DISCOURS PRÉLIMINAIRE. Scribendi recte sapere est et principium et fons. HOR. QUATR UATRE grandes époques ont marqué, sur la route du temps, la marche et les progrès de l'esprit humain dans le brillant domaine de l'imagination : quatre Poétiques les ont à jamais fixées dans les fastes de la littérature européenne. Il est glorieux pour la France que deux de ces époques lui appartiennent, et que les siècles de François Ier et de Louis XIV disputent, à ceux d'Alexandre et d'Auguste, l'immortel honneur d'avoir donné à la société son dernier degré de politesse et de perfectionnement, en y faisant naître, pour les beaux-arts, un amour qui fut bientôt un culte, porté quelquefois jusqu'au fanatisme: tant la passion du beau est susceptible d'exaltation! tant il est facile à l'homme de s'é garer dans l'objet de sa passion! les Les modèles ont de tout temps, et dans tous pays, devancé les préceptes. Homère, Pindare, Sophocle, avoient écrit: Corneille et Mo lière avoient illustré la scène françoise, avant qu'Aristote et Boileau songeassent à rédiger le code du goût, sous les yeux de la raison. I Le génie a ouvert la route; mais la rapidité de son vol n'a permis qu'à un petit nombre d'esprits privilégiés de s'élancer sur ses traces dans les régions qu'il parcouroit; de mesurer sa course; de lui dérober, et de nous apprendre le secret de sa force; de marquer enfin les nombreux écueils de cette route périlleuse, en les signalant d'avance à la témérité qui les brave sans les connoître, ou à l'audace qui en triomphe heureusement. Aristote fut un de ces hommes rares, qui sont un événement pour leur siècle, et une époque pour tous les autres. «Quel homme, << s'écrie Voltaire 1, que celui qui trace les régles de la tragédie de la même main dont il a << donné celles de la dialectique, de la morale, « de la politique, et dont il a levé, autant qu'il << a pu, le grand voile de la nature! » Mais c'est précisément à l'homme doué du génie le plus éminemment philosophique, qu'il appartenoit de porter sur les arts ce coup d'œil sûr et perçant, qui lui avoit révélé presque tous les secrets de la nature; qui avoit éclairci les ténébres de la métaphysique, et réduit, pour ainsi dire, aux termes rigoureux de la science, ce qu'il Quest. Encycl., art. ARISTOTE. " « |