Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

l'honneur de la chevalerie, étant prisonnier du prince Noir, égala la magnanimité de Porus entre les mains d'Alexandre. Le prince l'ayant rendu maître de sa rançon, Bertrand la porta à une somme excessive. « Où prendrez-vous tout cet or? dit le héros anglois, étonné. Chez mes amis, repartit le fier connétable : il n'y a pas de fileresse en France qui ne filât sa quenouille pour me tirer de vos mains. »

La reine d'Angleterre, touchée des vertus de Du Guesclin, fut la première à donner une grosse somme pour hâter la liberté du plus redoutable ennemi de sa patrie. « Ah! madame! s'écria le chevalier breton en se jetant à ses pieds, j'avois cru jusque ici estre le plus laid homme de France, mais je commence à n'avoir pas si mauvaise opinion de moi, puisque les dames me font de tels présents. >>

FIN DU LIVRE CINQUIEME.

[blocks in formation]

SERVICES RENDUS A LA SOCIÉTÉ

PAR LE CLERGÉ ET LA RELIGION CHRETIENNE EN GENERAL.

CHAPITRE PREMIER.

IMMENSITÉ DES BIENFAITS DU CHRISTIANISME'.

Ce ne seroit rien connoître que de connoître vaguement les bienfaits du christianisme : c'est le détail de ses bienfaits, c'est l'art avec lequel la religion a varié ses dons, répandu ses secours, distribué ses trésors, ses remèdes, ses lumières; c'est ce détail, c'est cet art qu'il faut pénétrer. Jusqu'aux délicatesses des sentiments, jusqu'aux amours-propres, jusqu'aux foiblesses, la religion a tout ménagé en soulageant tout. Pour nous, qui depuis quelques années nous occupons de ces recherches, tant de traits de charité, tant de fondations admirables, tant d'inconcevables sacrifices sont passés sous nos yeux, que nous croyons qu'il y a dans ce seul mérite du christianisme de quoi expier tous les crimes des hommes: culte céleste, qui nous force d'aimer cette triste humanité qui le calomnie.

Ce que nous allons citer est bien peu de chose, et nous pourrions remplir plusieurs volumes de ce que nous rejetons; nous ne sommes pas même sûr d'avoir choisi ce qu'il y a de plus frappant : mais, dans l'impossibilité de tout décrire et de juger qui l'emporte en vertu par un si grand nombre d'œuvres charitables, nous recueillons presque au hasard ce que nous donnons ici.

Pour se faire d'abord une idée de l'immensité des bienfaits de la religion, il faut se représenter la chrétienté comme une vaste république où tout ce que nous rapportons d'une partie se passe en même

1. Voyez, pour toute cette partie, HÉLYOT, Hist. des Ordres relig. et milit., 8 vol. in-4o; HERMANT, Étab. des Ordres relig.; BONNANI, Catal. omn. Ord. relig.; GIUSTINIANI, MENNEHIUS et SHOONBECK, dans leur Hist. des Ordres milit.; SAINT-FOIX, Essais sur Paris; Vie de saint Vincent de Paul Vie des Pères du Désert, S. BASILE, Oper.; LOBINEAU, Hist. de Bretagne,

[ocr errors]

temps dans une autre. Ainsi, quand nous parlerons des hôpitaux, des missions, des colléges de la France, il faut aussi se figurer les hôpitaux, les missions, les colléges de l'Italie, de l'Espagne, de l'Allemagne, de la Russie, de l'Angleterre, de l'Amérique, de l'Afrique et de l'Asie; il faut voir deux cents millions d'hommes au moins chez qui se pratiquent les mêmes vertus et se font les mêmes sacrifices; il faut se ressouvenir qu'il y a dix-huit cents ans que ces vertus existent et que les mêmes actes de charité se répètent : calculez maintenant, si votre esprit ne s'y perd, le nombre d'individus soulagés et éclairés par le christianisme chez tant de nations et pendant une aussi longue suite de siècles!

CHAPITRE II.

HÔPITAUX.

La charité, vertu absolument chrétienne et inconnue des anciens, a pris naissance dans Jésus-Christ; c'est la vertu qui le distingua principalement du reste des mortels, et qui fut en lui le sceau de la rénovation de la nature numaine. Ce fut par la charité, à l'exemple de leur divin Maître, que les apôtres gagnèrent si rapidement les cœurs et séduisirent saintement les hommes.

Les premiers fidèles, instruits dans cette grande vertu, mettoient en commun quelques deniers pour secourir les nécessiteux, les malades et les voyageurs: ainsi commencèrent les hôpitaux. Devenue plus opulente, l'Église fonda pour nos maux des établissements dignes d'elle. Dès ce moment les œuvres de miséricorde n'eurent plus de retenue: il y eut comme un débordement de la charité sur les misérables, jusque alors abandonnés sans secours par les heureux du monde. On demandera peut-être comment faisoient les anciens, qui n'avoient point d'hôpitaux? Ils avoient pour se défaire des pauvres et des infortunés deux moyens que les chrétiens n'ont pas l'infanticide et l'esclavage.

Les maladreries ou lèproseries de Saint-Lazare semblent avoir été en Orient les premières maisons de refuge. On y recevoit ces lépreux qui, renoncés de leurs proches, languissoient aux carrefours des cités, en horreur à tous les hommes. Ces hôpitaux étoient desservis par des religieux de l'ordre de Saint-Basile.

Nous avons dit un mot des Trinitaires, ou des pères de la Redemption des captifs. Saint Pierre de Nolasque en Espagne imita saint Jean de Matha en France. On ne peut lire sans attendrissement les règles

austères de ces ordres. Par leur première constitution, les trinitaires ne pouvoient manger que des légumes et du laitage. Et pourquoi cette vie rigoureuse? Parce que plus ces pères se privoient des nécessités de la vie, plus il restoit de trésors à prodiguer aux barbares; parce que s'il falloit des victimes à la colère céleste, on espéroit que le ToutPuissant recevroit les expiations de ces religieux en échange des maux dont ils délivroient les prisonniers.

L'ordre de la Merci donna plusieurs saints au monde. Saint Pierre Pascal, évêque de Jaën, après avoir employé ses revenus au rachat des captifs et au soulagement des pauvres, passa chez les Turcs, où il fut chargé de fers. Le clergé et le peuple de son église lui envoyèrent une somme d'argent pour sa rançon. « Le saint, dit Hélyot, la reçut avec beaucoup de reconnoissance; mais, au lieu de l'employer à se procurer la liberté, il en racheta quantité de femmes et d'enfants dont la foiblesse lui faisoit craindre qu'ils n'abandonnassent la religion chrétienne, et il demeura toujours entre les mains de ces barbares, qui lui procurèrent la couronne du martyre en 1300. »

Il se forma aussi dans cet ordre une congrégation de femmes qui se dévouoient au soulagement des pauvres étrangères. Une des fondatrices de ce tiers ordre étoit une grande dame de Barcelone, qui distribua son bien aux malheureux; son nom de famille s'est perdu; elle n'est plus connue aujourd'hui que par le nom de Marie DU SECOURS, que les pauvres lui avoient donné.

L'ordre des religieuses pénitentes, en Allemagne et en France, retiroit du vice de malheureuses filles exposées à périr dans la misère après avoir vécu dans le désordre. C'étoit une chose tout à fait divine de voir la religion, surmontant ses dégoûts par un excès de charité, exiger jusqu'aux preuves du vice, de peur qu'on ne trompât ses institutions et que l'innocence, sous la forme du repentir, n'usurpât une retraite qui n'étoit pas établie pour elle. « Vous savez, dit Jehan Simon, évêque de Paris, dans les constitutions de cet ordre, qu'aucunes sont venues à nous qui étoient vierges..., à la suggestion de leurs mères et parents, qui ne demandoient qu'à s'en défaire : ordonnons que si aucune vouloit entrer en votre congrégation, elle soit interrogée, etc. >>

Les noms les plus doux et les plus miséricordieux servoient à couvrir les erreurs passées de ces pécheresses. On les appeloit les filles du Bon Pasteur, ou les filles de la Madeleine, pour désigner leur retour au bercail et le pardon qui les attendoit. Elles ne prononçoient que des vœux simples; on tâchoit même de les marier quand elles le désircient, et on leur assuroit une petite dot. Afin qu'elles n'eussent que

des idées de pureté autour d'elles, elles étoient vêtues de blanc, d'où on les nommoit aussi filles blanches. Dans quelques villes on leur mettoit une couronne sur la tête et l'on chantoit Veni, sponsa Christi : « Venez, épouse du Christ. » Ces contrastes étoient touchants, et cette délicatesse bien digne d'une religion qui sait secourir sans offenser, et ménager les foiblesses du cœur humain, tout en l'arrachant à ses vices. A l'hôpital du Saint-Esprit, à Rome, il est défendu de suivre les personnes qui déposent les orphelins à la porte du PèreUniversel.

Il y a dans la société des malheureux qu on n'aperçoit pas, parce que, descendus de parents honnêtes, mais indigents, ils sont obligés de garder les dehors de l'aisance dans les privations de la pauvreté; il n'y a guère de situation plus cruelle : le cœur est blessé de toutes parts, et pour peu qu'on ait l'âme élevée, la vie n'est qu'une longue souffrance. Que deviendront les malheureuses demoiselles nées dans de telles familles? Iront-elles chez des parents riches et hautains se soumettre à toutes sortes de mépris, ou embrasseront-elles des métiers que les préjugés sociaux et leur délicatesse naturelle leur défendent? La religion a trouvé le remède. Notre-Dame de Miséricorde ouvre à ces femmes sensibles ses pieuses et respectables solitudes. Il y a quelques années que nous n'aurions osé parler de Saint-Cyr, car il étoit alors convenu que de pauvres filles nobles ne méritoient ni asile ni pitié.

Dieu a différentes voies pour appeler à lui ses serviteurs. Le capitaine Caraffa sollicitoit à Naples la récompense des services militaires qu'il avoit rendus à la couronne d'Espagne. Un jour, comme il se rendoit au palais, il entre par hasard dans l'église d'un monastère. Une jeune religieuse chantoit; il fut touché jusqu'aux larmes de la douceur de sa voix : il jugea que le service de Dieu doit être plein de délices, puisqu'il donne de tels accents à ceux qui lui ont consacré leurs jours. Il retourne à l'instant chez lui, jette au feu ses certificats de service, se coupe les cheveux, embrasse la vie monastique, et fonde l'ordre des Ouvriers pieux, qui s'occupe en général du soulagement des infirmités humaines. Cet ordre fit d'abord peu de progrès, parce dans une peste qui survint à Naples, les religieux moururent tous en assistant les pestiférés, à l'exception de deux prêtres et de trois clercs.

[ocr errors]

Pierre de Betancourt, frère de l'ordre de Saint-François, étant à Guatimala, ville et province de l'Amérique espagnole, fut touché du sort des esclaves qui n'avoient aucun lieu de refuge pendant leurs maladies. Ayant obtenu par aumône le don d'une chétive maison où il tenoit auparavant une école pour les pauvres, il båtit lui-même une

« ZurückWeiter »