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point les Ordonnances du Roi signées à Gand dans le même mois. On paie l'officier à demi-solde, chevalier de la Légion d'Honneur, et l'on fait fort bien; mais le chevalier de Saint-Louis, courbé par les ans, est à l'aumône trop heureux, ce dernier, quand on lui achète une méchante redingote pour couvrir sa nudité, ou quand on lui donne un billet avec lequel il pourra du moins faire panser par les filles de la Charité, de vieilles blessures méprisées comme la vieille Monarchie. Enfin, c'est une sottise, une faute, un crime, de n'avoir pas servi Buonaparte. N'allez pas dire, si vous voulez placer ce jeune homme, qu'il s'est racheté de la Conscription au prix d'une partie de sa fortune; qu'il a été errant, persécuté, emprisonné, pour ne pas prêter son bras à l'Usurpateur; qu'il n'a jamais fait un serment, accepté une place; qu'il s'est conservé pur et sans tache pour son Roi; qu'il l'a accompagné dans sa dernière retraite, au risque de s'exposer avec lui à un exil éternel: ce sont là autant de motifs d'exclusion. « Il n'a pas servi, vous répondra-t-on froide<«<ment; il ne sait rien. » Mais il sait l'honneur. Pauvre principe! Le siècle est plus avancé que cela.

Mais venez proposez, pour vous dédommager de ce refus, un homme qui aura tout accepté, depuis la haute dignité de portemanteau jusqu'à la place de marmiton impérial. Parlez; que voulez-vous? Choisissez dans la Magistrature, l'Administration, l'Armée. Cent témoins vont déposer en faveur de votre client; ils attesteront qu'ils l'ont vu veiller dans les antichambres avec un courage extraordinaire. Il ne veut qu'une décoration; c'est trop juste. Vite un chevalier pour lui donner l'accolade; attachez à sa boutonnière la croix de Saint-Louis: c'est un homme prudent, il la mettra dans sa poche en temps et lieu.

Celui-là était facile à placer, j'en conviens: il était sans tache. Mais vous hésitez à présenter celui-ci. Il a foulé sa croix de SaintLouis aux pieds pendant les Cent-Jours. Bagatelle, excès d'énergie ce caractère bouillant est un vin généreux que le temps. adoucira.

Un homme, pendant les Cent-Jours, a été l'écrivain des charniers de la Police; faites-lui une pension: il faut encourager les talents. Un autre est venu à Gand, au péril de sa vie, proposer au Roi de l'argent et des soldats; il sollicite une petite place dans son

village: donnez cette place au douanier qui tira sur cet ultraRoyaliste lorsqu'il passait à la frontière.

Vous n'avez pas obtenu la nomination de ce Juge? Mais ne saviez-vous pas qu'elle était promise à un Prêtre marié? Un ci-devant Préfet avait prévariqué : un rapport était prêt; on arrête ce rapport; et pourquoi? « Ne voyez-vous pas, répond-on, que le rapport vous empêcherait de placer cet homme?»>

Où sont vos certificats, dit-on au meilleur Royaliste qui sollicite humblement la plus petite place. Il y a vingt-cinq ans qu'il souffre pour le Roi ; il a tout perdu, sa famille et sa fortune. Il a des recommandations des Princes, de cette Princesse, peut-être, dont la moindre parole est un oracle pour quiconque reconnaît la puissance de la vertu, de l'héroïsme et du malheur. Ces titres ne sont pas jugés suffisants. Arrive un Buonapartiste; les fronts se dérident; ses papiers étaient à la Police; il les a perdus lors du renvoi de M. Fouché. C'est un malheur; on le croit sur sa parole. « Entrez, mon ami, voilà votre brevet. » Dans le Système des intérêts révolutionnaires on ne saurait trop tôt employer un homme des Cent-Jours qu'il aille encore, tout chaud de sa trahison nouvelle, souiller le palais de nos Rois, comme Messaline rapportait dans celui des Césars la honte de ses prostitutions impériales.

CHAPITRE XLIII.

Cc que l'on se propose en persécutant les Royalistes.

Cette tactique a pour but de fatiguer les amis du Trône, d'enlever à la Couronne ses derniers partisans: on espère les jeter dans le désespoir, les pousser à des imprudences dont on profiterait contre eux et contre la Monarchie légitime; on se flatte du moins qu'ils feront ce qu'ils ont toujours fait et ce qui les a toujours perdus, qu'ils se retireront.

Depuis le commencement de la Révolution, tel a été le sort des Royalistes dépouillés d'abord, on a cessé depuis de triompher de leur malheur. On prend à tâche de leur répéter qu'ils n'ont rien.

qu'ils n'auront rien, qu'ils ne doivent compter sur rien. On leur a rouvert la France, mais on a écrit pour eux sur la porte comme sur celle des Enfers: « Entre, qui que tu sois, et laisse l'espérance. » On reprend la Loi qui les a frappés; on l'aiguise, on la lenrs retourne dans le sein comme un poignard. Offrent-ils ce qui leur reste, leurs bras et leurs services, on les repousse. Le nom de Royaliste semble être un brevet d'incapacité, une condamnation aux souffrances et à la misère. Aux partisans du Système des intérêts révolutionnaires se joignent les prédicateurs de l'ingratitude. Les Royalistes, disent-ils, ne sont pas dangereux; il est inutile de s'occuper de leur sort. S'il survient un orage, nous les retrouverons. Et vous ne craignez pas de flétrir par des propos inconsidérés, de laisser languir dans l'oppression et la pauvreté ceux dont vous avez une si haute idée ! Quels hommes que ceux-là que vous repoussez dans la fortune, et dont vous vous réservez la vertu pour le temps de vos malheurs!

Vous avez raison! ils ne se lasseront pas; ils consommeront leur sacrifice: leur patience est inépuisable comme leur amour pour leur Roi.

CHAPITRE XLIV.

La Faction poursuit la Religion.

Les Royalistes défendraient leur Roi, il faut les écarter; l'Autel soutiendrait le Trône, il faut l'empêcher de se rétablir. Le Système des intérêts révolutionnaires est surtout incompatible avec la Religion; les plus grands efforts du parti se dirigent contre elle, parce qu'elle est la pierre angulaire de la Légitimité.

On a tâché d'abord d'exciter une guerre civile dans le Midi, avec le dessein d'en rejeter l'odieux sur les catholiques. On a rendu vains les projets des Chambres: aucune des propositions religieuses adoptées par elles n'est sortie du portefeuille des Ministres: double avantage pour les intérêts révolutionnaires : le prêtre marié continue à toucher sa pension, et le curé meurt de faim.

Ainsi, l'on n'a encore presque rien fait depuis le retour du Fils

aîné de l'Église, pour guérir les plaies, ou mettre fin au scandale de l'Église et pourtant que ne doit point ce Royaume à la Religion catholique ! Le premier apôtre des Français dit au premier Roi des Français montant sur le Trône : « Sicambre, adore ce que tu as méprisé; brûle ce que tu as adoré. » Le dernier apôtre des Français dit au dernier Roi des Français descendant du Trône: <«< Fils de saint Louis, montez au Ciel. » C'est entre ces deux mots qu'il faut placer l'histoire des Rois Très-Chrétiens, et chercher le génie de la Monarchie de saint Louis.

On n'a point adopté les propositions favorables au Clergé, mais on a regretté vivement la Loi du 23 septembre. On sait très-bien que cette Loi est une mauvaise Loi de finances, mais c'est une bonne mesure révolutionnaire. On sait très-bien que 10 millions de rentes restitués aux Églises ne feraient pas la fortune du Clergé, mais ce serait un acte de justice et de religion; et il ne faut ni Justice ni Religion, parce qu'elles contrarient le système des intérêts révolutionnaires.

Toutes choses allant comme elles vont, dans vingt-cinq ans d'ici il n'y aura de prêtres en France que pour attester qu'il y avait jadis des autels. Le parti connaît le calcul et pour empêcher la race sacerdotale de renaître, il s'oppose à ce qu'on lui fournisse les moyens d'une existence honorable. Il n'ignore pas que des pensions insuffisantes, précaires, soumises à toutes les détresses du fisc et à tous les événements politiques, ne présentent pas assez d'avantages aux familles pour qu'elles consacrent leurs enfants à l'état ecclésiastique. Les mères ne vouent pas facilement leurs fils au mépris et à la pauvreté : la partie est donc sûre, si elle est jouée avec persévérance. Je ne sais si la patience appartient à l'Enfer comme au Ciel, à cause de son éternité; mais je sais que, dans ce monde, elle est donnée au méchant. La destruction physique et matérielle du Culte est certaine en France, pourvu que les ennemis secrets de la Légitimité, tantôt sous un prétexte, tantôt sous un autre, parviennent à tenir le Clergé dans l'état d'abjection où il est maintenant plongé.

Au milieu de ses enfants massacrés, sur le champ de bataille où elle est tombée, en défendant le Trône de saint Louis, la Religion blessée étend encore ses mains défaillantes, pour parer les

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coups qu'on porte au Roi mais ceux qui l'ont renversée sont attentifs; et toutes les fois qu'elle fait un effort pour se relever, ils frappent un coup pour l'abattre. Un Prélat vénérable avait obtenu la direction des Affaires religieuses; la distribution du Pain des Martyrs n'était plus confiée à ceux qui l'ont pétri avec l'ivraie, et qui ne vendent pas même à bon poids ce pain amer. On a forcé un Ministre honorable de remettre les choses telles et pires qu'elles étaient sous Buonaparte: le Prêtre est rentré sous l'autorité du laïque, et la Religion est venue se replacer sous la surveillance du siècle.

Lorsqu'un vicaire veut toucher le mois échu de sa pension, il faut qu'il présente un certificat de vie au Maire du lieu ; celui-ci en écrit au Sous-Préfet, qui s'adresse à son tour au Préfet, dont la prudence en peut référer au Chef de division de l'intérieur, chargé de la direction des cultes le chef peut en parler au Ministre. Enfin, cette grande affaire mûrement examinée, on compte 12 liv. 10 s. sur quittance, à l'homme qui console les affligés, partage son denier avec les pauvres, soulage les infirmes, exhorte les mourants, donne la sépulture aux morts, prie pour ses ennemis, pour la France et pour le Roi.

Quelques biens ecclésiastiques étaient aliénés sans contrat légal; on les découverts on a craint que leurs détenteurs ne trouvassent le moyen de les rendre aux Églises; vite, on s'est hâté de rappeler les biens aux domaines.

Ce n'est pas assez d'empêcher le Prêtre de vivre, il faut encore lui ôter, s'il est possible, toute considération aux yeux des peuples. Ce qu'on n'avait pas vu sous le règne des athées, on a trouvé piquant de le montrer sous le règne du Roi Très-Chrétien; un Pretre a été cité, comme un criminel, à comparaître au tribunal de la police correctionnelle : il y est venu en soutane et en rabat, s'asseoir sur les bancs des prostituées et des filous. Le peuple a été étonné, et la cause a cessé d'être publique.

Cette haine de la Religion est le caractère distinctif de ceux qui ont fait notre pette, qui méditent encore notre ruine. Ils détestent cette Religion, parce qu'ils l'ont persécutée, parce que sa sagesse éternelle et sa morale divine sont en opposition avec leur vaine sagesse et la corruption de leur cœur. Jamais ils ne se récon

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