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disgrâce qui ne saurait atteindre un dieu, il est manifeste qu'il répond au nom de la créature elle-même.

M. Langdon ne l'entend pas autrement, hormis que les êtres secourables qui vont être produits et qui sont destinés à réparer les effets funestes de la chute, sont, pour lui, les premiers patrons de la civilisation, assimilables à Abel, Caïn, Enoch, Jered, Lamech, etc. (ibid., p. 53).

Enlil et Nin harsag se concertent pour remédier au triste état des choses, non qu'ils puissent ramener la nature humaine à sa première institution, mais parce qu'ils veulent en adoucir les épreuves par le secours d'êtres supérieurs créés à cette fin.

La déesse semble consoler le dieu et s'excuser elle-même d'avoir fait l'homme si défectueux :

Šeš mu anazu aragig.

<«< Mon frère, en quoi te sens-tu souffrant? »

C'est la question huit fois répétée. Les huit réponses d'Enlil dénoncent autant de maux physiques qui réclament autant de remèdes présentés par Nin harsag.

Notons, une fois pour toutes, que l'auteur de l'épopée s'est fait une règle de rappeler par un écho, dans le nom du remède, le mot qui exprime le mal.

Rev. III (Langdon, p. 83-85).

24. šeš-mu a-na-zu a-ra-gig

25. ab-?-?-mu ma-gig

(an) Ab-u im-ma-ra-an-tu-ud

šeš-mu a-na-zu a-ra-gig
u-tul-mu ma-gig

(an) Nin-tul-la im-ma-ra-an-tu-ud

30. šeš-mu a-na-zu a-ra-gig ka-mu ma-gig

(an) Nin-ka -u-tud im-ma-ra-an-tu-ud

6e mal, 6 remède.

da-mu ma-gig an Da-zi-mâ-a im-ma-ra-an-tu-ud. Mon bras (da) est souffrant!

divine Da-zi-mâ.

Voici que je t'enfante la

Le nom du membre blessé est DA; il n'y a point place, à mon sens, pour une restitution plus longue comme serait Da-zi-mu ma-gig.

DA a été l'hieroglyphe et est devenu l'idéogramme du bras droit et, par extension, du côté. C'est l'organe des organes, la force physique, l'action extérieure de l'homme qui est en souffrance. Car un vaillant (idlu) s'écrit en babylonien mâ-da, c'est-à-dire, celui dont le bras sort et n'est pas paralysé (Meissn., Idgr., 2838).

La déesse secourable à l'homme, dans cette infirmité qui eût compromis les prouesses des futurs Nemrod, est précisément Dazimâ dont le nom signifie «< celle qui lève un bras sain », ou «< qui tend un bras vigoureux » (cf. â-zi-da).

7e mal, 7e remède.

((

til-mu ma-gig an Nin-til im-ma-ra-an-tu-ud.

-

Ma côte (til) est souffrante! Voici que je t'enfante la divine Nin-til.

Dans l'anatomie du corps, til désigne silu, la côte. C'est aussi spécialement la cage thoracique qui protège les organes les plus délicats et les plus essentiels de la vie. De là est venu que le signe til, d'un emploi si fréquent dans les textes babyloniens, prit bientôt le sens général de vie (balaṭu).

Pour le dire en passant, le fait que dans une tradition analogue, on appelle Hawa, Hawwa « vivante ou vivifiante », la première femme, issue d'une côte de l'homme, a bien pu se produire chez un peuple qui se servait de l'écriture idéographique babylonienne, où le signe TI a les valeurs et de vie et de côte. Cette observation ne serait-elle

2e mal, 2e remède.

utul-mu ma-gig -an Nin-tul-la im-ma-ra-an-tu-ud. Mon troupeau (utul) est souffrant! Voici que je t'enfanterai le divin Nin-tulla!

Le nouveau mal semble faire double emploi avec le précédent : mauvais pâturage et malheureux troupeau, n'est-ce point la même infortune? Mais, par le nom du remède, nous voyons qu'il s'agit vraiment d'autre chose. Le dieu Nin tulla1 n'est point, à mon avis, le dieu des troupeaux (lequel s'appellerait: Nin utulla), mais, comme son nom l'indique, le dieu des citernes, des fosses. C'est une grave question pendant une partie de l'année, en Orient, que celle de l'abreuvement. Le buffle, par exemple, s'il reste plus d'un jour sans eau, se détache à l'arrière, se couche et meurt. Dans le désert, on aménage, au temps des pluies, des points d'eau, fosses ou citernes, qui tant bien que mal sauveront l'existence du bétail.

Devant ce danger nouveau, qui se rattache indirectement à la malédiction du sol, Nin haršag créera Nin tulla, providence qui abreuve les troupeaux, comme Abû pourvoit à leur alimentation.

3e mal, 3e remède.

ka-mu ma-gig

(an) Nin ka-u-tud im-ma-ra-an-tu-ud. Ma bouche (ka) est souffrante! - Voici que je t'enfanterai la divine Nin-ka-utud!

Le nom du remède Nin-ka-utud signifie la dame qui produit la parole! Il se peut donc que, dans l'opinion des Nippuriens, la manducation du fruit fatal ait causé, par manière de châtiment, dans l'homme, la privation de la parole ou du moins la confusion du langage! C'est pourquoi la déesse-mère Nin harsag créera Celle qui produit et rend la parole, Nin-ka-utud.

1. Rectifier la citation de Langdon : p. 83, no 3. Cuneif. Texts. 24, 26, 113 a Nin el-lal. On trouve Nin tul-lal, ibid., 24, 7, 13.

4e mal, 4 remède.

Ka-mu ma-gig

(an) Nin-ka-si im-ma-ra-an-tu-ud. Ma bouche (ka) est souffrante! Voici que je t'enfanterai la divine Nin-ka-si !

Le nom du remède signifie « la dame qui comble la bouche ».

Les 3 et 4 maux << Ma bouche est souffrante! » paraissent être identiques: il s'en faut, si l'on considère la nature des remèdes. Dans le premier cas, la bouche est un organe producteur, émetteur; dans le second cas, la bouche reçoit, appréhende. Là, il s'agit de la parole: ici, de nourriture, de nourriture plutôt légère : Nin kasi qui intervient est définie ailleurs comme la divinité des breuvages (Siris : Brunn. 11003), lesquels constituent pour beaucoup le fond de l'alimentation des tribus en Orient.

L'usage de mets plus solides n'est point exclu. Cela va de soi. La conservation des troupeaux (remèdes 1 et 2) l'implique suffisamment.

5e mal, 5 remède.

Na-mu-ma-gig an Na-zid im-ma-ra-an-tu-ud.

Mon na est souffrant! Voici que je t'enfanterai la divine Na-zid.

Le nom du mal est en partie dégradé. L'espace disponible ne permet de lui attribuer qu'un seul signe (M. Langdon pense diversement).

Si l'on tient compte de l'habitude du calembour chez l'écrivain, ce signe ne pouvait être que ou na ou zid, l'un substantif, l'autre adjectif. Retenons le substantif et lisons na dont l'amorce existe encore sur la tablette : Mon na est en souffrance!

Le na est en effet une partie du corps humain, siège ou organe de quelque faculté. Il est rendu par maḥirtum « la partie antérieure » (Meissn. Idgr. 897), mais ce mot vague

ment des dieux, un acte inconsidéré commis malgré la mise en garde divine.

Les créateurs de l'homme viennent à son aide de protecteurs et de thérapeutes divins.

par l'envoi

Pour finir, on peut se demander si, à la même époque, des moralistes comme Hammurabi et d'autres penseurs d'élite ne se posèrent pas cette seconde question : Pourquoi l'homme ne jouit-il pas de la plénitude de la santé morale? D'où viennent un certain obscurcissement de l'intelligence dans la perception du vrai et du bien; une certaine débilité de la volonté dans l'exécution du bien vu et approuvé; le dérèglement, par excès ou par défaut, des appétits irascible et concupiscible?

La réponse, dans l'hypothèse, aurait été analogue à celle de la première question.

L'harmonie de l'être moral a été rompue par quelque transgression ou faute d'ordre moral.

Pour pousser l'analogie jusqu'au bout, il restait aux dieux créateurs à envoyer à l'homme des docteurs divins lui aidant à comprendre et à accomplir le bien, à modérer ses passions, à régler sa vie.

UNE SCÈNE D'AFFRANCHISSEMENT PAR LA VINDICTE

AU PREMIER SIÈCLE DE NOTRE ÈRE,

PAR M. ÉDOUARD CUQ,

MEMBRE DE L'ACADÉMIE.

La scène est figurée sur un fragment de relief en marbre blanc (hauteur 0 m 90). Ce relief, qui a été pendant longtemps conservé à Rome au Palais Paluzzi, piazza Campitelli, puis à la villa Altieri, est entré ensuite dans la collection d'antiquités égyptiennes, grecques et romaines formée par M. Raoul Warocqué à Mariémont près Charleroi. Il a été publié pour la première fois à la fin du xvie siècle

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