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NOTICE

SUR ANNE DE GONZAGUE,

PRINCESSE PALATINE.

ANNE DE GONZAGUE étoit la deuxième des trois filles de Charles de Gonzague-Clèves, premier du nom, duc de Nevers, de Rhetel, de Mantoue et de Montferrat : elle naquit en 1616. L'aînée des filles fut reine de Pologne; ANNE DE GONZAGUE et sa plus jeune sœur, sacrifiées dès leur jeune âge à l'agrandissement de leur aînée, étoient destinées à la vie religieuse. Aussi, dès l'enfance, furentelles mises au couvent. ANNE de Gonzague fut élevée à l'abbaye de Faremonstier, diocèse de Meaux. L'empressement qu'on mit à lui faire prendre les goûts et les habitudes monastiques, fut précisément ce qui l'en détourna. Devenue libre, et maîtresse de ses droits par la mort de son père, arrivée en 1637, elle parut à la Cour de France, et épousa quelque temps après le prince Edouard, l'un des treize enfans que Frédéric V, duc de Bavière, comte Palatin du Rhin, avoit eus d'Elisabeth, fille de Jacques Ier, roi d'Angleterre. Le prince Edouard s'étoit réfugié en France pendant les malheurs de sa maison. Il étoit protestant; mais il renonça à l'hérésie pour épouser la princesse ANNE, et de ce mariage naquirent quatre enfans dont une fille, qui, en 1663, épousa Henri-Jules, duc d'Anguien, depuis prince de Condé.

Les guerres de la Fronde furent pour la princesse Palatine une occasion de faire briller sa dextérité dans les affaires et ses talens dans l'art de concilier les esprits. C'est l'idée qu'on donne d'elle dans tous les Mémoires du temps.

424 Attachée au parti de la Reine régente, elle eut souvent à négocier les intérêts de la Cour, figura dans beaucoup d'intrigues, et finit par essuyer une disgrâce en 1660, ayant été forcée à cette époque, par le cardinal Mazarin, de donner sa démission de la charge de surintendante de la maison de la Reine, dont le même Mazarin l'avoit fait pourvoir. Elle resta pendant trois ans éloignée de la Cour, et employa ce temps, qu'elle passa à la campagne, à acquitter toutes ses dettes avec la plus scrupuleuse fidélité.

NOTICE SUR ANNE DE GONZAGUE.

On cite encore, comme un trait de magnanimité qui l'honore, un secours en argent qu'elle envoya à la reine de Pologne, sa sœur, lorsque celle-ci, poursuivie par les Suédois qui lui faisoient la guerre, étoit réduite aux dernières extrémités. ANNE, pour rendre service à la Reine sa sœur, dont elle avoit d'ailleurs beaucoup à se plaindre, oublia dans cette occasion le mauvais état de ses propres affaires; et cette conduite généreuse lui gagna tous les cœurs.

ANNE devint veuve en 1663, et il paroît qu'elle se servit de la liberté du veuvage pour se livrer avec moins de contrainte à tous les plaisirs. Elle en vint même jusqu'à perdre la foi, se sentant, lorsqu'on parloit sérieusement devant elle des mystères de la religion catholique, « la même envie de >> rire qu'on sent ordinairement quand des personnes fort » simples croient des choses ridicules et impossibles. » Ce sont les propres expressions de la Princesse elle-même, à . qui l'abbé de Rancé, ce fameux réformateur de la Trappe, ordonna d'écrire toutes les circonstances de sa conversion miraculeuse. On en trouvera les principales dans l'Oraison funèbre suiyante. Une foi vive et une pénitence austère succédèrent à tous les égaremens de l'esprit et du cœur ; et douze années de langueur ou de douleurs aiguës rendirent cette pénitence plus entière encore et plus parfaite. Elle mourut à Paris, en 1684, âgée de soixante huit ans.

Voyez l'Histoire de Bossuet, tom. III,

liv. vii, n. II.

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Apprehendi te ab extremis terræ, et à longinquis ejus vocavi te elegi te, et non abjeci te: ne timeas, quia ego tecum sum.

Je t'ai pris par la main, pour te ramener des extrémités de la terre: je t'ai appelé des lieux les plus éloignés : je t'ai choisi, et je ne t'ai pas rejeté : ne crains point, parce que je suis avec toi. C'est Dieu même qui parle ainsi. Isai. XLI. 9, 10.

MONSEIGNEUR,

Je voudrois que toutes les ames éloignées de Dieu; que tous ceux qui se persuadent qu'on ne peut se vaincre soi-même, ni soutenir sa constance parmi les combats et les douleurs; tous ceux enfin qui désespèrent de leur conversion ou de leur persévérance, fussent présens à cette assemblée. Ce discours leur feroit connoître qu'une ame fidèle à la grâce, malgré les obstacles les plus invincibles, s'élève à la perfection la plus éminente. La Princesse à qui nous rendons les derniers devoirs, en récitant selon sa coutume l'office divin, lisoit les paroles d'Isaïe, que j'ai rapportées. Qu'il est beau de méditer l'E

criture sainte, et que Dieu y sait bien parler, nonseulement à toute l'Eglise, mais encore à chaque fidèle selon ses besoins! Pendant qu'elle méditoit ces paroles, (c'est elle-même qui le raconte dans une lettre admirable) Dieu lui imprima dans le cœur que c'étoit à elle qu'il les adressoit. Elle crut entendre une voix douce et paternelle qui lui disoit : « Je t'ai ramenée des extrémités de la terre, des » lieux les plus éloignés (1) » ; des voies détournées, où tu te perdois, abandonnée à ton propre sens, si loin de la céleste patrie, et de la véritable voie qui est Jésus-Christ. Pendant que tu disois en ton cœur rebelle: Je ne puis me captiver; j'ai mis sur toi ma puissante main, « et j'ai dit : Tu seras ma servante : » je t'ai choisie » dès l'éternité, « et je n'ai pas re» jeté » ton ame superbe et dédaigneuse. Vous voyez par quelles paroles Dieu lui fait sentir l'état d'où il l'a tirée. Mais écoutez comme il l'encourage parmi les dures épreuves où il met sa patience : « Ne crains » point » au milieu des maux dont tu te sens accablée, « parce que je suis ton Dieu » qui te fortifie : « ne te détourne pas de la voie où je t'engage puisque je suis avec toi », jamais je ne cesserai de te secourir; «< et le juste que j'envoie au monde », ce Sauveur miséricordieux, ce Pontife compatissant, << te tient par la main » : Tenebit te dextera justi mei. Voilà, Messieurs, le passage entier du saint prophète Isaïe, dont je n'avois récité que les premières paroles. Puis-je mieux vous représenter les conseils de Dieu sur cette Princesse, que par des paroles dont il s'est servi pour lui expliquer les secrets

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(1) Isai. XLI. 9, 10.

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