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ORAISON FUNÈBRE

DE MESSIRE

MICHEL LE TELLIER,

CHEVALIER,

CHANCELIER DE FRANCE,

Prononcée dans l'église paroissiale de Saint-Gervais,, où il est inhumé, le 25 janvier 1686.

NOTICE

SUR MICHEL LE TELLIER,

CHANCELIER DE FRANCE.

mm

MICHEL LE TELLIER, fils de Michel, seigneur de Châville, près Meudon, et conseiller à la Cour des Aides, naquit en 1603, et entra de bonne heure dans la carrière de la magistrature. Il fut pourvu d'une charge de conseiller au grand conseil, n'étant encore âgé que de vingtun ans, et s'y fit remarquer par beaucoup d'intégrité et d'application au travail. Il quitta cette charge en 1631 pour exercer celle de procureur du Roi au Châtelet. En 1639 il fut fait maître des requêtes; et un an après nommé intendant de l'armée de Piémont. Dans l'intervalle de ces deux dernières promotions, le cardinal Mazarin l'avoit choisi pour accompagner le chancelier Séguier qu'on envoyoit en Normandie ramener à la soumission les révoltés de cette province. Le Chancelier avoit à sa disposition des forces imposantes, LE TELLIER et lui furent assez heureux et assez habiles pour pouvoir s'en passer. Enfin, le cardinal Mazarin le proposa au Roi pour remplir la charge de secrétaire d'Etat, vacante par la démission volontaire de M. Desnoyers; et LE TELLIER commença dès-lors à faire les fonctions de cette charge, dont il n'eut néanmoins le titre qu'après la mort de son prédécesseur.

Ce fut principalement sous la régence d'Anne d'Autriche, et pendant la minorité de Louis XIV, que MICHEL LE TELLIER signala son zèle pour l'autorité royale, et fit preuve à la fois de fermeté et de prudence dans les cir constances critiques où l'on se trouvoit alors. Il eut la plus

grande part au traité de Ruel, qui parut d'abord ramener le calme; et ce fut à lui que la Reine régente et le cardinal donnèrent leur confiance pendant les troubles qui suivirent de près ce traité.

Quand, en 1651, le cardinal Mazarin se vit obligé de céder à l'orage, et de s'éloigner de la Cour, le Tellier crut devoir suivre son exemple; mais il ne tarda pas à être rappelé, et le fut même avant le retour du cardinal; et quand celui-ci fut forcé de nouveau de quitter la Cour, et de sortir même du royaume, tout le poids du ministère retomba alors sur MICHEL LE TELLIER, qui demeura constamment auprès de la Reine régente et du jeune Roi.

Le Roi enfin étant rentré dans Paris, et le cardinal Mazarin étant revenu à la Cour avec plus d'autorité que jamais, LE TELLIER fut, pour récompense de ses services, revêtu de la charge de trésorier des ordres du Roi; et la en 1654 il obtint, pour le marquis de Louvois son fils, survivance de sa charge de secrétaire d'Etat, ce qui étoit alors une grâce fort singulière. Lorsqu'en 1659 le cardinal Mazarin partit pour aller négocier la paix avec l'Espagne, et le mariage du Roi avec l'infante Marie-Thérèse, il laissa MICHEL LE TELLIER auprès du Roi, pour dresser les dépêches et instructions qu'il attendoit de la Cour; et c'est à lui qu'il adressoit la relation de ses conférences avec le ministre d'Espagne.

Le cardinal mourut en 1661; et Louis XIV s'étant mis dès-lors à la tête des affaires, ne cessa pas d'accorder toute sa confiance à MICHEL LE TELLIER, qui continua ses fonctions de secrétaire d'Etat jusqu'en l'année 1666, qu'il obtint la permission d'en remettre les fonctions et le titre à son fils le marquis de Louvois; mais il n'en conserva pas moins la qualité de ministre, et comme tel ne manqua jamais d'assister régulièrement au conseil. En 1677, le Roi lui donna une nouvelle preuve de sa confiance et de son estime, en l'élevant, après la mort de M. d'Aligre, à la dignité de chancelier et garde des sceaux de France. I

470 NOTICE SUR MICHEL LE TELLIER.

avoit alors soixante-quatorze ans; et dans une place si éminente, et dont les fonctions étoient si étendues, si multipliées, il montra beaucoup de vigueur d'esprit, d'activité et d'application. Il recommandoit souvent à sa famille et à ses amis de l'avertir, dès qu'on apercevroit en lui le moindre affoiblissement de tête, pour que ses infirmités naturelles ne devinssent pas préjudiciables au bien public. Mais il n'eut pas besoin de cet avertissement; il mourut en 1685, encore en possession de sa charge; et jusqu'à ses derniers momens, où il souffrit des douleurs aiguës, et où Bossuet l'assista, il montra, avec toutes les dispositions d'un chrétien résigné, une fermeté d'ame, une constance à souffrir ses maux, et une force de tête vraiment admirables.

Il avoit été de tout temps fort zélé pour les intérêts de l'Eglise, et pour la propagation de la foi catholique. En 1681, le Roi convoqua une assemblée générale du clergé, pour terminer l'affaire de la Régale, qui, depuis quelques années, divisoit la Cour de France et celle de Rome. LE TELLIER, alors chancelier, eut beaucoup de part aux délibérations de cette assemblée, et à la rédaction des quatre fameux articles qu'elle dressa. Il ne contribua pas peu aussi à la révocation de l'Edit de Nantes; et en scellant cette mémorable déclaration, qu'il regardoit comme un des plus grands et des plus glorieux événemens du règne de Louis XIV, il dit en pleurant de joie, qu'après ce triomphe de la foi, qui mettoit le comble à ses souhaits les plus ardens, il mourroit en paix et sans regret.

Voyez l'Histoire de Bossuet, tom. III,

liv.

VIII,

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ORAISON FUNÈBRE

DE

MICHEL LE TELLIER,

CHANCELIER DE FRANCE.

1

Posside sapientiam, acquire prudentiam; arripe illam, et exaltabit te : glorificaberis ab ea, cùm eam fueris amplexatus.

Possédez la sagesse, et acquérez la prudence: si vous la cherchez avec ardeur, elle vous élevera; et vous remplira de gloire, quand vous l'aurez embrassée. Prov. IV. 7, 8.

MESSEIGNEURS (*),

EN louant l'homme incomparable dont cette illustre assemblée célèbre les funérailles et honore les vertus, je louerai la sagesse même et la sagesse que je dois louer dans ce discours, n'est pas celle qui élève les hommes et qui agrandit les maisons; ni celle qui gouverne les empires, qui règle la paix et la guerre, et enfin qui dicte les lois, et qui dispense les grâces. la diCar encore que ce grand ministre, choisi par

(*) A Messeigneurs les Evêques qui étoient présens en habit.

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