jean-Baptiste, Jean l'Evangéliste, saint Paul. Je ne cite point ici JésusChrist,qu'il semble que personne n'ait jamais osé nommer à propos de mariage: tant cel état suppose dans l'homme, je ne sais quel naturel ravalement que ne pouvait accepter l'Homme-Dieu. qui avait pourtant pris sur lui

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