Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

être sûr qu'il a dix langues à craindre, et dix langues est beaucoup. Les enfants ne taisent rien : leur commander le silence et le secret, ce serait le vrai moyen pour les engager à parler ; et quand ils se tairaient pendant quelque tems, leur conduite les trahirait d'abord.

Un instituteur, s'il veut conserver sa réputation et gagner la confiance des braves gens, est donc plus ou moins forcé de respecter les mœurs et d'éviter dans ses leçons tout ce qui pourrait produire un danger apparent. Il est comme placé sur un théâtre ouvert; il ne peut, il ne doit jamais se promettre de faire des œuvres de ténèbres. En cas qu'il voulût pervertir la jeunesse, leur inspirer des sentiments contraires à la soumission et au respect qu'on doit aux lois et au monarque, il serait découvert, méprisé et puni, même, selon toute apparence, avant qu'il eût le avant qu'il eût le temps de corrompre. Et si, contre toute attente, il parvint à bouleverser quelques jeunes têtes, il ne le ferait pas longtems, à moins que l'autorité, pour l'une ou l'autre raison, ne voulût fermer les yeux et autoriser le mal. Oui, nous ne craignons pas de le dire, une école ne saurait donner de l'alarme et devenir dangereuse, qu'autant que ceux qui en ont la surveillance, qui peuvent s'en informer et punir au besoin, le permettent. S'il y a séduction, ce sera presque toujours leur faute. Ils n'ont même pas besoin d'étendre beaucoup leurs récherchés et leurs perquisitions; il ne leur faut pas

les yeux d'Argus, pour découvrir les coupables : il suffit de ne pas vouloir être aveugle, d'interroger seulement quelques élèves et quelques parents; et si l'école est entachée de quelque vice, il sera connu si on veut le connaître.

Des gens infectés de mauvais principes, sont donc plus à craindre et plus dangereux lorsqu'ils écrivent et impriment, que lorsqu'ils instruisent et dirigent des enfans. C'est pourquoi un gouvernement, qui établit la liberté de la presse, qui n'appréhende pas la manifestation de sentiments et de pensées, même de la part de gens qu'il a droit de suspecter, de gens dont il connaît le mauvais esprit, d'étrangers qu'on ne sait d'où ils viennent, qui ne lui sauraient être sincèrement attachés; un gouvernement, dis-je, qui ne s'inquiète pas de tout cela, semble n'avoir rien à craindre de l'instruction publique, dont il peut connaître si aisément la tendance et les effets. Quelle raison pourrait-on avoir de redouter un pauvre maître d'école, dont la conduite est tout-àfait connue, qui trouve ses plus chers intérêts à se bien comporter et être prudent, tandis qu'on ne craint pas les attaques de la presse, qui peut être rendue si redoutable par la malveillance et la méchanceté ? Pourquoi craindrait-on un homme qui ne saurait s'écarter de son devoir, sans trouver aussitôt sa punition, tandis que l'on est tranquille et sans inquiétude à l'égard de ceux qui peuvent faire du mal pendant un assez long tems, sans

être aperçus ni découverts, et qui, devenant connus, échappent bien souvent à la peine méritée.

Un prime qui entrave la presse, montre qu'il est conséquent en se rendant maître de l'éducation des enfants : il existe, comme nous l'avons fait voir, une étroite liaison entre ces deux objets. Celui qui croit avoir des raisons pour interdire à ses sujets la manifestation de leurs sentiments par le moyen de la presse, ne peut naturellement non plus leur permettre de les communiquer de vive voix à un certain nombre de jeunes gens réunis dans un endroit qui est ouvert à tout le monde. Il s'érige en juge de tout ce qui s'écrit, et n'accorde le droit d'enseigner qu'à ceux qu'il ne craint pas. Mais est-on conséquent, lorsqu'on donne pleine liberté à la presse, et des chaînes à l'enseignement? est-on conséquent lorsqu'on laisse, sans soupçon et sans inquiétude, les armes visibles et invisibles à une foule de gens qu'on ne connaît pas, et qui ont mille moyens de nuire impunément, et qu'au contraire on arrache les armes à des personnes connues, ou que l'on peut connaître et désarmer sans peine ?

Mais, dira-t-on, la liberté d'écrire est limitée : on n'imprime pas tout ce qu'on veut ; il y a des lois, des tribunaux, des juges et des prisons. Nous le savons, et nous sommes loin de trouver cela mauvais. Nous ne voudrions pas, non plus, une liberté illimitée dans l'enseignement : ce serait ridicule de vouloir pour l'éducation, la permission

de tout faire; ce serait se moquer de l'autorité, que de lui dire : « Ne te mêles en aucune manière de l'enseignement. » Il faut rêver, pour ne pas voir un milieu entre un monopole et une liberté chimérique. Que le gouvernement prescrive des bornes à la liberté d'enseignement, comme il en a prescrites à celle de la presse. Il peut être généreux et même libéral, et néanmoins fixer des règles; même y est-il obligé.

Il n'est pas besoin d'accorder à tous le droit d'enseigner, sans se mettre en peine de la capacité des maîtres; il n'est pas besoin d'accorder au peuple d'aller chercher ses instituteurs partout où l'ignorance et la séduction pourraient le pousser. Il nous semble seulement qu'en un pays où la presse est libre, il serait à souhaiter qu'on accordât également une sage liberté à l'enseignement, qu'on ne refusât pas un diplôme d'instituteur à celui qui possède les qualités requises, qui jouit de l'estime des familles, qui donne des preuves de son savoir et se soumet à un examen convenable; qu'on n'eût ou qu'on ne prétextât point de crainte à l'égard de ceux dont la conduite et les principes sont connus, qui ont la confiance de leurs concitoyens, et qui n'ont d'autre vue que celle d'être utiles. Que surtout on ne force pas d'employer des livres classiques, qui contiennent des choses contraires à la religion catholique-romaine, qui est la plus répandue dans les Pays-Bas, et dont l'usage blesserait la conscience de ceux

qui la professent; qu'on évite de montrer, dans l'instruction publique, un prosélytisme anti-catholique, pire que la plus rigoureuse censure: qu'on y réfléchisse, la loi fondamentale promet à tous les habitants liberté d'opinions religieuses, et à toutes les sociétés religieuses une égale protection; or l'enchaînement de l'instruction, et la contrainte dans l'emploi des livres classiques, sont des mesures diamétralement opposées à cette liberté et à cette protection.

(De Ultramontaan.)

MELANGES.

ENCORE une nouvelle dénonciation pour un fait qu'on nous présente comme une monstrueuse intolérance. Une mère, qui voulait placer son fils dans une pension à Paris, ayant déclaré que son intention était que ce jeune homme fût élevé dans le protestantisme, le maître lui déclara avec beaucoup de politesse que, dans l'intérêt méme de l'élève, il ne pouvait pas le recevoir. Tel est le récit même du Constitutionnel, qui là-dessus s'échauffe, se fache tout rouge, crie au jésuitisme, à l'intolérance, à l'inquisition. En bonne conscience, où est le prétexte de semblables déclamations? On est libre de recevoir chez soi qui on veut ; et comme un maître de maison n'ad

« ZurückWeiter »