Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

Si l'amendement du noble comte, en favorisant les intérêts des expropriés, étoit contraire à ceux de la patrie, au lieu de l'appuyer, je le repousserois, dans les intérêts des expropriés eux-mêmes: le bien particulier qui nuit au bien général n'est pas un bien, mais le plus grand des maux. Pourquoi l'indemnité doit-elle être donnée? Parce qu'elle est une mesure de salut pour la France; autrement elle rendroit odieux ceux qui en seroient l'objet. On seroit même averti par cette haine que la mesure seroit injuste, car il y a un sentiment d'équité chez les peuples, qui fait qu'ils ne haïssent pas ce qu'ils sentent juste au fond du cœur: aussi un murmure ne s'est élevé contre les plus généreuses victimes que lorsqu'on a voulu mêler à la loi d'indemnité une loi qu'un noble comte, qui prend son génie dans sa conscience, a si énergiquement qualifiée dans la séance d'hier. L'amendement détruira cette funeste connexion.

En puisant à la caisse d'amortissement, vous avez pour la France l'inappréciable avantage de mettre des obstacles à un système erroné, qui consiste à prendre des monnoies fictives, des masses de papier qu'aucun produit du sol, du commerce ou de l'industrie ne représente, pour des monnoies réelles; un système qui croit augmenter les richesses du pays en multipliant les signes d'une hypothèque qui n'existe pas, qui croit diminuer des dettes en empruntant.

Vous rentrerez en même temps dans la vraie route de l'amortissement; vous le réduirez à ce qu'il doit être; vous ne lui conserverez pas cette force mobile d'agiotage et non de crédit, ce moyen reprouvé par toutes les autorités financières et par l'Angleterre même, que nous croyons cependant imiter.

Sous le rapport de la paix intérieure de la France, et de la concorde entre les citoyens, la mesure est toute salutaire. On désire qu'il y ait des transactions entre les acquéreurs et les indemnisés? Je le désire aussi de toute mon âme : eh bien, quand vous aurez mis les indemnisés à l'aise, autant et aussi sincèrement que vous le pourrez, quand vous leur aurez donné, non pas des illusions pour des faits, non pas des fictions pour des réalités, ils auront bientôt racheté le patrimoine de leurs pères, à la satisfaction de tous les gens de bien. Alors les divisions cesseront réellement, alors l'œuvre magnanime du roi sera accomplie, alors s'évanouiront les alarmes avec ces projets financiers, ces rêves qui nous conduiroient au plus fatal réveil. Le sol que l'on fait trembler sous nos pas se raffermira; l'indemnisé sera content, le rentier tranquille, l'acquéreur rassuré, libre de garder, libre de rétrocéder une propriété remontée à sa véritable valeur. Appuyé sur la bonne foi, si puissante en France, on pourra attendre en paix le temps

:

des emprunts futurs à cette époque, si elle doit jamais arriver, on créera tout naturellement des 4, des 3 pour 100; en un mot, tout ce qu'on veut produire aujourd'hui sans motif, sans cause, sans nécessité, comme si l'on vouloit seulement s'agiter pour s'agiter. Le ministère même sera dans une position plus morale, plus solide, et les sentiments d'une fidélité politique, toujours honorables dans ceux qui les conservent, trouveront leur compte à l'amendement proposé, comme les intérêts publics.

DÉVELOPPEMENTS

D'UN AMENDEMENT PROPOSÉ A L'ARTICLE V
DU PROJET DE LOI D'INDEMNITÉ.

CHAMBRE DES PAIRS, SÉANCE DU 18 avril 1825.

Messieurs, je viens essayer de sauver quelques débris du bel édifice qu'avoit voulu élever un grand maître de l'art. M. le comte Roy avoit introduit à l'article 6 du projet de loi les dispositions que je vais avoir l'honneur de vous lire.

Ce sont ces dispositions, messieurs, que je reprends, et qui forment l'amendement que j'ai l'honneur de vous proposer. Ces disposi tions, qui dans l'amendement de M. le comte Roy s'appliquoient aux 5 pour 100, peuvent également s'appliquer aux 3 pour 100. J'ai déjà eu l'honneur de vous faire remarquer l'immense avantage pour l'indemnisé de recevoir à la fois ses cinq inscriptions, bien qu'elles ne soient négociables que par cinquième, à leur écheance respective. C'est déjà, pour ainsi dire, posséder le fonds de l'indemnité, sans en avoir encore tout le revenu; c'est avoir le titre de sa propriété; et ce titre entre les mains du propriétaire peut servir aux transactions les plus importantes pour lui.

Le noble comte auteur d'un amendement qui auroit changé tant de fictions en réalités a fait remarquer que l'article 5 du projet de loi disoit bien que les rentes 3 pour 100 seroient inscrites ua grandlivre et délivrées d'année en année, mais qu'il ne disoit pas que l'inscription elle-même, portant jouissance des intérêts, seroit délivrée: d'où il pourroit arriver que l'inscription, par une cause ou par une autre, restât entre les mains du gouvernement, qu'elle cessât ainsi d'être négociable pendant un grand nombre d'années, et que le tont 'se reduisît pour tel ou tel indemnisé à une sorte de pension, à une rente dont le capital ne seroit pas à sa disposition.

Les dispositions présentées par le noble comte, et que je reproduis aujourd'hui, messieurs, en forme d'amendement, écartent cette diffi

culté. Y a-t-il vice de rédaction dans le projet de loi, a-t-on mis par inadvertance: les rentes seront délivrées, au lieu de l'inscription de rente sera délivrée? Cela peut être; et sans doute MM. les ministres du roi voudront bien s'expliquer; mais ce vice de rédaction doit être corrigé, car les paroles des ministres ne font pas, à ce qu'il paroît, jurisprudence. On sait, par exemple, que M. Crétet, lors de la fameuse réduction ou banqueroute des 5 pour 100, déclara formellement que les 5 pour 100 consolidés ne seroient pas remboursables. Tient-on compte aujourd'hui de cette déclaration, qui en engageant la foi publique donnoit au moins au rentier la certitude de conserver ce qu'on vouloit bien lui laisser? Vous voyez, messieurs, le danger extrême de ne pas exprimer les faits dans les lois. Cette remarque s'applique encore à l'article 9 comme à l'article 6 du projet de loi. Si vous ne précisez rien au sujet des dettes, je déclare que l'article 9 est rempli d'écueils et de périls.

Quoi qu'il en soit, messieurs, j'ai donc l'honneur de vous proposer d'amender l'article 6 en supprimant l'article 5 d'après les dispositions rédigées par M. le comte Roy. Ces dispositions, qui mettent entre les mains de l'indemnisé liquidé son titre ou ses cinq inscriptions à la fois, sont pour lui un avantage si évident, qu'il doit frapper tous les yeux. Cet amendement ne touche ni à la caisse d'amortissement ni aux 3 pour 100; il n'accroît ni ne diminue l'intérêt ou le capital; il ne fait arriver aucune valeur surabondante à la Bourse; il ne dérange rien à l'économie du projet de loi, il n'en altère aucune partie; il le laisse subsister dans tout son ensemble, en l'améliorant seulement sur un point capital, autant que ce déplorable projet peut être amélioré. J'ai cherché de bonne foi en moi-même quelles objections le gouvernement pourroit y faire, et je n'en ai trouvé aucune. J'ai donc l'espoir que MM. les ministres du roi, qui ne veulent sans doute, comme moi, que l'intérêt des indemnisés, sans nuire aux intérêts de la France, se réuniront à cet amendement. On ne pourra pas du moins soupçonner des vues hostiles; ici l'intérêt de l'indemnisé se présente seul. L'amendement est d'une innocence complète; il est dégagé de toutes les conséquences que voudroient y chercher des sollicitudes politiques. Il n'a pas même contre lui ce terrible argument, cet argument si constitutionnel qui laisse à nos opinions tant d'indépendance, savoir, que le projet de loi retourneroit à la chambre des députés, car un amendement déjà passé nous rend ce malheur inévitable.

OPINION

SUR LE

PROJET DE LOI RELATIF A LA DETTE PUBLIQUE

ET L'AMORTISSEMENT,

PRONONCEE A LA CHAMBRE DES PAIRS,
SÉANCE DU 26 AVRIL 1826.

Messieurs, un des moindres inconvénients que j'éprouve en paroissant à cette tribune, après des hommes d'un grand mérite, c'est de venir répéter ce qu'ils ont dit beaucoup mieux que je ne le dirai. Les deux orateurs qui ont parlé contre le projet de loi ont dévasté mes chiffres et emporté mes principaux arguments. Si je retranchois de mon discours tout ce qui ne sera pas nouveau, il n'y resteroit rien: vous y gagneriez du temps, messieurs, et moi aussi. Toutefois la gravité de la matière m'impose le devoir de me faire entendre.

Il est certain qu'un moyen puissant de conviction pour beaucoup de personnes, c'est de voir que des esprits divers se sont rencontrés dans une même vérité. Ensuite chaque esprit a sa nature; la génération des idées ne s'y fait pas de la même façon, les principes et les conséquences s'y enchaînent d'une manière différente, et il arrive que tel auditeur se rend à une raison qui ne l'avoit pas frappé d'abord, parce qu'elle étoit autrement développée : c'est donc ce qui m'engage à vous présenter mon travail sans y rien changer.

Les orateurs qui ont soutenu le projet de loi ont vu échouer leu habileté contre ce projet insoutenable.

C'est toujours la liberté d'une conversion, qui ne sera pas libre; le dégrèvement des contribuables, qui ne seront pas dégrevés; l'accroissement de l'industrie, qui ne s'accroîtra pas; la diminution de l'intérêt de l'argent, qui ne diminuera point; l'élévation des fonds publics, qui ne monteront que pour descendre; le refoulement dans les pro

« ZurückWeiter »