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dans leur Etat originel; & telle fut parmi les hommes la premiére fource de l'inégalité, qu'il eft plus aifé de démontrer ainsi en général, que d'en affigner avec précision les véritables causes.

Que mes Lecteurs ne s'imaginent donc pas que j'ofe me flatter d'avoir vû ce qui me paroit fi difficile à voir. J'ai commencé quelques raifonnemens; J'ai hazardé quelques conjectures, moins dans l'efpoir de refoudre la queftion que dans l'intention de l'éclaircir & de la reduire à fon véritable état. D'autres pourront aifèment aller plus loin dans la même route, fans qu'il fait facile à perfonne d'arriver au terme. Car ce n'eft pas une légére entreprise de démêler ce qu'il y a d'originaire & d'artificiel dans la Nature actuelle de l'hom

l'homme, & de bien connoître un Etat qui n'existe plus, qui n'a peut-être point exifté, qui probablement n'exiftera jamais, & dont il eft pourtant neceffaire d'avoir des Notions juftes pour bien juger de nôtre état présent. Il faudroit même plus de Philofophie qu'on ne pense à celui qui entreprendroit de déterminer exactement les précautions à prendre pour faire fur ce fujet de folides obfervations; & une bonne folution du Problême fuivant ne me paroîtroit pas indigne des Ariftotes & des Plines de nôtre fiécle. Quelles expériences feroient néceffaires pour par venir à connoître l'homme naturel; & quels font les moyens de faire ces expériences au fein de la fociété ? Loin d'entreprendre de réfoudre ce Problê me, je crois en avoir affés medité le

Sujet,

Sujet, pour ofer répondre d'avance que les plus grands Philofophes ne feront pas trop bons pour diriger ces expériences, ni les plus puiffants fouverains pour les faire; concours auquel il n'eft guéres raifonnable de s'attendre furtout avec la perfeverance ou plutôt la fucceffion de lumières & de bonne volonté néceffaire de part & d'autre pour arriver au fuccés.

Ces recherches fi difficiles à faire, & auxquelles on a fi peu fongé jusqu'ici, font pourtant les feuls moyens qui nous reftent de lever une multitude de difficultés qui nous dérobent la connoissance des fondemens réels de la fociété humaine. C'eft cette ignorance de la nature de l'homme qui jette tant d'incertitude & d'obfcurité fur la véritable definition du droit naturel: car l'idée

du

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du droit, dit Mr. Burlamaqui, & plus encore celle du droit naturel, font manifeftement des idées rélatives à la Nature de l'homme. C'est donc de cette Nature même de l'homme, continue-til, de fa constitution & de fon Etat qu'il faut déduire les principes de cette science.

Ce n'eft point fans furprife & fans fcandale qu'on remarque le peu d'accord qui régne fur cette importante matiere entre les divers Auteurs qui en ont traité. Parmi les plus graves Ecrivains à peine en trouve-t-on deux qui foient du même avis fur ce point. Sans parler des Anciens Philofophes qui femblent avoir pris à tâche de fe contredire entre eux fur les principes les plus fondamentaux, les Jurifconfultes Romains affujettiffent indifferem

ment

ment l'homme & tous les autres animaux à la même Loy naturelle, parce qu'ils confidérent plutôt fous ce nom la Loy que la Nature s'impose à elle même que celle qu'elle prescrit; ou plutôt, à caufe de l'acception particuliére felon laquelle ces Jurifconfultes entendent le mot de Loy qu'ils semblent n'avoir pris en cette occafion que pour l'expreffion des rapports généraux établis par la nature entre tous les êtres animés, pour leur commune confervation. Les Modernes ne reconnoiffant fous le nom de Loy qu'une régle prefcrite à un être moral, c'eftà-dire intelligent, libre, & confidéré dans fes rapports avec d'autres êtres, bornent confequemment au feul animal doué de raison, c'est-a-dire à l'homme, la compétence de la Loy naturelle; mais

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