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qui serez et sa couronne et sa gloire au jour de notre Seigneur, si, comme vous avez été durant tout le cours de sa vie obéissans à ses ordres, vous vous rendez de plus en plus après sa mort fidèles imitateurs de sa piété. Ainsi soit-il.

ORAISON

ORAISON FUNÈBRE

DE MADAME

YOLANDE DE MONTERBY,

ABBESSE DES RELIGIEUSES BERNARDINES DE *** (*).

Ubi est, mors, victoria tua?

O mort, où est la victoire? I. Cor. xv. 55.

QUAND l'Eglise ouvre la bouche des prédicateurs dans les funérailles de ses enfans, ce n'est pas pour accroître la pompe du deuil par des plaintes étudiées, ni pour satisfaire l'ambition des vivans par de vains éloges des morts. La première de ces deux choses est trop indigne de sa fermeté; et l'autre, trop contraire à sa modestie. Elle se propose un objet plus noble dans la solennité des discours funèbres : elle ordonne que ses ministres, dans les derniers devoirs que l'on rend aux morts, fassent contempler à leurs auditeurs la commune condition de tous les mortels, afin que la pensée de la mort leur donne un saint dégoût de la vie présente, et que la vanité humaine rougisse en regardant le

(*) Nous ignorons de quelle maison religieuse cette dame étoit abbesse; et quelques recherches que nous ayons faites, nous n'avons pu rien découvrir de certain sur sa famille. (Edit. de Déforis.) BOSSUET, XVII. 38

terme fatal

que la Providence divine a donné à ses espérances trompeuses.

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Ainsi n'attendez pas, chrétiens, que je vous représente aujourd'hui, ni la perte de cette maison, ni la juste affliction de toutes ces dames, à qui la mort ravit une mère qui les a si bien élevées. Ce n'est pas aussi mon dessein de rechercher bien loin dans l'antiquité les marques d'une très-illustre noblesse, qu'il me seroit aisé de vous faire voir dans la race de Monterby, dont l'éclat est assez connu par son nom et ses alliances. Je laisse tous ces entretiens superflus, pour m'attacher à une matière et plus sainte et plus fructueuse. Je vous demande seulement que vous appreniez de l'abbesse très-digne et très-vertueuse, pour laquelle nous offrons à Dieu le saint sacrifice de l'Eucharistie, à vous servir si heureusement de la mort, qu'elle vous obtienne l'immortalité. C'est par-là que vous rendrez inutiles tous les efforts de cette cruelle ennemie; et que l'ayant enfin désarmée de tout ce qu'elle semble avoir de terrible, vous lui pourrez dire avec l'apôtre : « O mort, où est ta victoire »? Ubi est, mors, victoria tua? C'est ce que je tâcherai de vous faire entendre dans cette courte exhortation, où j'espère le Saint-Esprit me fera la grâce de ramasser en peu de paroles des vérités très-considérables, que je puiserai dans les Ecritures.

que

C'EST un fameux problême, qui a été souvent agité dans les écoles des philosophes, lequel est le plus désirable à l'homme, ou de vivre jusqu'à l'extrême vieillesse, ou d'être promptement délivré des

misères de cette vie. Je n'ignore pas, chrétiens, ce que pensent là-dessus la plupart des hommes. Mais comme je vois tant d'erreurs reçues dans le monde avec un tel applaudissement, je ne veux pas ici consulter les sentimens de la multitude, mais la raison et la vérité, qui seules doivent gouverner les esprits des hommes.

Et certes, il pourroit sembler, au premier abord, que la voix commune de la nature, qui désire toujours ardemment la vie, devroit décider cette question car si la vie est un don de Dieu, n'est-ce pas un désir très-juste de vouloir conserver long-temps les bienfaits de son souverain? Et d'ailleurs étant certain que la longue vie approche de plus près l'immortalité, ne devons-nous pas souhaiter de retenir, si nous pouvons, quelque image de ce glorieux privilége dont notre nature est déchue?

En effet, nous voyons que les premiers hommes, lorsque le monde plus innocent étoit encore dans son enfance, remplissoient des neuf cents ans par leur vie ; et que, lorsque la malice est accrue, la vie en même temps s'est diminuée. Dieu même, dont la vérité infaillible doit être la règle souveraine de nos sentimens, étant irrité contre nous, nous menace en sa colère d'abréger nos jours : et au contraire il promet une longue vie à ceux qui observeront ses commandemens. Enfin, si cette vie est le champ fécond dans lequel nous devons semer pour la glorieuse immortalité, ne devons-nous pas désirer que ce champ soit ample et spacieux, afin que la moisson soit plus abondante? Et ainsi l'on ne peut nier que la longue vie ne soit souhaitable.

Ces raisons qui flattent nos sens gagneront aisément le dessus. Mais on leur oppose d'autres maximes, qui sont plus dures, à la vérité, et aussi plus fortes et plus vigoureuses. Et premièrement, je nie que la vie de l'homme puisse être longue, de sorte que souhaiter une longue vie dans ce lieu de corrup tion, c'est n'entendre pas ses propres désirs. Je me fonde sur ce principe de saint Augustin: Non est longum quod aliquando finitur (1): « Tout ce qui a » fin ne peut être long ». Et la raison en est évidente; car tout ce qui est sujet à finir s'efface nécessairement au dernier moment, et on ne peut compter de longueur en ce qui est entièrement effacé. Car de même qu'il ne sert de rien de remplir, lorsque j'efface tout par un dernier trait ainsi la longue et la courte vie sont toutes égalées par la mort, parce qu'elle les efface toutes également.

Je vous ai représenté, chrétiens, deux opinions différentes qui partagent les sentimens de tous les mortels. Les uns, en petit nombre, méprisent la vie; les autres estiment que leur plus grand bien c'est de la pouvoir long-temps conserver. Mais peut-être que nous accorderons aisément ces deux propositions si contraires, par une troisième maxime, qui nous apprendra d'estimer la vie, non par sa longueur, mais par son usage; et qui nous fera confesser qu'il n'est rien de plus dangereux qu'une longue vie, quand elle n'est remplie que de vaines entreprises, ou même d'actions criminelles; comme aussi il n'est rien de plus précieux, quand elle est utilement ménagée pour l'éternité. Et c'est pour cette seule raison que

(1) In Joan. Tract. xxxII, n. 9; t. 11, part. 1, col. 529.

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