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respect quelques articles de la Charte; je ne relève pas ce qu'on a dit de l'Europe attentive. Quant à moi, messieurs, je dois sans doute au sang françois qui coule dans mes veines cette impatience que j'éprouve quand, pour déterminer mon suffrage, on me parle des opinions placées hors de ma patrie; et si l'Europe civilisée vouloit m'imposer la Charte, j'irois vivre à Constantinople.

Mais cette Charte, messieurs, c'est le descendant de saint Louis, c'est le frère de Louis XVI, c'est un François qui nous l'a donnée. Jc la chéris comme le garant de ma liberté, comme le présent de mon roi! C'est pour cela que je la veux tout entière; c'est pour cela que je demande une loi d'élection.

J'espère, messieurs, que vous ne désavouerez pas ces sentiments. Plus le haut rang de la pairie semble nous éloigner de la foule, plus nous devons nous montrer les zélés défenseurs des priviléges du peuple. Attachons-nous fortement à nos nouvelles institutions, empressons-nous d'y ajouter ce qui leur manque. Pour relever l'autel avec des applaudissements unanimes, pour justifier la rigueur que nous avons déployée dans la poursuite des criminels, soyons généreux en sentiments politiques; réclamons sans cesse tout ce qui appartient à l'indépendance et à la dignité de l'homme. Quand on saura que notre sévérité religieuse n'est point de la bigoterie; que la justice que nous demandons pour les prêtres n'est point une inimitié secrète contre les philosophes; que nous ne voulons point faire rétrograder l'esprit humain que nous désirons seulement une alliance utile entre la morale et les lumières, entre la religion et les sciences, entre les bonnes mœurs et les beaux-arts, alors rien ne nous sera impossible, alors tous les obstacles s'évanouiront, alors nous pourrons espérer le bonheur et la restauration de la France. Trois choses, messieurs, feront notre salut : le roi, la religion et la liberté. C'est comme cela que nous marcherons avec le siècle et avec les siècles, et que nous mettrons dans nos institutions la convenance et la durée.

Je vote pour la loi amendée, me réservant de proposer moi-même quelques amendements quand on en viendra à la discussion particulière des articles.

PROPOSITION

RELATIVE AUX PUISSANCES BARBARESQUES

FAITE A LA CHAMBRE DES PAIRS,

SÉANCE DU 9 AVRIL 1816.

(La chambre a décidé qu'il y avoit lieu de s'occuper
de cette proposition.)

-Messieurs, je vais avoir l'honneur de vous soumettre un projet d'adresse au roi. Il s'agit de réclamer les droits de l'humanité et d'effacer, j'ose le dire, la honte de l'Europe. Le parlement d'Angleterre, en abolissant la traite des noirs, semble avoir indiqué à notre émulation l'objet d'un plus beau triomphe : faisons cesser l'esclavage des blancs. Cet esclavage existe depuis trop longtemps sur les côtes de la Barbarie; car par un dessein particulier de la Providence, qui place l'exemple du châtiment là où la faute a été commise, l'Europe payoit à l'Afrique les douleurs qu'elle lui avoit apportées et lui rendoit esclaves pour esclaves.

J'ai vu, messieurs, les ruines de Carthage; j'ai rencontré parmi ces ruines les successeurs de ces malheureux chrétiens pour la délivrance desquels saint Louis fit le sacrifice de sa vie. Le nombre de ces victimes augmente tous les jours. Avant la révolution les corsaires de Tripoli, de Tunis, d'Alger et de Maroc, étoient contenus par la surveillance de l'ordre de Malte nos vaisseaux régnoient sur la Méditerranée, et le pavillon de Philippe-Auguste faisoit encore trembler les infidèles. Profitant de nos discordes, ils ont osé insulter nos rivages; ils viennent d'enlever la population d'une île entière: hommes, femmes, enfants, vieillards, tout a été plongé dans la plus affreuse servitude. N'est-ce pas aux François, nés pour la gloire et pour les

entreprises généreuses, d'accomplir enfin l'œuvre commencée par leurs aïeux? C'est en France que fut prêchée la première croisade; c'est en France qu'il faut lever l'étendard de la dernière, sans sortir toutefois du caractère des temps et sans employer des moyens qui ne sont plus dans nos mœurs. Je sais que nous avons pour nous-mêmes peu de chose à craindre des puissances de la côte d'Afrique; mais plus nous sommes à l'abri, plus nous agirons noblement en nous opposant à leurs injustices. De petits intérêts de commerce ne peuvent plus balancer les grands intérêts de l'humanité; il est temps que les peuples civilisés s'affranchissent des honteux tributs qu'ils payent à une poignée de barbares.

Messieurs, si vous agréez ma proposition, et qu'elle se perde ensuite par des circonstances étrangères, du moins votre voix se sera fait entendre; il vous restera l'honneur d'avoir plaidé une si belle cause. Tel est l'avantage de ces gouvernements représentatifs par qui toute vérité peut être dite, toute chose utile proposée : ils changent les vertus sans les affaiblir; ils les conduisent au même but en leur donnant un autre mobile. Ainsi nous ne sommes plus des chevaliers, mais nous pouvons être des citoyens illustres; ainsi la philosophie pourroit prendre sa part de la gloire attachée au succès de ma proposition et se vanter d'avoir obtenu dans un siècle de lumières ce que la religion tenta inutilement dans des siècles de ténèbres.

Veuillez maintenant, messieurs, écouter ma proposition :

Projet d'adresse au roi.

Qu'il soit présenté une adresse au roi par la chambre des pairs: dans cette adresse, Sa Majesté sera humblement suppliée d'ordonner à son ministre des affaires étrangères d'écrire dans toutes les cours de l'Europe, à l'effet d'ouvrir des négociations générales avec les puissances barbaresques pour déterminer ces puissances à respecter les pavillons des nations européennes et à mettre un terme à l'esclavage des chrétiens

PROPOSITION

FAITE A LA CHAMBRE DES PAIRS,

SÉANCE DU 23 NOVEMBRE 1816,

TENDANT A CE QUE LE ROI SOIT HUMBLEMENT SUPPLIÉ DE FAIRE EXAMINER CE QUI S'EST PASIR AUX DERNIÈRES ÉLECTIONS, AFIN D'EN ORDONNER ENSUITE SELON SA JUSTICE.

SUIVIE

DES PIÈCES JUSTIFICATIVES ANNONCÉES DANS LA PROPOSITION.

AVERTISSEMENT.

Dans la proposition que j'eus l'honneur de faire à la chambre des pairs, le 23 du mois dernier, j'annonçai des pièces justificatives. La proposition ayant été écartée, il me restoit à prouver, par respect pour messieurs les pairs, que je n'avois rien annoncé légèrement. Il m'importoit encore de montrer aux personnes qui m'avoient remis les pièces justificatives que j'avois fait tout ce que j'avois pu faire, que je n'avois trompé ni l'intérêt de la chose publique ni l'estime qu'elles m'avoient témoignée en voulant bien me confier une affaire d'une si haute importance.

J'avois envoyé en conséquence à l'imprimeur de la chambre des pairs ma proposition, les pièces justificatives annoncées dans la proposition et l'analyse de ces pièces. Étant allé lundi, 2 de ce mois, à dix heures du matin, chez M. Didot pour corriger des épreuves, je le trouvai alarmé des menaces qu'on étoit venu lui faire relativement à l'impression de ma proposition. Il me représenta qu'étant père de famille, il craignoit de se compromettre en continuant cette impression. Je respectai ses motifs; je ne voulus point exposer à des persécutions un homme estimable et dont les talents font tant d'honneur à son art. En conséquence, M. Didot me rendit deux cent cinquante exemplaires déjà tirés de ma Proposition et de l'Analyse des pièces justificatives; il me remit encore une épreuve des pièces justificatives elles-mêmes et le reste du manuscrit.

Mon imprimeur, M. Lenormant, ayant déjà été poursuivi pour la publication d'un de mes ouvrages, e te voulus pas l'exposer aux nouvelles chances de ma fortune. Je cherchai et je trouvai enfin un imprimeur assez hardi pour imprimer la Proposition d'un pair de France.

Je crois devoir rappeler l'état actuel de notre législation relativement à la liberté de la presse.

L'article 8 de la Charte déclare que « tous les François ont le droit de pubner et de faire imprimer leurs opinions, en se conformant aux lois qui doivent réprimer les abus de cette liberté ».

La loi relative à la liberté de la presse, du 24 octobre 1814, dit, article 4", que tout écrit de plus de vingt feuilles d'impression pourra être imprimé librement et sans examen ou censure préalable »;

Articles 2 et 3, que « il en sera de même, quel que soit le nombre de feuilles, des opinions des membres des deux chambres ».

Une ordonnance du roi, du 20 juillet 1845, exempte même de la censure tout écrit au-dessous de vingt feuilles d'impression.

Si malgré ces lois un pair de France en plein exercice de ses fonctions ne peut pas faire imprimer ses opinions chez l'imprimeur de la chambre même sans exposer cet imprimeur à être inquiété dans sa famille et menacé dans son état; si, au moins, dans le cours d'une session, nous n'avons pas la liberté de penser, de parler, d'écrire sur les affaires qui occupent les chambres, et de publier ce que nous avons pensé et écrit, alors, je le demande, où sommes-nous? où allons-nous? que devient la Charte? que deviennent les lois et le gouvernement constitutionnel?

Je ne me plains pas, en ce qui me touche personnellement, de ce nouveau genre d'abus, pas plus que je ne me plains des libelles qu'on imprime tous les jours contre moi, avec ou sans la protection de la police. Je trouve trèsbon qu'on m'attaque, quoique je ne puisse me défendre; mes intérêts ne me feront jamais abandonner mes principes. Je suis donc charmé que la liberté de la presse existe pour quelqu'un cela empêche du moins la prescription. Mais je me plains dans ce moment, pour l'honneur des chambres, pour la dignité de la pairie, pour les droits de tous les François. Ce qui m'arrive aujourd'hui peut arriver demain à tout pair, à tout député qui aurait le malheur de faire une proposition ou d'émettre une opinion contraire aux vues des ministres. Les deux chambres vont s'occuper d'une loi sur la liberté de la presse: je livre le que fait je viens de raconter aux méditations de leurs. sagesses.

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