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sujets fidèles ce qui n'est que le fruit de la pauvreté de vos conceptions? Abandonnez un moyen de défense aussi maladroit qu'imprudent, puisqu'au lieu de prouver la bonté de votre système, il en démontre le vice.

CHAPITRE XXIII.

Que s'il n'y a pas de Royalistes en France, il faut en faire.

Après avoir nié la majeure, je change d'argument, et j'accorde aux adversaires tout ce qu'ils voudront. Je dis alors: Fût-il vrai qu'il n'y eût pas de Royalistes en France, le devoir du Ministère serait d'en faire; loin de gouverner dans le sens de la Révolution, de fortifier les principes révolutionnaires, essentiellement républicains, il serait coupable de ne pas employer tous ses efforts pour amener le triomphe des opinions monarchiques.

Ainsi, trouvant sous sa main, par miracle, une Chambre de Députés purement Royalistes, le Ministre devait s'en servir pour changer la mauvaise opinion qu'il supposait exister dans la majorité de la France. Et qu'il ne soutienne pas que ce changement eût été impossible: les moyens d'un Gouvernement sont toujours immenses. C'est bien après avoir été témoin de toutes les variations. que la Révolution a produites, de tous les rôles que la plupart des hommes ont joués, de tous ces serments prêtés à la République, à la Tyrannie, à la Royauté, au Gouvernement de droit, aut Gouvernement de fait, que l'on peut désespérer de ramener à la Légitimité des caractères si flexibles! Et si au lieu de supposer la majorité révolutionnaire, je la suppose seulement indifférente et passive, quelle facilité de plus pour la faire pencher vers les principes de la Religion et de la Royauté ! C'est donc par goût et par choix que vous la déterminez à tomber du côté de la Révolution? Vous avez dit à la tribune qu'un Ministre doit diriger l'opinion; eh bien ! je vous prends par vos paroles: faites des Royalistes, ou je vous accuse de n'être pas Royalistes vous-mêmes.

CHAPITRE XXIV.

Système sur la Chambre actuelle des Députés.

Ce qui embarrasse le plus les partisans des intérêts révolutionnaires, lorsqu'ils soutiennent qu'il n'y a point de Royalistes en France, c'est la composition de la Chambre des Députés.

Le système des intérêts révolutionnaires amène le système de la minorité des Royalistes en France; ce second système produit nécessairement celui-ci, savoir, que la Chambre actuelle des Députés n'a point été élue dans le sens de l'opinion générale. C'est de ce quatrième système qu'est née l'absurdité inconstitutionnelle d'après laquelle on prétend que le Ministère n'a pas besoin de la majorité de la Chambre. Le mal engendre le mal.

Voici comment on raisonne pour détruire l'objection tirée du royalisme de la Chambre des Députés.

« L'opinion de la majorité de la Chambre des Députés ne représente point, dit-on, l'opinion de la majorité de la France. Cette Chambre, élue par surprise, fut convoquée au milieu d'une invasion. Dans le trouble et la confusion, les Colléges électoraux se sont hâtés de nommer des Royalistes, croyant que ceux-ci allaient être tout-puissants, quoique l'opinion de ces Colléges fùt opposée à la nature des choix mêmes qu'ils faisaient. L'opinion de la majorité des Français est précisément celle de la minorité actuelle de la Chambre des Députés: voilà pourquoi les Ministres ont suivi cette minorité, voulant marcher avec la France, et non pas avec une faction. »

CHAPITRE XXV.

Réfutation.

Je vois d'abord dans cet exposé une chose qui, si elle était réelle, confirmerait ce que j'ai avancé plus haut: il est facile de faire. des Royalistes en France, en supposant qu'ils n'y en ait pas.

En effet, des Colléges électoraux sont assemblés: dans la sim

ple supposition que les Royalistes vont être puissants, que le Gouvernement va prendre des mesures en leur faveur, ces Colléges nomment sur-le-champ contre leurs intérêts, leurs penchants et leurs opinions, des Députés royalistes ! On est donc bien coupable, je le répète, de ne pas rendre toute la France royaliste, lorsqu'on le peut à si peu de frais, lorsque la moindre influence la détermine à faire aussi promptement ce qu'elle ne veut pas, que ce qu'elle veut.

Pour moi, je m'en tiens au positif, et, comme ceux dont je combats le système, je ne veux que des faits.

J'ai eu l'honneur de présider un Collége électoral dans une ville dont la garnison étrangère n'était séparée de l'armée de la Loire que par un pont. S'il devait y avoir oppression, confusion, incertitude quelque part, c'était certainement là. Je n'ai vu que le calme le plus parfait, que la gaieté même, que l'espérance, l'absence de toutes craintes, que les opinions les plus libres. Le Collége était nombreux; il n'y manquait presque personne. On y remarquait des hommes de tous les caractères, de toutes les opinions; des malades s'y étaient fait porter: le résultat de tout cela fut la nomination de quatre Royalistes pris dans l'Administration, la Magistrature et le Commerce. Il y en aurait eu vingt de nommés, si l'on avait eu vingt choix à faire, car il n'y eut concurrence qu'entre des Royalistes. On n'aurait trouvé de difficulté ou plutôt d'impossibilité qu'à faire élire les partisans des intérêts révolutionnaires.

Je suis peut-être suspect ici par mes opinions. Il y a d'autres. Présidents qui ne l'étaient pas ; et ils ont rapporté comme moi des nominations Royalistes. Si donc il y avait tant de calme et d'indépendance à Orléans, les départements éloignés de Paris et du théâtre de la guerre devaient être encore plus libres de suivre leurs véritables opinions.

Une preuve de plus que l'opinion de la majorité de la Chambre des Députés était l'opinion de la majorité de la France, c'est la réception que les départements ont faite à leurs Députés. Je ne parle pas des témoignages de satisfaction donnés aux hommes les plus éclatants; on pourrait répondre que l'esprit de parti s'en est mêlé. Je parle de la manière dont les Députés les plus obscurs ont été

accueillis presque partout, par cela seul qu'ils avaient voté avec la majorité. On a dit que la Police avait envoyé des ordres secrets. pour que de semblables honneurs attendissent aussi les membres de la minorité : ce sont des propos de la malveillance.

Si les départements avaient élu des Députés qu'ils n'aimaient pas, il faut avouer qu'ils avaient eu le temps de revenir de leur surprise, de s'apercevoir que les Royalistes n'avaient ni puissance, ni faveur; alors ces départements, mécontents eux-mêmes de tout ce qui s'était passé dans la Session, auraient pu montrer combien ils se repentaient de leurs choix. Point du tout : ils en paraissaient de plus en plus satisfaits. Voilà une abnégation de soi-même, une frayeur, une surprise, qui durent bien longtemps !

Que n'avait-on point tenté toutefois pour égarer l'opinion! Que de calomnies répandues, que d'insultes dans les journaux ! Tantôt les Députés voulaient ramener l'ancien ordre de choses, et revenir sur tout ce qui avait été fait; tantôt ils attaquaient la Prérogative, et prétendaient résister au Roi. Comment dans les provinces aurait-on démêlé la vérité, quand la Presse n'était pas libre, quand elle était entre les mains des Ministres, quand on ne pouvait rien expliquer au delà de la barrière de Paris, ni faire comprendre la singulière position où l'on plaçait les plus fidèles serviteurs du Roi? Pour couronner l'œuvre, les Chambres avaient été renvoyées immédiatement après le rapport sur le Budget à la Chambre des Pairs; et les Députés, sans pouvoir répondre, étaient retournés chez eux, chacun avec un acte d'accusation dans la poche: cependant la vérité a été connue.

Trompé comme on l'est dans les cercles de Paris, où chacun ne voit et n'entend que sa coterie, où l'on prend ce qu'on désire pour la vérité, où l'on est la dupe des bruits et des opinions que l'on a soi-même répandus, où la flatterie attaque le dernier commis comme le premier Ministre, on disait avec une généreuse pitié que le Ministère serait obligé de protéger les Députés quand ils retourneraient dans les provinces, que ces malheureux seraient insultés, bafoués, maltraités par le peuple : Ride, si sapis!

Il me semble que les départements commencent à se soustraire à cette influence de Paris, qui les a dominés depuis la Révolution, et qui date de loin en France. Lorsque le duc de Guise le Balafré ÉTUDES HISTORIQUES, T. II.

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montrait à sa mère la liste des villes qui entraient dans la Ligue : « Ce n'est rien que tout cela, mon fils, disait la duchesse de Nemours si vous n'avez Paris, vous n'avez rien. >>

Que l'Administration, par maladresse, accroisse aujourd'hui le dissentiment entre les provinces et Paris, il en résultera une grande révolution pour la France.

CHAPITRE XXVI.

Conseils des Départements.

Le sophisme engendre l'illusion; l'illusion détrompée produit l'humeur, anime l'amour-propre : on se pique au jeu. Il serait plus simple de dire : J'ai tort, et de revenir; mais on ne le fait pas.

Les départements avaient bien reçu leurs Députés; cette réception tendait à prouver que l'opinion était royaliste, mais il restait une ressource: les Conseils des départements allaient s'assembler. S'ils se plaignaient des Députés ou ne montraient pour leurs travaux que de l'indifférence, le triomphe était encore possible. On eût fait valoir les adresses des Conseils; on se serait écrié : «Vous « le voyez ! nous vous l'avions bien dit. Voilà la véritable opinion « de la France. Êtes-vous maintenant convaincus que la Chambre « n'a point été choisie dans le sens de l'opinion générale, opinion << qui est toute dans les intérêts révolutionnaires? Écoutez les Con « seils généraux : ils sont les organes de l'opinion publique. »

Qu'est-il arrivé? Les Conseils ont aussi fait l'éloge des Députés. Hé bien! les Conseils ne sont plus les organes de l'opinion publique! On sait que toutes ces louanges sont des coups monies, des affaires de cabale et de parti. On sait que l'on rédige une adresse comme on veut, etc.

Ordre aux journaux de se moquer des honneurs rendus aux Députés; ordre aux Conseils généraux de ne députer personne à Paris, parce qu'on ne veut pas qu'on vienne dire au pied du Trône combien la France est satisfaite de ses mandataires. On ne recevra que les adresses des Conseils; et ces adresses, on ne les mettra que par extraits dans le Moniteur, en ayant soin d'en retrancher tous les éloges de la Chambre.

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