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C'est la seule bonne aujourd'hui : c'est, d'ailleurs, la seule possible; cela tranche la question.

CHAPITRE II.

Suite de l'Exposé.

Partons donc de ce point que nous avons une Charte, que nous ne pouvons avoir autre chose que cette Charte.

Mais depuis que nous vivons sous l'empire de la Charte, nous en avons tellement méconnu l'esprit et le caractère, que c'est merveille.

A quoi cela tient-il? A ce qu'emportés par nos passions, nos intérêts, notre humeur, nous n'avons presque jamais voulu nous soumettre à la conséquence, tout en disant que nous adoptions le principe; à ce que nous prétendons maintenir des choses contradictoires et impossibles; à ce que nous résistons à la nature du Gouvernement établi, au lieu d'en suivre le cours; à ce que, contrariés par des institutions encore nouvelles, nous n'avons pas le courage de braver de légers inconvénients, pour acquérir de grands avantages; à ce qu'ayant pris la Liberté pour base de ces institutions, nous nous effrayons, et nous sommes tentés de reculer jusqu'à l'arbitraire, ne comprenant pas comment un Gouvernement peut être vigoureux sans cesser d'être constitutionnel.

Je vais essayer de poser quelques vérités d'un usage commun dans la pratique de la Monarchie représentative. Je traiterai des principes je tâcherai de démontrer ce qui manque à nos institutions, ce qu'il faut créer, ce qu'il faut détruire, ce qui est raisonnable, ce qui est absurde. Je parlerai ensuite des systèmes : je dirai quels sont ceux que l'on a suivis jusqu'ici dans l'administration. J'indiquerai le mal; je finirai par offrir ce que je crois être le remède. Au reste, je ne m'écarterai pas des premières notions du sens commun. Mais il paraît que le sens commun est une chose plus rare que son nom ne semble l'indiquer : la Révolution nous a fait oublier tant de choses! En politique comme en religion, nous en sommes au catéchisme.

CHAPITRE III.

Éléments de la Monarchie représentative.

Qu'est-ce que le gouvernement représentatif? quelle est son origine? comment s'est-il formé en Europe? comment fut-il établi autrefois en France et en Angleterre? comment se détruisit-il chez nos aïeux, et pourquoi subsista-t-il chez nos voisins? par quelles voies y sommes-nous revenus? Pour toutes ces questions, voyez les Réflexions politiques.

Or le Gouvernement établi par la Charte se compose de quatre éléments de la Royauté ou de la Prérogative royale, de la Chambre des Pairs, de la Chambre des Députés, du Ministère. Cette machine, moins compliquée que l'organisation de l'ancienne Monarchie avant Louis XIV, est cependant plus délicate, et doit être touchée avec plus d'adresse: la violence la briserait; l'inhabileté en arrêterait le mouvement.

Voyons ce qui manque, et quels embarras se sont rencontrés. jusqu'ici dans la nouvelle Monarchie.

CHAPITRE IV.

De la Prérogative royale. Principe fondamental.

La doctrine sur la Prérogative royale constitutionnelle est : Que rien ne procède directement du Roi dans les actes du Gouvernement; que tout est l'œuvre du Ministère, même la chose qui se fait au nom du Roi et avec sa signature, projets de Loi, Ordonnances, choix des hommes.

Le Roi, dans la Monarchie représentative, est une Divinité que rien ne peut atteindre : inviolable et sacrée, elle est encore infaillible; car, s'il y a erreur, cette erreur est du Ministre et non du Roi. Ainsi, on peut tout examiner sans blesser la Majesté royale, car tout découle d'un Ministère responsable.

CHAPITRE V.

Application du principe.

Quand donc les Ministres alarment des sujets fidèles, quand ils emploient le nom du Roi pour faire passer de fausses mesures, c'est qu'ils abusent de notre ignorance, ou qu'ils ignorent euxmêmes la nature du Gouvernement représentatif. Le plus frane Royaliste, dans les Chambres, peut, sans témérité, écarter le bou-clier sacré qu'on lui oppose et aller droit au Ministre; il ne s'agit que de ce dernier, jamais du Roi.

Et tout cela est fondé en raison.

Car le Roi étant environné de Ministres responsables, tandis qu'il s'élève au-dessus de toute responsabilité, il est évident qu'il doit les laisser agir d'après eux-mêmes, puisqu'on s'en prendra à eux seuls de l'événement. S'ils n'étaient que les exécuteurs de la volonté Royale, il y aurait injustice à les poursuivre pour des desseins qui ne seraient pas les leurs.

Que fait donc le Roi dans son Conseil? Il juge, mais il ne force point le Ministre. Si le Ministre obtempère à l'avis du Roi, il est sûr de faire une chose excellente, et qui aura l'assentiment général; s'il s'en écarte, et que, pour maintenir sa propre opinion, il argumente de sa responsabilité, le Roi n'insiste plus le Ministre agit, fait une faute, tombe; et le Roi change'son Ministre.

Et quand bien même le Roi, dans le Conseil, eût adopté l'avis du Ministère, si cet avis entraîne une fausse mesure, le Roi n'est encore pour rien dans tout cela: ce sont les Ministres qui ont surpris sa sagesse, en lui présentant les choses sous un faux jour, en le trompant par corruption, passion, incapacité. Encore un coup, rien n'est l'ouvrage du Roi que la Loi sanctionnée, le bonheur du peuple et la prospérité de la Patrie.

J'ai appuyé sur cette doctrine, parce qu'elle a été méconnue : on a profité de la passion que la Chambre des Députés a pour le Roi, afin de donner des scrupules à cette Chambre admirable. Les Députés ont été quelque temps à démêler les véritables intérêts du Trône, quand on se servait du nom même du Roi pour l'opposer à ses intérêts. Passons du principe général à quelques détails.

CHAPITRE VI.

Suite de la Prérogative royale. Initiative. Ordonnance du Roi.

La Prérogative royale doit être plus forte en France qu'en Angleterre 1; mais il faudra, tôt ou tard, la débarrasser d'un inconvénient dont le principe est dans la Charte on a cru fortifier cette Prérogative, en lui attribuant exclusivement l'initiative, on l'a au contraire affaiblie.

La forme ici n'a pas moins d'inconvénients que le fond les Ministres apportent aux Chambres leur projet de Loi dans une Ordonnance royale. Cette Ordonnance commence par la formule : Louis, par la grâce de Dieu, etc. Ainsi les Ministres sont forcés de faire parler le Roi à la première personne : ils lui font dire qu'il a médité dans sa sagesse leur projet de Loi, qu'il l'envoie aux Chambres dans sa puissance : puis surviennent des amendements qui sont admis par la Couronne; et la sagesse et la puissance du Roi reçoivent un démenti formel. Il faut une seconde Ordonnance pour déclarer encore par la grâce de Dieu, la sagesse et la puissance du Roi, que le Roi (c'est-à-dire le Ministère) s'est trompé.

Et voilà comment un nom sacré se trouve compromis. Il est donc nécessaire que l'Ordonnance soit réservée pour la Loi complète, ouvrage de la Couronne assistée de deux autres branches de la puissance législative, et non pour le projet de Loi, qui n'est que le travail des Ministres.

En tout, il faut désormais user des Ordonnances avec sobriété : le style de l'Ordonnance est absolu, parce qu'autrefois le Roi était seul Souverain législateur; mais aujourd'hui qu'il a consenti dans sa magnanimité à partager les fonctions législatives avec les deux Chambres, il est mieux, en matière de Loi, que la Couronne ne parle impérieusement que pour la Loi achevée. Autrement vous placez le Pair et le Député entre deux puissances législatives, la Loi et l'Ordonnance, entre l'ancienne et la nouvelle Constitution, entre ce qu'on doit à la Loi comme citoyen, et ce qu'on doit à l'Ordonnance comme sujet. Comment alors travailler librement à la

Réflexions politiques.

Loi, sans blesser la Prérogative, ou se taire devant la Prérogative, sans cesser d'obéir à sa conscience en votant sur les articles de la Loi ? Le nom du Roi, mis en avant par les Ministres, produirait à la longue l'un ou l'autre de ces graves inconvénients ou il imprimerait un tel respect que, toute Liberté disparaissant dans les deux Chambres, on tomberait sous le despotisme ministériel; ou il n'enchaînerait pas les volontés, ce qui conduirait au mépris de cette Autorité royale, sans laquelle pourtant il n'est point de salut pour nous.

Toutes les convenances seraient choquées en Angleterre si un membre du Parlement s'avisait de citer l'auguste nom du Monarque pour combattre ou pour faire passer un bill.

CHAPITRE VII.

Objections.

Mais si les Chambres ont seules l'initiative, ou si elles la partagent avec la Couronne, ne va-t-on pas voir recommencer cette manie de faire des Lois, qui perdit la France sous l'Assemblée Constituante?

la

On oublie dans ces comparaisons si souvent répétées, que l'esprit de la France n'était pas tel alors qu'il est aujourd'hui ; que Révolution commençait et qu'elle finit; que l'on tend au repos, comme on tendait au mouvement; que loin de vouloir détruire, la plus forte envie est de réparer.

On oublie que la Constitution n'était pas la même; qu'il n'y avait qu'une Assemblée ou deux Conseils de même nature, et que la Charte a établi deux Chambres formées d'éléments divers; que ces deux Chambres se balancent, que l'une peut arrêter ce que l'autre aurait proposé imprudemment.

On oublie que toute motion d'ordre faite et poursuivie spontanément n'est plus possible; que toute proposition doit être déposée par écrit sur le bureau; que si les Chambres décident qu'il y a lieu de s'occuper de cette proposition, elle ne peut être développée qu'après un intervalle de trois jours; qu'elle est ensuite

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