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Thérapeutique n'est pas moins soucieux de mettre en relief les progrès, les perfectionnements, les heureuses innovations de la chirurgie que de la médecine elle-même. Les travaux de M. Cousin sur les injections d'air et vapeurs médicamenteuses dans la trompe d'Eustache, dans quelques maladies profondes de l'oreille; de M. Baudon sur l'utilité du perchlorure de fer dans le purpura hémorrhagique; l'observation de M. Marguerite (du Havre) sur le danger de l'omphalorrhagie; la notice intéressante de M. Belhomme sur le traitement du phagédénisme chancreux; divers travaux de M. Béranger-Féraud, de la marine impériale; de M. Morpain, de M. Scanzoni; de MM. Ripoll, Delore, Philippeaux, Paquet, Desgranges, Bourguet (d'Aix), Hamon, etc., etc., sont autant de spécimens qu'il nous suffit de rappeler, pour montrer que les informations nouvelles que le Bulletin général de Thérapeutique a recueillies du côté de la chirurgie ne sont pas moins intéressantes que celles de la médecine même, et que nous avons autant souci de servir les intérêts de l'une que les intérêts de l'autre.

Ces résumés annuels des modestes travaux du Bulletin, auxquels on nous permettra d'attacher quelque importance, ont, dans notre pensée, un double but. Ce que nous nous y proposons d'abord, c'est de ramasser sous le regard de nos nombreux lecteurs, en une esquisse rapide, les points de pratique qui nous ont paru bénéficier davantage du travail incessant des observateurs, et ensuite de fixer l'attention sur les problèmes non encore résolus, vers lesquels sont portés les esprits réfléchis, à un moment donné de l'évolution de la science, par le courant des idées. Non-seulement l'œuvre pratique de la médecine est une œuvre collective, à laquelle nous concourons tous, suivant les circonstances où le cours des choses nous a placés ; mais la science, dans les problèmes complexes qu'elle a charge de résoudre, réclame, elle aussi, et non moins impérieusement, le concours de tous. II Ꭹ donc là un double et égal intérêt à servir. Organe, bien que dans une mesure inégale, de ce double intérêt, le Bulletin général de Thérapeutique, grâce au concours de nombreux collaborateurs, s'applique à servir l'un et l'autre ; le rappeler en résumant très-sommairement nos travaux de l'année qui vient de finir, et partir de ce point pour nous acheminer, s'il est possible, vers un nouveau progrès, c'est tout le dessein que nous nous proposons dans ces courtes revues rétrospectives; c'est à nos lecteurs qu'il appartient de juger si nous y avons réussi,

THERAPEUTIQUE CHIRURGICALE.

Du traitement des corps étrangers des voies aériennes (1);

Par le docteur Félix GUYON, agrégé de la Faculté de médecine,

chirurgien de l'hôpital Necker.

Les moyens dont le traitement dispose ont pour but de provoquer l'expulsion du corps étranger à travers les voies naturelles ou de lui ouvrir artificiellement une voie à travers le tube aérien.

Pour obtenir l'expulsion par les voies naturelles, l'on a excité la toux, provoqué l'éternument, employé les lubréfiants; l'on a eu recours enfin à des manœuvres particulières. Lorsque l'opération a été pratiquée, le larynx ou la trachée, quelquefois la trachée et la partie inférieure du larynx ont été divisés. Nous n'aurons pas dans cet article à étudier le manuel opératoire de la laryngotomie, de la tracheotomie ou de la laryngo-trachéotomie, mais nous devrons nous attacher à bien préciser les indications de l'opération et ses résultats; sans entrer non plus dans l'énumération de tous les moyens mis en œuvre pour éviter l'opération, nous devrons cependant étudier avec soin les moyens proposés et chercher à apprécier leur valeur.

Il était aisé de prévoir que ces moyens seraient tout d'abord préférés à l'opération, mais il est singulier de voir les chirurgiens les mettre exclusivement en usage jusqu'au dix-septième siècle. Depuis Aétius qui, le premier, semble avoir transmis quelques préceptes relatifs à l'expulsion des corps étrangers des voies aériennes, on se contente de répéter avec le célèbre compilateur, qu'il faut, lorsque quelque chose de ce qu'on avale tombe sur l'extrémité de l'artère respiratoire ou tombe au dedans d'elle, provoquer la toux par des choses aigres ou jeter dans le nez un sternutatoire. L'agitation, les efforts; l'expiration violente qui en résultent aurait pour effet habituel de chasser le corps étranger au dehors. (Voy. Daléchamps, Chir. frane., chap. xxxII, p. 130, annot. A. Paré, t. II, p. 443, édit. Malg. Hévin, mém. cit., p. 436.) Fabrice de Hilden réagit, il est vrai, et vient proposer de substituer aux choses aigres qui resser

(1) Nous empruntons à la dernière livraison du Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales l'article suivant qui termine la longue étude consacrée dans cet ouvrage à cet important sujet de pratique.

rent la trachée et l'œsophage, les lubréfiants tels que les sirops de réglisse et de guimauve, huile d'amandes douces Fabrice conservait les sternutatoires, il voulait lui aussi s'en remettre à une expiration violente du soin de jeter au dehors le corps étranger; mais bien que des succès aient pu être obtenus de la sorte, les sternutatoires, de même que les agents excitant de la toux, sont aujourd'hui tombés dans un discrédit légitime.

Si, lorsque l'expiration est provoquée, la glotte était largement ouverte, si l'on pouvait espérer que le corps étranger s'y présentât dans la position la plus commode pour la franchir, rien ne serait plus rationnel; mais rien ne l'est moins que de compter sur le hasardeux concours de semblables circonstances. Jobert, a démontré que même sur le cadavre, les corps étrangers, poussés avec un soufflet fournissant une volumineuse colonne d'air ont peine à franchir la glotte. La résistance est cependant alors toute passive, et l'ouverture glottique toujours béante, ainsi qu'il est facile de s'en assurer. Les conditions qu'offre la glotte sont, on le sait, différentes sur le vivant.

Mais si l'on a volontiers proscrit les moyens qui excitent la toux et l'éternument, les lubréfiants ont conservé une assez grande faveur. Il suffit de lire un certain nombre d'observations pour se convaincre que l'huile est volontiers administrée et que ce moyen a été même plusieurs fois proposé comme nouveau depuis Fabrice. Il a au moins le mérite d'être inoffensif; mais en est-il de même des vomitifs que l'on administre d'une façon banale dans presque tous les cas? Nous n'avons pas la preuve qu'ils aient déterminé quelque accident spécial, mais ne doit-on pas considérer cette pratique comme fàcheuse, alors que l'on voit et que l'on peut prévoir qu'elle est presque inévitablement inutile. Et cependant un, deux, trois, quatre, cinq et six vomitifs ont été successivement administrés en semblable circonstance. Si la présence d'un corps étranger dans les voies aériennes ne crée pas de contre-indications à l'emploi des vomitifs, on doit cependant condamner comme inutile. la médication vomitive si fréquemment mais si inutilement appliquée, dans le but de provoquer l'expulsion à travers les voies naturelles.

Les manœuvres spéciales employées dans le même but veulent être plus sérieusement examinées.

L'on a eu recours à des percussions exercées sur le thorax et à la position.

C'est à la fois une ressource et un usage vulgaire que de frapper dans le dos lorsque l'on étrangle en avalant. Indistinctement appliquée dans ces conditions pour les corps étrangers de l'œsophage et des voies aériennes, cette manoeuvre, dont l'origine est chirurgicale, a été mise à profit dans plusieurs circonstances, pour les cas dont nous nous occupons. Mais elle n'a guère été employée alors que comme adjuvant de la position; nous en apprécierons les effets, en étudiant ceux de la position.

Nul doute que bon nombre de corps étrangers ne puissent être déplacés sous la seule influence de la position. Les plus lourd obéiront surtout aux lois de la pesanteur. Aussi, est-il incontestable que, dans plusieurs cas, la position n'ait déterminé ou favorisé l'expulsion de corps étrangers introduits dans les voies aériennes ; c'est ce que démontrent les faits de Brodie, de Lenoir, de Duncan, de Beneys, que Malgaigne a pris soin de réunir dans son journal (Journal de chirurg., t. III, p. 51, 55, 83. Rev. méd.-chir., t. XI, p. 101). C'est ce que peut démontrer encore la pratique du docteur Hansford (Rev. méd.-chir., t. VII, p. 362).

Le plus connu de tous ces faits est celui de Brodie; c'est l'histoire de l'accident arrivé à l'ingénieur Brunel. Le plus remarquable est celui de Lenoir. Un homme était entré à l'hôpital de la Charité, disant qu'il avait avalé une pièce de 50 centimes, et qu'il la sentait dans le dos au-dessous de l'omoplate droite. Lenoir le fit coucher sur le ventre, la tête en bas, frappa de la main sur la région où le malade accusait la présence du corps étranger, et en même temps l'engagea à tousser. Immédiatement la pièce se dégagea, franchit la trachée et la glotte, et sortit par la bouche, de telle sorte qu'en se relevant le malade se trouva guéri. Les succès du docteur Hansford ne semblent pas moins remarquables. Dans six cas, l'expulsion de différents corps étrangers fut obtenue en faisant coucher les patients horizontalement sur un banc, la tête dépassant l'extrémité du banc, et en exerçant sur le dos des percussions violentes avec un coussin bien tendu. Mais il est si vrai que cette manœuvre laisse beaucoup au hasard, que Brunel faillit être victime de l'une des tentatives d'expulsion. « La toux était si violente et les phénomènes de suffocation si alarmants, qu'il devint évident qu'il y aurait imprudence à répéter cette tentative. » Le spasme glottique, mis en jeu par le contact du corps étranger, avait été comme toujours la cause de l'échec et des accidents. Alors, comme toujours, la glotte ne livre passage que si elle est franchie sans que ses lèvres soient TOME LXXVI. 1re LIVR. 2

en quelque sorte touchées ; ce n'est en effet que par surprise ou à la faveur du rejet d'un flot liquide que nous avons vu les corps étrangers franchir la barrière contractile que leur oppose la glotte.

Dans ce cas, les percussions furent aussi employées; elles déterminaient immédiatement la toux et même une toux violente, lorsqu'on les pratiquait pendant que le malade avait la tête en bas. L'apparition de la toux, succédant immédiatement au choc, semble d'autant mieux indiquer que le corps étranger se déplaçait sous son influence, que malgré la position déclive la toux ne s'était pas montrée.

Les percussions exercées sur le thorax sont donc à bon droit considérées comme adjuvant du déplacement du corps étranger, déjà invité à descendre vers la glotte par la position déclive. Elles méritent d'être conservées dans le traitement, et pourraient aussi être employées pour aider à établir le diagnostic dans certains cas. Quant aux percussions empiriques que l'on pratique au moment de l'accident, nous ne pouvons les apprécier, faute de notions suffisantes sur leur efficacité. On conçoit que la secousse qu'elles impriment, l'expiration et la toux qu'elles tendent à provoquer, aient pu être utiles lorsque le corps étranger menace l'espace sus-glottique, ou est engagé dans la partie supérieure de l'œsophage.

Quoi qu'il en soit, ce que nous avons pu démontrer, c'est que la position et la percussion contribuent efficacement à déplacer le corps étranger et à le pousser vers la glotte; mais faut-il en conclure qu'il y ait dans l'association de ces manœuvres, ou dans l'une ou l'autre, une méthode d'expulsion à préconiser? Nous ne le pensons pas, et nous en avons assez dit pour que l'on comprenne que les inconvénients sérieux que nous avons signalés et le peu de certitude de réussir déterminent notre conclusion. Les faits où cette méthode a réussi sont d'ailleurs bien peu nombreux. Nous croyons, en y joignant celui qui est indiqué dans les leçons de Dupuytren (t. VI, p. 302, note du R.), les avoir à peu près tous cités; celui de Duncan nous laisse bien des doutes sur la réalité de l'introduction dans les voies aériennes ; il fallut faire la trachéotomie chez Brunel, le malade de Beneys rendit un flot de pus en même temps que sa balle, et les six faits du docteur Hansford sont bien laconiquement exposés.

La méthode qui consiste à ouvrir au corps étranger une voie artificielle, c'est-à-dire la trachéotomie ou la laryngotomie, nous semble donc actuellement la seule qui puisse offrir au chirurgien

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