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fort de patriotisme; on avait besoin de parler aux sentiments catholiques du peuple contre des hommes que leur malheureuse situation et leur renommée plus malheureuse encore posait en représentants de l'impiété moderne on le fit franchement, hautement, avec succès. Les villes conquises s'attachèrent plus étroitement à la foi en voyant nos soldats convertir les églises en écuries après les avoir dépouillées, et changer les monastères en casernes. Etre irréligieux dans ce moment, c'eût été appartenir à l'ennemi; on fut plus chrétien que jamais.

Il faut donc le dire, cette guerre si cruelle d'Espagne ne contribua pas à la révolution religieuse, du moins dans l'ordre du peuple et de la bourgeoisie. Je sais bien qu'il en fut autrement pour une certaine classe, celle qui avait accepté des charges de la main des conquérants; mais cette classe avait et a conservé depuis très-peu d'influence.

Joseph était venu trôner à Madrid, pendant que le monarque espagnol était captif à Valençay. On avait besoin d'argent; on songea à battre monnaie avec le balancier de 1790, c'est-à-dire en dépouillant le clergé. Les hommes nouveaux le demandaient, le gouvernement le désirait sans oser le faire. On sonda l'opinion.. Un inconnu, sous le nom de Solitaire d'Alicante, publia dans ce sens plusieurs pamphlets répandus à profusion; mais il eut peu d'écho; il trouva un rude et victorieux adversaire dans un religieux dominicain, dom François Alvarado. Les lettres critiques que celui-ci fit imprimer en Portugal, où il s'était réfugié, sont pleines de ce sel, de cette raison solide, de celte argumentation serrée, jointe à cette mordante et spirituelle satire, qui distinguent notre abbé Guénée: elles eurent un succès complet. Le temps ne permit pas, d'ailleurs, d'accomplir une spoliation décidée en principe. Dieu, abaissant sur la France un de ces regards qui guérissent toutes les blessures, lui avait rendu les frères et les héritiers du roi-martyr. L'Espagne participa à nos joies, comme elle avait souffert de nos désastres.

Ce fut une halte. Les Jésuites, remis en possession de leurs colléges, travaillèrent à réparer le mal que leur absence avait laissé grandir; ils fondèrent pour les plus jeunes enfants des écoles, semblables à celles de nos bons Frères de la doctrine chrétienne; ils se multiplièrent sous toutes les formes et se livrèrent sans relâche à toutes les industries du zèle. L'Espagne leur doit beaucoup sans ce travail de dix-huit années qui arrèta le mal et lui arracha presque tous les jeunes cœurs, les excès de ses troubles, déjà si affreux, eussent peut-être épouvanté le monde; car ce peuple, absolu en tout, ne fait rien à demi.

Cependant le voltairianisme, qui se donna si franche carrière sous la Restauration, fit de nouveaux prosélytes dans la péninsule. M. de Custine a sondé cette plaie avec talent dans son livre de L'Espagne sous Ferdinand VII. Le mal était aussi bien apprécié par l'infant

don Carlos; et c'est pourquoi on s'appliqua dès lors à soulever contre lui tant de haines, que n'adopta pas le peuple espagnol, il est vrai, mais qui servirent de puissant auxiliaire à ses ennemis pour l'exclure de la couronne. C'était un point de ressemblance frappant entre les deux royaumes de France et d'Espagne. Le résultat fut le même dans les deux Etats.

A tous ces éléments vint s'en joindre, après les déplorables événements de 1830, un autre plus dangereux, parce qu'il était plus accessible aux masses: je veux dire la lecture des romans obscènes. Un journal religieux, la Paz, s'exprime ainsi à ce sujet : « Les « nouvelles, dans lesquelles, sous une forme séduisante, on répand « le venin le plus actif, ont été le moyen dont se sont prévalus de« puis grand nombre d'années les libertins et les impies de tout « genre pour propager leurs erreurs... On remarque parmi nous « une licence extraordinaire pour se croire autorisé à lire ces oua vrages réprouvés, et on le fait avec une certaine jactance qui « prend le nom d'indépendance d'esprit : comme si se soustraire au <«< devoir était le signe d'une grande élévation de pensées. » — Les plus hideux feuilletons de la presse parisienne étaient traduits aussitôt et jetés en pâture à une multitude, qui s'en montrait d'autant plus avide, que ce genre de littérature n'exige aucune connaissance profonde, et qu'il était tout nouveau pour elle. On ne saurait croire le mal produit en Espagne par cette œuvre maudite, cette babel de calomnies, de sensualisme et de monstruosités, qu'on appelle le Juif-Errant; on peut dire qu'elle a passé par toutes les mains. Frédéric Soulié, Georges Sand, Balzac, Victor Hugo, quelquefois Alexandre Dumas, y ont contribué pour une large part. Les Espagnols n'ont pas eux-mêmes ou ont très-peu de romanciers. Il est inutile d'ajouter que les théâtres ont aussi adopté les œuvres des nôtres; mais ils sont surveillés davantage, et l'immoralité ne s'y affiche pas ouvertement.

Les derniers événements de la révolution espagnole sont connus de tout le monde. Les biens ecclésiastiques confisqués et vendus, les religieux chassés de leurs maisons, le clergé privé de toute ressource, de pauvres curés égorgés par dizaines dans les montagnes de la Manche, des moines brûlés dans leurs couvents, tels furent les actes de haute réforme apportés par les hommes d'Etat de l'esprit nouveau. Ils n'en sont pas devenus plus riches, ils n'en seront pas plus invincibles car la malédiction divine s'est attachée à leurs mains; en aucun temps le trésor n'a été plus appauvri, en aucun temps ils n'ont été eux-mêmes plus justement estimés à leur valeur. Au reste, cette unique spoliation a une autre portée qu'on ne le croirait au premier abord : les acquéreurs des biens prétendus nationaux (le Clamor les appelle biens libéraux, los buenos liberales; le mot est piquant) ne se sont pas contentés, pour s'en assurer la possession paisible, de fouler aux pieds les inspirations chrétiennes de leur con

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science, ils travaillent à pervertir ce qui les entoure. L'Eglise ne compte pas aujourd'hui d'ennemis plus acharnés. D'un autre côté, mille existences sont troublées : tel homme aurait fait un excellent religieux dans le cloître auquel il se destinait, qui devient dans le monde un très-mauvais chrétien.

Je continuerai ce tableau dans un prochain article.

Nouvelles Religieuses.

DIOCÈSE DE LYON.-S. Em. Mgr le Cardinal de Bonald a donné les saints ordres à cinquante prêtres, trente-trois diacres, vingt-cinq sous-diacres, soixantedouze tant tonsurés que minorés.

DIOCÈSE DE TOULOUSE. - Le ministre de la guerre ayant ordonné que de bons livres fussent mis à la disposition des militaires détenus, aussitôt que la décision ministérielle fut connue, un membre de l'OEuvre des bons livres s'est empressé d'indiquer à l'officier chargé de la mettre à exécution au Pénitencier militaire de Toulouse, la source où il pourrait puiser, sans frais, tous les ouvrages qui lui seraient nécessaires. Cet officier s'étant rendu à la bibliothèque, M. l'abbé P., sousbibliothécaire, lui a offert de choisir sur les 25,000 volumes à la disposition du public ceux qui seraient à sa convenance, M. l'abbé P. a proposé d'établir, avec le conseil d'administration de l'OEuvre, un dépôt au Pénitencier, de renouveler ee dépôt aussi souvent qu'il serait jugé convenable, ainsi que cela se pratique pour les paroisses du diocèse. Cette pieuse association dont les bienfaits sont déjà sensibles, a trouvé là une occasion qu'elle ne pouvait laisser échapper d'étendre son œuvre de moralisation.

DIOCÈSE DE DIJON. On écrit d'Arnay-le-Duc :

« Nous avons eu le 3 de ce mois, dans notre voisinage; une belle et fort intéressante cérémonie. Il s'agissait de la bénédiction d'un Chemin de Croix pour l'église de Viévy.

« Douze prêtres de la contrée s'étaient rendus à l'appel de M. le curé. Après la lecture de l'ordonnance épiscopale, qui autorise l'érection du Chemin de la Croix, et quelques avis du pasteur sur l'ordre qui devait être suivi dans la cérémonie, M. le curé a d'abord, suivant le pieux et antique usage, béni les croix présentées les fidèles et destinées à être plantées dans les héritages; puis il a procédé à la bénédiction solennelle des quatorze tableaux du Chemin de la Croix et des quatorze croix qui les surmontent. La procession eut lieu ensuite, tout le clergé en tête et en habit de chœur.

par

◄ L'église était pleine comme aux jours des plus grandes fêtes, ce qui prouve que la foi, trop souvent endormie dans nos populations des campagnes, se réveille à la première occasion, et que les prédications révolutionnaires et socialistes dont on les assourdit chaque jour, en les trompant de la manière la plus indigne et la plus grossière, ne les ont point perverties comme d'abord on serait tenté de le croire. Lorsqu'il leur sera donné de connaître enfin, de plus près, ceux qui travaillent si audacieusement à les exploiter, elles les repousseront du pied dans la boue.>>>

SUISSE. On lit dans l'Observateur de Genève :

-

Nous avons toujours à Genève bon nombre de réfugiés italiens; il y a parmi eux quelques défroqués. Le plus célèbre est un M. de Sanctis; il a quitté le froc, pris femme en Angleterre, et maintenant il est ici où il prêche la Bible deux fois la semaine dans un salon. Ces déserteurs du catholicisme, au service de toute

révolution, viennent ici comme en pays de connaissance; ils distribuent des Bibles tronquées à tout venant, signent quelques pamphlets protestants, annoncent le salut gratuit; car ils ne comptent que sur celui-là, et ainsi ils réalisent la parole de Jean-Jacques Rousseau qui disait de certains ministres : Toute leur religion consiste à attaquer celle d'autrui. Plus que jamais éclate l'étroite affinité qui existe entre les révolutionnaires et le principe protestant; plaise à Dieu que ces recrues de toute nation fassent ouvrir les yeux aux hommes d'ordre et d'intelligence qui sont à Genève!»

Bulletin de la politique étrangère.

ESPAGNE.-Le différend entre l'Angleterre et l'Espagne est enfin arrangé. La note de lord Palmerston en réponse à celle du cabinet de Madrid, relève avec affectation toutes les expressions de cette der nière qui dénolent un désir de renouer les anciennes relations; elle ajoute que si M. Bulwer n'était pas employé ailleurs pour le service de S. M. britannique, le gouvernement de S. M. aurait pensé ne pas pouvoir faire un meilleur choix. (On se rappelle que M. Bulwer a été forcé de quitter Madrid par suite de sa conduite dans l'affaire des mariages et que de là date la mésintelligence entre les deux nations.)En somme, dans cet accord, l'Angleterre a pris le beau rôle.

Les juntes des provinces basques manifestent une énergique volonté de défendre les priviléges de leurs anciens fueros. Les résolu lutions de la junte de Guernica sont connues, et la province d'Alava promet de n'être pas moins explicite.

SUISSE. Pendant qu'à Berne les radicaux vaincus par le vote populaire tentent de se maintenir au pouvoir par la force, le canton de Genève est menacé d'une élection municipale démagogique. Plusieurs communes catholiques sont décidées, il est vrai, à nommer d'honnêtes gens sans trop se préoccuper de la couleur de leur dra peau, mais dans d'autres les mauvaises doctrines ont fait de terri bles progrès. « Les anciens conservateurs, dit l'Observateur de Ge nève, peuvent revendiquer leur part dans ces succès de la prédica tion démagogique. Dans le but d'assurer davantage leur influence, les conservateurs protestants ont toujours tendu à diminuer l'in fluence de la religion dans les communes catholiques. Il suffisait de leur temps d'être un mauvais catholique pour obtenir la faveur des hommes influents. Les catholiques de cette trempe étaient universellement estimés et appréciés, on les décorait de l'épithète d'hommes tolérants, de catholiques éclairés. Que de fois ne s'en est-on pas servi pour attaquer sournoisement l'Eglise! Personne n'a été surpris de voir un bon nombre de catholiques de cette espèce devenir les fi

dèles serviteurs du radicalisme. »>

-Les pétitions des fribourgeois frappés de contributions de guerre comme membres ou fauteurs du Sonderbund, ont eu pour résultat de faire envoyer des commissaires fédéraux, charges du rôle de médiateurs entre le grand conseil et les contribuables.

Après bien des conférences, un accord a été proposé auquel les délégués des contribuables ont accédé, et dont voici les dispositions principales:

« Les contribuables fribourgeois fourniront en deux termes de trois mois en trois mois chaque fois 750,000 liv. ainsi en tout 1,500,000 liv. qui seront remboursées par l'Etat au bout de 25 ans, avec alloacation d'un intérêt de 1 112 p. 010 pendant les cinq premières années; de là 1 112 p. 010 jusqu'à la dixième année, puis 2 p. 010 jusqu'à la vingt-cinquième année, époque du remboursement. L'Etat fournit aux contribuables à l'emprunt hypothèque sur les forêts domaniales. Les réductions que la confédération accorderait éventuellement au canton de Fribourg profiteront de moitié à l'Etat et aux contribuables. Les mesures pénales des décrets de 1848, telles que bannissement, privation des droits politiques, etc., sont révoquées. D

ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE.

Séance du 28 mai. ·

PRÉSIDENCE DE M. DARU, VICE-PRÉSIDENT.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion sur la loi électorale.

M. SAIN propose un amendement qui est rejeté. Uu autre de M. CHARAMAULE a le même sort.

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M. MONNET présente un amendement dont le but est de remplacer les mots le domicile sera constaté, de l'article 3, par ceux-ci : « le domicile pourra être constaté. » M. DE LAMORICIÈRE défend l'amendement. Il se proclame le défenseur du suffrage E universel. Il ne veut pas de politique à outrance. Voici comment il termine :

Je n'ai plus qu'un mot à dire. Je vous demande de rester dans le droit, mais d'entourer son expression de toutes les garanties désirables. Je vous demande d'accepter toutes 1 les preuves qu'on peut apporter juridiquement. S'il en était autrement, il n'y aurait plus de suffrage universel; j'ai combattu sous ce drapeau; je sais ce qu'il apporte d'énergie à ceux qui combattent pour lui; je sais ce qu'il inspire de faiblesse et d'incertitude à ceux qui combattent contre lui.

In hoc signo vinces.

Avec cette devise tu triompheras. (Applaudissements à la Montagne.)

M. BERKYER. Messieurs, en succédant à la tribune à l'honorable général Lamoricière, je ne viens pas combattre les considérations présentées par M. de Lamoricière ; je ne rentrerai pas dans la discussion générale, comment combattrais-je l'honorable général? Les sentiments qu'il vient d'exprimer sur la sincérité, la dignité, la loyauté de la loi, ces sentiments sont les miens! Certes, je suis loin, au fond de mon cœur, de penser me séparer de lui au moment où il défend la dignité, la liberté du citoyen dans ce noble pays. Mais je me séparerais de toute ma vie, de toutes les habitudes de ma vie. Mes convictions, je les ai gardées, et au milieu des tristes expériences dont j'ai été le témoin, j'ai toujours pratiqué la soumission aux lois, le dévouement sincèré aux institutions du pays.

Je ne me séparerai pas de M. de Lamoricière même au moment où son langage si ferme, si énergique, si dangereux pour les ennemis de la société, a reçu des applaudissements auxquels le général ne s'attendait pas sans doute. (Rires et applaudissements.)

L'illustre orateur fait justice avec une haute éloquence de toutes les arguties avocassières du général Lamoricière qui s'était flatté d'entraîner à son opinion une portion du parti légitimiste, à l'aide de grossières flatteries. Certes, s'écrie M. Berryer, personne n'est plus disposé que moi à respecter les convictions quand elles sont sincères; mais, enfin, pour ces hommes qui n'ont ni respect ni soumission pour les lois du pays... (Bruit.)

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