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Mais ce n'est pas le Pandit qui est dans l'erreur, car l'apostrophe est parfaitement bien placée pour indiquer la suppression de l'a privatif de ahitah, synonyme de véirinah [ennemis, sous-entendu bhoûtwâ], nominatif pluriel isolé, de même que ougra-karmânah [malfaiteurs]: kchayâya étant le complément du verbe prabhavanti, et non de hitâh [intenti] ; ils sont, ils existent pour la perte, le malheur du monde. Telle est donc la construction logique de la phrase: ougra-karmânah, ahitâh, prabhavanti kchayâya djagatah. « Malfaiteurs, d'un esprit hostile, ils » existent pour le malheur du monde. »

Écoutons le commentaire: ougram, himsram karma yéchâm té | ahitâ véirino bhoûtwa djagatah kchayâya bhavantityartah.

M. Wilkins s'est aussi écarté du vrai sens dans son interprétation, où l'on voit qu'il a pris le mot composé ougra - karmânah pour un cinquième cas singulier, au lieu d'un nominatif pluriel; la forme de ces deux cas étant la même. Voici sa traduction :

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<< These lost souls, and men of little understandings, having fixed >> upon this vision, are born of dreadful and inhuman deeds, for the » destruction of the world. >>

Quant à la construction du verbe prabhavati ou bhavati, avec un nom au quatrième cas ou datif, Bartrihari nous en fournira une nouvelle preuve dans ce charmant distique, plein de finesse et vraiment digne d'Anacréon:

Shroutâ, bhavati tâpâya; drichtâ, tchonmâda-varddhinî:

Sprichtâ, bhavati mohâya; sâ, nâma! dayitâ katham!....

« Au seul son de sa voix, vous brûlez; à sa vuè, vous délirez; à son >> toucher, vous vous sentez mourir; et cet être dangereux, vous lui » donnez le nom d'amie!.... »

Telles sont les taches principales que nous avons cru devoir relever dans le travail de M. de Schlegel, taches rachetées d'ailleurs par de grandes beautés, et que nous croyons devoir attribuer en grande partie au desir qu'il a eu de faire trop tôt peut-être l'emploi du caractère dévanagari gravé d'après son dessin et sous sa direction.

Un peu moins d'impatience de sa part et quelque légère étude de plus les lui eussent fait éviter, du moins si nous en jugeons par la sagacité qu'il a déployée dans l'interprétation de certains passages fort difficiles, et qui n'avoient pas été entendus par le célèbre Wilkins, à l'époque reculée où ce patriarche des indianistes a fait jouir le monde savant d'un ouvrage qui a passé alors et qui passera à jamais pour un des phénomènes littéraires les plus dignes d'admiration.

Nous pouvons donc espérer que M. de Schlegel s'acquittera plus

heureusement encore de la nouvelle tâche qu'il s'est imposée. Nous voulons parler du texte complet du Râmâyana, et d'une traduction latine de ce poëme, accompagnée de notes tant historiques que géographiques, critiques et philologiques; et sa gloire en sera d'autant plus grande, que, pour conduire à fin une semblable entreprise, en Europe sur-tout, il ne seroit pas trop des dix têtes de Râvana.

CHÉZY.

HISTOIRE DE LA VIE ET DES OUVRAGES DE RAPHAËL, ornée d'un portrait, par M. Quatremère de Quincy; avec cette épigraphe :

Soleva dire Rafaello che il pittore ha obbligo di fare le cose non come le fa la natura, ma come ella le dovrebbe fare. (Fed. Zuccharo, Lett. pitt. t. VI, p. 213.)

I vol. in-8.o, xvj et 480 pages. Paris, librairie de Charles Gosselin.

SECOND ARTICLE.

Nous avons laissé Raphaël (1) à cette époque importante de sa vie, où, privé de la protection de son parent Bramante, mais désormais appuyé sur sa propre renommée, et assuré du concours de nombreux disciples, ce grand peintre vit s'ouvrir une carrière nouvelle de travaux et de gloire, où nous n'aurons nous-mêmes que la peine de le suivre, sur les pas de son exact et habile historien.

Chargé, comme héritier de Bramante, de continuer l'élévation de la cour du Vatican, nommée la cour des loges, dont celui-ci n'avoit pu jeter que les fondations, Raphaël eut à déployer des talens, non pas absolument nouveaux pour lui, mais encore inconnus à la plupart de ses contemporains. Ce fut d'abord comme architecte qu'il se produisit dans cet important ouvrage, et comme architecte digne d'associer ses travaux à ceux de Bramante. La cour du Vatican, avec ses galeries ou loges, ouvertes en portiques et en colonnes circulant tout à l'entour, s'éleva sur un modèle en bois exécuté par lui-même. Nous retrouverons plus d'une fois encore, dans la vie de Raphaël, le grand architecte trop facilement oublié pour le grand peintre; et nous y reviendrons toujours avec de nouveaux motifs d'admirer ce génie souple

(1) Voyez le Journal des Savans, octobre, 614-621,

et fécond, autant que noble et élevé, qui sut créer des modèles dans tous les arts du dessin, et dans tous les genres que ces arts ont pu produire. C'est ainsi que la décoration des loges du Vatican lui fournit une occasion de perfectionner, en le renouvelant, un autre genre de peinture, celui qu'on nomme improprement arabesque, qui fut connu des anciens et assez souvent gâté ou mal employé par les modernes. La découverte, alors toute récente, des peintures des Thermes de Titus, suggéra sans doute à Raphaël l'idée d'en appliquer à la décoration de ses loges du Vatican, non pas les ornemens eux-mêmes, ce qui n'eût pu se faire que par un plagiat manifeste, ou par une dégradation coupable, mais l'esprit et le goût, ce qu'il est toujours permis de faire en toute chose. M. Quatremère s'attache ici à montrer à quoi se réduisent les emprunts que Raphaël put se permettre à cet égard, et les allégations, beaucoup plus graves, mais heureusement beaucoup moins fondées encore, d'après lesquelles on pourroit croire que Raphaël détruisit une partie de ces peintures antiques, pour s'attribuer l'invention de celles qu'il fit exécuter par ses élèves ou qu'il exécuta lui-même. Il prouve que les idées morales répandues par Raphaël dans ces jeux brillans et capricieux de son pinceau, et le principe unique qui y domine, dans l'emploi d'une ingénieuse allégorie, assurent à son auteur le mérite d'une originalité incontestable. Il expose enfin par quel heureux concours de circonstances Raphaël put employer à des travaux si divers, mais tous empreints d'un même goût, et comme produits sous l'influence d'une seule pensée, une foule de talens également variés, que le charme de son caractère moral, non moins que le légitime ascendant de sa supériorité, rassembloit autour de sa personne.

Cette époque où Raphaël se voyoit environné des premiers talens de son siècle, heureux et fiers de rendre hommage à son génie, est aussi celle qui signale, dans l'histoire de ses travaux, le plus haut degré de ce qu'on appelle sa seconde manière; et dans cette manière, le premier rang est dû au tableau de la S. Cécile, suivant notre auteur, qui recherche ici, avec beaucoup de soin et d'intérêt, jusqu'aux moindres particularités relatives à la composition et à l'exécution de ce tableau célèbre. Il en coûta la vie, seulement pour l'avoir envisagé en ouvrant la caisse qui le renfermoit, à un peintre renommé de ce tempslà, qui se nommoit Francia, et à qui Raphaël l'avoit lui-même adressé. M. Quatremère rapporte à ce sujet les opinions opposées de deux historiens de l'art, Vasari et Malvasia; et il incline à penser que c'est dans l'histoire du cœur humain qu'il faut chercher la solution des doutes

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que peut faire naître cette singulière anecdote. Nous imiterons la réserve de notre auteur, et nous poursuivrons, à son exemple, l'énumération des travaux de Raphaël qui appartiennent à sa seconde manière, ou qui s'en rapprochent le plus immédiatement.

Dans cette classe, M. Quatremère range la plupart de ces tableaux de madonnes, qui ne peuvent sans doute, eu égard à leur grand nombre, avoir été exécutés à une seule époque, mais qui portent le caractère d'une pensée commune. Vasari cite plus de vingt de ces tableaux; encore omet-il le plus important de tous, la grande Sainte Famille exécutée pour François I.", ce qui fait présumer qu'il a pu en oublier beaucoup d'autres. Notre auteur, qui ne s'est pas proposé simplement, comme Vasari, de décrire et de compter des tableaux, mais de décrire et de comparer la marche du génie qui les a créés, expose d'abord l'idée générale qu'on doit se faire de ces nombreux tableaux de madonnes, si divers par leur composition, si semblables par le caractère de beauté qui y domine, et dont Raphaël a bien certainement fixé l'idéal, beauté qui n'est pourtant pas celle des Vierges du Guide, et idéal qui n'est pas non plus celui d'une Vénus, ou d'une Junon, ou d'une Minerve antiques. L'impression qui résulte de l'examen des Vierges de Raphaël, est celle d'un mélange de divinité et d'humanité, de noblesse et de modestie, de candeur virginale et d'affection maternelle. C'est un genre de beauté et d'idéal dont les anciens n'avoient pu lui fournir le modèle, pas plus qu'il n'a été possible aux modernes de le reproduire ; c'est, en un mot, un type aussi neuf dans les arts du dessin, que l'est, dans un autre ordre d'idées, le fond même des croyances religieuses, auxquelles il étoit emprunté. Après cette observation générale, M. Quatremère passe à la description des tableaux de Raphaël rangés sous le titre commun de madonnes, et qu'il distingue en trois classes: la première, comprenant les tableaux où la Vierge est seule avec l'Enfant Jésus, et quelquefois avec le petit S. Jean; la seconde, ceux qui s'appellent proprement saintesfamilles, où se trouvent ordinairement réunis la Vierge avec l'Enfant Jésus, S. Elizabeth et le petit S. Jean, S. Joseph et S. Anne; la troisième, enfin, les compositions où la S. Vierge, avec son divin enfant, se montre comme apparoissant, soit dans un nuage, soit sur un trône, à de simples mortels.

La seule énumération des tableaux de Raphaël feroit un livre considérable, et ne seroit pourtant qu'un catalogue incomplet, puisqu'il manqueroit toujours à un pareil livre l'indication, même succincte, des idées morales et des principes de goût qui se rattachent aux moindres

ceuvres de Raphaël. Aussi, M. Quatremère s'applique-t-il à bien décrire quelques-uns de ces tableaux, sur-tout de ceux qui, comme les madonnes et les saintes-familles, appartiennent à une classe commune, plutôt qu'à les énumérer tous avec une égale attention, ce qui ne seroit qu'une égale indifférence. Dans la première classe de ses madonnes, les tableaux que notre auteur cite de préférence, pour en faire ressortir le mérite et l'originalité, sont la Vierge du palais Tempi à Florence, la Madonna della seggiola, ou la Vierge à la chaise, aussi à Florence; la Vierge au linge, la Jardinière, et deux autres Vierges qui ont passé en Angleterre, et dont l'une a été gravée récemment par M. Desnoyers. Dans tous ces tableaux, d'une composition toute différente, et d'une exécution tout aussi variée, le mérite que M. Quatremère s'attache principalement à signaler, c'est de n'avoir jamais excédé les bornes d'aucune des bienséances que comportoient ces scènes religieuses; c'est d'avoir exprimé, d'une manière sensible à-la fois pour l'œil et pour la raison, l'idée mystique d'un dieu enfant et d'une vierge mère, et non pas l'image vulgaire et banale d'une simple mère avec son enfant; c'est, en un mot, de n'être jamais, dans un sujet qui touchoit de si près aux affections de l'humanité, descendu jusqu'à la familiarité d'une scène domestique : admirable délicatesse du génie le plus sublime, constamment dirigé par le goût le plus sûr !

Pour les madonnes de la seconde classe, ou les saintes-familles, compositions plus importantes, dont quelques-unes réunissent jusqu'à cinq, six ou sept figures, notre auteur suit la même méthode d'indiquer seulement les principales de ces compositions, en insistant beaucoup sur les observations qui en révèlent le goût et le génie. M. Quatremère cite, sous ce double rapport, la Vierge au berceau, du musée royal de Paris; la Vierge à la longue cuisse, du musée de Naples, et la Vierge au rideau, du palais Pitti, à Florence. Quant aux deux plus célèbres de toutes les saintes-familles, celle d'Espagne, qu'on nomme la perle, et celle de Paris, exécutée pour François I., une mention plus détaillée et plus conforme à la place que ces beaux ouvrages occupent dans l'histoire de Raphaël et dans celle de l'art, leur est réservée dans un autre endroit de cet ouvrage. Mais, en attendant, voici de quelle manière M. Quatremère apprécie et juge les compositions dé Raphaël que nous venons de citer:

<<< Dans toutes ces compositions, Raphaël, sans s'écarter d'une cer»taine grâce, à laquelle le sujet ne sauroit se refuser, s'est toujours > tenu fort loin de ce qu'on pourroit appeler le simple naturel, ou, » si l'on veut, le genre vulgaire d'une scène purement domestique. Il

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