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BULLETIN GÉNÉRAL

DE

THÉRAPEUTIQUE

MÉDICALE ET CHIRURGICALE.

THÉRAPEUTIQUE MÉDICALE.

Coup d'œil rétrospectif sur les travaux publiés, pendant le cours de l'année 1968, par le Bulletin général de Thérapeutique médicale et chirurgicale.

Il y a quelque trente ans, la médecine, qui ne s'absorbait pas dans le système du jour, n'aspirait guère au progrès que par la voie d'une anatomie pathologique superficielle, d'une analyse symptomatique variable suivant la sagacité des esprits, et d'une critique plus ou moins profonde des idées synthétiques dans lesquelles se résumait la science du passé. Depuis l'introduction dans l'étude de la biologie de méthodes qui plongent plus profondément dans l'intimité de l'organisme vivant, ou qui y suscitent une vie en quelque sorte artificielle, pour éclairer la vie normale ou pathologique, l'horizon de la médecine s'est singulièrement agrandi, et la thérapeutique qui en est la conclusion pratique a vu elle-même s'élargir les bases sur lesquelles elle s'était jusque-là développée. Le journal que nous avons l'honneur de diriger aujourd'hui, et qui, depuis bientôt quarante ans, s'applique à marquer le progrès de la science, quant à la thérapeutique surtout, et à y concourir dans la mesure de ses forces, ne saurait rester étranger au mouvement qui s'accomplit autour de lui. Bien que pour rester fidèle à la mission qu'il s'est donnée, et qui consiste essentiellement à diriger la pratique de l'art proprement dit, il ait principalement à étudier le mouvement dont nous parlions tout à l'heure en vue de ce suprême intérêt, l'évolution de la science elle-même dans ses hautes spéculations ne saurait manquer d'éveiller son attention, et, soit dans ses travaux origi

naux, soit dans la reproduction partielle d'études importantes, soit enfin dans ses notices bibliographiques, il réserve une place importante à l'exposition critique des données nouvelles de la science contemporaine.

Cette préoccupation légitime des grandes questions, agitées aujourd'hui dans la science, nous a paturellement conduit à accorder, pendant l'année qui vient de s'écouler, une place plus large que nous le faisions d'ordinaire à certaines de ces questions. C'est ainsi que nous avons donné, dans toute son extension, un travail extrêmement intéressant de M. Oulmont sur l'action du veratrum viride sur l'organisme vivant, travail d'où semble clairement résulter que ce modificateur puissant se rapproche par son action de la digitale, et peut, en une certaine mesure, lui être comparé : c'est ainsi encore que nous avons inséré dans les pages du Bulletin une série d'articles de M. Meuriot sur la belladone, et où l'auteur s'attache surtout à démontrer que cet agent ne doit pas être considéré comme un sédatif, un stupéfiant direct du système nerveux, mais qu'il doit être rangé, comme le veut M. le professeur Sée, dans la classe des agents vasculo-cardiaques. L'alcool et le phosphore sont encore de puissants modificateurs de l'organisme qu'il était utile de remettre à l'étude, et qui appelaient l'observation d'une expérimentation physiologique rigoureuse; MM. Gubler et Dujardin-Baumetz se sont chargés de porter la lumière sur les résultats encore incomplets qui se trouvaient consignés dans la science relativement à l'action de ces agents, soit dans l'état physiologique, soit dans l'état pathologique. Si les conclusions du second, surtout en ce qui touche à l'influence du phosphore sur la marche du processus pathologique auquel se lie l'ataxie locomotrice, laissent encore à désirer, le travail du savant médecin de l'hôpital Beaujon, vérifiant et étendant, tout en les précisant davantage, les conclusions de MM. Jaccoud, Béhier, etc., sur l'action thérapeutique de l'alcool dans les maladies, permet de dire qu'aujourd'hui, grâce surtout à la hardiesse prudente de la médecine française, cet agent d'excitation et de combustion physiologique tout ensemble est devenu, entre les mains de qui sait le manier, un des agents les plus utiles de la matière médicale: là où il est indiqué, et employé dans une juste mesure, il peut relever l'économie d'un collapsus qui, sans cette opportune intervention, eût abouti à une catastrophe fatale.

Ce sont les faits de cet ordre, joints aux enseignements de l'é

tude de certaines maladies abandonnées aux réactions spontanées de l'organisme vivant, qui ont mis les esprits réfléchis sur la voie des dangers des spoliations sanguines dans un grand nombre d'affections où, au commencement de ce siècle, et sur la foi de spéculations erronées, on en usait jusqu'à un abus déplorable. Instruit à cet égard à l'école de nos savants maîtres, et éclairé un peu aussi par notre propre expérience, nous avons cru que le temps était venu où le Bulletin général de Thérapeutique devait étudier cette question d'une manière générale, et formuler, en face des praticiens dont ce journal est depuis longtemps le guide, les conclusions qui sont dans l'esprit des hommes qui font autorité de la science, et qui se résument en la recommandation d'une excessive circonspection dans l'emploi d'une médication où l'on arrive facilement à l'excès.

Tout le monde connaît, ne fût-ce que par quelques résultats originaux auxquels il a conduit, un instrument nouveau pour l'exploration de la tension vasculaire, le sphygmographe de M. Marey. Cet instrument peut non-seulement s'appliquer à mesurer le degré de tension de la colonne sanguine des artères superficielles que déterminent les maladies, mais il peut servir à mesurer en ce sens tout au moins l'action d'un certain nombre d'agents thérapeutiques dans un certain nombre de celles-ci. En ces sortes d'informations, le sphygmographe ne dit pas tout, et même ce qu'il dit, on peut quelquefois l'apprendre par une observation moins compliquée; mais ce qu'il dit vaut la peine d'être connu, et peut devenir un élément de plus dans un diagnostic précis, comme dans la nette, appréciation d'une action thérapeutique. Ce n'est donc pas un yain travail que celui auquel s'est livré sur ce dernier point notre laborieux confrère M. le docteur Bordier, et que nous avons consigné dans les colonnes du Bulletin.

L'observation, si complète qu'elle soit, est une méthode pour arriver à la science, mais n'est pas la science la science même doit l'inspirer pour diriger ses laborieuses enquêtes, sous peine de tomber, sans espoir d'en sortir jamais, dans l'ornière de l'empirisme. Un jeune professeur de notre Faculté de médecine, M. Axenfeld, l'a parfaitement compris, et l'a exposé avec cette largeur de vues et cette lucidité de conception qui caractérisent son enseignement, dans une leçon que nous avons été heureux de reproduire. La plupart des médecins auxquels va ce journal n'ont point entendu cette parole limpide qui, si elle ne dissipe pas toutes les

obscurités de la science, en fait au moins scintiller aux yeux les brillantes clartés; nous sommes convaincu qu'ils nous ont su gré de leur en faire entendre ici un éloquent écho.

Mais, si entraîné que nous soyons du côté de l'horizon de la science, où apparaissent, où resplendissent, si vous voulez, toutes ces clartés nouvelles, la science d'hier, qui compta, et qui compte encore de nombreux et vigoureux athlètes, ne se tient pas pour complétement vaincue, et alors même qu'elle passe dans le camp ennemi, elle y passe avec armes et bagages, et ne consent pas à laisser enfouir dans le diluvium de la science, comme un vain détritus, les fruits de son vaillant labeur. M. Devergie, dans des pages remarquées, s'est fait l'organe de ces prudentes et très-légitimes réserves. Abordant surtout les questions de l'arthritisme, de l'herpétisme, etc., et des métamorphoses de l'hétérogénie pathologique, il s'est efforcé de démontrer que sur tous ces points la lumière est loin d'être faite. Dans tous les cas, il établit, au nom d'une expérience demi-séculaire, que les conceptions, les idées nouvelles, à supposer qu'elles parvinssent à se démontrer un jour, ne sauraient annihiler les résultats d'une observation rigoureuse. Là nous paraît être la vérité, et dans l'élaboration de la science nouvelle, il y a moins à rechercher des éléments nouveaux qu'à intellectualiser, pour nous servir de l'expression d'un ancien maître, M. le professeur Bouillaud, les données de la science ancienne.

Mais ce n'est pas seulement la science traditionnelle, toujours un peu souillée de la rouille du temps, qui appelle le contrôle d'une observation attentive, la science d'hier même, sous peine de ne fournir que des résultats plus tard niés ou contestés, doit se contrôler elle-même, pour se fixer irrévocablement. C'est pour assurer le bénéfice de cette critique essentielle à une méthode thérapeutique nouvelle et toute française, la méthode hypodermique, que nous avons inséré dans les colonnes de cette revue le rapport adressé à la Société médico-chirurgicale de Londres par un comité spécial chargé d'étudier cette méthode. Ce rapport dont la traduction appartient à l'un des professeurs les plus distingués de la Faculté de Montpellier, et dont l'esprit se tourne comme d'instinct aux questions les plus pratiques, M. Fonssagrives, ce rapport, on se le rappelle, confirme en tous points les conclusions que les initiateurs de cette méthode avaient tirées de leurs judicieuses observations. C'est ainsi que se trouve définitivement installé dans la science un modus faciendi d'une incontestable utilité. Cette remarque, nous sommes

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