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THÉRAPEUTIQUE CHIRURGICALE.

Observations sur la cystocèle vaginale et son traitement (1); Par M. DEMARQUAY, chirurgien de la Maison municipale de santé, membre de l'Académie de médecine.

Mme D***, âgée de cinquante ans, rentière, est entrée à la maison de santé, dans le service de M. Demarquay, le 19 septembre 1868. Cette femme, fortement constituée, mariée à vingt et un ans, eut six enfants en l'espace de sept ans. Après le dernier accouchement qui remonte à 1849, elle éprouva quelques troubles mal déterminés du côté des organes pelviens, troubles que le médecin rattacha à un abaissement de l'utérus et pour lesquels il conseilla un pessaire. Mme D*** tenait alors un café-restaurant, et sous l'influence de la marche continuelle, de la station debout prolongée, d'autres phénomènes mieux déterminés s'ajoutèrent aux douleurs vagues qui existaient auparavant. C'étaient surtout des envies fréquentes d'uriner avec un peu de cuisson après le passage de

l'urine.

Il y a seulement quatre à cinq ans que la malade dit s'être aperçue d'une petite proéminence située tout à fait à la partie antérieure du vagin.

Plusieurs médecins appelés successivement auraient cautérisé le méat urinaire et la partie antérieure de l'urèthre sans résultat favorable. Le besoin continuel d'uriner devenant intolérable, au point de la forcer à se lever quinze à vingt fois par nuit, Mme D*** se décide à entrer à la maison de santé.

Voici son état au 15 octobre. Santé générale bonne; absence complète de douleurs dans les reins et le bas-ventre; un peu de cuisson seulement dans l'urèthre après le passage de l'urine. Mais le symptôme le plus pénible pour la malade, ce sont les envies fréquentes d'uriner. Malgré le repos qu'elle a gardé depuis son entrée, elle urine encore toutes les heures. Le jet n'est pas sensiblement modifié dans la direction ni le calibre. Les urines sont un peu troubles et donnent un dépôt blanchâtre.

Si on fait l'examen de la vulve, la femme étant couchée, on ne

(1) Observation recueillie par M. Flamen.

voit d'abord rien d'anormal. Mais si on écarte les lèvres et qu'on engage la malade à pousser, on aperçoit la petite extrémité d'une tumeur ovoïde qui se prolonge dans le vagin. Cette tumeur est grosse comme un œuf de poule environ; elle est rougeâtre avec des plis transversaux d'une couleur un peu plus foncée. Le doigt, introduit dans le vagin, la circonscrit parfaitement en arrière et en haut. On peut constater aussi qu'elle occupe surtout la partie antérieure du vagin et qu'elle s'arrête à peu près à 5 centimètres de la vulve. La consistance en est molle, sans élasticité, et la réduction très-facile et non douloureuse. Le col est à 7 à 8 centimètres de la vulve, mais nettement séparé de la tumeur par le cul-de-sac antérieur qui persiste. L'utérus n'a pas subi de déviation notable. La paroi postérieure du vagin est intacte ainsi que le cul-de-sac postérieur. Le méat urinaire est caché dans un enfoncement profond au-dessus de la tumeur. L'urèthre est dévié de façon que le cathéter, pour pénétrer, doit être dirigé en arrière et en bas. Cette exploration donne du reste des résultats très-importants. On constate, en effet, que la partie antérieure de la cystocèle est formée par le col de la vessie et le canal de l'urèthre dilatés, car le doigt sent le bec de la sonde à travers les parois de la tumeur, 1 centimètre à peine au delà du méat.

GALANTE

GALANTE

M. Demarquay conseille un pessaire à réservoir d'air maintenu par une lame en caoutchouc, qui s'applique sur la vulve et le périnée, et s'attache sur une ceinture hypogastrique par des tubes en caoutchouc qui jouent le rôle de sous-cuisses. Cet appareil ne réduit qu'une partie de la tumeur, la partie vésicale proprement dite, mais

il est bien toléré et soulage notablement la malade. Elle sort améliorée le 12 novembre.

L'exposé de ce simple fait qui, d'ailleurs, ne présente en luimême rien de vraiment extraordinaire, soulève néanmoins des questions pleines d'intérêt pour la science et pour la pratique. Il n'est donc pas inutile de faire connaître l'état actuel de la science sur une maladie que le médecin a bien souvent l'occasion de traiter.

La cystocèle vaginale était regardée autrefois comme une affection rare. Rognetta, quand il voulut écrire son mémoire en 1832, ne put en trouver que sept exemples, et encore la plupart de cas rapportés ne sont pas entièrement conformes aux descriptions classiques de la cystocèle vaginale. Ils appartiennent à cette variété de prolapsus qui se fait brusquement à la suite d'un effort et guérit facilement. Telles sont les observations de Chaussier (Leblanc, Précis d'opérations de chirurgie, 1755) et de Sabatier (Médecine opératoire).

Mme Rondet la première, dans un mémoire présenté à l'Académie des sciences en 1835, avançait, en s'appuyant sur les faits, que la cystocèle n'était point rare, et Malgaigne, dans son mémoire de 1840 (Journal de chirurgie, 1843), montrait que c'était le plus fréquent des prolapsus vaginaux. En l'espace de quatre mois, au bureau central, il voyait trente-neuf cystocèles tant simples que compliquées de rectocèles et de déplacements de l'utérus. La description qu'il en donne est fort complète, et les travaux consécutifs sur ce sujet n'ont rien appris relativement aux symptômes et à l'étiologie.

Jobert, dans un mémoire lu à l'Académie de médecine en 1840, et M. Huguier, dans la Gazette des hôpitaux de 1844, et la Thèse de M. Drouet en 1861, exposent chacun un procédé opératoire pour la cure radicale de la cystocèle. Des observations éparses ont été publiées en outre par A. Cooper, Éguisier, Blandin, M. Bourdon, Morel-Lavallée.

La lecture de ces faits montre qu'on pourrait établir deux catégories de cystocèles.

En effet, quelques-unes de ces hernies, du reste les plus rares, sont produites par un violent effort; elles s'accompagnent de douleurs vives, quelquefois de rétention d'urine; la réduction en est douloureuse, mais se maintient facilement, et après quelques jours de repos et de l'application d'un pessaire approprié, la malade est

tout à fait guèrie. On pourrait presque leur donner le nom de cystocèles aiguës.

Malgaigne en rapporte un exemple remarquable chez une sagefemme de quarante-cinq ans. La guérison était complète au bout de douze jours. Dans l'observation de Chaussier déjà citée, la tumeur était apparue brusquement à la suite d'un effort; un chirurgien, la prenant pour une tête de fœtus, voulait appliquer le forceps; Chaussier la réduisit et elle ne reparut plus.

Sabatier et Malgaigne ont aussi observé cette forme de cystocèle pendant la grossesse; après l'accouchement, tout était revenu à l'état normal.

Bien différente est dans son origine et surtout sa marche la cystocèle ordinaire qu'on pourrait appeler chronique. Dans des cas très-exceptionnels, la femme rapporte le début de sa maladie à un effort ou à une chute sur le siége. Presque toujours, le prolapsus se montre quelque temps après l'accouchement et sans cause occasionnelle appréciable.

On le voit donc surtout chez les femmes multipares de trente à quarante ans. Pourtant A. Cooper l'a observé chez une fille de dixsept ans, Sandifort chez une vierge de vingt-cinq ans, M. Bourdon chez une fille de quatorze ans. D'autre part, Malgaigne l'a rencontré chez des femmes de soixante-cinq et soixante-douze ans.

La profession de blanchisseuse est une prédisposition sérieuse que met en évidence la statistique.

Quant au mécanisme de la hernie, il a été interprété de différentes manières. Tous les auteurs admettent un vice de conformation congénital chez les jeunes filles vierges ou au moins nullipares atteintes de cystocèle. Pour les cas ordinaires, Jobert pensait qu'il y avait relâchement des ligaments pubio-vésicaux qui retiennent la vessie au bassin. Rognetta, à la suite d'expériences sur le cadavre, donnait comme triple condition : la pression sur la vessie par l'utérus en gestation, la mixtion peu fréquente amenant la distension de la vessie, enfin la laxité des parois du vagin. M. Huguier pense que l'utérus en s'élevant pendant la grossesse entraîne le vagin dont les parois sont ainsi amincies et même éraillées.

Généralement la hernie ne comprend pas toute la vessie. Il serait intéressant, soit pour l'explication des symptômes, soit pour la forme à donner aux pessaires, de rechercher quelle est la partie herniée. Les observations ne donnent pas de renseignements à cet égard. Malgaigne dit seulement que tantôt la cystocèle répond au

col de la vessie et même à l'urèthre, et qu'il ne l'a vuté qu'une fois occuper la partie supérieure de la vessie. Dans l'observation que nous rapportons, la cystocèle occupait surtout le col de la vessie et l'urethre, et pourtant les urines étaient parfaitement retenues. Les fibres musculaires de la partie antérieure de l'urethre ne se seraientelles point développées suffisamment pour remplacer le sphincter du col de la vessie?

Le col de l'utérus est si intimement uni au vagin et à la vessie, que dans un certain nombre de cas l'abaissement de l'utérus accompagne la cystocèle. Mais ce n'est pas une complication constante, ainsi que le pensait Jobert. C'est au contraire l'exception. Malgaigne déjà avait remarqué que dans les trois quarts des cas, l'abaissement de l'utérus manquait.

Dans l'observation de M. Bourdon, dans trois observations de M. Drouet, dans la nôtre, le col était à la distance ordinaire de la vulve.

Il faut encore signaler comme se rencontrant assez souvent avec la cystocèle la rectocèle, les hernies inguinales et crurales. Dans les observations de Ruysch, Blandin, Morel-Lavallée, la vessie contenait des calculs.

La cystocèle entraîne des troubles urinaires intéressants à signaler. Un symptôme presque constamment indiqué dans les observations, ce sont les envies fréquentes d'uriner. Quelques malades urinent vingt-cinq et même cinquante fois par jour. Mais il est difficile de déterminer la véritable cause de ce phénomène. Doit-on le rattacher à une irritation chronique de la muqueuse vésicale ou bien est-ce une conséquence physique de la déviation, ou de la dilatation du col de la vessie? En raison de la constance du symptôme, cette dernière opinion paraît la plus probable. La rétention d'urine, au moins complète, n'est pas observée, mais il est fréquent de voir ce liquide séjourner en partie, après la mixtion, dans la poche herniée. L'incontinence de l'urine n'est pas moins rare. Le jet est quelquefois modifié, Malgaigne l'a vu dans un cas presque horizontal. Quant aux caractères physiques de la cystocèle, ils se laissent facilement deviner.

C'est une tumeur rougeâtre, plissée transversalement, d'un volume variant depuis une noix jusqu'à la tête d'un fœtus, faisant saillie entre les grandes lèvres, augmentant par la station verticale et les efforts, diminuant de volume et même disparaissant complétement par le repos au lit. Cette tumeur a une consistance molle,

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